Note de l'auteur : Étant donné que la « famille » principale est assez nombreuse, je vais vous la détailler pour un peu plus de compréhension :

Alistair Subban : chef de famille, tuteur de Gaël et Xoran, oncle de Nicolas, Alexandre et Maël. Il a environ 38 ans et il est chef cuisinier dans un grand restaurant de New-York. C'est un ancien Maitre de Potions de renommée mondiale.

Nicolas Savaige : Aîné, 18 ans, neveu d'Alistair, frère d'Alexandre et de Maël. Il est étudiant en médicomagie.

Gaël Jedusor : 17 ans, étudiant (le reste de ses capacités et secrets seront dévoilés au fur et à mesure). C'est son histoire.

Xoran Helldown : 15 ans, étudiant très doué en Métamorphose et en DCFM.

Alexandre Savaige : 13 ans, étudiant surdoué en Potions.

Maël Savaige : 11 ans, futur étudiant.

Chapitre 1 :

Il survolait paisiblement la forêt, mer d'arbres respirant le calme. Son élégante silhouette, son vol puissant, sa noble prestance faisaient de lui un véritable « prince des airs ». Merveilleux voilier, il enchaînait les piqués vertigineux et les brusques accélérations. Sa silhouette fuselée était un chef d'œuvre naturel et ses yeux perçants, d'un jaune troublant, détaillaient les environs avec attention. Il repérait le moindre mouvement à une distance de deux kilomètres.

Le fier faucon pèlerin de la taille d'un petit aigle émit un cri strident, comme pour prévenir de son arrivée. Il touchait au but.

Un imposant château se dressait hors de la forêt, dans un parc soigneusement entretenu et de taille surprenante. Fait de pierres sombres, il semblait émaner de lui une aura étrange et intimidante. Le temps n'avait guère entaché sa prestance ni sa majesté, et il se dressait fièrement sur ses fondations.

Plongeant rapidement, le rapace atteignit la vitesse impressionnante de 290 km/h. Le faucon se dirigea vers les marches. Alors qu'il se trouvait encore à quelques mètres au-dessus, ses contours se troublèrent, laissant place à un jeune homme. Malgré les deux mètres le séparant du sol, il atterrit avec une grâce et une souplesse félines. Traînant des pieds et roulant des hanches, il se dirigea vers la haute porte gardée par des statues, son long manteau noir formant une traînée derrière lui. Il avait un port de tête altier et une allure toute aristocratique.

Il releva son visage, dissimulé par le col de sa veste, et une série de sifflements passa ses lèvres finement ciselées, ornées d'un simple anneau en argent. Il traversa alors les battants en bois comme s'ils n'existaient pas.

- JE SUIS RENTRÉ ! fit-il fortement.

Sa voix était étrange. Métallique et froide, elle restait sensuelle et sa manière de rouler les « r » était charmante.

Une tête châtain foncée presque noire, savamment coiffée entre l'élève modèle et le charmeur, et des cheveux blonds ébouriffés sortirent respectivement d'une porte située au fond du hall et de derrière la rambarde, en haut des majestueux escaliers de marbre.

- Et alors ? Fit l'homme aux cheveux noirs, âgé d'une quarantaine d'années tout au plus. Tu nous fais tout un cirque pour ça ?

- Il a raison, acquiesça le blond. Tu fais déjà assez de boucan en passant les protections pour te faire annoncer, pas besoin de hurler en plus.

- C'est bon de se sentir aimé, railla celui qui venait d'entrer. Bonjour Alistair, 'lut Xoran.

- Salut Gaël, répondirent les deux autres en le rejoignant.

Le premier à arriver était celui qui se trouvait sur le seuil du hall d'entrée. Il avait une prestance extraordinaire, presque intimidante. Ses traits taillés à la serpe laissaient deviner une nature impérieuse, une férocité, une sauvagerie dissimulées mais néanmoins alliées à une intelligence vive et raffinée. Il était très mince, avec des pommettes hautes et saillantes, une mâchoire aux lignes abruptes et une fine bouche. Sa chevelure foncée était plutôt courte et retombait délicatement sur son front, s'accordant à merveille avec sa peau délicieusement métissée et sa barbe de quelques jours. Ses yeux d'onyx pétillaient. Il tenait une spatule en bois à la main.

