Note de l'auteure : Hello ! Cette histoire va être un peu particulière, car il s'agit d'un cross-over entre le manga Black Butler, de Yana Toboso, et Les Malheurs de Sophie, de la Comtesse de Ségur, où plus exactement la trilogie de Fleurville (Les Malheurs de Sophie, Les Petites Filles Modèles, Les Vacances).

Par conséquent, il y aura des personnages de ces deux oeuvres. Je re-présente bien sûr chaque personnage au cours de l'histoire.

Pour Black Butler, je me base principalement sur le manga, mais j'inclurais tout de même certains éléments de l'anime si je trouve cela intéressant. Ma fanfiction se déroule juste après l'arc du Collège Weston.

Pour la trilogie de Fleurville, je me base principalement sur les romans de la Comtesse de Ségur. Ainsi, par exemple, les personnages ne ressemblent pas forcément à leur version dans le dessin animé Les Malheurs de Sophie. Bon, je dois tout de même avouer que pour l'apparence des personnages, j'ai un peu extrapolé, pour plusieurs raisons. Déjà, la Comtesse de Ségur ne décrit pas beaucoup ses personnages, donc pour certains (notamment les adultes), c'est dur de trouver une description. Ensuite, si je me souvenais qu'un personnage était décrit dans les livres, j'essayais de chercher le passage en question, mais si je ne m'en souvenais pas, alors je décrivais le personnage comme je le sentais. Enfin, ma fanfiction se passe quelques années après Les Vacances, le dernier livre de la trilogie, donc les enfants ont un peu grandi. Ce n'est pas donc pas grave s'ils ne ressemblent pas exactement à la description que la Comtesse de Ségur fait d'eux dans ses livres.

Un autre point important à souligner avant de commencer, c'est l'aspect temporel. La trilogie de Fleurville se déroule dans les années 1850 environ, tandis que Black Butler se déroule aux alentours de 1890. Mais OSEF ! C'est un cross-over, pas besoin que ça soit logique à ce point là XD.

Je n'ai plus l'habitude d'écrire de fanfictions en français, d'habitude j'écris en anglais. Aussi, si vous trouvez quelques fautes d'orthographe, n'hésitez pas à m'en faire part ^^.

Ce premier chapitre sert d'introduction pour les personnages de Black Butler. Les personnages de la trilogie de Fleurville interviendront dans le prochain chapitre. Enjoy !


La journée d'un majordome commence tôt. Le soir, il termine son travail après tout le monde, et le matin, c'est le premier qui commence à travailler. Telle est la mission du majordome, qui gère toute l'organisation du manoir.

Sebastian, le majordome démon du manoir Phantomhive, s'adonnait à cette tâche avec application. Chaque jour, il donnait ses instructions aux employés du manoir, le cuisinier Bardroy, la servante May Linn et le jardinier Finnian. Il s'efforçait de leur donner des instructions claires et précises, car les domestiques du manoir Phantomhive, bien qu'à l'enthousiasme débordant, n'étaient pas très efficaces. Avant d'aller réparer leurs bêtises, Sebastian avait le temps de préparer le thé et le petit déjeuner de son maître.

Il avait maintenant l'habitude de préparer le petit déjeuner tous les jours, mais il ne pouvait réprimer la pensée que tout irait bien plus vite s'il n'était pas obligé de s'y prendre à la manière des humains. Il pouvait faire apparaître un véritable festin d'un simple claquement de doigts, mais malgré cela il devait cuisiner lui-même les pâtisseries qu'il servait au jeune Comte. Il avait également dû apprendre à préparer un thé parfait, ce qui s'avéra plus difficile que prévu, étant donné les goûts de luxe des anglais en la matière. Mais c'était un ordre du maître, il ne pouvait que s'y plier.

Un grand fracas retentit quelque part dans le manoir. C'était sans doute May Linn qui venait encore de faire tomber de la vaisselle. Sebastian poussa un soupir. Malgré ses efforts pour rendre utile les autres domestiques, il devait finalement toujours tout faire lui-même. La vaisselle attendrait, décida-t-il, car il devait maintenant aller réveiller son maître. Il plaça le service à thé et les pâtisseries sur un chariot et se dirigea vers la chambre du Comte.

