Cette histoire suit Porte ouverte dans la série Coeurs Transfigurés et se déroule durant le chapitre quinze de Harry Potter et l'Ordre du Phénix

Un problème recurrent: Première partie

Traductrice: MysticScribe

Lorsque des missions pour le compte de l'Ordre menèrent Remus Lupin dans le voisinage du Ministère de la Magie, il s'arrêta un instant devant la cabine téléphonique qui camouflait l'entrée des visiteurs aux yeux des Moldus. Il avait vu Tonks le soir précédent et il la verrait de nouveau ce soir, mais être si près d'elle maintenant était troublant. Il voulait faire un saut et la visiter. Toutefois, il hésita à agir sous le coup de l'impulsion. Pouvait-il réellement le faire?

Ce n'était pas que l'Ordre exigeait de Remus et de Tonks d'être discrets au sujet de leur relation; c'était simplement qu'il n'avait jamais fait quelque chose comme surprendre une petite amie au travail. Quelle raison pourrait-il invoquer pour demander l'admission au Département de la justice magique ? Et si Tonks ne travaillait pas au quartier général des Aurors aujourd'hui? Serait-il seulement sage de vouloir visiter le Ministère aujourd'hui, à la lumière de ce qui avait été publié dans la dernière édition de la Gazette du Sorcier?

"Remus!"

Il se retourna pour voir la solution à son dilemme se présenter d'elle-même. Tonks émergea de la boutique délabrée de l'autre côté de la boîte téléphonique.

"Salut, Remus!" appela-t-elle, accélérant la cadence de son pas et lui adressant un geste amical de la main.

Le cœur de Remus battit plus fort devant le large sourire qu'elle lui adressa. Elle était superbe vêtue de robes d'un bleu profond avec ses cheveux aujourd'hui longs et sombres, tirés en une queue de cheval un peu de travers. Ses joues étaient rouges et ses yeux brillants.

"Comme c'est génial de ma part de faire un saut à la surface pour une pause, maintenant!"Tonks l'attrapa dans une étreinte rapide et furtive, et elle s'étira pour déposer un baiser furtif sur ses lèvres. "As-tu affaire au Ministère?"

"Dans le voisinage," dit-il. "J'étais simplement venu pour te demander si tu avais le temps de venir déjeuner avec moi." Ce n'était pas vraiment un mensonge ; s'il avait trouvé le courage d'y entrer, il aurait sans doute pensé à l'inviter pour déjeuner. Peut-être.

L'expression de Tonks se fana quelque peu. "Oh, j'aimerais vraiment ça, mais j'ai une réunion dans quelques minutes."

Remus ressentit une pointe de déception, mais le plaisir inattendu de la rencontrer s'empara de lui – et la façon dont elle touchait sa cravate contribua en cela. La lumière du soleil brillait dans ses cheveux, et il se pencha un peu pour en examiner la couleur de plus près. "Tes cheveux sont-ils bleus ou noirs aujourd'hui?"

"Bleus." Tonks fronça les sourcils. "Tu aimes?"

"C'est ravissant." Remus suivit du bout des doigts une mèche qui s'était échappée de son attache à cheveux. Elle était soyeuse, et elle s'enroula délicieusement autour de son doigt. "Mais je croyais qu'Ombrage exigeait des couleurs naturelles."

Tonks rejeta la tête en arrière, sa queue de cheval. "Ombrage n'est pas ici, et je me sens plutôt rebelle face à la nouvelle -" Son expression se durcit, et sa voix se fit tranchante. "La nouvelle Grande Inquisitrice de Poudlard."

Même si Remus ne souhaitait pas que la conversation prenne ce chemin en particulier, il dit : "Je comprends donc que tu as lu la Gazette du Sorcier?"

"Seulement les manchettes. J'essaie de ne pas lire le journal au travail, parce que…bien, tu sais toutes les choses que je dis à propos de mes employeurs."

