Coucou mes petits chocolats :D Et me revoici en ce début 2016 (BONNE ANNEE A TOUS !) avec une toute nouvelle histoire ;) pour ceux qui lisent mes fanfictions "Juste pour me souvenir" et "Bella E Scura Illusione", pas de panique, la publication de ce nouveau bébé ne me feront pas prendre du retard dans les deux autres :)

Alors c'est une fois encore sur Assassin's Creed, cette saga de jeu vidéos est une source inépuisable d'inspiration ! J'ai pu récemment jouée à l'avant dernier jeu sorti, c'est à dire "Assassin's Creed Unity" qui fut pour moi un énorme coup de coeur sur presque tout les points, et une fois de plus je suis tombée amoureuse d'un personnage secondaire du jeu : Pierre Bellec, le mentor d'Arno Dorian :)

Contrairement à ce que pourrait penser donc ce premier chapitre, "Parce que Paris n'est que notre ombre" est une histoire sur Pierre Bellec, une histoire d'amour avec une nouvelle héroïne que j'ai crée et qui j'espère vous plaira autant qu'à moi ! Le titre, "Parce que Paris n'est que notre ombre" est une manière poétique de souligné la discrétion des Assassins (avec le mot "ombre") mais aussi l'état d'esprit de Pierre Bellec (qui sera aussi celui d'Adeline, mon héroïne) qu'il à la fin et même durant tout le jeu, et c'est aussi une référence à la dernière phrase qu'il prononce avant de mourir "Pour sauver la Confrérie, je réduirai Paris en cendres...".

NOTE : Je ne connais pas Paris comme je connais Rome où même les Caraïbes, je me suis donc entièrement fiée au jeu et à sa map pour décrire les quartiers et les décors, pour décrire leurs noms également. Il y aura peut-être un peu moins de description de décors dans cette fic là bien que je ne promette rien non plus, cela fait parti de mon style d'écriture de décrire les décors donc ça pourrait quand même revenir. Je ne connais pas non plus l'histoire de la Révolution Française comme je connais l'histoire des pirates (Juste pour me souvenir) où celle des Borgia (Bella E Scura Illusione), donc je vais me documenter un peu pour les prochains chapitres mais je ne m'y attarderai pas plus que ne l'exige le jeu par peur de faire des erreurs historiques.

Je doute que cette nouvelle histoire soit particulièrement longue, je sais déjà comment elle doit se finir, et sachez que je resterais le plus fidèle au jeu possible, détestant y être infidèle. J'espère vraiment que cette nouvelle histoire sur les Assassins Français vous plaira, et que ce premier chapitre vous donnera envie de continuez :D

Sur ce, je vous laisse au chapitre, et si cela vous plait, une petite review pour m'encourager ? ;D et même si cela ne vous plait pas, une petite review pour m'aider à m'améliorer ? XD

Bisous et à bientôt ! :D

Roza-Maria.


"J'y pense encore, toujours, encore, et ça tourne en rond

J'y pense autant que le temps nous attend,

Il est ma prison".

("La Sentence", comédie musicale 1789 : Les Amants de la Bastille).

Paris, Porte Saint-Denis.

10 janvier 1790.

La Cour des Miracles. Un lieu détesté par les nobles de Paris. Où même par le peuple moyen, avait-elle envie de dire. Ils avaient sans doute en parti raison de détester ces lieux. Cela sentait mauvais à chaque coin de rue, les semblants de bâtisse en bois faisaient peur à voir, mais pas autant que ses habitants. C'était ce que pensait la plupart des gens. Adeline aussi, quelque fois. Mais elle s'était habituée depuis longtemps à ces lieux et elle aurait presque dit qu'elle s'y attachait, des fois.

Pourtant, elle n'y vivait pas, pas plus qu'elle n'y était à l'aise. Mais elle était contrainte d'y passer tous les jours pour rejoindre la taverne où elle travaillait dans les cuisines, « L'Éclopée ». Si elle n'était pas pauvre au point d'aller chercher abri dans la Cour des Miracles, ses revenues était néanmoins suffisamment basses pour qu'elle vive dans les quartiers à peine meilleurs qui l'entourait. Non pas qu'elle s'en plaigne particulièrement. Adeline se considérait chanceuse d'avoir au moins quelques pièces d'or que lui procurait son petit travail qui lui permettait de manger, à défaut de bien les habiller.