- Qu'es-tu en train de nous faire ? Demanda Gaël.

- J'essaie une nouvelle recette. J'aimerais la proposer pour la carte du mois prochain.

Alistair Subban était le chef cuisinier d'un grand restaurant se trouvant dans la ville de New-York.

- On peut goûter ? Le questionna Gaël en faisant une moue adorable.

- Non, gronda Alistair. Vous êtes des personnes civilisées alors vous attendrez. Comme tout le monde.

Gaël grommela dans sa barbe – inexistante – et le laissa retourner à son domaine sacré avant de se retourner vers le blondinet. Il était plus jeune que les deux autres et devait approcher des quatorze-quinze ans.

Son teint bronzé, parcouru de reflets dorés, s'accordait avec ses pommettes hautes, son nez droit et son menton fier. Une légère lueur d'arrogance brillait dans ses prunelles bleues électriques surmontées de délicats sourcils.

Xoran Helldown était quelqu'un d'assez narcissique, très vif, blagueur et excité. Il ne pouvait pas tenir en place plus de quelques minutes, c'était au-delà de ses forces. Tout comme arrêter de faire des blagues lui était impossible. À cause de cela, tous les habitants du château avaient pris l'habitude de s'entourer de sorts tous plus défensifs les uns que les autres, dans l'espoir d'échapper à l'humour étrange de Xoran. Malheureusement, celui-ci se trouvait être trop intelligent pour son propre bien puisqu'il parvenait quand même à leur jouer des tours. Les autres n'étaient cependant guère en reste...

- Comment vont les filles ? Demanda Xoran. Pas trop de cœurs brisés ?

- Dois-je vraiment te rappeler à chaque fois que je suis gay ? Soupira Gaël en ôtant son manteau, dévoilant par la même occasion une silhouette frêle mais finement musclée.

Xoran observa son ami et retint une grimace d'envie. Gaël était beau. Très beau. Son visage pâle aux traits fins lui conférait une certaine fragilité. Cette figure de porcelaine mettait en valeur son aura naturelle de mystère et d'élégance. Seul son piercing au labret décalé - à gauche - tranchait avec la noblesse de ses traits. Ses cheveux noirs descendant jusqu'aux omoplates étaient noués en catogan mais deux mèches taquines s'étaient échappées du nœud pour venir encadrer le visage de l'adolescent d'à peine dix-sept ans.

Ses yeux étaient sans pareils. Le droit d'un bleu pâle intense givré et glacial faisait ressortir le noir de la pupille et de la fine bande entourant l'iris, tandis que le gauche arborait la teinte d'un rouge qui vous dévore l'âme. Les deux pupilles étaient légèrement allongées, bien que ce ne soit pas aisément distinguable. Son regard était dur. C'était un regard que seuls ceux ayant fait des sacrifices trop jeunes ou portant un lourd fardeau pouvaient avoir. Mais on y distinguait aussi une envie de liberté irrépressible et une certaine joie de vivre.

- J'oublie à chaque fois que tu es du même bord que moi, se reprit Xoran en ricanant. Grâce à toi, j'ai pu gagner pas mal de fric sur le dos d'Al et de Maël...

- J'arrive toujours pas à croire que vous ayez osé parier sur mon orientation sexuelle... grogna Gaël en secouant la tête d'un air désespéré.

- Faut dire que t'es pas sorti avec grand monde, toi, le beau gosse des environs.

- Et alors ? Ça te trouble parce que toi tu enchaines conquêtes sur conquêtes alors que tu n'as que quatorze ans ?

- J'en ai quinze, espèce de sale serpent visqueux, répliqua Xoran. Mais je vois qu'Al a poussé une gueulante...

- Quelle idée de se pointer avec un mec à son resto aussi !

- C'est lui qui a voulu m'emmener dans le meilleur restaurant de New-York hier soir ! S'offusqua le blond. Al aurait dû être flatté ! De toute façon, je l'ai plaqué.

- Ah bon ? Pourquoi ? Tu as enfin réalisé qu'il était trop vieux pour toi ? Fit Gaël avec une note d'espoir presque imperceptible dans la voix.

- Il a osé me faire une crise parce que je regardais un peu trop longtemps Alistair. Ça a jeté un froid sur toute notre soirée... Et il n'était pas trop vieux ! Il était juste... mûr !

