Après une très longue absence, voici le chapitre 1 légèrement modifié/amélioré. Je les reprends un par un pour corriger les fautes et pour pouvoir écrire la suite et fin de cette fic. J'ai en effet tout perdu suite à un crash de disque dur et à la mort de mon pc, d'où ma très longue absence sur Démons... Je m'en excuse auprès de toutes les personnes qui me suivent.

Accident

Dans la capitale, la grande cité, centre du monde, il y a le Palais. Et dans le Palais vit sa grande Majesté l'Impératrice. Le Palais est interdit à tous, formellement, et seul le Haut Rang peut y pénétrer. D'aucuns disent qu'il renferme de noirs secrets, mais jamais personne n'a pu le vérifier, car les rumeurs qui courent dans la ville et qui s'échangent à voix basse racontent que si on y entre, on n'en ressort pas. Pas vivant en tout cas. Parfois des corps sont retrouvés, trainant dans un caniveaux engorgé par l'eau de pluie, des corbeaux dévorant leur chair pourrissante, et il n'y a jamais personne pour les réclamer, car personne n'est assez fou pour venir pleurer un ennemi du Palais.

Entrer. Un épineux problème. Le Palais est gigantesque, amas de pierre et de métal, de ferraille et de tuyaux crachant fumée et vapeur qui se mêlent au brouillard qui l'entoure continuellement, et ses tours les plus hautes, depuis longtemps abandonnées, semblent se perdre dans les nuages tant elles s'élèvent haut dans le ciel. Ce bâtiment imposant est entouré de douves asséchées, hérissées de pieux, plantés dans la terre sèche sur toute leur longueur, sans compter la garde royale composée des soldats les plus aguerris qui patrouillent régulièrement, gardant la moindre porte, la moindre ouverture avec une vigilance extrême. On dit que même une mouche ne pourrait pas y pénétrer, que pas un rat, pas la plus petite souris ne pourrait s'y faufiler. Mais là encore, point de preuves, car même les mouches et les rats ont peur de rentrer dans le Palais.

Le Palais, si bien gardé, abrite les appartements de sa Majesté l'Impératrice. Personne appartenant au peuple ne l'a jamais vue, ni même seulement aperçue. Sa majesté l'Impératrice ne se montre qu'aux nobles, aux personnes de Sang, et pas aux faibles et aux exécrables. Une rumeur court sur sa Majesté. Elle détiendrait l'éternelle jeunesse, et le soir, dans les tavernes, à l'heure où les hommes sont trop saouls pour rentrer chez eux, on trouve toujours un pauvre fou affirmant dans son délire d'ivrogne que sa Majesté l'Impératrice aurait le même visage depuis plus de quarante ans. Foutaises, n'est-ce pas? Certainement. C'est en tout cas ce que pensent ceux qui, aussi éméchés qu'eux, les écoutent devant un verre de piquette.

Le Palais n'est pas simplement la demeure de sa Majesté, c'est aussi son trône. Un trône immense et imposant, projetant son ombre grandiose sur la ville soumise, la gouvernant d'une poigne de fer. Sa Majesté ne connait pas la pitié. La pitié est inutile, et elle appartient aux faibles d'esprit. En ces temps troublés où les guerres font rage, seule la force compte. La force de l'armée, et l'obéissance du peuple. C'est par ces deux choses que s'obtient la grandeur d'une nation, et sa Majesté sait mener son pays à la gloire. Tout du moins est-ce l'avis général. Mais dans les bas quartiers, là où personne de censé n'oserait s'aventurer, des choses se murmurent, bas, si bas qu'il faut tendre l'oreille et écouter avec attention pour en saisir le sens.

Dans ces ruelles sombres et glauques, si l'on sait où chercher, on apprend des secrets enfouis sur la quête de gloire du Palais. Cette quête de gloire qui commença il y a quelques années en même temps qu'éclata la première des guerres, et par laquelle la désolation s'abattit sur tous, par qui viendra la Renaissance. Car le Palais a de nombreux ennemis, et il y en a un qu'il doit craindre par dessus tout. Une organisation étrange dirigée par des personnages inconnus de tous, levant une armée pour s'emparer du monde et l'écraser. Et on raconte aussi, parfois, que la quête de pouvoir insensée de l'Impératrice afin d'écraser cette menace a mené à une catastrophe qui a fait trembler les fondations de ce noir bâtiment et le cœur du monde lui-même...

OOO

Le palais était en effervescence, comme à son habitude. Les serviteurs courraient en tous sens, portant des plateaux chargés de nourriture aussi bien que des messages destinés aux gens du sang occupant la moindre parcelle des quartiers des nobles. Parmi ces serviteurs pressés, une jeune fille se frayait un passage au travers de ce flot permanent et continu de personnes hésitant entre la course et la marche rapide, portant une théière noire laquée ornée d'une unique fleur de cerisier rose. C'était l'heure du thé de la maîtresse. Et de son traitement. La jeune fille passa plusieurs portes, gravit autant d'escaliers, et se retrouva finalement face à deux battants imposants, fermés et gardés par une dizaine de membres de la milice. Elle les salua d'un signe de tête et ils lui ouvrirent sans rechigner – ils la connaissaient tous – juste assez cependant pour qu'elle puisse se glisser dans l'entrebâillement. Elle entendit les portes claquer juste derrière elle. La sécurité de la maîtresse était la plus importante des choses. On ne plaisantait pas avec la vie de sa Majesté l'Impératrice. La fille fit quelques pas vers le trône bas et recouvert de coussins de toute sorte, entouré de rideaux fins mais assez opaques pour qu'on ne voit que l'ombre de la personne se cachant derrière eux. Elle s'agenouilla et attendit.

_Approche Sakura. Je t'attendais.

_Oui Tsunade-Sama.

Sakura, car c'est ainsi qu'elle s'appelait, se leva, portant toujours la théière chaude dans ses mains, et se glissa entre les rideaux. Elle était la servante de sa majesté depuis plusieurs années maintenant, et elle se targuait d'avoir toujours su répondre à ses désirs. Sa majesté se tenait là, assisse en tailleur au milieu des coussins disposés sur son trône, ses cheveux blonds rassemblés en deux couettes retenues par un lien de cuir de chaque côté de son crâne. Son imposante poitrine sortait en partie d'un corset posé et lacé par-dessus une longue robe de soie aux manches larges. Sa majesté était belle. Belle et jeune, encore et toujours.