Adeline marcha dans une flaque de boue alors qu'elle regardait de droite à gauche à mesure qu'elle s'aventurait dans la Cour des Miracles. Elle avait beau ne pas craindre spécialement cet endroit, elle savait que cela restait dangereux. N'importe qui l'aurait traitée de folle pour oser s'y aventurer seule au milieu de la nuit. Certes, elle s'habillait comme un garçon mais pas suffisamment pour se cacher des regards, elle portait un pantalon mais ses cheveux noirs et longs étaient lâchés derrière son dos. Impossible de s'y tromper, on ne voyait qu'une fille en elle.

Non, si elle s'habillait en homme, c'est qu'elle trouvait cela plus agréable, voilà tout. Et aussi parce qu'elle n'aurait jamais eu les moyens de s'acheter une robe. Les vêtements d'hommes coûtaient moins cher, et elle savait mieux les recoudre que des vêtements féminins. Elle avait appris la couture de sa mère, qui elle-même n'avait jamais que réparer les vêtements de son époux, mort depuis longtemps. Elle sentit une violente pointe au cœur la saisir à cette pensée. Cela avait beau daté de presque neuf ans, la douleur était toujours aussi forte.

Le petit peuple la connaissait bien, à la Porte Saint-Denis. Son nom était Lormay. Adeline Lormay. La fille du défunt Jean Lormay, un joyeux luron apprécié par tous ses voisins. Il travaillait autrefois en tant que garde pour un homme riche et haut placé dans la société qui avait une demeure dans le Marais, tout près de l'ancien Temple, cette prison impressionnante. Il y avait travaillé pendant des années, sans jamais connaître le nom de l'homme pour lequel il protégeait la demeure. Ce qui lui ne lui avait pas porté chance. Qui que ce soit cet homme riche pour lequel avait travaillé son père, il n'avait eu aucune considération pour ses gardes. Alors qu'il subissait une attaque, l'infâme s'était enfui et avait ordonné qu'on ferme chacune des portes derrière lui, laissant les cinq où six gardes qu'il restait enfermé avec les révolutionnaires assoiffés de rage et de sang. Son père en était mort, de même que les autres gardes, à l'exception d'un qui avait réussi à briser une fenêtre et à fuir et qui avait pu raconter ce qui s'était passé. Et qui s'était ensuite perdu dans la Cour des Miracles avant de mourir mystérieusement.

C'était il y a neuf ans. A cette époque-là, Adeline avait 11 ans et vivait une vie plutôt heureuse avec sa mère et son père dans leur modeste appartement situé dans la Porte Saint-Denis. Son père buvait un peu trop mais n'en restait pas moins charmant, aimant passionnément sa petite femme et sa fille chérie. Leur vie était simple mais heureuse. Tout avait basculé avec la mort de son père et cela, Adeline ne pourrait jamais l'oublier. Sa mère avait toujours été quelqu'un de fragile. Charlotte Lormay était une femme qui s'occupait de son époux, de sa maison et de son enfant, ce qui lui avait toujours convenu à merveille. Mais une fois son mari décédé, elle avait littéralement sombré dans un gouffre de faiblesse à la simple idée que c'était à elle désormais d'apporter argent et nourriture à la maison. Elle en aurait été totalement incapable. Adeline l'avait compris en regardant sa mère passer ses journées à pleurer dans son lit, à demi consciente, alors que les armoires se vidaient. Elle avait su alors que ce serait à elle de faire vivre la maison.

Cela ne lui avait pas trop posée de problèmes, bizarrement. A cette époque là, elle ne demandait qu'à s'occuper pour ne surtout pas penser à son père et pleurer et rien ne lui faisait plus plaisir que de venir en aide à sa pauvre mère malade. Son père était aimée de beaucoup, ce qui fait que les gens ont eu rapidement pitié de cette gamine de 11 ans qui traînait seule dans les rues de Paris à la recherche d'un quelconque travaille alors qu'elle ne savait pas faire grand-chose à part des sculptures de papiers, ce qui n'intéressait personne. C'est finalement Mélanie, la patronne de la taverne favorite de son père, située dans le Marais, qui avait offert quelque travail à Adeline, lui faisant rapporter des lettres, lui apprenant par la suite à travailler le pain et n'importe quel autre nourriture en cuisine, où elle avait fini par y rester et par en devenir experte. Mélanie n'était pas quelqu'un de très affectueux, elle était du genre bougon et colérique, mais Adeline savait que malgré ses hurlements, elle l'aimait énormément. Elle n'offrait pas du travail au premier venu et même si des fois elle l'épuisait, Adeline aurait eu bien du mal à s'en sortir ces dernières années sans Mélanie et cela elle ne l'oublierait jamais.

