Ouais, me revoilà de retour après un certain moment sans rien écrire. Hier soir a eu lieu la 101 nuit de Forum francophone ! Pour l'occasion, j'ai décidé de faire une fic à chapitre. Aussi, je ne pourrais publier qu'une fois par mois puisque je dois attendre les thèmes et je ne sais pas combien de temps cela va durer.
Bref. J'espère que cela va vous plaire et n'hésitez pas à partager votre avis. Le premier thème, celui de 21h, était "Papillon".
Je tiens de plus à préciser qu'il y'a évocation d'une relation homosexuelle donc merci ne pas être surpris.
Disclaimer : Rien ne m'appartient, tout est à Oda.
Law sentait ses yeux le brûler sous la fatigue. Tout son corps hurlait sa douleur, de la plus infime de ses cellules jusqu'au moindre de ses tissus. Mais ce n'était pas pour autant qu'il s'arrêtait de travailler. Sa main tatouée continuait à dessiner, ignorant l'heure tardive et noircissant une feuille déjà bien emplie.
Son atelier ressemblait plus à un immense capharnaüm qu'à celui d'un inventeur. La poussière avait fini par recouvrir les meubles, comme les cartons qui contenaient des plans et des bricoles. Cela faisait plusieurs semaines que le brun avait abandonné l'idée de nettoyer quoique ce soit. Il préférait passer son temps à noircir ses pages, comme si soudainement son coeur allait se vider sur ces dernières. Mais il aurait beau dessiner, au fond, la douleur resterait indélébile.
Le trentenaire ne se retourna pas tandis que la porte s'ouvrait dans son dos. Pas besoin de mots pour savoir qui se tenait derrière lui, le bruit de ses pas lui suffisait amplement. C'était un des seuls sons qu'il avait entendu depuis des mois, s'éloignant de la société pour travailler à la lumière jaunâtre de sa lampe.
Jewelry Bonney se positionna brusquement face à lui, posant avec autorité ses mains sur son bureau. Elle le fusillait de ses yeux violets, une couleur si intense qu'elle marquait tous ceux qui auraient eu le malheur de les croiser. C'était une nuance comme celle-ci, si profonde, qu'il cherchait désespérément à recréer grâce à ses calculs. Mais comment réussir à reproduire l'éclat de ses yeux quand elle riait, comment retransmettre leur colère lorsqu'elle jurait ?
Sa plus vieille amie semblait être à bout de patience, son visage étant déformé par la colère et la frustration. Mais Law ne lui accorda pas un regard de plus, préférant retourner à ses chiffres et ses calculs. Malheureusement pour lui, elle en avait décidé autrement, volant son carnet où il retranscrivait toutes ses idées et ses réflexions. Ses sourcils se froncèrent alors qu'il sentait l'agacement envahir son coeur devenu si froid. Une sensation si étrange après tant de temps sans même ressentir un sursaut d'émotion.
- Ça suffit, Law, déclara-t-elle.
Sans lui laisser le temps de protester, elle était déjà partie dans les couloirs. Trafalgar décida de la suivre sans prendre le temps d'y réfléchir, quittant enfin le bureau hors duquel il n'existait plus. La lumière du crépuscule l'aveugla quelques secondes avant qu'il ne reprenne ses esprits. Comme s'il replongeait dans de vieux souvenirs oubliés, le tatoué avait l'impression désagréable de rêver. Perdu, il avait oublié la couleur beige des murs ainsi que celle foncée des lattes du parquet. Il avait oublié la couleur pourpre des rideaux ainsi que celle des meubles. Mais pourtant, toutes ces couleurs lui paraissaient plus fades que dans ses souvenirs.
Le trentenaire ne s'attarda pas plus longtemps sur le décor, poursuivant la rose dans l'immense résidence. Courant à en perdre l'haleine, il ouvrait toutes les portes sur son chemin, cherchant vainement la jeune femme. Il tomba ainsi sur de nombreuses chambres abandonnées ou des pièces seulement remplies de meubles recouverts.
Il la trouva finalement dans le salon, devant la cheminée où un feu brûlait dans l'âtre. Les rideaux étaient entre-ouverts, laissant passer quelques rayons oranges du soleil qui éclairaient les canapés en tissu. Mais l'atmosphère était si glaciale que ni les couleurs ni le feu ne réussissait à la réchauffer.
Lentement, le brun s'approchait d'elle, refusant de comprendre ce qu'elle voulait faire. Pourtant, il ne put se voiler plus longtemps la face lorsque Bonney se tourna vers lui, le visage baigné de larmes. Tendant une main vers elle, ses yeux gris méfiants, il tentait de s'approcher alors qu'elle avait suspendu ses notes au-dessus des flammes.
