N.A.: ATTENTION ATTENTION CECI N'EST PAS UNE FANFICTION ORDINAIRE.

Donc je vous explique ce qui s'est passé: je faisais le ménage dans mon ordinateur (ce qui m'arrive EXTRÊMEMENT rarement) et je suis tombée sur cette première partie de fic, que j'avais commencé à écrire puis abandonné pour panne d'inspiration (en plus, il me semble qu'à ce moment là, j'étais en écriture de la trame de MNEL, ce qui m'intéressait bien plus que ce machin, qui devait être un two shot ou un three shot). Sauf qu'en le relisant, je me suis intéressée à l'histoire que je dessine sauf que j'ai la flemme HUMHUM JE VEUX DIRE JE N'AI PAS LE TEMPS d'écrire la suite/fin.

C'est là que tu interviens, cher lecteur/lectrice et auteur-e en herbe! Car c'est vous qui écrirez des fins et je les posterai à la suite de ce chapitre avec le pseudo de l'auteur-e, ça fera plein de fins alternatives sans que j'ai rien fait et ce sera bien :3

Comment? C'est de l'exploitation et vaguement égocentrique? J'entends bien. Mais comme dit le proverbe : "Haha, yolosef."

Comment participer ? C'est simple ! Si tu as un compte ff, va dans "DocX" sur le menu puis sur "Connections" et ajoute moi dans les tiennes (en utilisant "By PenName") puis envoie moi un PM pour que je fasse de même. Tu pourras ensuite m'envoyer ta fin par ce biais lorsque je t'aurai ajouté à mon tour. Attention, si tu ne m'envoies pas de PM, je ne saurai pas que tu m'as ajouté. Si tu n'as pas de compte ff, tu peux, soit me contacter sur twitter, je suis Metarien ou Le Rien, le pangolin, soit par skype : je suis meta(point)lerien (dans ce cas, écris un petit message de bon aloi expliquant que tu es de ff pour que je t'ajoute ;) ).

Il n'y a aucune limite de temps, et aucune censure, je publierai tout (TOUT) donc si vous vous sentez inspiré, n'hésitez pas. Je conseillerais bien de ne pas lire les fins alternatives déjà postées avant d'écrire la vôtre, mais je vous connais, bandes de polissons.

Aucun rating, ou contrainte spécifique, laissez parler votre imagination!

En cas, vous êtes toujours libres de me répondre par PM ou review. Voili voilou !

Enjoy!


Il y avait des jours où Antoine Daniel détestait vraiment sa vie.

« Prof, tu es sûr de ce que tu fais ? »

« Plus que cinq minutes ! » fut la réponse du scientifique.

S'efforçant de ne pas relever le fait que sa question était restée sans réponse, Antoine tenta de se détendre dans son fauteuil. Dieu savait qu'il devait apprécier Mathieu pour pouvoir supporter ses personnalités.

… Bon d'accord, il était de mauvaise foi. Il les aimait bien, ces personnalités. Peut-être qu'il les aimait aussi parce que dans chacune d'elles, il voyait Mathieu, ou plutôt une facette de Mathieu, et rien ne passionnait plus Antoine que d'essayer de décortiquer jusqu'au cœur l'oignon humain qu'était le jeune Sommet. Pourquoi ? Antoine sourit légèrement. Pour une raison qui ferait hurler les fangirls sans doute…

Il revint brutalement à la réalité lorsque la machine sur laquelle il reposait se mit à gronder de manière très inquiétante.

« Prof ?! »

« Détends-toi ! » répondit la voix étouffée du Prof, où perçait malgré tout une légère note de panique.

Pourquoi avait-il accepté d'être attaché, encore ? Non, sérieusement. Quelle idée de merde. Oui, Antoine, attache-toi à une invention inconnue en cours de fabrication, créée par un esprit génial mais aléatoire. Rien ne pourra t'arriver, champion !

« PROF ?! »

Une odeur de brûlé lui parvint, achevant de le faire paniquer. Il allait mourir, il allait mourir, il allait…

Un flash éblouissant envahit la pièce et Antoine se sentit glisser vers l'inconscient. Sa dernière vision fut celle du Prof courant vers lui en hurlant. Il s'évanouit.


Quand Mathieu rentra chez lui, un soulagement mêlé de légère impatience l'envahit.