- Il avait vingt-quatre ans, Xoran ! À ce niveau, ça devient du détournement de mineur !

- Je ne suis pas allé vivre chez lui, et encore moins sans votre accord, donc, non, ce n'en est pas un ! Affirma le garçon blond avec un sourire victorieux.

- Je vois le genre... Il n'empêche qu'il était trop vieux pour toi ! Persista Gaël, têtu.

Xoran décida de ne pas répliquer parce que sinon, il le savait, ils en avaient pour des heures à parlementer sur ce sujet.

- Et tu t'en sors sinon avec l'autre là... Julian ?

- J'ai rompu ce matin. Monsieur voulait conclure alors que moi non. En plus ça commençait à tourner au vinaigre entre nous. Il était bien trop jaloux. Et ce n'est pas la peine de te relancer dans ton fameux discours sur le bon mec, je pense l'avoir assez entendu comme ça, merci bien ! S'exclama Gaël.

- Mais tout le monde m'en veut aujourd'hui ou quoi ? Tout à l'heure, Al me vire de la cuisine à grands coups de spatule sur la tête, après Alex et Maël me sont tombés dessus en prétendant que je leur avais joué un tour – ce qui est totalement faux bien sûr ! – et maintenant c'est toi qui repousse mes sages conseils ! Que vous ai-je fait de si cruel pour que vous m'en vouliez autant ? Gémit-il faussement.

Tout en riant, Gaël lui fit un clin d'oeil moqueur et entreprit de regagner sa chambre, qui se trouvait deux étages, plusieurs couloirs, au moins quatre passages secrets et un escalier dérobé plus loin. Il soupira devant l'ampleur du chemin à parcourir mais finit, bien heureusement, par arriver dans son aile.

Car, oui, chaque personne vivant dans le château possédait sa propre aile avec les pièces aménagées à sa façon. De cette manière, on pouvait trouver plusieurs appartements dans la vaste demeure.

Ainsi Gaël, Xoran et Alistair cohabitaient avec trois autres sorciers de la même fratrie, âgés respectivement de dix-huit, treize et onze ans. Ce qui manquait à toute cette joyeuse bande était une présence féminine, mais les garçons se débrouillait plutôt bien entre eux et il régnait une certaine joie de vivre dans l'immense domaine. Bien que de nombreuses bagarres éclataient un peu partout et pour diverses raisons, souvent très futiles.

Gaël leva les yeux sur le tableau grandeur nature qui masquait l'entrée de son aile. Il s'agissait d'un jeune homme d'environ seize ans, à vue de nez. Ses joues roses et ses yeux bleus pétillants de joie et de douceur donnaient l'impression qu'il s'agissait d'un enfant. Ses cheveux bruns et courts s'opposaient à sa peau nacrée et délicate. Le garçon avait été représenté devant un lac à l'eau pure, sous la lumière froide des étoiles et de la lune. Le tout lui donnait un air éthéré surprenant. Comme s'il n'appartenait pas à ce monde. Ce qui était, en quelque sorte, le cas, puisqu'il n'était qu'un portrait.

- Bonjour Najar, le salua Gaël.

L'adolescent représenté sur la toile tourna ses yeux brillants vers lui et lui sourit doucement, jouant avec la rose blanche qu'il tenait délicatement entre ses doigts.

- Bonjour à toi aussi, Gaël Jedusor. Comment vas-tu ? Je t'ai à peine vu ce matin.

- Bien, merci. Et toi ? Tu ne t'ennuies pas trop ici, tout seul ? J'avais un rendez-vous important, se justifia Gaël après avoir posé ses questions.

- Tout va pour le mieux. Il ne manque pas d'animation par ici, gloussa l'adolescent peint avec un air amusé au visage.

- Nous ne sommes pas connus pour notre tranquillité. Peux-tu modifier le mot de passe, s'il te plaît ? Demanda le garçon aux cheveux noirs.

- Bien sûr. Que désires-tu choisir ?

Gaël réfléchit un instant puis un sourire étira ses lèvres.

- Hildr.

- Ah, ce mot signifie bataille en... vieux norrois me semble-t-il. C'est également le nom d'une légendaire Valkyrie, dit Najar d'un air nostalgique.