La chambre du jeune maître était encore plongée dans la pénombre. Sebastian déposa le chariot près du lit et alla ouvrir les épais rideaux de velours. La lumière révéla une pièce richement décorée, comme il se devait pour un membre de la prestigieuse famille Phantomhive. Le Comte gémit dans son sommeil, dérangé par la luminosité soudaine, et se tourna dans l'autre sens. Sebastian esquissa un sourire. Son maître, le Comte Ciel Phantomhive, n'était encore qu'un enfant.

"Il est l'heure de vous lever, Monsieur," dit Sebastian, en versant du thé dans la tasse en porcelaine de Wedgwood. "Ce matin, je vous ai préparé des rognons grillés à la diable et une salade d'épinards aux fraises. Comme accompagnement, il y a des scones et des muffins. Que désirez-vous ?"

"Des scones…" répondit Ciel d'une voix fatiguée. Il s'étira en baillant. "Ce parfum, c'est du Darjeeling ?"

"En effet Monsieur. La seconde récolte de cette année est d'une rare qualité."

Ciel bu une gorgée du thé noir et entama son petit déjeuner pendant que Sebastian préparait ses vêtements. Tout était délicieux, comme d'habitude. Sebastian avait de nombreux talents, et Ciel doutait que la Reine elle-même ait un aussi bon cuisinier. Mais c'était la moindre des choses pour le majordome de la famille Phantomhive, comme Sebastian se plaisait à le dire.

Après son petit-déjeuner, Ciel sortit du lit et Sebastian l'habilla. Le Comte était un jeune garçon de 13 ans, plutôt fluet et petit pour son âge. Il avait les cheveux gris foncé, aux reflets bleutés, encadrant gracieusement son visage. Il avait encore le visage rond et les traits fins et délicats de l'enfance, mais son expression laissait paraître une profonde tristesse. Malgré cela, il était d'une grande beauté, et ressemblait à s'y méprendre à son défunt père.

Son majordome Sebastian Michaelis, quant à lui, était grand et séduisant. Ses cheveux noirs, ses yeux rouge carmin et sa peau pâle lui donnait un air mystérieux. Son caractère calme et poli, du moins en façade, son apparence soignée et son dévouement sans faille pour son maître en faisait un majordome parfait.

"Qu'y a-t-il au programme aujourd'hui ?" demanda Ciel pendant que Sebastian lui boutonnait sa chemise. En tant que Comte, Ciel portait des vêtements seyant à son rang. Par-dessus sa chemise, il portait généralement un gilet, de soie ou de cachemire. Malgré sa volonté constante de ne pas être traité comme un enfant, il portait des culottes courtes, confectionnées dans des tissus de grande qualité par la célèbre couturière Nina Hopkins. Ses jambes étaient vêtues de bas de chausse, tenus par des jarretières, ainsi que de souliers à talons ou de bottes, fabriquées sur mesure. Enfin, une redingote venait bien souvent compléter sa tenue, ainsi qu'un jabot ou un nœud autour de son cou.

"Ce matin, vous aurez une leçon de français avec le professeur Hugues," répondit Sebastian. "Ensuite, après le déjeuner, vous recevrez le responsable de votre usine de Londres."

"Si Lizzy ne s'en mêle pas…" soupira-t-il.

Malgré son jeune âge, Ciel était à la tête de l'entreprise familiale, la Société Funtom. Grâce à d'habiles manœuvres commerciales, il en avait fait une des premières entreprises du pays et un leader mondial dans le domaine des jouets et confiseries. La rencontre de cette après-midi devait concerner la production d'une nouvelle gamme de produit. Pourtant, Ciel avait le sentiment que cette rencontre allait être compromise. Sa cousine et fiancée, la Marquise Elizabeth Midford, était actuellement en séjour au manoir, et Ciel doutait qu'elle puisse passer la journée à l'attendre sagement.

"Vous devriez passer plus de temps avec votre fiancée," dit Sebastian avec un sourire en coin. "Je m'étonne que vous ne recherchiez pas la compagnie d'une femme, après avoir passé autant de temps dans une école pour garçons."