Soulagement parce qu'il se sentait vanné. On le serait à moins. Il avait passé la journée à aider ses parents à déménager. « Parce que nous aussi, nous voulons voir la capitale, mon fils. » Même si par la capitale, ils entendaient plus ''la banlieue résidentielle calme et bobo'' que ''le cœur même de Paris, rempli de lumière, de bars et de putes'' comme Antoine appelait le coin que Mathieu avait choisi pour sa tanière. Pour revenir à ce dernier, au final, il ne voyait pas vraiment ce qu'avait apporté ce déménagement à ses parents. La banlieue qu'ils avaient choisie était aussi éloignée de tout que l'avait été leur village et s'ils étaient plus proches géographiquement de leur fils, la ville où ils habitaient était si mal desservie qu'en pratique, cela ne changeait rien. Il prendrait maintenant trois heures de transports en commun plutôt que trois heures de train pour les voir. Amélioration, mon cul.

Impatience aussi parce qu'Antoine avait promis de venir dans la soirée. Et s'il y avait une chose dont il avait besoin ce soir, c'était de son meilleur ami.

Meilleur ami qui agissait bizarrement ces derniers temps d'ailleurs, même selon ses standards. Trouvant des prétextes abracadabrants pour reporter leurs rendez-vous, passant des jours à faire le mort, se tortillant nerveusement à chaque brève entrevue, puis l'appelant au beau milieu de la nuit, complètement bourré, et complètement incompréhensible.

« Il a intérêt à avoir une bonne explication, ce con. » grommela Mathieu dans sa barbe, sans pouvoir pour autant s'empêcher de sourire à la pensée de le revoir.

Il passa sa main sur son crâne rasé sur lequel une touffe irrégulière de cheveux poussait péniblement et secoua la tête. Antoine avait un double de ses clés, il y avait de grandes chances pour qu'il soit déjà là.

« Antoine ? » appela-t-il.

Des petits chuchotements paniqués semblèrent répondre à son appel. Il fronça les sourcils. Qu'est-ce que ses personnalités avaient encore foutu ?

« Les mecs ? » demanda-t-il en avançant en direction du bruit. « Vous n'auriez pas vu Antoi… ? »

Les mots se bloquèrent dans sa gorge à la vue qui s'offrit à lui.

Le Patron, la Fille, le Hippie, Maître Panda et le Prof étaient réunis, semblant se disputer à mi-voix dans le couloir sans le remarquer tout de suite, le Geek légèrement à l'écart qui geignait de sa voix insupportable. Mais ce n'était pas ce qui avait retenu l'attention du jeune vidéaste.

Ce qui avait réussi à le tétaniser sur place était le bout de chair rose et criard que le Prof agitait dangereusement à hauteur d'épaule. Un… UN BEBE ? Qu'est-ce que ce… truc faisait chez lui ?! Il cligna des yeux rapidement de façon répétée avant de se concentrer sur le bruit de sa propre respiration par-dessus le bourdonnement de ses oreilles pour se calmer.

Ce n'était pas vraiment un bébé, nota la partie plus ou moins lucide de son cerveau. Plutôt un enfant en bas âge, trois ou quatre ans à tout casser. Et ce gosse lui disait furieusement quelque chose avec ses cheveux emmêlés, ses grands yeux bruns de myope cachés derrière des verres beaucoup trop grands et ses mouvements vigoureux, bien qu'assez aléatoires. Un mauvais pressentiment s'imposa à lui, que confirma la conversation chuchotée de ses personnalités qu'il parvint enfin à décoder :

« Mathieu va nous tuer… » pleurnichait le Geek.

« C'est facile de m'accuser ! » protestait en même temps le Prof en secouant –peut-être un peu trop fort- le bambin. « Mais si vous aviez accepté que je prenne le Geek comme cobaye comme d'habitude… »

« Le Geek n'est pas une victime. » répondit la voix plus posée, mais pleine de colère contenue, du Panda. « Je refuse de vous laisser jouer avec lui comme bon vous semble sous prétexte qu'il est le plus faible d'entre nous. La prochaine que je surprends l'un d'entre vous à essayer, je lui arrache la peau à froid. »

Les menaces de Maître Panda étaient devenues bizarrement beaucoup plus convaincantes depuis leur séjour à l'hôpital psychiatrique et la petite période ''Psychose'' qui avait suivi.

« Pas la peine de monter sur tes grandes putes, gamin. »

« On dit ''monter sur ses grands chevaux'', machiste ! »

« Ha, tu vois une différence ? »

A quel moment cette conversation avait-elle versé du côté zoophile de la force ?