- Exact, Hildr était bien une Valkyrie. Selon la légende, elle avait le pouvoir de ramener à la vie les morts sur le champ de bataille. Il est dit qu'elle était très belle mais possédait une cruauté sans pareille. Certains sorciers affirment que la voir était signe de mort, à l'instar du Sinistros.

- Tu a l'air de t'y connaître. Les Valkyries te passionneraient-elles ?

- Je n'irai pas jusque là, mais leurs légendes sont très intéressantes.

Najar inclina légèrement la tête et le tableau s'écarta pour laisser passer Gaël.

- À bientôt, Gaël Jedusor.

- Au revoir, Najar.

Gaël se glissa dans l'ouverture, qui se referma rapidement derrière lui. Il tomba alors sur un couloir uniquement éclairé par les torches ornant les murs et au sol recouvert d'une épaisse moquette rouge. Gaël ignora la plupart des portes qui s'offraient à lui, arborant toutes des mots dorés soigneusement calligraphiés indiquant le genre de pièce qu'elles renfermaient. Il se rendit directement à sa chambre, qu'il ouvrit d'une pression sur la poignée en argent.

Devant lui se dressait, non pas une chambre banale, mais une véritable bibliothèque. Les immenses murs couverts de livres semblaient s'étendre à l'infini. Un unique lit baldaquin trônait au centre de la pièce avec des draps de soie et une fourrure sombre en guise de couverture.

Dans un coin trônait un imposant bureau, près d'une cheminée au manteau sculpté d'une vigne florale très élégante. On pouvait également y voir une fine plaque en argent, incrustée à même la pierre. Finement ciselés, apparaissaient les mots « Sol lucet omnibus » qui signifiaient : « Le soleil luit pour tout le monde ».

Le sol était recouvert de livres fermés ou ouverts face contre terre, de boules de papiers, de crayons, de plumes en tous genres, d'encriers à moitiés vides pour la plupart et de coussins de toutes les couleurs – une des rares touches vives dans la chambre. Seul un modeste pan de mur n'était pas dissimulé par une bibliothèque mais, hormis la fenêtre ornée de légers rideaux blancs, le jeune homme paraissait s'en servir comme d'un tableau géant. On pouvait y voir des dessins, des schémas de toutes sortes, divers calculs ou écrits...

L'ambiance de la pièce était assez pesante.

Gaël eut un sourire devant son chez lui et rentra vivement pour poser un livre miniaturisé, sorti de sa poche, sur le lit.

Il sortit sa baguette, vingt-huit centimètres, bois d'if, flamme de phénix gelée dans du sang de basilic, et redonna sa taille normale à l'objet. Un air fier au visage, il alla le ranger dans une des nombreuses étagères de livres meublant sa chambre avant de la quitter pour se rendre dans la pièce en face, un dressing.

Il y rangea sa veste et ôta sa tenue passe-partout – t-shirt et jean délavé – pour se retrouver en boxer noir devant plusieurs rangées de vêtements.

Gaël avait beau être mince et assez petit, il était remarquablement bien fait de sa personne, surtout pour un adolescent de son âge. Il avait un torse glabre et pâle, aussi dur et froid que du marbre. Musclé finement, chose due à un entraînement sportif quotidien, à son ancienne pratique des arts martiaux et à son métabolisme naturel.

Il enfila rapidement un pantalon moulant noir et une chemise assortie, dont il laissa les premiers boutons ouverts et remonta le col. L'ouverture de son haut laissait voir un tatouage sous sa clavicule gauche, le chiffre romain XIII, ainsi qu'une chaîne ornée d'un étrange anneau en or. Des lignes fines, plus fines que les plus fins traits d'une plume, couraient le long du bijou, à l'extérieur et à l'intérieur : des lignes de feu qui paraissaient former les lettres d'une gracieuse inscription. Elles brillaient d'un éclat perçant qui semblait pourtant maléfique.

Les mots disaient :

Un Anneau pour les dominer tous, un Anneau pour la Connaissance préserver.

Un Anneau pour gouverner et les ténèbres posséder.

Un regard sur l'horloge placée dans un coin lui apprit qu'il était bientôt l'heure de passer à table. Et, comme pour confirmer, la voix magiquement amplifiée d'Alistair retentit dans tout le château :

- A TABLE !