Sakura prit une tasse sur un petit plateau en argent ciselé posé sur une table basse à côté du trône et versa son thé à l'impératrice, y ajoutant quelques gouttes provenant d'une fiole qu'elle sortit de sa poche.

_Double la dose aujourd'hui. Je sens déjà les effets qui diminuent. J'aurai besoin de tes soins cet après-midi.

_Bien Tsunade-sama.

_Cette couleur ne part toujours pas de tes cheveux?

_Non Tsunade-sama, rien à faire, j'ai tout essayé, se plaignit Sakura. Ça m'apprenda a jouer avec d'anciens parchemins.

_Ce n'est pas grave, le rose te va bien. C'est juste un peu étrange. Mais qu'est-ce qui est encore normal dans ce palais hein? Reprit-elle d'une voix lasse.

_Pas grand chose majesté.

Sakura passa machinalement une main dans ses cheveux rose, résultat d'une expérience ratée suite à l'utilisation d'un ancien sort trouvé dans un livre poussiéreux, et tendit la tasse à Tsunade. Celle-ci l'avala d'une traite, grimaçant un peu à cause du goût amer de la potion que lui préparait Sakura. La jeune fille, en plus d'être sa servante, avait aussi été longtemps sa disciple, montrant un talent inné dans la pratique des sorts médicinaux, et elle se chargeait maintenant quotidiennement des soins de sa majesté puisque celle-ci était devenue incapable de les accomplir elle-même. Sakura était, en outre, une des rares personnes en qui elle avait une totale confiance.

Tsunade prit un air pensif et contrarié. Elle s'était vraiment considérablement affaiblie depuis son accès au trône, encroutée dans ce maudit fauteuil, emmurée dans ce palais sordide d'où elle savait qu'elle ne sortirait jamais, pas même à sa mort. Et tout ça parce qu'elle n'arrivait pas à se débarrasser de son orgueil, parce qu'elle se refusait à voir son corps vieillit et ridé. Mais elle n'aurait bientôt plus le choix. Son corps dépérissait et ne supportait plus le rude traitement qu'elle lui faisait subir. Il était trop tard pour penser à se lamenter, elle était déjà allée trop loin, mais elle se disait qu'elle avait le temps. Juste encore un peu. Perdue dans ses pensées, désireuse d'oublier que son apparente jeunesse tomberait bientôt en miette, elle n'entendit pas les légers coups frappés à une porte située quelque part derrière le trône.

_Tsunade-sama. Orochimaru-sama est là, annonça l'un des gardes.

_Hein? Ah, bien, fais-le patienter quelques minutes, je suis occupée.

_Si je puis me permettre, majesté...

_Quoi donc?

_Vous devriez vous méfier de lui. On dit qu'il tourne mal, chuchota Sakura.

_Je suis au courant des rumeurs qui fourmillent dans le palais, et je me tiens sur mes gardes. Tu peux disposer Sakura.

La jeune fille s'inclina devant l'impératrice, puis se glissa sans bruit jusqu'à la porte à lourds battants, quittant la pièce. Tsunade saisit la théière et rempli la tasse qui contenait précédemment la potion immonde que Sakura lui apportait chaque matin. Posément, avec tout le calme du monde, elle porta la tasse à ses lèvres pleines et laissa le liquide chaud couler dans sa gorge. Ce n'est qu'une fois la dernière goutte avalée qu'elle daigna faire introduire son visiteur. Il était parfois bon de rappeler à Orochimaru qui faisait la loi ici. Il avait un peu trop tendance à oublier qu'il n'était pas le maître des lieux, et attendre ne pouvait lui faire que du bien.

Orochimaru, s'avança jusqu'à elle, glissant silencieusement sur le sol. Malgré les années, il lui faisait toujours autant froid dans le dos. Il avait été élevé avec elle et Jiraya, et elle le connaissait depuis sa petite enfance, avant qu'elle ne soit enfermée ici, et elle aurait dû lui faire confiance, mais les rumeurs dont Sakura lui avait parlé l'inquiétaient. Elle en avait entendu parler elle aussi, grâce aux espions de l'Anbu, sa milice personnelle, et elle se méfiait de plus en plus de lui. Elle ne savait pas vraiment avec qui il fricotait mais ce n'était pas bon. Il avait toujours eu des vues sur le trône, elle le savait, et peut-être cherchait-il encore un moyen de le lui prendre.

_Orochimaru. Que me vaut ta visite?

L'homme, plus pâle que de raison, la regardait, immobile, à travers la mince fente formée par ses yeux. Il portait une tunique d'intérieur de fine soie et des cheveux noirs et huileux lui recouvraient les épaules. Tout en lui rappelait à l'Impératrice un serpent près à bondir, et elle se sentait mal à l'aise, ici, seule avec lui.

_Je dois te parler Tsunade-sama, lui dit-il d'une voix enjoleuse.

_De quoi?

_Des prophéties. D'une en particulier. Tu la connais non? « Et il viendra, possédé par le Démon. Et par la violence et le sang, il sauvera le monde », récita le serpent.

_Je connais les prophéties aussi bien que toi Orochimaru, pas la peine de venir m'importuner avec elles. Et je sais aussi où tu veux en venir. Épargne-moi une nouvelle discussion sur le sujet veux-tu, je suis lasse de tout cela.

_Pourtant, tu devrais m'écouter Tsunade-sama. Le danger grandit pendant que tu perds du temps à tergiverser sur la question. Nous devons agir les premiers, les détruire avant d'être écrasés.

_Je refuse d'agir si cela implique ce que tu proposes. C'est un Démon Majeur enfin! Te rends-tu compte des risques que comporte une invocation de ce type? Et il faudrait un réceptacle, quelqu'un de fort et d'inébranlable, des spécialistes en sceaux et en invocation et...