Ciel lui lança un regard noir. Il n'avait aucune envie de passer l'après-midi à danser ou à se promener dans les jardins. En tant que chef de la famille Phantomhive, il était très occupé, cela n'avait rien à voir avec Lizzy ou avec son récent séjour au Collège Weston.

"Elle n'aura qu'à jouer avec May Linn et Finny," répondit-il sèchement.

Pour finir, Sebastian noua autour de la tête de Ciel un cache-œil, dissimulant ainsi son œil droit, qui portait la marque du contrat liant le démon et le jeune noble. Sebastian arborait une marque similaire sur le dos de sa main gauche, qu'il cachait en portant à longueur de journée des gants blancs, parfaitement adaptés à son rôle de majordome. Il était évident que personne à part eux deux ne connaissait l'existence de ce pacte.


La matinée se déroula sans encombre. Pendant que Sebastian réparait les bêtises commises par les autres domestiques, Ciel étudiait le français avec le professeur Hugues, spécialiste de l'éducation royale. Lizzy prenait son mal en patience et attendait le déjeuner en lisant un livre, en compagnie de sa servante Paula.

Quand l'heure du déjeuner sonna enfin, Ciel alla retrouver Lizzy.

Lizzy était une jeune lady de 14 ans, promise au Comte Phantomhive depuis leurs naissances. Elle était la fille du Marquis Alexis Leon Midford, chef de l'ordre des chevaliers britanniques, et de la Marquise Frances Midford, la tante de Ciel. Lizzy avait de longs cheveux blonds, coiffés en deux grosses couettes, ondulant de chaque côté de sa tête. Une grande mèche se terminant par une bouclette tombait sur le côté droit de son visage. Elle avait de grands yeux émeraude, et, comme Ciel, son visage conservait encore la rondeur et la finesse d'un visage d'enfant. Elle aimait les choses mignonnes, et se donnait beaucoup de mal pour être jolie pour Ciel. Elle était notamment complexée par sa taille, dépassant légèrement celle de Ciel. Par conséquent, elle s'interdisait le port de chaussures à talons. Elle portait en revanche toujours de magnifiques robes, et sa tenue était généralement agrémentée de nœuds, de froufrous, ou d'accessoires mignons.

Ciel et Lizzy s'installèrent de part et d'autre de l'immense table de la salle à manger, sur laquelle était déjà installé un luxueux service de vaisselle en faïence fine. Sebastian et May Linn apportèrent les plats, et les jeunes nobles commencèrent leur repas.

"Dis Ciel, cette après-midi j'aimerais aller me promener dans la forêt, autour du manoir," annonça Lizzy avec un grand sourire, tout en coupant un morceau de faisan dans son assiette.

"D'accord," répondit Ciel. "Je demanderai à Finny de te montrer les endroits les plus jolis."

"Mais c'est avec toi que je veux y aller !" rétorqua-t-elle, déçue. "Quand je suis arrivée hier soir, tu m'avais promis qu'on passerait du temps ensemble…"

"J'ai du travail Lizzy, cette après-midi je dois voir le responsable de mon usine de Londres et…"

"Tu peux bien le voir un autre jour," le coupa-t-elle. "C'est le premier jour des vacances, amusons-nous ensemble !"

Ciel soupira. Contrairement à Lizzy, il n'était jamais en vacances. Avant qu'il ne puisse répondre, on frappa à la porte.

"Qui peut bien nous déranger pendant le déjeuner ?" demanda Lizzy, tournant un regard interrogatif vers la porte. Ciel paraissait aussi surpris, et demanda à Sebastian d'aller ouvrir.

Snake entra dans la pièce, portant un serpent autour du cou. Le jeune homme à la peau de serpent était un ancien membre du cirque Noah, que Ciel avait récemment engagé comme valet.

"Smile, tu as de la visite, dit Oscar," dit-il, parlant au nom de son reptile. Snake et ses serpents appelaient toujours le Comte par le surnom qu'il portait lors de son infiltration au sein du cirque Noah, "Smile".

"De la visite à cette heure-ci ?" s'étonna Ciel, contrarié. "Qui est-ce ?"

"Je me permets d'entrer !" annonça une voix dans le couloir.

