Peace, Norah Jones
Il avait d'abord pensé que c'était un jour vert, puis un jour bleu, et il semblerait que ce soit, en fait, un jour noir.
Dans son corps une douleur fantôme et le cri silencieux de la solitude, dans son appartement un vide, et dans la ville une chaleur étouffante.
Dans quelques heures il devrait sortir aller à son travail, c'est-à-dire voir des gens.
Il pourrait faire des pancakes, ça serait une bonne occupation mais il devrait aller acheter de la farine, c'est-à-dire voir des gens.
Il pourrait faire un tour dehors, mais ça voudrait dire tout d'abord voir des gens, et ensuite trainer son corps lourd. L'idée même d'enchainer des pas lui semblait épuisante.
Hunk sentit la vibration dans son portable dans le canapé et poussa un grognement. Il étendit la main pour le pousser le plus loin possible, mais le canapé vibra encore au nouveau message.
Il se leva donc, prit son portable et l'entassa sous une pile de coussin à l'autre bout de la pièce avec des mouvements énergétiques.
Il ne prit pas la peine de regarder qui lui avait envoyé ces messages, il ne voulait pas le savoir, il voulait vivre dans le déni que des gens vivent, en dehors de ces murs, des gens avec tout un tas d'émotions, dont la joie, ou des gens qui vivaient des choses bien pires que lui, et qui lui feraient sentir qu'il n'avait aucun droit de se sentir aussi misérable, alors qu'il avait tout ce qui lui fallait, une famille, des amis, un travail.
Des gens qui le regardaient de travers quand il disait préférer les activités calmes en nombre réduit voir solitaires aux grosses fêtes bruyantes, des gens qui le faisaient se sentir comme un étranger, comme à part et tout le temps à côté de ce qu'il devrait être à leurs yeux.
Hunk se laissa retomber sur le canapé, la tête enfoncée contre le dossier. Il savait que le jour noir passerait, que déjà il se sentirait mieux le lendemain, comme pour tous les autres jours noirs jusqu'à présent. Mais ça ne l'empêchait pas de souhaiter que le monde explose, pour que ses responsabilités explosent aussi avec.
Après avoir pris quelques respirations profondes, Hunk rapprocha son ordinateur de lui et mit sa playlist confort.
Alors que son portable était le rappel de sa vie sociale et de ses obligations, son ordinateur était son lien vers un monde où être socialement acceptable n'avait pas d'importance.
Sa chanson préférée s'échappait des hauts parleurs de son ordinateur et semblait déjà avoir un effet sur lui. Il sentait la lourdeur dans ses os diminuer petit à petit, ses pensées s'éclaircir.
Tout irait bien. Oui, tout irait bien.
Peace is for everyone …