_Tu as déjà les spécialistes. Kushina Uzumaki et Minato Namikaze. Ne sont-ils pas les plus à même de mener une invocation de démon majeur à bien? Et pour le réceptacle, on m'a parlé d'un enfant du clan Uchiha, un jeune prodige. Les Uchiha forment la garde rapprochée de la famille impériale depuis des années. Même votre Anbu ne leur arrive pas à la cheville S'il y a un clan pouvant fournir quelqu'un de fort, c'est bien celui-là.

_Je refuse de mettre en danger les parents de Naruto.

_Je sais que tu tiens à ce gamin Tsunade-sama. Mais tu dois penser d'abord à ton peuple. Les pauvres n'osent pas encore s'approcher des portes du Palais, mais bientôt, ils s'y masseront pour implorer l'aide des Grands, pour demander que quelque chose soit fait. Ils ont peur, Tsunade-sama. Peur de ce qui se cache à l'extérieur. Le danger rôde et la mort est à nos portes. Cette organisation grandit de jours en jours et son armée ne cesse de voir grossir ses rangs. Tu as beaucoup d'ennemis. Et ces ennemis se rassemblent comme un seul homme pour t'écraser de leur poing. Nous avons besoin de cette puissance, et nous avons les moyens de nous la procurer. Il n'y a plus à hésiter, sauf si ton souhait est de voir le Palais s'écrouler comme un château de cartes et ton peuple se faire massacrer.

_Je... je vais y réfléchir. Laisse-moi maintenant.

Orochimaru s'inclina légèrement puis quitta la pièce sans un mot de plus, laissant Tsunade seule avec ses doutes et ses peurs. Une guerre. Voilà ce qui était à ses portes. Et elle, elle restait là à attendre que ses ennemis viennent l'abattre. Pourtant, elle ne pouvait se résoudre à la solution proposée par Orochimaru. Ou presque pas... Un démon majeur, le neuvième de surcroit... Elle devait parler à Jiraya, et à Minato de toute urgence. Il fallait régler cette histoire au plus vite car elle avait besoin d'une solution à ses problèmes. Elle détestait l'admettre mais cette vipère d'Orochimaru avait raison, et plus elle tardait à agir plus le danger se rapprochait.

Poussée par une angoisse dont elle n'arrivait pas à se défaire, elle quitta son trône, et se retrouva à parcourir seule – elle avait congédié la garde – les étroits couloirs qu'utilisaient les gens du Haut Rang pour se déplacer sans avoir à croiser les serviteurs et les nobles d'un rang juste assez élevé pour être tolérés dans le palais. Elle ne croisa personne et elle s'en réjouit profondément. Elle n'était pas d'humeur à se montrer aimable avec un quelconque parent éloigné qui lui ferait la conversation dans le seul et unique espoir de pouvoir se vanter de lui avoir parlé. Tsunade accéléra le pas. Elle savait parfaitement où aller. Elle les trouverait là-bas tous les deux.

Dans la vaste pièce aux murs recouverts de schémas, de calculs interminables et de sceaux tracés parfois à même les murs, une agitation sans nom régnait, transformant le lieu en un effroyable capharnaüm. Et ce par la faute de deux petits garçons qu'elle connaissait très bien. Le premier, elle le considérait comme son petit-fils, et le deuxième était tout simplement inséparable du premier, et cela par son intervention personnelle.

_Bonjour tout le monde, cria presque l'Impératrice pour réussir à se faire entendre.

_Tsunade bâ-chan!

Et une petite furie blonde se jeta sur elle avec force, suivit de près par un petit garçon d'un calme étonnant qui s'inclina respectueusement devant elle.

_Tsunade-Sama.

_Bonjour Sasuke. Naruto.

Souriante, elle reposa le petit blond et détailla d'un œil bienveillant les deux enfants. Naruto avait décidément une vraie gueule d'ange. Plus petit que son ami, et plus jeune aussi, il montrait, du haut de ses 8 ans, une vivacité d'esprit hors du commun. Petit et d'un blond soutenu, ses grands yeux bleus étaient soulignés par le collier de la même couleur que Tsunade lui avait offert quelques années auparavant. Il portait encore des habits d'enfants, une ample tunique aux manches courtes descendant jusqu'à mi-cuisse et un short long noir couvrant ses genoux ainsi que des chaussures basses souples, plus adaptées aux sols en marbre du palais qu'à l'extérieur. Extérieur où Naruto n'avait certainement jamais mit les pieds. Et il en allait de même pour l'autre garçon. Sasuke, était le dernier fils du clan Uchiha qui formait sa garde et celle du palais depuis plusieurs générations maintenant. Plus grand que le blond d'une bonne dizaine de centimètres, et plus âgé de trois ans, il était l'exact contraire de Naruto. Si le petit blond ne tenait pas en place, Sasuke était calme et serein. Aussi brun que Naruto était blond, sa peau pâle jurait avec le teint plus foncé de son ami. Sasuke était beau. Oui, indéniablement beau. Surtout depuis qu'il avait été autorisé à quitter la tenue des enfants. Il portait ainsi une tunique ajustée noire ornée de l'emblème de son clan qui faisait ressortir la teinte outrageusement blanche de sa peau.

_Tu viens voir papa Tsunade? Demanda le petit blond.

_Oui, allez jouer un peu plus loin, nous avons à parler de choses importantes.

_Mais...protesta Naruto

_Bien Tsunade-Sama. Viens Naruto. Et ne discute pas, le coupa net Sasuke.

_T'es lourd Sas'ke.

_Mais oui.

Tsunade eut un sourire attendrit lorsqu'elle vit le petit garçon blond se faire tirer en arrière par le brun, de force visiblement. Elle se souvenait encore parfaitement de ce jour-là. Naruto avait à peine deux ans à cette époque, et Sasuke en avait cinq. Naruto tenait debout mais encore dans un équilibre précaire et elle lui tenait la main. Les représentants les plus importants du clan Uchiha les entouraient. C'était la coutume que le clan soit en charge de la protection rapprochée du Trône, mais ce qui allait se faire était proprement inédit. Un serment. Un serment plus important que tout qui lierait à jamais deux âmes. Un serment pour protéger. Car elle était là, mais ça ne serait pas toujours le cas. Elle occupait un poste dangereux et convoité, et on ne savait pas ce qu'il pouvait arriver, car si la guerre n'avait pas encore éclatée, on entendait son murmure se répandre dans tout le pays. Naruto était important. Il était l'enfant de son fils adoptif, et en tant que tel, il était l'avenir, l'héritier du trône. Un héritage empoisonné mais elle savait que ce petit garçon serait un jour assez fort pour assumer ce rôle, elle y travaillait.