Un élégant jeune homme aux cheveux blancs mi-longs entra dans la pièce. Il portait un uniforme blanc richement décoré et une rapière au côté droit. A sa veste était accrochée une broche représentant la Reine Victoria, ne laissant aucun doute quant à son identité.

"Comte Grey !" s'exclama Ciel, reconnaissant son invité surprise. "Que vient faire ici le majordome de la Reine ?"

"Voyons, n'est-ce pas évident, Comte ? J'ai une lettre pour vous," répondit-il avec un sourire insolent. Il tira une enveloppe de la poche intérieure de sa veste, scellée par le cachet de cire de la Reine Victoria.

Ciel et Sebastian échangèrent un regard inquiet. Si la Reine envoyait son majordome lui délivrer une lettre, cela ne pouvait signifier qu'une chose : une mission pour le Chien de Garde de la Reine. Le regard de Ciel se porta sur l'enveloppe, puis sur Lizzy.

"Lizzy, laisse-nous seuls un instant, s'il te plait," dit-il en soupirant.

"Mais… Et notre promenade ?"

"J'ai bien peur qu'il ne faille revoir vos plans pour la journée, Mademoiselle," lui dit Sebastian en s'inclinant et en lui souriant gentiment. "Veuillez vous installer dans le petit salon, je vais demander à Paula de vous apporter votre déjeuner."

"Mais…" répéta Lizzy. Non seulement elle ne pouvait pas passer l'après-midi avec Ciel, mais elle ne pouvait pas non plus rester déjeuner avec lui ? Elle allait protester à nouveau, mais l'air sérieux de Ciel l'en dissuada. Elle se leva et quitta la pièce d'un air dépité.

Une fois Lizzy partie, Charles Grey s'installa nonchalamment à sa place et se servit un verre de vin. Ciel serra les dents, agacé par l'attitude du Comte.

"Excusez-moi de vous déranger en plein déjeuner avec votre fiancée," dit Grey d'un ton sarcastique, "mais le courrier de Sa Majesté n'attend pas."

"Au moins, cette fois-ci vous n'avez pas cassé de fenêtre…" soupira Ciel, se rappelant la dernière visite du Comte. Il le suspectait néanmoins d'être venu exprès à l'heure du déjeuner pour jouer les pique-assiettes.

"C'est moins drôle quand Phipps n'est pas là…" répondit-il en haussant les épaules. Il donna la lettre de la Reine à Sebastian puis s'attaqua au morceau de faisan qui se trouvait encore dans l'assiette de Lizzy. Sebastian tendit la lettre à son maître.

Son contenu était on ne peut plus clair. Le Baron Spencer Salford, un officier de liaison entre le secrétariat privé de la Reine et la Royal Navy, avait récemment été destitué de son poste et s'était enfui en France avec des secrets d'Etats. Ce serait une catastrophe s'il les vendait aux français. La Reine Victoria demandait au Comte Phantomhive de partir en France et d'arrêter ce criminel par tous les moyens.

"Partir en France…" murmura Ciel d'un ton ennuyé. Il n'avait aucune envie d'aller en France. Il revenait à peine d'une mission mouvementée au Collège Weston, n'avait-il pas mérité un peu de repos ?

"Cela vous donnera l'occasion de mettre en pratique vos leçons de français, Monsieur," dit Sebastian avec un sourire moqueur. Ciel parlait très bien français, mais Sebastian ne cessait de lui reprocher son accent.

"En quoi cela me concerne-t-il ?" demanda Ciel à Grey, ignorant la remarque de son majordome. Le rôle de la famille Phantomhive, en tant que Chiens de Garde de la Reine, était d'empêcher que les agissements de la pègre et de la société souterraine n'interférent avec le commun des citoyens britanniques. "N'est-ce pas du ressort de l'armée ? Ou même du vôtre, puisque vous faites partie du secrétariat privé de la Reine ?"