Sachant pertinemment que s'il faisait le chemin inverse pour se rendre à la salle à manger il serait très en retard, Gaël opta pour ses escaliers de secours. Chaque aile comportait en effet, même si c'était un peu enfantin, une sorte de toboggan menant où l'on voulait. Il suffisait d'énoncer clairement la destination voulue, pour peu qu'elle ne soit pas gardée par un mot de passe.

Ce fut donc à peine deux minutes plus tard que Gaël se retrouvait attablé en compagnie du reste des habitants du château.

Tout d'abord, Alistair, en tête de table, était en train de se servir après en avoir fait de même pour tout le monde. Ensuite, près de lui, se trouvait Xoran. Au vu de son air concentré et amusé, le blondinet semblait plongé dans une conversation passionnante avec un jeune garçon de onze ans, Maël Leïan Savaige, un des neveux d'Alistair.

Maël avait des cheveux bruns qu'il ne prenait jamais la peine de coiffer et des yeux verts tirant sur le jaune très froids et bridés, à la manière des japonais. Un sourire qu'on pourrait considérer comme sadique ornait sa bouche aux lèvres légèrement charnues.

À côté du pré-adolescent se tenait un de ses frères, de deux ans son aîné, Alexandre Eiden Savaige, véritable génie des Potions.

Alors que Maël était plutôt froid et distant avec les gens qu'il ne connaissait pas et avait tendance à dissimuler ses véritables émotions, Alexandre était très ouvert. Il était, en outre, mignon à croquer. Il avait de longs cheveux châtains caressant sa taille et noués en catogan à la base de la nuque. Une musculature discrète mais bien présente était aisément visible sous son pantalon de lin noir, rentré dans des bottes à lacets brunes, et sa chemise ample beige, ajustée à la taille par une ceinture. On pouvait également dire qu'il avait un fessier plus que potable et une peau nacrée tentante. Son regard de braise et ses lèvres ourlées et fines attiraient aussi bien la gente féminine que la masculine, malgré son jeune âge.

Il était en train de débiter une bien étrange tirade à un de ses voisins de table :

- Nicolas, Ô Nicolas... Comment peux-tu ainsi oser me trahir pour les beaux yeux d'un autre qui ne te mérite pas ? Moi, ton complice de farce, ton meilleur ami, ton frère, ta famille, ton amant, ton souffre-douleur, ton persécuteur, ton prince, ton compagnon ! Moi qui, pour toi, briserai sans foi ni loi, un royaume, un peuple, un roi, un monde... Ne peux-tu donc t'attendrir et me laisser quelques miettes de ta si grande bonté et de ta tendresse si pure et si belle ? Pour toi, je donnerai ma vie. Pour toi, je t'offrirai l'envie. L'envie de quoi me demanderas-tu ? L'envie pourquoi, me chuchoteras-tu ? Mais l'envie de Moi, te répondrais-je. L'envie de ne jamais plus pouvoir te passer de ma présence, qui sera, un jour, je le sais, je le sens, apte à te réchauffer le coeur. Comme quoi... Tout est risible. Tout est possible.

- Mais qu'est-ce que c'est que ce truc ? S'exclama Maël en se détournant de sa conversation.

- Du théâtre très cher. Et sache que je ne m'adressai point à toi mais à mon, Ô si cher, Nicolas, rétorqua Alexandre.

- Débilité... grommela le-dit Nicolas.

Âgé de dix-huit ans passés, Nicolas Arcana Savaige était, après Alistair, le plus vieux de tous les habitants du château. Sa chevelure brune plutôt longue, mais pas autant que celle d'Alexandre, était retenue par un simple lacet jaune. Sa peau d'albâtre jurait avec ses yeux noirs bridés et ses vêtements. Il portait en effet un t-shirt noir orné de dessins tribaux jaunes et rouges ainsi qu'un pantalon gris foncé.

- Nicolas, tu es cruel ! Fit Alexandre. Je sais que la cruauté est un élément nécessaire à tout spectacle et que sans lui le théâtre n'est pas possible mais ce n'est pas parce que j'ai un coeur que tu peux me le détruire sans une once de compassion.

- Alex, mais bon sang tais-toi... Et passe moi donc la bolognaise, tiens, coupa Gaël en grognant presque.