Elle avait lâché Naruto et avait reculé d'un pas alors que Sasuke se plaçait devant le petit garçon qui le regardait anxieusement, ne comprenant pas vraiment tout ce qu'il se passait tout autour de lui. Sasuke s'était agenouillé devant le petit blond aux grands yeux bleu. Et il avait prononcé ces paroles apprises par cœur et bien trop lourdes pour qu'un enfant les comprennent, ces mots qui résonneraient dans son esprit jusqu'à la fin de ses jours, lui rappelant le devoir qui serait dorénavant le sien.

« Mon sang coulant jusqu'à la dernière goutte et ma vie donnée avant que la sienne ne soit en danger. Que je meure pour qu'il vive, car il est tout et je ne suis rien. Je le protègerai, sur ma vie, je le jure. »

Sasuke n'avait pas tout comprit, mais il savait que c'était quelque chose d'important qu'il venait de réaliser. Quelque chose dont il ne pourrait se défaire. Il le protégerait, toujours et quoi qu'il arrive, car c'est pour cela qu'il était venu au monde. Sasuke serait toujours là pour Naruto, Tsunade en était certaine. Après ce jour, le jeune Uchiha avait commencé à suivre Naruto partout, ne parlant que rarement, mais veillant à ce que le petit blond ne coure pas le moindre danger. Et quand Naruto se blessait dans ses expéditions à travers le palais, c'est Sasuke qui le réprimandait, soignant en même temps les écorchures du garçon. Ils avaient grandit, et les envies d'exploration de Naruto aussi. Il devenait de plus en plus turbulent et intenable, mais Sasuke ne se décourageait pas. Il était toujours avec lui, et, inflexible et imperturbable, il veillait.

Sa majesté détourna son attention des deux gamins, le plus grand écoutant son cadet lui raconter elle ne savait quoi, et elle traversa la pièce, s'approchant des trois autres occupants des lieux. Elle savait qu'elle les trouverait là. Les deux hommes étaient, à l'image des deux enfants, inséparables, l'un ayant été le maître de l'autre. Et la femme qui les accompagnait les regardait avec un sourire paisible. Ce fut elle qui la vit en premier. Tout de suite, elle s'inclina puis s'avança pour saluer l'impératrice.

_Tsunade-sama, quel plaisir de vous voir!

_Kushina, je t'ai déjà demandé d'arrêter ces simagrées. Pas besoin de donner du « sama » avec moi.

Minato, Jiraya, j'ai à vous parler.

_Je vais emmener les enfants manger quelque chose aux cuisines, annonça Kushina. Naruto est un vrai ventre sur pattes.

Aux yeux de Tsunade, Kushina, l'épouse de Minato, était vraiment la meilleure des mères. Un peu emportée parfois - son fils tenait d'elle, c'est sûr - elle se montrait néanmoins douce et aimante envers son mari tant qu'envers Naruto. Elle parti chercher les enfants, leur proposant elle ne savait quelle friandise, ou en proposant plutôt au petit blond qui serait immédiatement suivit par le brun, et elle quitta le laboratoire suivit de son fils et de son ami. Tsunade se tourna donc vers ses deux interlocuteurs, et une fois de plus, elle fut frappée par la ressemblance physique impressionnante entre le père et le fils. Naruto était un Minato miniature. C'en était presque troublant.

Minato... Il était son fils depuis plusieurs années maintenant, et même si beaucoup avaient critiqué son choix, jamais elle n'avait regretté ce geste. Et Jiraya non plus. Il était son compagnon de toujours. Élevés ensemble, ils se connaissaient depuis l'enfance eux et Orochimaru. Il leur avait fallut longtemps pour comprendre qu'ils se désiraient mutuellement et il vivait maintenant avec elle au Palais, après plusieurs années passées en ermite, là où elle ne pouvait surveiller sa perversité parfois un peu trop développée.

_J'ai parlé avec Orochimaru. Je sais ce que vous pensez de lui, et je connais les bruits de couloirs, et même si je me méfie de lui, il n'a pas forcément tord quant à la situation dans laquelle nous sommes. Il a fait une... proposition... Vous savez tous deux que le danger se rapproche de jours en jours. Cette maudite organisation dont nous se savons rien hormis son existence et le nombre global des soldats garnissant ses rangs. Nous savons aussi que leur but est d'exterminer tout ce qui se dressera sur leur passage, et nous ne sommes au courant que parce qu'ils ont renvoyé un ou deux espions encore en état de transmettre un message. Il faut agir, c'est devenu une nécessité, et Orochimaru a proposé quelque chose. C'est certes un peu radical, mais peut-être que ça pourrait marcher.

_Et qu'elle est cette fabuleuse idée qu'a eu Orochimaru? Demanda prudemment le vieux Jiraya.

_Je doute que ça te plaise mon cher Jiraya.

_Et bien? Insista l'ermite.

_Un démon majeur. Le neuvième.

_Tu as parfaitement raison. Je n'aime pas ça du tout. Un démon majeur, enfin Tsunade tu as perdu la tête! Et le plus puissant de surcroit! C'est l'enfermement dans ce maudit palais qui te ramolli la cervelle, ô votre majesté? Et puis que fais-tu de l'élu? Tu comptes l'appeler en espérant qu'il apparaisse gentiment?

_D'après Orochimaru, un des enfants Uchiha pourrait faire l'affaire.

_Nous ne devrions pas jouer avec ça. Il doit venir à nous, il ne nous appartient pas d'aller le chercher. Ça ne peut que nous apporter du malheur. Les prophéties du Mont Myôboku ne sont pas là pour rien, elles sont une mise en garde. Ça ne peux que mal tourner si on provoque sa venue.

_Minato, qu'en penses-tu?

_Tsunade s'il te plait, tu sais bien qu'il ne résistera pas à l'envie d'essayer si tu lui agites les moyens de réaliser cette invocation sous le nez.