- Il faut que tu arrêtes, Law ! Tu es entrain de te détruire, cria-t-elle en sanglots.
Mais le plus vieux ne l'écouta guère, essayant de se rapprocher par tous les moyens, obnubilé par l'idée que son travail deviendrait peut-être des cendres. Des cendres faites de carbone, des morceaux de papier brûlé qui n'attendaient qu'une brise pour disparaître au loin. Et pour ne plus jamais revenir.
- J'y suis presque, Bonney…Tu ne peux pas tout gâcher. Tu n'as pas le droit, lui assura-t-il.
Le visage de son amie fut une fois de plus déformé par ses émotions qui prenaient leur envol, comme des oiseaux. Finalement, elle finit par baisser son bras tendu, le faisant soupirer de soulagement. Mais alors qu'il s'approchait pour reprendre son bien, son amie d'enfance tendit le bras pour mettre de la distance entre eux.
- C'est fini, Law. Soit tu t'arrêtes maintenant, soit je pars et je ne reviendrais pas, le menaça-t-elle.
Quelques mois auparavant, le chantage affectif de la jeune femme aurait fonctionné à merveille, son coeur se serait douloureusement serré. Mais aujourd'hui, il ne le sentait même plus battre dans sa poitrine, comme une machine à l'arrêt. Il n'était plus qu'une machine à la peau chaude et au coeur en mille morceau.
- Désolé Bonney. Je ne peux pas arrêter maintenant, s'excusa-t-il en reprenant le carnet.
Dans son dos, il entendait les sanglots de la rose reprendre alors qu'elle s'écroulait par terre. Le tatoué la connaissait comme une soeur. Elle tiendrait sa promesse, elle le laisserait seul dans cette immense demeure pour partir loin d'ici. Quitter cet endroit où chaque chose était lié à un souvenir, où il ne pouvait pas retourner dans sa chambre sans que son coeur ne se déchire. À l'aube, Bonney aurait quitté les lieux. À l'aube, Trafalgar Law serait seul.
Sur une des tables présentes dans l'atelier se trouvait une forme cachée par un draps blanc. La seule chose qu'il avait pris la peine de protéger de la poussière qui l'entourait constamment. Doucement, comme s'il avait peur de réveiller quelqu'un, Law se saisit d'une chaise pour s'asseoir à côté de la table, à un mètre à peine du draps. Avec lenteur, sa main tatouée leva le draps, dévoilant ainsi un visage pâle. C'était sa copie conforme. La même peau claire et tachetée, les cheveux noirs qui ondulaient délicatement ou encore les mêmes lèvres qu'il avait caressé bien trop de fois. Sa main vint s'égarer sur la peau froide, bien loin de sa propre température. Pourtant, il ne cessait de ramener des souvenirs à la surface, toujours plus vifs et intenses, comme s'il venait à peine de les vivre.
Ce n'était pas encore lui. Si le brun soulevait le reste du draps, il apercevrait les mécanismes complexes et les circuits visibles de sa création. Il n'avait pas encore fini de le recouvrir de la peau synthétique, il lui restait encore trop de travail à effectuer au niveau des organes et du fonctionnement interne. Bien trop de choses que le médecin devait fignoler pour que la copie prenne vie.
Malgré le retard qu'il prenait sur ses prévisions, le trentenaire continua de frôler ses joues de ses doigts, heureux de revoir ses traits si fins. Enfin, son coeur semblait reprendre son activité, il sentait un feu recommençait à l'animer. Parce que ses yeux pouvaient se régaler de la vision de Portgas D. Ace endormi. Son cerveau, lui, plus conscient de la folie de son entreprise, ne cessait de lui hurler que ce n'était pas son compagnon. Il ne cessait de lui rappeler en une litanie qu'Ace était mort et que les morts ne revenaient pas à la vie. Mais le coeur de Law était une machine déterminée qui étouffait les supplications de son esprit, comme il avait fait taire Bonney.
Se relevant pour retourner à son bureau, le jeune homme remit le drap à sa place et prit ses notes pour continuer à les étudier. Il lui restait encore des détails à régler, d'autres à prévoir et certains à offrir au hasard. Encore tant de choses à faire pour qu'Ace revienne parmi eux, pour qu'il puisse réentendre son rire si particulier et sentir son odeur brûlée. Law observa ses calculs compliqués.
Pour l'instant, Ace n'était qu'un papillon qui ne prendrait que quelques semaines à s'éteindre. Lorsqu'enfin, il aurait compris ce qu'il lui manquait, il réussirait à capturer l'essence de son amant pour la sceller dans ce corps. Et le papillon éphémère deviendrait une flamme éternelle.