« Ta gueule, on est dans la merde si Mathieu apprend ce que le Prof… »

« Hum hum. »

« …Ce que nous avons laissé le Prof faire à Antoine. »

« MOUCHE A FRAISE ! »

« Tu crois qu'il sera si furax que ça ? C'est pas comme s'il perdait grand-chose. Ok, ça risque d'être plus compliqué de le baiser sous cette forme. Quoi que le frisson de la nouveauté… »

« T'es dégueulasse ! »

« C'est un peu mon fond de commerce, gamine. »

« …Il va nous tuer, tous nous tuer… »

« Je confirme. »

Toutes les personnalités se turent lorsque la voix de leur créateur retentit dans le couloir. Ils se retournèrent lentement. Une aura noire semblait flotter au-dessus du jeune homme.

« Dites-moi que je me trompe. » prononça-t-il d'une voix grinçante. « Et dites-moi que vous n'avez pas transformé Antoine en chiard de trois ans. »

Il y eut un petit silence avant que le Prof ne finisse par l'interrompre :

« Techniquement, il a trois ans, sept mois et huit jours… »

C'est tout ce qu'il put dire avant de se prendre un coup de poing dans la tronche.


« Mama ? »

« Non, je ne suis pas ta ''Mama''. » répondit patiemment Mathieu à celui qui avait été son ami. « Prof, tu as une idée de comment lui rendre son apparence normale ? »

Le Prof, pressant une compresse froide sur son nez, ravala la remarque désobligeante qu'il s'apprêtait à faire et répondit :

« Si mes calculs sont justes, les effets devraient se dissiper tous seuls en un peu plus de vingt-quatre heures… »

« Plus de… Tu veux dire qu'il va rester une journée entière comme ça ?! »

« Pas exactement. Son corps va entamer une croissance normale en accéléré qui sera entièrement aboutie dans le délai que je t'ai donné. Le gros problème étant bien sûr que la psyché suit le même développement que la partie corporelle… »

« C'est-à-dire ? »

« Antoine est un enfant physiquement et… mentalement. »

« Mama ! » déclara triomphalement Antoine, confirmant les dires du scientifique.

« Il est siiii mignoooon ! » s'exclama la Fille.

Mathieu leva les yeux au ciel. Parfois, il se demandait pourquoi il avait créé des personnalités aussi… envahissantes. Dans tous les sens du terme. Elles envahissaient son espace vital, mais aussi sa vie sociale avec leurs caractères si… entiers. Il ne pouvait pas concevoir entamer une amitié réelle avec quelqu'un sans les inclure dans l'équation, en priant très fort pour qu'elles ne fassent pas fuir la personne de peur. Cela expliquait pourquoi il avait si peu d'amis.

La Fille, des étoiles dans les yeux, s'agenouilla devant le petit garçonnet et pointa un doigt sur sa poitrine :

« Moi, je m'appelle Fille. »

« Fiiiiiiii. » acquiesça gravement Antoine.

« Et lui, c'est Mathieu. Répéte : Ma-thieu ! »

« Ma-yeu. » Antoine fronça le nez, comme insatisfait de lui-même avant que son regard ne s'éclaire et qu'il ne piaille gaiement : « Ma-ma ! Mama ! »

« Qu'il est chouuuuuuuu. »

Mathieu soupira. Il détestait les enfants et il détestait les idiots qui bêtifiaient devant eux. Il était même assez honteux que la Fille – une partie de lui, tout de même ! – fasse partie de cette frange haïssable de la population.

« Gerbant. » marmonna le Patron a côté de lui, résumant assez bien ses pensées.

Soudain, passant nerveusement sa tête par l'entrebâillement de la porte, le Geek demanda : « Tu veux jouer avec moi ? »

Mathieu s'apprêtait à répondre – le Geek lui demandait souvent de jouer avec lui, à un FPS ou Mario Kart le plus souvent, et il acceptait volontiers, mais là, le moment était plutôt mal choisi – quand il se rendit compte que le Geek s'adressait, non pas à lui, mais à Antoine et tenait dans ses mains des petites voitures au lieu de son sempiternel ordinateur.