_Jiraya, laisse-le parler.

L'homme blond, resté silencieux jusqu'à présent, s'avança, plantant ses yeux d'un incroyable bleu dans ceux de sa mère adoptive. Il n'avait pas dit un mot depuis qu'elle avait commencé à parler, et elle le sentait extrêmement concentré, pesant le pour et le contre, examinant chaque possibilité. Minato était comme ça. Intelligent et prudent. Très fort aussi. Le meilleur. Elle le soupçonnait depuis un moment d'avoir dépassé largement les connaissances de Jiraya, et sii quelqu'un pouvait invoquer un démon majeur avec un nombre minime de risques, c'était bien lui. Il était fort, et Kushina aussi. Elle savait qu'ils pouvaient le faire, et même si elle était encore un peu réticente à l'idée que cette proposition venait d'Orochimaru, elle ne voyait pas d'autre solution pour sauver sa nation, car sa propre armée ne viendrait jamais à bout de cet adversaire tapit dans l'ombre. Après un moment de réflexion durant lequel la tension entre Tsunade et Jiraya était palpable, Minato prit enfin la parole, parlant lentement et clairement, montrant qu'il était sur de lui et qu'il savait ce qu'il disait.

_Je pense que d'un point de vue purement technique, cette invocation est possible, bien que compliquée, pour peu que le porteur désigné soit assez fort pour résister au démon. Ça s'est déjà vu. Pas souvent, mais c'est arrivé. Il faudra simplement choisir avec soin le porteur ainsi que les sceaux utilisés. Bien sur il sera nécessaire que j'en parle avec Kushina, mais je pense qu'elle sera d'accord avec moi sur ce point.

_Tu es complètement fou Minato, rétorqua Jiraya. Minato n'y fit pas attention et pousuivit d'une voix égale:

_Kushina pourrait se charger de l'invocation, elle a déjà eu affaire à des démons. Je placerai les sceaux le maintenant en place le temps qu'il soit fixé dans le porteur. Et si tout se passe bien, nous aurons une arme de choix pour lutter contre cette fameuse organisation qui nous menace. Je suis sûr que ça peut marcher. Si on s'y prend bien, les risques seront existants, mais réduits.

_Mais il y en aura quand même.

_Il y en a toujours, tu le sais aussi bien que moi Jiraya. Même le sceau le plus élaboré peut lâcher si l'invoqueur fait une erreur. Je n'en ferais pas, et Kushina non plus.

_J'espère que tu es consciente que si tu donnes ton accord pour une telle chose, tu vas faire exactement ce que veut Orochimaru... Il tourne mal, tu le sais, surenchérit l'ermite. Tu n'as pas pu passer à côté de ces rumeurs. Tout le monde semble au courant dans le Palais. Il mijote quelque chose, et j'aimerais savoir ce que c'est avant que ça ne me tombe dessus par surprise.

_Je l'ai à l'œil. Et même si la proposition vient de lui, je dois dire qu'il a raison, nous sommes dans une situation plus que délicate. Nous avons besoin d'une force de frappe suffisamment puissante pour tenir nos ennemis à l'écart et pour les dissuader de venir nous importuner, et c'est le démon nous apportera cette force.

_J'espère que tu sais ce que tu fais Tsunade.

_Je l'espère aussi.

Après cette conversation quelque peu houleuse, tout s'était enchaîné très vite. Minato Jiraya et Kushina avaient travaillé d'arrache-pied, jour et nuit afin de mettre en place la meilleure technique d'invocation et les sceaux les plus résistants possible. Tsunade ne voulait prendre aucun risque. Elle ne pouvait pas se permettre le moindre problème, la moindre petite erreur.

OOO

Naruto semblait particulièrement surexcité par les préparatifs qui mettaient le Palais en ébullition. Et Sasuke semblait particulièrement excédé par sa surexcitation. Le blond courrait partout, suivant ses parents à la trace dans l'espoir de pouvoir les aider à faire quelque chose qu'il pourrait faire du haut de ses huit ans. Sasuke regardait, toujours impassible, totalement insensible aux gens s'agitant autour de lui dans la grande pièce à haut plafond située quelque part dans les sous-sols du château et qui serrait le théâtre de l'invocation. L'invocation. Une bouffée d'orgueil et de fierté monta en Sasuke. C'était Itachi Uchiha, son grand frère, qui avait été choisit pour être l'hôte du démon. Une très grande fierté pour la famille. Apparemment beaucoup plus importante que le fait que lui ai été choisit pour veiller personnellement sur l'héritier. Ses parents avaient certes été fiers de lui, mais Itachi le dépassait toujours, et il ne pouvait pas lutter. La jalousie fit une fois de plus place à la fierté et il tenta de la réprimer en reportant son attention sur Naruto qui courrait derrière son père, transportant quelques papiers couverts de sceaux et de notes manuscrites pour lui. Naruto. Le centre de sa vie depuis qu'il avait 5 ans. Au début, son rôle semblait plus se rapprocher du baby-sitting qu'autre chose, mais Naruto s'était vite révélé être parfaitement intenable, et il avait commencé à devoir lui courir après à travers tout le Palais. Le blond appréciait en effet assez peu d'être constamment surveillé, et il essayait de filer dès qu'il en avait la possibilité. Excédé par cette furie blonde durant les premiers temps, il s'était peu à peu prit d'une affection sans bornes pour ce garçon étrange qui était tout le temps avec lui. Naruto l'avait aussi adopté et il en avait fait, contre la volonté de Sasuke, son compagnon de jeu préféré, finissant par ne plus vouloir le quitter deux secondes. En effet, les rares fois où Sasuke avait été contraint de s'absenter, Naruto l'avait réclamé à corps et à cris jusqu'à ce que celui-ci revienne.

Il se souvenait de toute les fois où le petit garçon s'était écorché le genoux et où il n'avait accepté de se faire soigner que par Sasuke, où il n'arrivait pas à dormir et où Sasuke lui avait lu des livres d'un ton tellement monotone que le sommeil avait eu raison du blond, des fois où il avait été malade et où il avait surveillé sa fièvre toute la nuit en compagnie de Kushina, inquiète pour son fils.