"Je te recommande d'ignorer toutes les manchettes de l'édition d'aujourd'hui. Cela ne fera que te mettre en colère."

"Maintenant, tu piques ma curiosité." Tonks fouilla dans ses robes et en sortit un exemplaire. Du coin de l'œil, elle aperçut un banc de parc au bout du trottoir et elle se dirigea en sa direction.

Remus dut bouger rapidement pour rester à sa hauteur, même avec ses longues enjambées. "Pour satisfaire sa curiosité, le Chicaneur fait l'affaire, tu sais."

Tonks leva des yeux surpris et amusés alors qu'elle se laissa tomber sur le banc. "Tu lis le Chicaneur?"

"Religieusement."

Le rire bruyant de Tonks fit tourner nombre de têtes, magiques et moldues. Son rire mourut brusquement alors que ses yeux survolaient l'article. Son front se plissa en une expression de frustration.

"Oh, écoute mon oncle Lucius. Plusieurs d'entre nous qui avons les meilleurs intérêts de nos enfants à cœur avons été préoccupés par certaines décisions excentriques de Dumbledore dans les dernières années, et nous sommes contents que le Ministère garde à l'œil la situation. Ils parlent de Dumbledore comme s'il était un enfant turbulent et comme s'ils venaient d'embaucher Ombrage comme gouvernante."

"Au moins, Dumbledore garde un sens de l'humour à propos de ces choses," dit Remus, s'asseyant près d'elle. "Ne peux-tu pas l'imaginer rire.."

"Je ne ris pas." Tonks poursuivit sa lecture. "Parmi ses décisions excentriques se retrouvent indubitablement les embauches controversées décrites précédemment dans ce journal, en particulier l'embauche du loup-garou Remus Lupin…" Elle le dévisagea. "Qu'est-ce que tu as à voir avec tout ça? C'est comme s'ils attendaient l'opportunité d'en parler de nouveau!"

"Je ne pense pas -"

Elle chiffonna le journal et le lança vers une poubelle à proximité. Elle rata son tir et Remus se leva pour en disposer proprement.

Tonks se leva aussi et se mit à faire les cent pas alors qu'elle poursuivait sa lancée. "Oublie le fait que tu étais le meilleur professeur de Défense contre les Forces du Mal depuis des années. Oublie le fait que tu es un aussi bon professeur que McGonagall ou Flitwick…"

"Je ne suis pas…"

"Si, tu l'es." Tonks tourna sur elle-même pour lui faire face, les mains sur les hanches. "Hermione et Ginny me l'ont dit. Elles m'ont dit aussi que les étudiants t'aimaient."

"Pas tous les -"

"Mais pour le Ministère, tu n'es que Remus Lupin, loup-garou !" Sa voix s'était enflée pour atteindre une hauteur passionnée; elle craqua. Ses mains retombèrent à ses côtés, serrés; elle s'affala un peu, sa tête tombant vers l'avant. "Zut, Remus. Je ne peux pas le supporter."

Elle maintint cette position pour ce qui lui sembla un long moment, au cours duquel Remus lutta pour interpréter son langage non verbal. Il n'y avait pas deux semaines, le Ministère avait passé un nouveau décret éducationnel, nommant Ombrage professeur de Défense contre les Forces du Mal. Parce qu'Ombrage avait été celle à rédiger la loi contre les loups-garous, Tonks interprétait le fait que cette fonctionnaire prenne officiellement ses fonctions comme un affront personnel à Remus. La réaction de Tonks face à ce nouveau décret était similaire, mais son expression semblait également défaite.

Mais pourquoi? Quelque chose s'était-il passé plus tôt aujourd'hui? Si oui, son expression joyeuse n'avait-elle été qu'un masque? Remus n'y croyait pas. Tonks avait affirmé ne pas avoir lu la Gazette du Sorcier avant de le faire maintenant. Quelqu'un lui avait-il mentionné cet article? C'était la partie à son sujet qui l'avait le plus irritée. Est-ce qu'un de ses collègues avaient commenté sa relation avec Remus Lupin, loup-garou? Y avait-il quelqu'un d'autre à part Kingsley Shacklebolt qui savait qu'ils entretenaient une liaison amoureuse?