Mathieu se souvenait de ces voitures. Il les avait achetées un jour pour le Geek, avant qu'il ne comprenne que les seules voitures qu'appréciait ce dernier étaient celles dans Grand Theft Auto. Elles pourrissaient au fond de l'armoire du gamer depuis leur achat. Mathieu était même étonné qu'il ne les ait pas jetées depuis le temps. Ou vendues sur Ebay.

Mais ce qui le surprenait encore plus était que celui qu'il appelait affectueusement ''sale gosse'' ait fait l'effort –sans qu'on lui demande quoi que ce soit- d'aller les chercher pour le marmot qu'Antoine était à présent.

« Veux 'ouer. » sourit Antoine en battant des mains.

Un grand sourire –bien plus grand que celui qu'il faisait habituellement- illumina le visage du Geek qui s'accroupit près de la Fille, qui s'éloigna pour lui faire de la place, avant de faire défiler les voitures devant Antoine en faisait des bruitages aussi réalistes et sophistiqués que ''VROOOOOUM !''. Il finit par en passer une au petit garçon qui l'imita aussitôt, très concentré.

Quelque chose se tordit dans la poitrine de Mathieu en contemplant ce spectacle. C'était… touchant d'une certaine manière. Un petit bruit à sa droite lui fit tourner la tête pour voir le Patron assister à la scène avec un air indéchiffrable plaqué sur le visage avant que celui-ci ne se lève brusquement.

« Je vais fumer. » jeta-t-il. « Appelez-moi quand il sera plus mature. »

Et il quitta la pièce sans attendre de réponse.

Mathieu le suivit des yeux aussi longtemps qu'il put avant de revenir au Geek et à la Fille qui jouaient toujours avec Antoine.

Qui était-il vraiment ? Un connard, prêt à abandonner son meilleur pote lorsque son confort personnel était trop menacé, ou un désespéré qui ne demandait qu'à compenser son manque d'affection en le reportant sur un gosse que techniquement il connaissait à peine ?

Toujours si cynique, railla une voix dans son crâne –comme s'il avait encore besoin de ça ! Tu ne peux pas simplement reconnaître que tu es terrifié par la situation mais que tu ferais tout pour aider Antoine ?

« Mathieu ? » émit le geek, le sortant de ses pensées. « Il fait beau. On peut aller au parc ? C'est là que les enfants vont en général, non ? On peut y aller ? »

Mathieu haussa un sourcil. Le regardant d'un air implorant, Antoine et le Geek réussissait l'exploit de paraître aussi mignon l'un que l'autre (même si dans le cas du Geek, c'était un peu plus pathétique).

« O-kay. » dit-il lentement. « Mais à condition que vous me promettiez de ne pas vous faire remarquer. C'est déjà suffisamment compliqué à expliquer lorsqu'on me surprend dans la rue avec un mystérieux double, si quelqu'un reconnaissait Antoine dans son état actuel, ce serait catastrophique. »

Mathieu finirait sans doute en prison pour le restant de ses jours. Ou enfermé dans un asile pour de bon cette fois. Et c'était si la mère d'Antoine ne le tuait pas avant…

« Je reste. » déclara la Fille. « Je ferai la cuisine. »

Elle s'en alla sous le regard étonné de ses compagnons. D'habitude, elle protestait et hurlait au sexisme dès que l'un de ses ''colocataires'' avait le culot de lui demander ne serait-ce qu'un sandwich (pas tout le temps à tort, il fallait l'avouer). Peut-être que les enfants, comme la musique, adoucissait les mœurs ?

Devant l'air interrogatif du Geek, Mathieu se contenta de hausser ses épaules et de prendre son chapeau.

« Alors, on y va ? »


Heureusement pour eux, le parc était relativement désert. Il fallait dire qu'ils y allaient en semaine, la plupart des parents travaillaient et les enfants étaient gentiment parqués à l'école. Mathieu jeta un regard circulaire sur l'espace de jeux. Enfant, il avait grandi à la campagne. Ses lieux de loisirs ressemblaient plus à des champs en friche ou des terrains vagues plutôt qu'à ces semblants d'espaces verts bitumés.

« Ouiiiiiii ! » hurla Antoine en dévalant du toboggan.

Mathieu eut un sourire involontaire. ''Mini-Antoine'' comme il commençait à l'appeler en privé, était décidemment trop mignon.

« Mama ! » l'appela-t-il justement. « Balanchoire ? La balanchoire ? »

« Va pour la ''balanchoire''. » sourit-il. A côté de lui, le Geek semblait s'amuser autant qu'Antoine et être complètement détendu – pour une fois.