- Toi aussi tu ne comprends pas la tragédie qui est en train de se dérouler ? Mais bientôt nous partirons. Nous quitterons ce foyer si cher à nos cœurs. Et, comme on dit : Loin des yeux, loin du coeur... Et jamais plus je ne reverrais mon Nicolas... Oh mon Nicolas... Mon Unique Amour... Vous m'abandonnez tous... Plus rien n'a d'importance à mes yeux...

Alexandre avait pris une pose tragique, un bras sur le front, une main sur le coeur et une jambe tendue sur la table. Un air faussement désespéré s'était plaqué sur son visage.

- Tordant, répliqua Nicolas en donnant le pot de bolognaise à Gaël, qui le remercia d'un regard.

- Mais de rien. Il faut bien que je vous fasse profiter de...

Alexandre fut malheureusement – ou heureusement – interrompu dans sa réplique par Alistair qui tentait de ramener le calme à table.

- Maintenant, tais-toi Alexandre. Dépêchez-vous de manger et retournez à vos occupations. Maël arrête, tu sais bien que tu ne dois pas provoquer ton frère... Non, Alex lâche Maël, tu vas l'étrangler et me l'abîmer... Comment ça, c'est le but ? Espèce de sale garnement ! Gaël, combien de fois devrais-je te dire que, non, on ne lit pas à table ? Et encore moins un livre sur les Malédictions Perdues ! Même si c'est un bouquin passionnant... Xoran, ne pense pas que je ne t'ai pas vu ! Tu ne drogueras pas ce plat ! Nicolas ne touche pas le jus de tomate de Gaël, tu sais très bien qu'il déteste ça, tu vas encore te retrouver avec les cheveux verts et des pustules plein le visage... Non, Xoran, descends de la table... Ce n'est pas une piste de danse je te dis ! Oui, bien évidemment que j'en suis sûr... soupira le malheureux Alistair. Oh et puis faites comme vous vou...

Mais avant qu'Alistair n'ait pu terminer sa phrase, un bruit insolite interrompit toutes les conversations et actions et ils tournèrent la tête dans un même ensemble.

À la grande fenêtre donnant sur le parc se trouvait un hibou gris qui toquait avec un acharnement admirable à l'aide de son bec, visiblement exténué. Intrigué, ce fut Alistair qui alla lui ouvrir et l'oiseau s'engouffra à l'intérieur. Il déposa la lettre au milieu de la table partiellement saccagée et entreprit de picorer dans les assiettes tout en renversant le verre de jus de tomate de Gaël. Ce-dernier se répandit en jurons en essayant d'éloigner le volatile de la tâche rouge qui jurait sur la nappe blanche et de sauver ce qui restait de sa boisson favorite.

Lentement, le plus proche de la lettre, soit Alexandre, s'en empara et la lut d'une voix légèrement vacillante :

Chers messieurs Subban, Savaige, Helldown et Jedusor,

J'espère que cette lettre vous trouvera en bonne santé, où que vous soyez.

Vous vous posez sans doute de nombreuses questions. Dont celle-ci : pourquoi est-ce que je vous contacte maintenant, après tant d'années ? Si je ne me trompe pas, cela fait quatre ans que nous ne nous sommes point vu. La raison de cette lettre est bien simple malheureusement.

Alistair, tu as toujours eu de très bonnes relations; vous n'êtes donc pas sans ignorer l'activité suspecte de certains individus. Nous pensons à d'anciens mangemorts, ou bien à leurs descendants, qui seraient à la recherche de quelque chose d'important et de très probablement maléfique. Je ne l'ai dis à personne, mais je ne pense pas me tromper en affirmant qu'ils ont découvert que leur maître avait emmagasiné tous ses souvenirs, ses connaissances et une certaine réserve de magie dans un objet précis.

La bonne nouvelle dans ce malheur, est qu'ils ignorent très certainement de quoi il s'agit et que l'objet en question se trouve actuellement en la possession de l'Héritier. Comment puis-je dire cela ? Eh bien, dans toutes les recherches qu'ils ont effectué jusqu'à présent et les enquêtes que nous avons mené, il n'a pas été cité une seule fois le véritable nom de l'objet en question ni son genre.

Bien sûr nous faisons tout pour que la population ne soit pas au courant. Elle se remet encore des troubles de la dernière guerre. Cependant le directeur du Bureau des Aurors, monsieur Potter, et moi-même, pensons que les Mangemorts – ou ce qui y ressemble du moins – ne vont bientôt plus se contenter de chercher l'objet et qu'ils feront quelques attaques ou prises d'otages pour affirmer leur supériorité sur les autres sorciers.