"Qu'est-ce que vous croyez, je n'ai pas que cela à faire !" protesta Grey. "C'est un ordre de sa Majesté de toute façon. Et puis… Salford n'est pas un saint. Il a été destitué de son poste car on a découvert qu'il était impliqué dans des affaires occultes. Des messes noires…" Grey baissa la voix, prenant un ton plus mystérieux. "Sa Majesté pense que cette information pourra vous intéresser, Comte. On a retrouvé chez lui des enfants captifs, enfermés au sous-sol, visiblement destinés à servir de sacrifices humains…"

Ciel ne répondit pas. La Reine Victoria avait décidément un sens de l'humour particulier, pensa-t-il. Son expression resta neutre, mais il venait pourtant de changer d'avis : il irait en France et capturerait ce criminel. A côté de lui, Sebastian esquissa un demi-sourire, pâle et froid.

Ciel avait hérité son titre de Comte, ainsi que son rôle de Chien de Garde de la Reine, après la mort de ses parents, quelques années plus tôt. Ses parents avaient été assassinés, et le manoir brûlé. Ciel n'avait pas pu s'enfuir. Il fut capturé et vendu en tant qu'esclave. La marque apposée au fer rouge sur son dos en témoignait. Au cours d'un rituel occulte, Ciel aurait dû être sacrifié, mais c'est alors qu'un démon est apparu et qu'ils formèrent un pacte. Sebastian a pris la forme d'un majordome afin d'aider Ciel à se venger de ses ravisseurs, en échange de son âme une fois que tout serait terminé.

Bien sûr, le Comte Grey ne savait pas tout cela, mais la Reine en savait sans doute plus long sur son Chien de Garde qu'elle ne le laissait paraître.


Une fois le Comte Grey parti, Ciel fit annuler sa rencontre avec le responsable de son usine. Il s'installa dans son bureau et relu la lettre de la Reine. Elle précisait que le Baron Salford avait des origines françaises et que sa famille possédait un vieux château dans la région de Normandie. Selon toute vraisemblance, c'était là qu'il se serait enfuit.

La famille Phantomhive avait des connexions dans le monde entier, qu'il s'agisse de partenaires commerciaux de la Société Funtom ou du réseau de contacts nécessaire à la mission de Chien de Garde de la Reine, que Ciel avait hérité de son père et élargi en y incluant ses propres connaissances, comme par exemple Lau.

Ciel fit appeler Monsieur Tanaka dans son bureau. Le vieux majordome s'inclina devant son jeune maître et resta debout près de Sebastian.

"Je vais devoir me rendre en Normandie pour quelques temps," déclara Ciel. "Il me semble que mon prédécesseur avait passé des accord commerciaux avec le président des chemins de fer français, Monsieur de… de…"

"Monsieur de Réan, Monsieur," l'aida Tanaka.

"C'est cela. Monsieur de Réan habite en Normandie, si mes souvenirs sont bons." Après avoir pris la tête de la famille Phantomhive, il avait dû retenir par cœur le réseau de son père, mais sa mémoire n'était pas parfaite, surtout concernant un étranger qu'il n'avait jamais rencontré. "Pensez-vous qu'il pourrait m'héberger ? Cela serait l'occasion de renouveler le partenariat, pour le compte de la Société Funtom."

Le transport des produits de la Société Funtom vers l'étranger se faisait bien sûr par bateau, mais en utilisant également le réseau ferroviaire sur le continent, Ciel pensait qu'il pourrait sans doute distribuer ses produits de manière plus large. De plus, il sentait que le train était l'avenir du transport de marchandise, et pensait s'y intéresser de près dans les prochains mois. Finalement, l'occasion se présentait d'elle-même.

"Hélas, Monsieur, Monsieur de Réan est décédé il y a quelques années," annonça Tanaka.

"Décédé ? Voilà qui est fâcheux…"

"Si je puis me permettre, Monsieur," reprit le vieux majordome, "Monsieur de Réan a une fille qui a le même âge que vous. Peut-être pourrait-elle vous recevoir ?"

"Hum… Je pourrais aller lui présenter mes condoléances, et contacter le nouveau président des chemins de fer. Sebastian, fais des recherches pour savoir si cette fille habite toujours en Normandie."

"Oui, maître," obéit Sebastian, s'inclinant légèrement, et quitta la pièce.

Cette tâche ne lui prit que quelques heures, grâce à ses talents de démons. Cela ne lui aurait pris que quelques minutes, si la fille de Monsieur de Réan habitait en Angleterre.