Plus le temps passait, plus Mathieu rejoignait l'euphorie des deux autres. Et tout était si simple avec Antoine sous cette forme. Différent, certes… mais plus simple. Il se remémora leur dernière entrevue.

C'était exactement treize jours auparavant. Peut-être devrait-il s'inquiéter du fait qu'il comptait scrupuleusement les jours où il ne voyait pas Antoine, mais là, il estimait avoir une bonne raison.

Antoine avait les traits déformés par la colère et… quelque chose d'autre ?

« Tu aurais pu me dire que tu étais de retour, ça m'aurait évité de me faire un sang d'encre ! Tu te rends compte de mon inquiétude lorsque personne n'a pu me dire où t'étais ?! »

« Je vais bien, Antoine. »

« Et tu crois que c'est suffisant ?! »

« Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? »

« Je sais pas, je sais pas, je… putain. » Antoine s'était quasiment effondré sur lui, la tête appuyée contre son cou, les bras ballants par-dessus ses épaules. « Je sais pas pourquoi je t'engueule… Pardon, Mathieu, c'est juste que… Tu m'as manqué et… »

La voix d'Antoine était un peu étouffée, un peu tremblante et l'estomac de Mathieu sembla se remplir de papillons alors qu'une affirmation sembla s'imposer dans l'esprit du jeune homme : Antoine était beaucoup trop près.

Il le repoussa, peut-être un peu brusquement, et ne put pas ne pas remarquer la lueur passagère de déception dans les yeux de son ami.

« Je vais bien, Antoine. Promis. »

« Ouais. » Antoine avait eu un sourire forcé. « Ouais. Tu vas… bien. »

Ça avait été une conversation étrange dans une atmosphère étrange. Dire qu'ils s'étaient finalement mis d'accord sur ce rendez-vous pour mettre tout ça au clair.

Mathieu donna un coup de pied rageur dans une pomme de pin. Mettre quoi au clair ? Bon sang, Antoine avait été la seule personne – la seule, nom de Dieu – à qui il avait dit la vérité. Il avait même menti à ses parents, prétextant une urgence chez un ami qui n'avait pas le réseau. Il lui avait dit la vérité. Sur l'asile, sur le docteur Frédéric, sur tout. Que voulait Antoine de plus ?

Et bien sûr, ce n'est pas comme si mini-Antoine avait la moindre idée de la réponse.

« Mayeu ? » demanda le sujet de ses pensées, les yeux brillants de fatigue.

« Tu veux rentrer, p'tit gars ? »

« Ui. »

« Alors, on y va ! »

« Mayeu ? »

« Hm ? »

« Chuis fatigué. Y ai mal aux pieds. » avoua Antoine d'un air piteux.

« Tu veux que je te porte ? »

« Uiiiii ! »

« Attendez-moi ! » cria le Geek derrière eux.

« Pas envie. » ricana Mathieu en se relevant, Antoine sur ses épaules. « Le dernier arrivé est la pute du Patron ! »


C'est riant et essoufflés qu'ils arrivèrent devant leur immeuble et Mathieu s'appliqua à faire lentement descendre Antoine de son dos.

« Heu… Mathieu ? C'est moi ou… il a grandi ? »

Le rire du youtuber mourut instantément lorsqu'il vit que son double à la casquette avait raison. Antoine était plus grand, toujours aussi joufflu mais ses lunettes semblaient presque à sa taille et ses vêtements – dont Mathieu ne connaissait d'ailleurs pas du tout la provenance – étaient trop étroits.

« Heu… Bonhomme, » dit prudemment Mathieu en cherchant des termes simples pour ne pas effrayer son ami. « tu as quel âge ? »

« J'ai sept ans ! » répondit fièrement mini-Antoine en brandissant six doigts.

Mathieu échangea un regard paniqué avec le Geek. Quatre ans en deux heures ? Comment pourraient-ils s'adapter à la situation si elle évoluait constamment ?!

« J'ai faim. » ajouta Antoine, totalement imperméable à la tension qu'il créait.

Se forçant à sourire, Mathieu les fit tous monter jusqu'à l'appartement, les neurones tournant à mille à l'heure.

Une fois arrivés, Antoine stoppa net en reniflant l'air. Mathieu s'arrêta et l'imita. L'eau lui vint instantanément à la bouche. La Fille s'était surpassée. Toute l'entrée embaumait le porc caramélisé et les épices légères.