La chaleur piqua les joues de Remus lorsqu'il songea aux implications de ses pensées. Son regard se posa sur un carré de mauvaises herbes qui poussaient à travers une fissure du trottoir. Il les écrasa du bout de sa chaussure élimé. "Est-ce que…est-ce que tu te sens embarrassée?"

"Humiliée." Tonks leva les yeux soudainement, fondant sur lui avec une expression mortifiée. "Je veux dire, par le Ministère, Remus! J'ai honte de travailler pour des gens comme Cornelius Fudge et Dolores Ombrage." Elle attrapa ses mains et les serra fermement, sans réaliser que ses ongles s'enfonçaient dans les paumes de Remus. "Je n'aurai jamais honte de toi."

Se libérant de l'étreinte d'acier de Tonks, Remus posa ses mains sur ses bras et les frotta pour l'apaiser. "Essaie de ne plus penser à cet article, Tonks. Tu ne peux pas te présenter à ta réunion dans cet état."

Tonks regarda par-dessus l'épaule de Remus en direction de l'immeuble souterrain. "Merlin, je ne peux pas du tout retourner là-bas…si ce n'est que pour démissionner."

Remus retint sa respiration et il la libéra en un rire sans joie. "S'il te plaît, rassure-moi et dis-moi que tu es en train de ventiler ta frustration et que tu ne le penses pas."

"Bien sûr que je ne le pense pas," répondit Tonks d'un air vaguement offensée. "Pas la partie à propos de démissionner, en tous cas."

"Bien, parce que cet article n'est pas à mon sujet. Il est au sujet de Dumbledore. Je suis sans importance."

Pour un moment, Tonks se renfrogna, mais elle sourit ensuite avec douceur. Elle glissa ses mains sur la poitrine de Remus et les joignit autour de son cou. "Rien à ton sujet ne sera jamais sans importance pour moi, Remus."

Même s'il croyait toujours qu'elle s'en faisait trop à ce sujet, il ne put s'empêcher de se pencher et d'effleurer ses lèvres des siennes.

Lorsqu'ils se séparèrent, Tonks soupira profondément. "J'ai parfois l'impression que je vis un mensonge."

"Que veux-tu dire?"

"Travailler pour Fudge et ces intolérants complaisants le jour, et servir l'Ordre le soir."

Remus savait que Tonks – et Kingsley – contournaient régulièrement les politiques du Ministère pour le compte de l'Ordre, mais Remus n'avait jamais vraiment réfléchi au fait qu'ils travaillaient contre le gouvernement. Il était probable que Kingsley ne le voyait pas de cette façon, mais Tonks n'était une Auror que depuis un an. Cela était sans doute déroutant pour elle.

"Le Ministère de la Magie est peut-être dans l'erreur maintenant," dit-il, caressant légèrement son bras. "Ils ne sont toutefois pas des méchants."

Tonks haussa un sourcil. "Sauf pour Ombrage."

"Je te l'accorde." Remus prit la main de Tonks et la guida sur le trottoir. " N'amplifie pas ta frustration en blâmant le Ministère pour ce qui est arrivé avec mon poste à Poudlard. Le Ministère ne m'a pas renvoyé. Je me suis renvoyé tout seul. J'ai oublié de prendre la potion Tue-Loup et je me suis transformé sur le terrain de l'école, alors que des enfants étaient présents. Peux-tu vraiment blâmer les gens d'avoir peur?"

"Peur de toi?" Elle renifla. "C'est vraiment…"

"Peu importe de la façon dont je suis la plupart du temps, ou mes qualifications pour ce poste, j'ai été négligent."

