Le jeune homme était assis, le dos courbé, les mains frêles et délicates reposés sur la table de chêne et la tête baissé. Là, seul et éloigné des regards, il laissa toutes ses peurs l'envahir. C'était un poids qui faisait trembler son cœur, qui se diffusait lentement dans son sang, et qui coulait dans ses veines sous sa peau pale et froide. Il avait froid malgré la chaleur étouffante de la pièce. Ses cheveux blonds et ébouriffés retombaient le long de ses joues qui affichaient un éternel hiver blanc.

La pièce était simplement éclairée par la lumière du jour qui tombait en cascade depuis une fenêtre avant de finir en millions de gouttes dorées. Ces gouttes d'énergie lumineuses baignaient la pièce d'une atmosphère céleste. Elles vibraient pleinement de vie, et autant qu'elles effrayèrent le jeune homme.

Il se sentait trop fragile pour affronter une telle énergie, alors que ce n'était rien d'autre que poussière d'or. Ses yeux gris, froids, glacials, étaient remplis de la même frayeur et évitaient en vain la douce luminosité de la pièce. Il aurait aimé s'enfuir, se cacher dans un coin sombre, se blottir contre le noir et laisser ses peines l'entraîner dans un gouffre qui semblait aussi profond que l'infini.

La tentation lui avait pris la main, et il s'apprêtait à la suivre quand la porte s'ouvrit.

-Malefoy !

Le nom du jeune homme résonna à travers la pièce. Le jeune homme, Draco Malfoy se retourna doucement pour voir son interlocuteur. Une jeune femme se tenait au seuil de la porte, un air surpris collé à son adorable visage. Elle avait l'air d'une poupée de porcelaine.

-Granger, dit Draco d'un ton calme.

-Weasley. Hermione Weasley, corrigea la jeune femme.

-Nom de sang-de-bourbe, nom de sang de traître… cela m'importe peu de savoir lequel tu portes.

Il soutint son regard. Son aspect de pierre était réapparut aussi vite qu'il avait précédemment fondu. Hermione ne lâcha pas non plus son regard. Elle croisa doucement les bras et s'appuya contre le mur.

-Tu ne changera donc jamais, dit elle sur un ton sombrement amusé.

Draco sourit.

-Il semble que toi non plus, répondit-il. Il parait que tu milites encore pour les elfes de maisons. Je ne sais pas si tu le sais, mais ils n'apprécient pas beaucoup.

- Cela fait plusieurs mois que tu as disparut. Que fais tu ici ? demanda Hermione sèchement.

-Si je suis venu ici, c'est parce que j'ai besoin de quelque chose d'important.

-À court de café ?

Adorable ton sarcastique, pensa Draco. Il ne sourcilla pas. Pas de temps à perdre avec des enfantillages, pas le temps de se lancer des remarques qui feraient frémir et raviraient une certaine journaliste. Seulement une idée, un espoir qu'il ne pouvait gâcher.

-Non… j'ai besoin de ton aide.

Un nouveau beau tableau de surprise orna le visage d'Hermione.

-Et…et pourquoi donc ? balbutia-t-elle.

Drago laissa échapper un soupir et se demanda comment commencer son histoire. Il avait été tellement occupé à se faire du souci qu'il n'y avait pas pensé avant. Drago prit une grande inspiration. Il sentit l'air s'engouffrer dans ses poumons et le chatouiller. Il expira et commença.

-Il faut d'abord que tu me promettes de ne pas répéter ceci à qui que ce soit.

Hermione fronça les sourcils. Depuis le grand combat, elle n'avait jamais vu Drago aussi accablé. Elle se rappelait de ce garçon au visage fatigué, torturé, effrayé, dans un certain manoir, un certain après-midi et certains événements. Ses sombres souvenir l'enveloppaient et ne la quitterait pas et qui de toute évidence ceux de Drago ne l'avaient pas non plus quitté. Ils étaient tous passés par d'horribles choses.

Certes, il se tenait droit et gardait une posture intimidante- comme son père- mais quelque chose c'était clairement brisé en lui. Et quelque part elle se sentit émut d'être en présence de ce jeune homme qui partageait les mêmes pensées et qui leur avaient causé alors bien des peines. Ses mots ne présageaient rien de bon. Hermione entra dans son bureau et ferma la porte.

-Vas-y, murmura-t-elle.

Un léger soulagement apparut dans les yeux de Draco.

-Il s'agit de mon fils, dit il.

-Je ne savais pas que tu avais un fils, coupa Hermione.