Nous n'avons pas la moindre idée de leur but final, nous ne savons même pas s'il s'agit du même que celui de Lord Voldemort ou d'un autre, plus dangereux, mais il nous faut agir maintenant car bientôt les gens auront peur. Nous ne savons pas vraiment quoi faire en ce moment même alors que nous devrions réagir !

J'ai ressuscité l'Ordre dès que j'ai pu mais il me faut encore trouver de nouveaux membres, ainsi qu'un véritable chef. Un chef de la lumière digne de celui qu'a été Albus autrefois. Pour l'instant, Harry Potter et moi-même nous relayons en quelque sorte. Cependant, remettre l'Ordre sur pieds prend du temps et de l'argent et le Ministère tarde à trouver une solution.

Je souhaite vivement que les malheurs d'il y a vingt-trois ans ne se répètent pas. Je ne pense pas que le monde sorcier puisse s'en remettre cette fois-ci. Il a été bien trop ébranlé la dernière fois.

Mon idée est simple, mes amis.

Je te demande de revenir te battre à nos côtés et d'intégrer l'Ordre, Alistair. Un Maître de Potions aussi doué et intelligent que toi pourrait grandement nous aider aussi bien dans le futur qu'aujourd'hui.

Je te demande également de mettre les enfants à Poudlard. Ils seront ainsi mieux protégés. Je n'ignore pas que l'endroit où vous demeurez reste un des endroits les plus sûrs au monde, cependant je pense qu'en étant au collège ils se mêleraient davantage à la société et pourraient ainsi se faire des amis et des alliés futurs. Et veiller sur eux serait plus simple.

Je me souviens que Nicolas avait déjà quatorze ans la dernière fois que nous nous sommes vus. Tu dois maintenant être majeur et étudier dans une excellente école – peut-être de médicomagie comme tu l'envisageais autrefois ? Je ne te demanderais pas de la quitter mais peut-être pourrais-tu, toi aussi nous aider ?

Je sais que vous craignez pour vos vies, autant futures que présentes, et que le jeune Gaël a encore davantage de raisons d'avoir peur de venir ici, mais nous avons bien trop besoin d'aide.

Pour l'Angleterre.

Pour Poudlard.

Pour toutes les générations d'élèves à venir.

À vous de choisir, mes amis. Quelle quelle soit, je respecterai votre décision.

Minerva McGonagall

P.-S. : Pour le cas où vous seriez d'accord pour vous rendre à Poudlard, je vous fournis directement les listes de fournitures d'après les âges que, je pense, vous avez.

- Gaël, tu devrais avoir dix-sept ans. Ainsi tu entrerais en 7eme année et devrais passer l'examen final appelé ASPICS.

- Xoran, il me semble que tu as fêté tes quinze ans. Tu entrerais donc en 5eme année et aurais également l'immense privilège d'avoir un examen à passer : les BUSES.

Je suis bien sûr persuadée que côté notes vous n'auriez aucun problème.

- Alexandre, treize ans depuis peu, non ? Tu serais en 3eme année.

- Et enfin, Maël, étant donné que tu dois – ou que tu vas bientôt – avoir onze ans, tu ferais ta rentrée normalement avec les nouveaux en 1ere année.

J'ai également pensé que, si Nicolas le souhaite bien entendu, je pourrai m'arranger avec son directeur pour qu'il puisse assister madame Pomfresh. La pauvre est débordée avec les élèves qui semblent se faire un malin plaisir de se blesser au Quidditch ou en cours... Ou un autre professeur s'il a changé d'avis sur ses études depuis le temps que nous ne nous sommes pas vus.

Mais gardez bien à l'esprit que je ne vous force en rien. Votre décision sera respectée dans tous les cas. Soyez également assurés que je ne divulguerais aucun de vos secrets. Certains d'entre eux doivent êtres gardés précieusement.

La lettre retomba sur la table dans un bruit de papier froissé. Les regards se cherchèrent, se trouvèrent, s'immobilisèrent. Les mains se crispèrent sur les tissus des vêtements ou les couverts. Le silence régnait.

Le temps était à la réflexion.