Adam composa un énième numéro de téléphone, non sans gêne. Il détestait se retrouver dans un cas de force majeure où la situation lui échappait complètement. Il avait déjà téléphoné à Stella, qui ne pouvait pas l'aider. Pas plus que Danny et Lindsay, déjà bien encombrés par la présence de leur nouveau-né. Hawkes n'était pas en ville pour le moment et Mac ? Il n'y avait même pas pensé. Ne restait donc plus que Don Flack à contacter. Trois sonneries passèrent avant que celui-ci ne décroche.
-'Flack' dit-il de sa voix autoritaire habituelle.
-'C'est Adam. J'te dérange ?' demanda-t-il ensuite, conscient de l'heure tardive à laquelle il appelait. Pourtant, il trouva un interlocuteur réceptif et patient, contrairement aux autres, ce qui l'étonna quelque peu compte tenu du caractère de Flack.
-'Non pas du tout. Que se passe-t-il, vieux ?'
Bien qu'il hésitait à lui en parler, il savait que son cellulaire n'avait presque plus de batterie et devait faire vite, sous peine de finir au mieux, sa nuit à l'hôtel et au pire, en pleine rue.
-'Bah j'ai plus d'appart'. Les voisins ont eu des souris et des cafards et la société de nettoyage a tout enduit de produits et de gaz toxiques.'
Il sentit le silence lourd envahir leur conversation et entendit comme un froissement, conscient que Flack se relevait dans son fauteuil.
-'T'es où là ?' demanda-t-il d'une voix paraissant inquiète.
-'Au carrefour d'Amsterdam Avenue et de la 2e. J'ai pris un sac et quelques affaires mais j'sais pas vraiment où aller... j'suis raide pour l'hôtel mais j'peux me trouver un ptit coin pour passer la nuit' continua-t-il, essayant de persuader le Détective de l'héberger. Il s'en voulait pour ça car il avait appris à ne compter sur personne et voilà qu'il se retrouvait dépendant de quelqu'un. Mais Flack ne l'entendait pas du tout de la même façon et Adam pouvait ressentir dans le ton de sa voix comme une sorte d'inquiétude mal dissimulée.
-'T'es fou ? T'as vu le temps qu'il fait ?! Tu vas chopper une pneumonie ! Bouge-pas, je viens te chercher'. Répondit Flack dont Adam pouvait déjà entendre les pas se diriger vers la porte.
Il attendit une dizaine de minutes à l'angle de la rue et vit enfin arriver la voiture noire de son collègue qui lui ouvrit la porte et l'invita à entrer rapidement. Pour tout avouer, le jeune laborantin était gelé et il était certain d'être retrouvé congelé s'il avait passé la nuit dehors. Il tombait en effet depuis une semaine, une pluie torrentielle accompagnée d'un vent glacial. Sans un regard, Adam dit d'une voix timide :
-'Merci Flack'.
Son ami secoua la tête et ne répondit pas mais le jeune homme voyait bien l'inquiétude et l'incrédulité sur le visage de son collègue. Parfois, il avait une image de cet homme comme de celle d'un ours : un peu bourru, mal léché mais qui cachait en fait un cœur d'or. Cette pensée le fit sourire et il s'abandonna à la rêverie jusqu'au moment où ils atteignirent l'appartement de l'inspecteur.
Don examina le mince sac de voyage qu'Adam avait eu le temps d'emporter et eut un petit sourire. Il ouvrit la porte de son appartement qui se révéla plus lumineux et spacieux que le pensait le jeune scientifique. Les murs étaient d'un vert kaki presque brun mais les meubles étaient clairs et le salon accueillant. Pendant qu'il faisait le tour de la pièce des yeux, Don prit son sac et se dirigea vers une autre pièce où Adam le suivit. Il fut surpris de se retrouver dans la chambre à coucher de Flack et haussa un sourcil interrogateur.
-'Pas question que tu dormes sur le canapé.' Dit simplement son ami et alors que le jeune homme ouvrit la bouche pour répliquer, il vit le regard transperçant et déterminé de son acolyte et ne prononça pas un mot de plus, capitulant.
Son ami sortit de sa propre chambre et Adam en profita pour reprendre sa respiration et regarder tout autour de lui et essayer de mieux cerner la personnalité de Don Flack Junior. Les murs de sa chambre étaient épurés, les meubles d'un style classique. C'était ainsi qu'il le voyait le plus souvent : Simple, classique et carré. Quelqu'un qui aime les règles bien établies et par conséquent, déteste les surprises.
-'Ross, qu'est-ce que tu fiches ?' demanda une voix provenant du salon. Déposant ses affaires sur la commode, il passa la tête par l'entrebâillement de la porte et vit Don un peu plus distinctement qu'auparavant. Il avait enlevé son long manteau noir et portait un jean délavé et un t-shirt vert où il était écrit « I love Ireland ». Il marchait pieds nus, comme il avait apparemment l'habitude de le faire chez lui, Adam n'ayant pas trouvé trace de pantoufles ou de chaussons. Il enleva ses chaussures mais garda ses chaussettes, ne voulant pas paraître impoli. Il n'était pas chez lui, après tout. Et cette situation le gênait quelque peu.
Lorsqu'il vit le sourire de Don, son inquiétude s'évapora comme neige au soleil. Le jeune Détective tenait un poêlon dans sa main et la pièce sentait bon les herbes aromatiques et la sauce tomate.
-'Tu dois crever la dalle. Je prépare des pâtes arrabiata. Pendant ce temps, tu peux aller prendre une douche et te réchauffer un peu, t'es trempé comme une soupe'. Lui dit Flack sans lever les yeux de ses fourneaux.
-'Hm... ok' lui répondit simplement Adam, un peu mal à l'aise. Il n'était déjà pas très loquace à son habitude, surtout avec Flack qu'il ne côtoyait pas beaucoup mais cette proximité, cette « intimité » forcée le mettait un peu dans l'embarras.
-'La salle de bain est au fond du couloir à droite.' Lui instruit ensuite son ami.
Adam prit un boxer, un pantalon de jogging et un vieux t-shirt de son sac et s'en alla vers le fond du couloir lorsque la voix de Don le rattrapa à nouveau :
-'Oh et, Adam...'
Ce dernier se retourna, l'air toujours perplexe.
-'Fais comme chez toi.' Lui répondit Flack d'une voix chaleureuse, un sourire timide mais mutin sur le visage, qui irradia curieusement Adam d'une douceur et d'une chaleur incomparable.
TBC.