Sebastian apprit que la fille de Monsieur de Réan s'appelait Sophie de Réan-Fichini de Fleurville, qu'elle avait 13 ans comme Ciel, et qu'elle vivait toujours en Normandie, chez sa tutrice Madame de Fleurville. Ciel fit donc envoyer une lettre à Madame de Fleurville et à cette Sophie.

L'après-midi était déjà bien avancée. L'heure du thé était déjà passée, mais il restait du temps avant que le dîner ne soit servi. Ciel décida donc qu'il pouvait passer un peu de temps avec Lizzy, et l'invita à se balader dans les jardins. Il était trop tard pour aller dans la forêt, mais Lizzy fut tout de même ravie de pouvoir parler avec Ciel.

Lizzy parla des potins et des agissements de telle ou telle famille, des dernières modes à Londres, et de son excitation à l'approche de l'été et du retour prochain de son frère Edward à la maison, à la fin de l'année scolaire au Collège Weston.

Pendant un moment, Ciel se contenta de faire semblant d'écouter, hochant la tête ou marmonnant un "ah" ou un "oui" aux moments clés. Puis il s'arrêta soudainement, faisant taire le babillage incessant de Lizzy. Elle s'arrêta aussi et le regarda d'un air surpris.

"Lizzy, tu vas devoir retourner chez ma tante plus tôt que prévu," annonça-t-il sans détour.

"Hein ? Mais pourquoi ?" demanda-t-elle, choquée. "C'est parce que je voulais que tu annules ta réunion pour te promener avec moi ? Je ne le ferais plus, je te le promets, alors laisse-moi rester !"

"Ça n'a rien à voir !" se défendit Ciel, devant l'air peiné de sa fiancée.

"Mais alors pourquoi ? J'avais prévu de redécorer tout ton manoir, mais je ne vais même pas pouvoir…"

Ciel remercia intérieurement la Reine de lui avoir épargné cela.

"Je vais devoir partir en France pour quelques temps. On pourra se revoir à mon retour, d'accord ?"

"En… En France !?" s'écria Lizzy, soudainement surexcitée, en saisissant les mains de Ciel. "Oh emmène-moi avec toi ! Je veux voir Paris moi aussi !"

"C'est hors de question ! D'abord je ne vais pas à Paris, mais dans la campagne Normande, et puis j'y vais pour travailler…"

"Pas à Paris ? Quel dommage… Mais je veux venir quand même ! S'il te plait, dis oui ! Je ne t'embêterai pas, et en plus je parle français aussi ! Dis oui dis oui dis oui !"

Ciel soupira. Il ne s'agissait pas d'une visite de courtoisie, il n'aurait pas le temps d'emmener Lizzy faire du tourisme.

"Je dois y aller pour une mission pour la Reine, je n'aurais pas le temps de m'occuper de toi, et ça peut être dangereux," dit-il, même s'il savait qu'il avait déjà perdu. Le sourire de Lizzy s'effaça, remplacé par une expression sérieuse et résolue.

"C'est une raison de plus pour que je vienne. Je l'ai déjà dit, je suis la femme du Chien de Garde de la Reine. Je veux devenir une femme capable de te protéger, Ciel."

Ciel détestait l'admettre, mais il devait la vie à Lizzy et à sa maîtrise de l'escrime. Elle l'avait sauvé, à bord du Campania, en combattant les cadavres réanimés alors qu'il n'avait pas pu la protéger. Mais ce n'était pas une raison pour l'entraîner à nouveau dans une aventure dangereuse. Cependant, il savait que sa tante, la mère de Lizzy, ne s'opposerait pas à ce voyage. Elle était heureuse que Lizzy prenne enfin au sérieux ses responsabilités de fiancée du Comte Phantomhive. Ciel aurait beau protester, il n'arriverait pas à empêcher Lizzy de le suivre.

Il s'avoua vaincu. Mais qu'importe, Lizzy pouvait bien le suivre en France. Une fois sur place, elle resterait chez leurs hôtes pendant qu'il mènerait son enquête. Après tout, le voyage à bord du Campania s'était mal terminé, alors il devait bien offrir à Lizzy un voyage plus agréable.