Comme à chaque fois qu'il pensait au blond, le serment qu'il avait prononcé ce jour-là revenait sonner dans l'esprit de Sasuke. Il le connaissait par coeur. « Sa vie, son sang avant que lui ne soit blessé. Car il était tout, et lui rien. » Un simple serment porteur d'un lien plus profond qu'il ne pouvait se l'imaginer. Protéger Naruto était important, et maintenant plus que jamais. La guerre menaçait, un démon majeur allait être appelé et Orochimaru préparait quelque chose. Il devait rester sur ses gardes.

Ce fut un sourire radieux et deux yeux bleu pétillants qui tirèrent Sasuke de ses pensées moroses.

_Papa m'a dit que c'était l'heure de ton entrainement et que je pouvais venir Sas'ke!

_Hum.

Le brun voyait clair dans les intentions de Minato. Il se débarrassait purement et simplement de son fils. Naruto n'assistait pas souvent à ses entrainements, c'était d'ailleurs les seuls moments où ils n'étaient pas ensemble. Si Minato autorisait le blond à l'y suivre, c'est qu'il était vraiment débordé, car il préférait d'habitude tenir Naruto éloigné des armes et des manifestations de violence. Sasuke saisit la main que Naruto lui tendait et l'entraina avec lui le long des couloirs menant aux salles d'entrainement réservées à son clan, demandant au moins trois fois au blond de se calmer un peu et de cesser de gigoter.

Naruto adorait voir « Sas'ke » s'entraîner. Sas'ke était le plus fort, il le savait. Enfin, presque. Il travaillait dur pour développer l'affinité élémentaire que son clan avait avec le feu, et il s'entrainait presque chaque jour en ce moment. Sasuke n'en parlait pas beaucoup, mais Naruto voyait qu'il tentait tant bien que mal d'égaler son grand frère. Le père de Sasuke répétait souvent qu'à l'âge de Sasuke, Itachi était déjà un Mage du Feu confirmé. Sasuke n'aimait pas ça, et Naruto lui répétait qu'il était le plus fort, que lui, il le savait bien. Sasuke lui souriait alors. Et Naruto était heureux de voir la tristesse quitter les yeux de Sas'ke.

Le plus fort, c'était sans conteste Itachi Uchiha, malgré les dires de Naruto. Tout le monde était d'accord là-dessus parmi les membres du clan Uchiha. Un clan puissant chargé de la protection du Trône qui assumait son rôle depuis toujours avec une immense fierté et le plus grand zèle. Et cette fidélité recevait aujourd'hui la plus grande des récompenses, le plus grand des honneurs. Le choix de Sasuke pour devenir le protecteur de Naruto avait certes était une joie pour les hautes sphères du clan, mais cette fois, un des leurs était choisit pour devenir l'arme la plus importante de la Nation. Itachi serait l'hôte du démon. Il servirait le Palais aux premières lignes du champ de bataille et apporterait la victoire à l'Impératrice quand la guerre éclaterait. Oui, c'était définitivement un immense honneur pour le clan Uchiha qui était donc présent dans sa totalité à l'intérieur de cette cave aux dimensions grandioses où se déroulerait l'invocation.

OOO

Tsunade voyait la salle se remplir peu à peu. Elle aurait préféré faire ça avec un nombre réduit de personnes pour limiter les risques, et ça l'embêtait que tout le clan soit présent, la famille proche d'Itachi située au tout premier rang, mais elle s'imaginait mal leur interdire d'assister à la « cérémonie ».

Elle se sentait anxieuse. Ça faisait maintenant trois semaines que Minato et Kushina travaillaient dur pour mettre au point la technique d'invocation la moins dangereuse et aillant le plus de chances de réussir. Ils avaient passés de nombreuses nuits blanches à parler avec Jiraya et elle afin de tout mettre au point dans les moindres détails. Tout s'était vraiment enchaîné très vite. Beaucoup trop vite peut-être. Et elle n'aimait pas plus qu'avant que l'idée soit venu du serpent Orochimaru. Et pourtant elle voyait bien qu'elle n'avait pas d'autre solution. Et si Orochimaru était assez fou pour tenter quelque chose, et bien le clan Uchiha au grand complet était là à disposition pour l'arrêter et un nombre suffisant de gardes se tenaient devant chaque accès à la salle. Tout devait bien se passer, en théorie, mais pas si on écoutait les prophéties. Elles parlaient d'un enfant élu pour recevoir le démon. Itachi n'avait-il pas été élu par elle-même? Elle ne savait pas. Jiraya la traitait de folle, il maintenait que l'enfant devait venir à eux. Elle espérait sincèrement qu'Itachi était le bon. Et que tout se déroulerait bien.

Et en effet, tout semblait bien se passer. Un silence tellement oppressant qu'on pouvait presque en sentir le poids régnait en maître dans la salle, pas un murmure, pas un bruissement, rien. Puis un bruit, lent, régulier. Un bruit de pas étouffé en partie par un tapis posé sur le sol de marbre, puis plus fort alors que la pierre résonnait sous les bottes, l'écho de chaque pas résonnant avec force. Puis à nouveau du silence. Car Itachi s'était arrêté. Il s'était placé au centre d'un entrelacs de symboles se superposant, se croisant et se chevauchant, formant un cercle parfait. Itachi resta là, bien droit, alors que Minato posait ses mains sur le sol face à Itachi et que Kushina faisait de même dans son dos. Ils exécutèrent de rapides signes avec leurs mains, si vite que leurs gestes paraissaient flous, puis les reposèrent avec force sur le sceau, un « Invocation » clair et puissant résonna. Rien ne se passa. Rien du tout. Puis, sans prévenir, les sceaux s'illuminèrent. Car celui sur lequel de trouvait Itachi n'était pas le seul. Il était relié par de fines écritures et des symboles à neuf autres cercles de tailles plus réduites disposés autour du sceau principal. Neuf. Neuf pour le neuvième démon qui était appelé. Itachi se crispa et un léger filet de sang coula de la lèvre qu'il mordait, mais il ne sembla pas s'en rendre compte. La lumière dégagée par les sceaux augmenta, gagnant progressivement en intensité. Le sol trembla, et un bruit retentit, comme si une bête avait poussé un grognement depuis les profondeurs. Tsunade se disait qu'elle rêvait jusqu'à ce qu'une forme commence à se matérialiser au-dessus d'Itachi. Kushina transpirait à grosses gouttes et elle donnait l'impression d'utiliser toutes ses forces pour appeler à elle ce démon.

