Author's note:
Sherlock est une série télévisée créée par Steven Moffat et Mark Gattis. Les personnages, scénarios, répliques et tout ce qui s'y rapporte sont la propriété de BBC, Hartswood Films Ltd et Masterpiece.
.
.
Chapitre 1
.
.
.
Sherlock Holmes détestait New York.
Cette ville était certainement pour lui l'une des pires au monde. Sale, clinquante, dangereuse, une combinaison de tous les péchés humains. Tellement étincelante en apparence, mais détestable une fois que l'on prenait la peine de regarder avec un peu plus d'attention. Sherlock avait toujours en tête l'image de mordre dans un beau fruit et d'en trouver le cœur pourri.
Il avait dû s'y rendre une fois, pour une enquête. Un suicide qui n'en était pas un. Il se souvenait de la veuve propre sur elle, les jambes serrées l'une contre l'autre dans une robe à plusieurs centaines de dollars. Le diamant souvent retiré de son annulaire gauche à plusieurs milliers de dollars. L'assurance-vie à plusieurs millions de dollars. Dieu qu'il avait détesté cette affaire, pleine d'avocats arrogants, de vamps insipides et d'enquêteurs ineptes. Il en avait tiré de profondes aversions pour le vieil Oncle Sam.
Et aujourd'hui, il était là, à l'aéroport international JFK, à attendre un taxi, avec sa valise de cabine posée à-côté de lui. Autour, les gens allaient et venaient, des solitaires, des couples, des familles, des touristes, des hommes d'affaires, flânant, courant, les valises couvertes d'étiquettes, simples figures passant son champ de vision, tels les fantômes d'une vie dont Sherlock ne voulait pas entendre parler. Les gens d'ici lui paraissaient d'une telle stupidité qu'il se força à museler son don d'observation pour ne pas avoir à subir davantage leur médiocrité. L'air sentait la chaleur, l'essence et l'huile de friture.
Finalement, ce fut son tour dans la file d'attente et il monta promptement dans le taxi, donnant l'adresse au chauffeur obèse.
.
Alors qu'ils quittaient Belt Parkway et s'engageaient sur North Conduit Avenue, Sherlock écarta sa veste et tira le portable de sa poche intérieure, ouvrant le SMS qui l'avait catapulté dans cette partie du monde. Quelques lignes à peine. Il avait été surpris par l'identité de son expéditeur, plutôt inattendue. Puis il avait ouvert le message, qui contenait une adresse, suivi d'un mot. Il avait ensuite fait sa valise et pris le premier vol pour New York, laissant derrière lui un John perplexe, un Lestrade furieux et une enquête ennuyeuse sur un meurtre apparent. Ce n'était pas un meurtre, il avait laissé ses déductions sur son bureau.
Le taxi quitta finalement North Conduit Boulevard pour Atlantic Avenue, avec ses rangées d'immeubles bas, de restaurants et de magasins, au style si éloigné de l'opulence traditionnelle qui était celle des quartiers du centre. Sherlock se renfrogna dans la banquette à cette pensée. Le luxe ne l'impressionnait plus, il avait lui-même grandi loin de la pauvreté, mais il ne pouvait souffrir l'indécence typiquement américaine à afficher autant d'aisance et de pouvoir. Dieu merci, il évitait Manhattan.
Après un moment, la large avenue rétrécit, roulant entre des bâtiments plus chaleureux et plus humains. Quelques immeubles commençaient à accuser un peu plus de hauteur. Enfin, la voix du GPS rendue nasillarde par des années d'usage et de poussière demanda de tourner à gauche et la voiture obtempéra, s'avançant dans une rue bordée d'arbres qui fleurait bon le quartier résidentiel, avec de belles maisons avec de beaux porches. Le taxi roula encore quelques minutes, puis ralentit et s'arrêta.
_ Vous y voilà, m'sieur, mâcha le chauffeur, laissant entrevoir un vieux chewing-gum à la menthe et trois caries.
Sherlock vérifia l'adresse dans le message, hocha la tête et donna un billet. Il y eut une confusion au sujet des 10% de pourboire, Sherlock eut à rappeler au chauffeur les compensations en nature qu'il acceptait fréquemment à en juger par l'état du siège passager, et le réduisit au silence en listant son souffle au cœur, son goût pour les petites culottes et la bagarre dans laquelle il avait été impliqué une semaine auparavant, surement une dette de jeu s'il devait en croire le journal de courses oublié sous le siège conducteur. Puis, sans un mot, laissant derrière lui un chauffeur coi et sans pourboire, il sortit du taxi et récupéra sa valise dans le coffre.
.
La maison devant lui était très jolie, en pierre brune italienne. Trois étages avec deux fenêtres chacun. Il monta les marches du porche en pierre blanche et à rampe de fer forgé, puis sonna à la porte. Il attendit quelques secondes et entendit la serrure cliqueter. La porte s'ouvrit sur une jeune et rousse domestique au petit tablier blanc, qui lui sourit gentiment.
_ Oui, monsieur ? S'enquit-elle. Puis-je vous renseigner ?
_ Sherlock Holmes, répondit-il, votre maitresse attend ma visite.
Il ignorait s'il était d'usage de présenter une carte de visite, mais il n'en eut pas besoin. La domestique s'écarta de la porte et le fit entrer avant de l'introduire dans un petit salon et de lui désigner le sofa.
_ Veuillez attendre ici, je vous prie, dit-elle, je vais dire à madame que vous êtes là.
Sherlock posa sa valise sur le sol en marbre alors que la domestique s'éloignait dans la maison, puis retira son trench et son écharpe. Il s'assit, regardant autour de lui. L'intérieur était à l'image de la propriétaire. Vieux rose, blanc doux, avec de petites touches de brun clair. Elégant et confortable. Cela lui rappelait Londres. Les aiguilles d'une horloge sur la cheminée trottaient doucement. Tout semblait si paisible, c'était reposant. Il commença à sentir le poids de son voyage le quitter.
Sherlock n'eut pas à attendre trop longtemps. Une minute plus tard, des talons claquèrent dans les escaliers et s'approchèrent, une silhouette apparut dans l'encadrement de la porte et Sherlock put enfin voir la femme qu'il pensait ne plus jamais revoir.
Irène Adler.
.
.
.