La Fille sortit de la cuisine, poursuivie par des odeurs alléchantes de nourriture, habillée d'un tablier que Mathieu ne se souvenait même pas posséder, un grand sourire aux lèvres.

« Le Prof m'avait prévenue qu'il serait assez grand pour manger la même chose que nous quand vous reviendriez. »

A ces mots, Mathieu libéra une respiration qu'il n'avait pas eu l'impression de retenir. Tout allait bien. Le Prof savait ce qui se passait, Antoine allait bientôt redevenir normal, et mieux que tout, il y avait à manger pour ce soir.

Ce fut cet instant que choisit le côté diablotin de mini-Antoine pour se manifester. Le petit garçon stoppa net tout mouvement, se retourna d'un coup, et observa longuement le visage de Mathieu d'un air buté avant de déclarer :

« Je veux des frites. »

« Il n'y en a pas, chéri » Décidemment, songea Mathieu, la Fille cachait des trésors de patience en elle. « Mais il y a d'autres choses délicieuses à mang… »

« Je veux des frites. »

Ne bougeant pas d'un iota, le gamin fixait Mathieu en plein dans ses prunelles, avec l'air de vouloir en découdre. Paniquant insensiblement, Mathieu réalisa que c'était à lui de prendre une décision.

« Heu… »

« Refuse. » siffla la Fille qui avait perdu son sourire. « Il fait un caprice. Il deviendra pourri-gâté si tu cèdes. »

« Je veux des frites. »

« Complètement arrogant et machiste, c'est ce genre d'adulte que tu veux qu'il devienne ? »

« Bah… C'est-à-dire que techniquement, il est déjà adulte et son éducation est déjà faite… »

« Je veux des frites. »

« Je vois. Tu préfères donc céder à la facilité au mépris des répercussions sur son futur. Bel exemple pour un enfant. Tu sauras de qui il tient s'il devient insupportable et lâche. »

« Je veux des frites. »

« Non mais STOP STOP, c'est du délire total ! Ce n'est pas mon gosse, c'est Antoine ! Tu en es consciente ? Arrête de vouloir me faire culpabiliser sur l'éducation de mon meilleur pote, c'est franchement creepy ! Et toi ! » ajouta-t-il en se tournant vers la paire de yeux marrons fixée sur lui. « Il n'y a pas de frites, et même pour toi, il est hors de question que je me bouge le cul pour aller d'en acheter, capishe ? »

« Tu as dit un gros mot ! »

Atterré, le jeune homme se massa les tempes en soupirant. De tout son discours, c'était la seule chose qu'Antoine avait retenu ?

« Il a raison, Mathieu, on ne dit pas de gros mots devant un enfant ! » appuya la Fille.

« Il mérite la punition ! » déclara sentencieusement mini-Antoine, qui avait l'air de beaucoup trop s'amuser au goût du plus âgé.

« Exactement. »

« Je te demande pardon ?! »

« Tu vas oser ne pas assumer les conséquences de tes actes, Mathieu ? » La Fille haussa comiquement (ou tragiquement, ça dépendait du point de vue) les sourcils. « Devant un enfant ? »

« C'est bon, c'est bon ! C'est quoi la fameuse ''punition'' ? »

« Tu manges par terre ! » expliqua doctement le démon qui se présentait sous la forme d'Antoine.

« Heu, ok, passe-moi juste une assiette… »

« Non. Sans assiette. » assena le petit diable.

« Quoi ?! »

Mais sous les gros yeux de la fille et la sympathie compatissante du Geek - bien que celle-ci rende les choses pires d'une certaine manière, je veux dire, quand même la victime de service a pitié de toi, c'est qu'il faut que tu te poses des questions sur ta vie – Mathieu consentit à poser son repas sur le carrelage et à manger à même le sol sous l'œil vigilant de la créature de l'Enfer – enfin, de mini-Antoine.

Cela aurait pu être pire, essaya de se consoler Mathieu, il y aurait pu avoir, il ne savait pas, plus de témoin, plus de moquerie…

Mais à l'instant où Mathieu formula cette pensée, et parce que le Destin est une salope sans cœur, le Patron fit son entrée, suivi de Maître Panda et d'un Hippie un peu blasé.

« Quand je t'imaginais à terre, tu étais en train de bouffer quelque chose d'autrement plus appétissant, gamin. »

Il y a des jours où il détestait sa vie.