-Oui…c'est long à expliquer, dit il.

Drago se mordit légèrement la lèvre inférieure et baissa les yeux. Puis, il se lança.

-Potter t'as certainement raconté ce qui c'est passé cette nuit là… vous étiez tous là… la nuit ou Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom est tombé. Quand tu-sais-qui a lancé le sort contre Potter dans la forêt, il a été cru que Potter avait finalement été tué. C'est à ma mère qu'il a demandé de vérifier la mort de Potter et évidemment celle-ci a mentit pour me protéger. Ce n'est pas tout. Ma mère a tout fait pour que Rogue m'aide à assassiner Dumbledore. Nous avons participé sans le savoir à la chute de Tu-sais-qui. Nous avons permis que le plan de Dumbledore fonctionne. J'ai laissé Potter me prendre ma baguette magique de façon à ce que la baguette de Dumbledore change de main et choisisse Potter. Si ma mère et moi ne sommes pas à Azkaban aujourd'hui, c'est à cause de tout ça. Nous sommes des…

Draco s'arrêta et ferma les yeux. Il déglutit et finit :

-Traîtres.

Il sentit Hermione se redresser sur sa chaise. Il continua son récit et se détesta pour ce qu'il allait dire.

- Des traîtres et rien d'autres. Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom n'a jamais rien compris à… l'amour. C'est pour cela qu'il n'a jamais rien remarqué que ma mère faisait tellement de choses pour moi… au point de le trahir. Tu sais que tous les Mangemorts n'ont pas été retrouvés. Ceux avec qui nous avions précédemment été alliés sont maintenant nos pires ennemies. Ils nous haïssent… Ils nous maudissent. Tout est de notre faute.

Il s'arrêta, se pinça la lèvre, ouvrit les yeux, lança un regard furtif à Hermione. Celle-ci pencha légèrement la tête de coté, un sentiment de compréhension, de tristesse et d'une certaine exaspération bataillant dans ses yeux.

-Et tu regrettes tout cela ? demanda-t-elle doucement.

Un sourire triste s'accrocha aux lèvres de Draco. Oh oui, il avait d'innombrables regrets. Mais la seule chose qu'il regrettait sincèrement était d'avoir agit ainsi il y a plusieurs années. Son ton était glacial quand il répondit.

-Ça… ça ne te concerne en aucun cas.

Hermione compris sans vraiment comprendre. Il y avait simplement des choses trop dures à avouer et elle le savait.

-Oui, je comprends très bien. Cela vous a effectivement évité Azkaban. Je comprends aussi que ce n'était pas de plein gré. Mais je ne vois toujours pas le rapport avec un fils dont personne ne connaît l'existence, dit Hermione après un long moment de silence.

-La suite devrait tout expliquer. Il y a deux ans, j'ai épousé Astoria Greengrass. Nous nous sommes cachés après notre mariage. Je ne voulais pas qu'un Mangemort réapparaisse et fasse du mal à Astoria. Cependant je n'ai pas rompu la communication avec les gens qui me sont proches- même si je dois dire qu'ils se sont retrouvés en nombre réduit après la chute de celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom – et ceux avec qui je travaille. J'ai réellement tout dissimulé quand j'ai appris que je serais bientôt père. La sécurité d'Astoria compte beaucoup pour moi et je dois dire que je craignais aussi pour la mienne, mais celle de mon fils surpasse tout… ça, c'est quelque chose que ma mère m'a apprit.

Draco sentit sa gorge se nouer. Les larmes lui montaient aux yeux. Dans un effort désespéré pour ne pas montrer à quel point il était vulnérable, il continua son histoire. Mais la voix qu'il prit le trahit – elle était clairement étouffée par les larmes.

-C'est là…je n'ai pas réussit à protéger mon fils. Il n'a qu'un an. Je ne sais pas comment il s'y sont pris, mais ils m'ont retrouvé. Ils ont pris mon fils. Il y a deux jours, ils ont fait intrusion chez moi pendant que je n'étais pas là. Astoria était seule et depuis la naissance de mon fils, elle n'a pas entièrement récupéré. Les Mangemorts l'ont attaqué et ont kidnappés mon fils. Astoria a tout fait pour les en empêcher mais quand je suis arrivé, la pauvre avait à peine réussit à se hisser sur une chaise après leur départ. J'ai essayé de les retrouvé, de savoir qui… mais rien.

