La ville est une immense solitude peuplée. Bien qu'entouré, on se sent désespérément seul. Et là, elle se sentait réellement seule. A quand remontait la dernière fois où elle avait fait une sortie entre copines avec ses amies ? Ces dernières avaient fini par cesser de demander, vu que sa réponse était toujours : « je n'ai pas le temps ». Et elle n'avait véritablement pas le temps, vu qu'elle se devait de jongler entre son boulot et sa thèse de doctorat. Mais, maintenant qu'elle avait fini ce qui la préoccupait tant, il n'y avait plus personne autour d'elle. Oh, bien sûr, les mois qui suivirent l'obtention de son nouveau titre, tout le monde était là, pour faire la fête avec elle.

Mais, après que tout se soit calmé, force était pour la brune de constater que des tas de choses avaient changé. Les meilleurs amis n'avaient subitement plus les mêmes centres d'intérêts, et quand bien même, la distance les avait séparé. Les uns s'étaient mariés et avaient fondés une famille, et c'était maintenant à eux, de ne plus avoir le temps pour elle. Les autres s'en étaient allés au loin, vivre leur vie ailleurs.

Le fait qu'elle ait dû déménager dans une nouvelle ville pour son nouvel emploi n'aidait pas vraiment. Elle avait bien essayé de rencontrer ses voisins, mais bizarrement, eux aussi, n'avaient pas le temps. Le voisinage jonchait d'avocats et honnêtement ces gens n'étaient pas les plus bavards qu'elle ait connus. Ils s'en tenaient avec elle au minimum de conversation requis, les salutations.

Alors, à son tour, elle se plongea corps et âme dans son travail. Elle n'avait, de nouveau, plus le temps. Tellement pas le temps, qu'elle ne remarqua que deux semaines plus tard, l'arrivée d'un nouveau voisin. Mais ce n'était pas grave, celui-là non plus, n'avait pas pris de temps de la saluer. Il était donc sage de dire qu'il n'avait, lui aussi, pas le temps. Et la vie pouvait continuer avec son absence de surprise.

Ou peut-être que non, un matin elle sortit drôlement tard de chez elle. Chose amusante, le nouveau voisin aussi, et elle dû retenir l'ascenseur, tandis qu'il courait pour y entrer. Une fois à l'intérieur, il arrangea sa cravate et passa une main dans ses cheveux de jais. Elle l'imaginait lui aussi avocat. Il lui passa ses remerciements, qu'elle accepta, sans plus.

Le trajet ne fut pas long. Dans un tintement, la porte métallique s'ouvrit, plus proche, il sortit en premier, elle le suivit. A son grand malheur, sa jupe se coinça à une des épines qui ornaient l'intérieur de la porte. Et tandis que l'élévateur remontait, elle ne put s'empêcher de pousser un cri. Honte. Mortification. A quand remontait la dernière fois où elle avait eu sa jupe soulevée devant tout le monde ? Sans doute à la crèche.

Ce fut autour du jeune homme d'aider. Elle ne sait pas trop comment, mais ils y étaient arrivés. Et maintenant, sa jupe avait un trou. Remonter à son appartement promettait de la mettre encore plus en retard qu'elle ne l'était déjà. Mais bon, une fois n'était pas coutume.

« Ca va aller ? » Fit la voix de son voisin, et elle fut surprise qu'il était encore là. Elle aurait imaginé qu'il était parti, vu tout le temps qu'elle avait passé assise à se lamenter sur son sort.

« Ca ira », répondit-elle sans relever la tête.

Elle ramassa son sac, et n'hésita pas à prendre la main généreuse que lui tendait son voisin pour l'aider à se lever.

« Merci » dit-elle, remontant doucement son attention vers le visage de son voisin.

Et là, leurs regards se sont enfin croisés. Ils sont restés dans cette position,-se serrant la main, les yeux de l'un ancrés dans celui de l'autre- comme pétrifiés.

« Uchiha », murmura-t-elle.

« Hyuga », fit-il à son tour.

A quand remontait la dernière fois qu'ils s'étaient vus ? Au lycée peut-être. Un sourire se dessina sur chacun de leur visage. Adolescents, ils n'avaient jamais vraiment pris la peine de se regarder droit dans les yeux. Bien sûr, ils se connaissaient, pourtant, en cet instant ils avaient l'impression de se redécouvrir. Ils avaient l'impression de voir plus que le souvenir de leurs années de jeunesse. Ils ne savaient pas encore quoi cela dit.

« Toujours aussi peu chanceuse », se moqua-t-il en lâchant enfin la main de la jeune femme.

« Dit la personne qui a fait un sprint il n'y a pas cinq minutes. »

Son sourire s'agrandit un peu plus. Il sorti d'une des poches de sa veste des clés, qu'il fit tinter.

« Je te dépose ? »

Elle prit quelques secondes pour réfléchir.

« Si ça ne t'ennui pas d'attendre que je me change avant. »

Il essaya de regarder ce qui attirait tant l'attention de la jeune femme sur sa jupe, et elle mit rapidement la main sur le trou, avant de frapper son avant-bras.

« Hey », reprocha-t-elle. A quoi, il souleva les mains en signe de défaite.

Il poussa le bouton de l'ascenseur. Quelques secondes plus tard, la machine laissait sortir trois personnes. La brune se mit de profil, espérant qu'aucun des nouveaux arrivants n'avaient vus son malheur. Tout le monde parti, l'Uchiha lui laissa grande la place.

« Après toi ». Et elle jurerait qu'il avait un sourire moqueur sur le visage.

« Je ferais retirer tous ces pins », grommela-t-elle, en prenant tout de même place dans l'ascenseur.

L'Uchiha la suivi, sa main droite sur sa bouche, pour étouffer son rire. Il reçut de son ancienne camarade un regard noir, qui ne fit que rendre son rire plus prononcé. L'ascenseur se referma su Hinata, qui après quelques secondes avait à son tour, les lèvres qui s'étiraient en un sourire.

La ville n'était, peut-être au final, pas si solitaire que ça.