Mais comme toutes choses finissaient toujours par passer, les bonnes comme les mauvaises, le dîner et le calvaire qu'il représenta pour Mathieu – principalement à cause des regards goguenards que lui lançait le Patron qui semblait apprécier beaucoup plus Antoine à présent - s'acheva enfin.

« Bien ! » déclara-t-il en se relevant, une légère grimace sur le visage. « Vous avez tous bien mangé et vous vous êtes tous bien foutu de ma… de moi mais c'est l'heure de dormir maintenant ! »

« Non. »

Mathieu leva les yeux au ciel. Evidemment. Il fallait qu'Antoine soit ce genre de gosse insupportable.

« Si. »

« Non. »

« Si ! »

« Non ! »

« Laisse faire les pros, gamin. »

Dubitatif, Mathieu recula d'un pas pour laisser le Patron s'agenouiller devant le garçonnet, un sourire assuré vissé sur les lèvres.

« Tu sais ce qui arrive aux gens qui refusent de dormir, gamin ? »

« Non ? » dit Antoine d'une toute petite voix.

« Ils finissent dans ma chambre à me… »

« STOOOOOOOP, je ne pense pas qu'il mérite que tu lui en dises plus. »

« C'est à toi de voir comment tu veux éduquer ton chiard, gamin. »

« Bon Dieu, qu'est-ce que vous avez tous ?! C'est Antoine, nom de Dieu, pas mon gosse. »

Le Patron haussa les épaules, visiblement peu perturbé par cette nuance à laquelle Mathieu semblait tenir et s'éloigna.

Mathieu soupira. La voix un peu stridente de mini-Antoine commençait à lui donner mal à la tête. Il ferma les yeux mais les rouvrit brusquement lorsqu'il entendit le bruit sourd d'un chute suivi d'un silence et tomba sur l'air gêné mais fier de lui du Patron.

« J'ai piqué du chloroforme au Prof, ça devrait tenir toute la nuit et te permettre de pioncer en paix. »

C'était… étrangement intentionné de sa part. Et flippant.

« Merci, mec. » Mais il y avait des moments où il fallait être reconnaissant.


Cinq heures plus tard, Mathieu ouvrit les yeux brusquement. Quelque chose l'avait réveillé. Sa porte était ouverte. Il lui fallut tout de même dix bonnes minutes pour faire le lien. Une silhouette mal coiffée se découpait nettement sur la lumière du couloir.

« Antoine ?... » balbutia Mathieu.

« J'ai fait un cauchemar et j'arrive pas à me rendormir… Je peux dormir avec toi ? »

Le ton était incertain, et déjà moins enfantin qu'avant. Mathieu plissa les yeux. Malgré le brouillard qui flouait sa réflexion, il croyait pouvoir deviner qu'Antoine avait maintenant environ douze ans. Il baissait la tête, un peu honteux de reconnaître ses peurs nocturnes à un âge où on aime se voir des similitudes avec des super héros. Mathieu eut pitié de lui – ou peut-être était-il trop fatigué pour refuser.

« Grimpe. » dit-il simplement en s'écartant un peu pour lui laisser de la place à la droite du lit.

Antoine ne se le fit pas dire deux fois et vint se rouler en boule à côté de son aîné avant d'apparemment immédiatement s'endormir. Mathieu soupira. C'est vrai qu'on a le sommeil facile à douze ans. Ce qui n'était pas son cas. Il passa pas mal de temps à gigoter dans son coin de lit, ne sachant si son insomnie venait de son réveil impromptu ou d'Antoine ou encore de toute cette situation bizarre qui semblait si loin de prendre fin. Il finit par sombrer dans un sommeil agité.

Lorsque Mathieu se réveilla après une nuit bien trop courte, ce fut pour se retrouver nez à nez avec de grands yeux chocolat et un petit sourire narquois d'adolescent. Il faillit tomber du lit.

« Nom de Dieu ! » jura-t-il.

Antoine avait encore grandi. C'était maintenant un jeune homme de seize ou dix sept ans qui n'avait pas l'air gêné le moins du monde de se retrouver aux côtés d'un Mathieu à moitié à poil, et même, au contraire. Il ricanait légèrement, les traits un peu sardoniques et… intéressés ?

Mathieu se sentit soudain incroyablement vulnérable sous ce regard.

To be continued... BY YOU. ;)