Sa voix prit un ton aigue sur la fin et Hermione ne put s'empêcher de le remarquer. Un autre silence s'installa entre eux. Hermione prit quelques secondes à analyser la situation et s'étonna qu'elle n'avait pas encore cédé à la panique. Un « Prouve que tu ne mens pas » lui brûlait avidement les lèvres mais elle s'en ravisa. Son ton, son attitude, sa passion avaient l'air trop réels. Hermione ne savait pas quoi dire et Draco ne savais pas s'il devait continuer ou attendre une réponse. Finalement Hermione décida de briser le silence.

-Je suis désolé pour ton fils et Astoria… mais je ne vois pas comment je pourrais t'être utile.

Presque déconcertant comme réponse. Draco fronça les sourcils. Il s'était attendu à bien plus. Non, il n'avait pas imaginé une réaction exacte, mais tout de même plus qu'un simple commentaire polit. Puis, il décida qu'il ne savait pas vraiment ce qu'il voulait. Elle aurait pu se mettre à hurler, elle aurait pu… lui dire que tout irait bien, que son fils serait retrouvé. Vouloir alerter les autres aurores n'était même plus était un problème et tout gâcher. Il fallait que quelqu'un fasse quelque chose. Draco prit une respiration profonde et posa le poing sur la table.

- Pour une ancienne mademoiselle-je-sais-tout, faut vraiment tout t'expliquer, hein ?

- Ce n'est pas en me parlant ainsi que tu pourras me convaincre de t'aider, répondit sèchement Hermione.

Draco se racla la gorge et continua d'un ton déterminé.

- Si je suis venu te parler de cela, c'est parce que tu travailles au département des aurors. Vous recherchez encore les Mangemorts manquant et si je ne me trompe pas, vous avez toutes les dernières informations les concernant. J'ai besoin de ses informations si je veux retrouver mon fils au plus vite.

Hermione considéra la proposition quelques secondes. C'était dangereux et peu raisonnable.

-En effet, je pense… que tu as aussi plusieurs informations… qui pourraient nous être… utile, dit Hermione d'un ton hésitant... Cependant, je pense aussi que tu devrais informer tout le département des aurores, ou du moins, Harry. Il dirige le département, donc, il devrait être plus…efficace pour ce … problème.

- Je ne sais pas. Je préfère ne rien ébruiter pour le moment, répondit Draco. Les Mangemorts sont certainement aussi à ma recherche.

-Nous savons faire preuve de discrétion, argumenta Hermione.

Draco s'accouda au bureau d'Hermione et fronça les sourcils. Alerter Potter ? Il lui devait encore beaucoup. Beaucoup trop même. Non, Potter n'était la solution. Alerter les autres aurores ne l'était pas non plus. Granger ou s'abaisser à demander de l'aide à une sang-de-bourbe était encore la seule chose que son ego lui permettait.

Comprenant que Draco n'avait pas l'intention de changer d'avis, Hermione laissa échapper un soupir et continua.

- Tu te rends compte que tu me demandes de te dévoiler des informations confidentielles et qui pourraient nuire au monde magique si tu décidais de tout révéler.

Draco hocha la tête.

- Tu n'as rien pour prouver l'existence de ton fils ou le fait pour vous ayez été attaqué.

Draco hocha la tête à nouveau.

- Et malgré tout cela tu penses toujours que je vais accepter de t'aider ? demanda Hermione, les yeux écarquillés.

-Tu as des enfants toi aussi, répondit simplement Draco.

Hermione s'enfuit le visage dans ses cheveux et laissa échapper un grognement. Pourquoi ? Oh, grand pourquoi avait Draco mêlé ses enfants à cette histoire. Elle aurait fait tout pour Hugo et Rose. Après quelques secondes d'hésitation, elle releva la tête et répondit.

- Malfoy, je suis vraiment désolé, mais je ne peux pas.

- Granger…

-Weasley, coupa Hermione.

-Il faut vraiment que tu m'aides.

Hermione secoua la tête. Elle souhaitait sincèrement que Draco retrouve son fils, mais il y avait trop en jeu.

-Alerte tout le département ou rien, proposa Hermione.

Draco sentit l'espoir lui glisser des doigts.

Autre silence.

Il était clair que Draco ne cèderait pas. Hermione se pencha vers lui et pesa ses mots avant de continuer.

- La plupart des aurors sont certainement déjà rentrés chez eux maintenant et Harry a repéré des évènements magiques douteux dans un petit village au nord. Il n'est pas là aujourd'hui. Tu as toujours jusqu'à demain pour réfléchir.