Avant que celui-ci n'ai pu prendre une forme distincte, Minato entra en scène. Il devait agir avant que le démon ne soit complètement là, pour éviter qu'il ne soit totalement libéré. Le démon était là, il fallait donc le sceller dans un porteur ou voir tout le monde mourir, tué par la soif de sang de cet être de haine pure.

Sa majesté se félicita d'avoir demandé à Sasuke de tenir Naruto loin de tout ça. Elle avait jugé bon de l'éloigner car même si tout allait bien, on n'était jamais sur de rien. Et elle avait raison. Car oui, tout se passait bien, mais tout dérapa.

Naruto, lui, se félicitait d'avoir réussi à semer Sasuke. Il mourrait d'envie de voir une invocation de démon, une vraie, de voir son père accomplir cette chose incroyable. Il avait donc entrainé Sasuke à un bout du palais et s'était enfuit dans le sens inverse dès qu'il l'avait pu, prenant la direction de ce sous-sol immense où il avait suivit son père une ou deux fois. Il était donc là, bien caché sous une table, écartant la lourde nappe de velours rouge juste assez pour voir ce qu'il se passait. Ce n'est qu'au premier hurlement qu'il comprit que quelque chose n'allait pas.

Sasuke, par contre, ne se félicitait absolument pas. Il avait perdu Naruto. Cet abruti de gamin l'avait entrainé dans une course-poursuite à travers le palais, heureusement du côté opposé à l'endroit où se déroulait la cérémonie. Mais il connaissait bien le petit garçon. Il voulait voir son père appeler la créature qu'on allait mettre dans son grand frère, et il doutait qu'il ait abandonné aussi vite son idée. Après l'avoir perdu complètement de vue au détour d'un couloir, Sasuke fouilla la chambre de Naruto, les cuisines, et les quelques endroits où aurait pu être le blond. Il ne le trouva nulle part et se rendit à l'évidence. Naruto avait décidé d'assister à cette maudite cérémonie quoi qu'on lui dise.

Alors qu'il approchait de la salle, le sol trembla. Puis trembla encore, un peu plus fort, et une sorte de rugissement retentit. Continuant à marcher, il se demanda si tout se passait bien pour son frère.

Tsunade avait comprit que quelque chose n'allait pas quand elle avait vu Minato froncer les sourcils. Et voir Itachi tomber à genoux en poussant un cri de douleur n'avait pas servi à la rassurer. Itachi avait lutté. Mais il avait de toute évidence perdu le contrôle, et plus rien ne pouvait l'arrêter. Un cri plus animal qu'humain. Un cri annonciateur d'un massacre. De l'envie de tuer.

La confusion.

La peur.

Des coups frénétiques.

Du sang. Des cris, encore. Et la mort. Des regards vides. Des débris jonchant le sol, aussi nombreux que les morts, aussi nombreux que les membres arrachés. Des mains pleines du sang de ces gens. Le garçon possédé par le Démon. Pas l'élu qui sauverait le monde. Un simple humain, instrument de la mort. Il n'avait pas été assez fort. Trop tard pour placer des entraves sur lui. Il attendait, les yeux dans le vague et un sourire dément sur les lèvres. Un sourire de fou. Jiraya le retenait, de peur qu'il ne décide de continuer son oeuvre. Kakashi était là aussi. Elle était pourtant sure et certaine d'avoir ordonné au capitaine de l'Anbu de rester à l'extérieur pour garder les portes. Il était entré dans la salle avec une blessure. Elle avait cru comprendre que la garde avait rejoint Orochimaru, mais elle n'en était pas sure à cause de la brume engourdissant son cerveau. Plus de garde. Ses hommes obéissant à Orochimaru... Et un démon qui risquait de se libérer.

Kushina avait finalement réussi à extraire le démon alors que le pauvre garçon finissait de décapiter les derniers membres de son clan présent. Mais il était trop tard pour le renvoyer. Pas assez forte pour expulser de ce monde un démon majeur à elle seule. Ouvrir une porte était une chose, renvoyer un démon contre sa volonté en était une autre. Il fallait le sceller dans un porteur, sinon, il serait libre et il tuerait pour assouvir sa soif de sang. Besoin d'un porteur et peu de volontaires. Tsunade vacilla. Sa tête lui faisait mal. Terriblement mal. Comme si son cerveau était entouré de laine et que les sons lui parvenaient avec difficulté. Et tout ce sang... la nausée. Un haut-le-cœur. Une blessure. Et du sang qui coule. Elle tenta de se maîtriser mais ne parvint qu'à chanceler un peu plus. Orochimaru. Elle ne se souvenait pourtant pas l'avoir vu au début de la cérémonie. Il parlait à Minato. Il se portait volontaire. Il ne fallait pas. Elle n'avait pas confiance en lui. Trop de rumeurs, beaucoup trop pour être simplement des rumeurs. Des menaces. Il n'hésiterait pas à agir si le démon n'était pas placé en lui. Il fallait faire quelque chose. Elle essayait de réfléchir, mais c'était comme si son cerveau refusait de se mettre en marche. Elle trouva juste la force de se relever pour faire face à Orochimaru prête à se battre avec lui s'il le fallait. Elle se mit en position de combat. Elle était peut-être affaiblie, mais elle pouvait le retenir un moment. Elle seule le pouvait. Elle connaissait l'ampleur de sa force. Et elle était à présent seule contre tous. Seule, avec pour seul soutient son vieux compagnon, le capitaine de sa garde, et deux enfants qui n'étaient absolument pas censés être là. Une belle armée...