Tonks garda le silence. Un coup d'œil en coin lui révéla que les muscles de sa mâchoire tremblaient alors qu'elle serrait les dents. Sa main était flasque dans la sienne.

"J'ai fait une erreur," dit Remus. "Je dois en payer les conséquences."

Tonks retira sa main et croisa les bras contre sa poitrine. "Ils t'auraient mis à la porte même si ce n'était pas arrivé."

"Mais c'est arrivé."

"Ça ne donne pas au Ministère le droit d'endosser ces saloperies de préjugés. Et que je sois damnée si je reste assise bien tranquille et que je ferme mes yeux et mes oreilles en prétendant que cela ne me dérange pas."

Remus s'immobilisa. Il attrapa l'épaule de Tonks et la tourna face à lui. "Tonks, être avec moi n'est pas facile. Je viens avec des problèmes pour lesquels il n'y a pas de solutions. L'intolérance en est un. Si tu ne peux pas gérer -"

"Mais bien sûr que je peux -"

"Mauvais choix de mots," dit-il rapidement. Quand Tonks ouvrit la bouche pour protester, Remus leva une main pour mesurer ses propos. "S'il te plaît, écoute-moi. Nous avons déjà discuté de tout cela, tu te souviens? Tu as dis que tu étais pour faire un effort de ne pas prendre toutes ces choses trop à cœur."

Elle baissa les yeux d'un air coupable, mais lorsqu'elle leva les yeux de nouveau, ils se faisaient accusateurs. "Comment je peux ne pas prendre ces choses à cœur? J'ai beaucoup d'affection pour toi, et …"

"Je ne vais pas te regarder bouder au sujet de toutes les petites choses qui sont dites à mon sujet."

"C'est seulement ma façon de réagir!"

"Alors, nous devrions peut-être mettre fin à tout cela."

Tonks resta bouche bée, cligna des paupières et ses yeux s'arrondirent en de parfaits cercles. "Quoi?"

Enracinant son regard au sol, Remus dit, "Tes sentiments pour moi nuisent à ta perspective sur le sujet. Tu pourrais ruiner tout ce que tu as essayé d'accomplir. Cela n'en vaut pas la-"

"Oh," dit Tonks catégoriquement. "De l'auto-dénigrement, encore une fois."

"Non!" L'irritation de Remus s'intensifia. "Je n'ai rien dit à propos de moi. Ce n'est pas à propos de cela du tout."

Tonks croisa les bras de nouveau, pointant le menton vers lui comme pour le défier. "De quoi s'agit-il, alors?"

Remus croisa son regard sans ciller et parla en hachant bien chaque syllabe. "D'en faire toute une histoire."

"M'inquiéter à ton sujet, c'est faire toute une histoire, c'est ça?"

"T'en faire à propos de cette histoire, Tonks. Je suis très touché de voir comment tu te sens, mais tu es jeune et inexpérimentée, et…"

"Trop immature pour toi, tu veux dire?"

Remus ferma les yeux. Il venait certainement de s'enfoncer les deux pieds dans la bouche. "Ce n'est pas ce que…"

"Si tu te sens ainsi," l'interrompit-elle, "je préfère ne pas être avec toi non plus."

Elle tourna les talons, perdant l'équilibre alors qu'elle descendit de la chaîne de trottoir. Remus tendit une main pour l'aider à conserver son équilibre, mais il la retira lorsque Tonks le foudroya du regard. Alors que Remus la regarda regagner l'entrée des employés du Ministère, son estomac se noua. Elle ne l'avait pas bien compris. Il avait été clair – ou il avait fait de son mieux pour l'être – mais elle ne l'avait pas bien compris.

C'était peut-être pour le mieux. Il était voué à la blesser éventuellement. C'était préférable que ce soit de cette façon, avec sa colère pour la protéger, plutôt qu'elle soit laissée à elle-même avec une vie en ruine et un cœur brisé.