Et après je raconte tout, pensa Hermione. C'était encore le seul moyen de l'aider, même si elle avait dans l'idée qu'il n'apprécierait pas.

Draco ne dit toujours rien. Elle n'avait pas tord. Il le savait. Mais il ne pouvait toujours pas. Après quelques secondes, il décida qu'il essayerait de convaincre Hermione à nouveau le lendemain.

-Bien…alors il ne me reste plus qu'à me trouver un endroit pour la nuit, dit Draco en se levant.

Retourner chez lui était encore trop dangereux.

-Et Astoria ? demanda Hermione surpris.

-St. Mangouste… aux soins intensifs. Ils ne la reconnaîtront pas pour le moment.

Hermione sourit d'un air désolé. Après un rapide coup d'œil à sa montre, elle vit qu'il était tard. Hugo et Rose l'attendaient à la maison. Attrapant quelques documents sur la table, Hermione se leva aussi et se dirigea vers la porte.

-Bien… je dois rentrer chez moi. Ron n'est pas là et Hugo va encore faire une crise si je ne…

- Je ne vois pas vraiment le rapport avec moi, Granger.

-Weasley.

-Peu importe.

- Cela compte beaucoup pour moi.

- Peu importe.

Hermione se tient au seuil de la porte et fit signe à Draco se s'en aller en agitant les documents qu'elle tenait. Celui-ci glissa les mains dans les poches de son pantalon et jeta un coup d'œil dehors avant de se lancer dans les couloirs.

-Je reviendrais demain, dit il.

-Que la nuit te porte conseil, dit Hermione.

Elle sourit. Draco n'y répondit pas. En entendant des pas dans le couloir, Draco se tourna pour faire face à Hermione et éviter de se faire remarquer.

- Encore ici Weasley ? dit une voix de femme fluette en passant à coté d'eux.

Hermione sourit à une dame portant une incroyable robe orange et répondit vaguement qu'elle avait perdu toute notion du temps. Ses dents étaient parfaitement alignées à présent. Les souvenirs d'un sort qui avait mal tourné revinrent à Draco et lui laissa un goût inconfortable dans la bouche. Il n'était pas fier de l'attitude qu'il avait adoptée quelques années auparavant. Il fronça les sourcils et observa les documents qu'Hermione tenait dans les mains.

- Bonne petite. Toujours à travailler dur !

La dame en orange s'éloigna et Hermione rapporta son attention à Draco.

- Weasley n'est pas là, n'est ce pas ? demanda Draco.

- Non, il est trop occupé avec la boutique de farce et attrape, répondit Hermione en se dirigea vers le bout du couloir.

-Granger…

-Weasley, lança Hermione en s'éloignant.

-Tu pourrais m'accueillir pour la nuit alors?

-Quuooooaaahhh ?

Ne lâchant pas les documents des yeux, Draco réfléchit rapidement avant de répondre.

-Weasley n'est pas là et j'ai absolument besoin d'un endroit sûr pour cette nuit.

-Et tes parents ?

-Ils chercheront chez eux en premier lieu.

-Je ne veux pas mettre mes enfants en danger, répondit froidement Hermione.

-Ils ne penseront jamais à chercher chez toi.

Hermione se retourna et marcha vers l'ascenseur, laissant Draco derrière elle. Il était clair que Ron n'apprécierait pas. Elle se rappela ce qu'il avait dit la dernière fois qu'ils essayaient de sauver Draco. « Harry je jure de te tuer si nous mourrons pour eux ! »

Oh, il n'aimerait pas du tout, pensa Hermione. Après tout, depuis la chute de Voldemort, les Mangemorts n'étaient plus aussi puissant. Draco pourrait facilement se défendre.

Hermione s'arrêta, secoua la tête et essaya de restreindre un sourire moqueur. Non, Draco ne pourrait certainement pas se défendre. Elle savait parfaitement que Draco essayait de paraître plus doué qu'il ne l'était vraiment.

Peut-être qu'elle devrait l'accueillir. Elle se mordit le pouce, sachant qu'elle regretterait ce qu'elle allait faire. La capacité d'Harry à s'attirer les ennuis était définitivement très contagieuse.

-Je sens que Ron va me détester, murmura-t-elle en se retournant.

Draco marchait déjà dans l'autre direction, les épaules tombantes.

-Hé, Malfoy ! Pour aller chez moi, c'est par ici.

Les lèvres de Draco s'étirèrent en un sourire. Il pourrait commencer ses recherches dès ce soir.