Ce fut Minato qui prit une décision à sa place. C'est avec effroi qu'elle le regarda s'approcher de son fils. Naruto... Elle avait pourtant voulu l'éloigner. Il avait dû échapper à Sasuke. Elle avait découvert qu'il était présent lorsque Itachi avait envoyé valser la table sous laquelle il s'était caché pour regarder discrètement la cérémonie. Il avait une entaille à l'arcade et était inconscient, mais ses jours ne semblaient pas en danger. Minato regarda Kushina qui hocha la tête pour montrer son accord après quelques instants de réflexion. Et elle comprit. Comprit leur horrible intention qui devait leur déchirer le cœur autant qu'à elle. Elle voulut hurler pour arrêter ça, mais aucun son ne sortit de sa bouche.

Kushina embrassa son fils inconscient, lui murmurant tant des mots d'amour que d'excuses. Puis elle agit, utilisant ses dernières forces, tentant d'ignorer les flots de sang coulant de ses blessures et de celles de son mari. Elle introduisit le démon, arraché à Itachi, dans le petit corps qui se cambra, écrasé sous la puissance de la créature qui hurlait, refusant qu'on l'emprisonne. Et Minato plaça les sceaux alors que Kuchina s'écroulait. Tsunade voulait lui hurler qu'il était fou, que les sceaux ne tiendrait pas, et que si le démon avait pu avoir le dessus sur Itachi, un gamin ne pourrait pas lutter. Mais Minato le savait aussi. Et elle le comprit en voyant qu'il plaçait une nouvelle série de sceaux, d'un rouge sang. Son propre sang. Le sang du père pour sauver le fils. Des entraves. Des sceaux de blocage entrelacés empêchant le démon de sortir. Naruto ne s'apercevrait même pas que la créature était en lui. Un dernier hurlement. Puis plus rien. Un silence de mort.

Et Naruto allongé là, des inscriptions sur son ventre disparaissant peu à peu. Naruto allongé et inconscient, la marque du pêché d'orgueil de l'Impératrice s'effaçant de son ventre pour que le garçon vive dans l'illusion qu'elle n'existait pas.

Ce petit garçon blond et inconscient, ce fut la dernière chose que vit Minato avant de mourir.

Le calme était revenu. Mais ce n'était pas bon signe. Simplement la preuve que parmi tous ces cadavres démembrés dont le sang couvrait le sol de marbre et imbibait les tapis, pas un seul n'était encore en vie. Le clan Uchiha était mort. Presque. Itachi vivait. Mais plus que d'une demie vie. Il était là, à genoux, à l'endroit même où il s'était laissé tomber sur le sol quand Kushina avait extrait le démon. Il sourirait, regardant dans le vide, les yeux dilatés. Oui, il restait Itachi.

Seulement Itachi? Non. Elle avait oublié un détail. Et ce « détail » venait de pousser la porte. Elle le vit entrer. Elle vit l'horreur se peindre sur son visage. L'horreur et l'incompréhension. Elle le vit tourner la tête vers son grand frère à genoux au milieu des cadavres, les mains pleines de sang et toujours ce sourire fou sur les lèvres. Puis il vit Naruto, et il sembla paniquer encore plus. Il le secoua, hurlant son nom dans le silence pesant, hurlant encore et encore.

_Il est en vie Sasuke, calme toi.

Tsunade se rendit compte qu'elle avait parlé seulement après avoir fini sa phrase. Les hurlements de Sasuke avaient agit comme un électrochoc pour elle, et elle tenta de se ressaisir, pesant, évaluant rapidement la situation. Naruto était évanoui et avait un démon enfermé en lui, Jiraya et Kakashi restaient autour d'Itachi, mais celui-ci ne semblait pas prêt de sortir de sa léthargie, et Sasuke, tenant le petit blond dans ses bras, semblait complètement perdu, presque déplacé, là, agenouillé entre les cadavres des parents de Naruto et de son défunt clan.

Il fallait agir. Tsunade envoya un premier coup vers Orochimaru. Son bras droit saignait abondamment mais elle s'efforça de l'ignorer. Elle devait prendre les choses en main car elle devait sauver ceux qui restaient. Il fallait le retenir le temps qu'ils s'échappent. Naruto était l'avenir. Esquivant un coup de son conseillé, visiblement très énervé d'être passé à côté du démon, elle hurla à l'intention de Jiraya et de Kakashi :

_Jiraya, Kakashi, prenez Naruto et Sasuke et partez!

_Hein? Qu'est-ce que tu racontes? Tu as perdu l'esprit?

_Jiraya, écoute-moi sans discuter pour une fois. Je le retiens. Fuyez, cachez-vous quelque part. Et quand Naruto sera prêt à utiliser la puissance que ses parents lui ont offerte, aidez-le à reprendre le Palais. Dépêchez-vous, PARTEZ!

Jiraya et Kakashi hésitèrent. Puis, alors que Tsunade évitait difficilement une pluie de coups, ils attrapèrent chacun un des enfants et quittèrent la pièce en courant. Jiraya portait Naruto dans ses bras tandis que son compagnon entrainait de force Sasuke, traversant les couloirs vides à toute allure. La dernière chose qu'ils virent fut Tsunade qui tombait à terre et Orochimaru qui hurlait un ordre pour qu'on les arrête et qu'on récupère Naruto. Plusieurs fois ils croisèrent une patrouille de la garde royale qui tenta de les arrêter. Fuyant pour ne pas perdre de temps, pour ne rien risquer, pour que plus aucune vie ne soit prise, il coururent jusqu'à une des sorties du château. Les portes n'étaient plus gardées et ils sortirent aisément. Orochimaru n'avait sans doute pas imaginé qu'il resterait quelqu'un de vivant pour fuir le Palais.

Ils coururent, encore et encore, jusqu'à la nuit tombée et encore après, jusqu'à l'épuisement, sans repos. Ils s'abritèrent quelques heures puis repartirent. Continuant pendant des jours et des jours encore. Ils s'arrêtèrent quelques jours dans un tout petit village pour reprendre des forces. Puis ils repartirent. Une vie d'errance nécessaire. Ils devaient disparaître, pour qu'Orochimaru ne remette pas la main sur le démon. Pour que grandisse l'espoir. Pour que grandisse la force. Et pour que la prophétie s'accomplisse.

« Et il viendra, possédé par le Démon. Et par la violence et le sang, il sauvera le monde ».

Naruto était maintenant le démon. Il détruira tout, et sauvera le monde.