Les journées étaient dures en cuisine mais cela plaisait à Adeline. Elle aimait se sentir utile à quelque chose et en travaillant avec Mélanie, elle aidait sa mère malade. Elle n'était pas certaine que sa mère se rendait compte d'où venait vraiment l'argent, son esprit s'était détérioré au fil des années et bien souvent, elle croyait son époux encore en vie et demandait à sa fille d'aller lui dire qu'ils allait dîner où de lui demander où il avait bien pu mettre tel où tel objet. Au début, Adeline en pleurait. Par la suite, elle s'y était faite et n'y faisait plus trop attention. Et quelques fois, sa mère avait été lucide et pleurait alors sur leur situation, ce qui avait eu le don d'exaspérer sa fille. Adeline voyait tout les jours en passant par la Cour des Miracles ce qu'était la véritable pauvreté et ni elle ni sa mère n'avait été à plaindre, en comparaison.

Aujourd'hui, sa mère était morte, elle aussi. Décédée il y à peine quelques mois, à force de faiblesse, perdue dans sa douce folie intérieur. Adeline n'avait pas pleurée dans les premiers temps. Et quelque part, elle s'était même senti soulagé de ne plus avoir ce poids à porter sur les épaules, de ne plus avoir à s'inquiéter chaque jour que sa mère ne mette le feu par accident à leur appartement alors qu'elle partait au travail, ne plus avoir à supporter ses larmes et ses divagations. Et quand elle avait senti ce soulagement l'envahir le jour où elle était rentrée à la maison et l'avait retrouvé morte dans son lit, elle s'était sentie monstrueuse. La plus horrible des filles qu'on puisse avoir. Et ce sentiment ne l'avait jamais quitté vraiment, même alors qu'elle avait ensuite versée des torrents de larmes pour sa mère, seule dans leur appartement qui lui était alors apparu trop grand pour elle seule. Mélanie lui avait bien proposé d'emménager avec elle après cela et Adeline avait été tentée. Un loyer nettement moins cher a payé, sans compter qu'elle ne vivrait plus avec les souvenirs de ses parents vivants dans cet appartement qu'avait été le leur. Plus de longues routes dangereuses à faire pour rejoindre son travail, plus besoin de traverser la Cour des Miracles. Mais même si elle adorait Mélanie, elle n'était pas certaine de parvenir à la supporter tous les jours. Son fils, Benjamin, qui était un ami cher pour Adeline, lui avait expliqué en long et en large à quel point cela pouvait être horrible de vivre avec sa mère, même si c'était une femme formidable, dans le fond. Elle n'avait cependant pas envie de tester les réveils au saut d'eau glacée jetée sur la figure. Pas la moindre envie, non !

Elle était d'humeur mélancolique, ce soir. Elle ne savait pas trop pourquoi. Cela venait peut-être du client qui avait passé sa soirée à chanter des chansons d'amours perdues, soul à une table dans la taverne. Il chantait si fort qu'ils l'entendaient dans les cuisines et elle n'avait pu s'empêcher de remarquer à quel point sa voix était malheureuse. Peut-être avait-il eu le cœur brisé par une femme. Adeline n'en savait rien, mais il avait eu le don de lui mettre le cafard, ce qu'elle détestait, elle qui savait conserver sa bonne humeur même dans les pires moments de stress des cuisines.

La jeune fille sentit une goutte lui tomber sur la joue et elle leva les yeux vers le ciel noir, sans la moindre étoile, couvert de nuages. Merveilleux. Il allait pleuvoir et elle était encore assez loin de chez elle. Elle accéléra le pas et arriva dans les pires bas fonds de la Cour des Miracles où elle vit des hommes souls couchés par terre, certains levant leurs yeux inconscients vers elle. Elle aurait pu prendre un autre chemin, ce qu'elle aurait fait si elle avait été quelqu'un de conscient, mais cela lui prendrait le double du temps à aller et venir. Mais elle ne craignait pas les hommes de la Cour des Miracles. Certes, beaucoup la dévisageait et elle avait déjà subi des agressions, mais le poignard qu'elle cachait dans son pantalon et sa maniabilité à s'en servir l'avait toujours sauvé jusque ici. Ce poignard appartenait jadis à son père. Vu sa richesse apparente, elle était certaine qu'il l'avait volé quelque part où gagner à un pari, car il n'aurait jamais eu les moyens de s'offrir un tel objet. L'acier était aiguisé et brillant, et de l'or y était incrusté dans le milieu et le manche était si solide qu'il servait aussi bien d'arme que la lame elle-même et il était parsemé de pierres précieuses noires, des onyx. Elle aurait pu vendre cette arme pour gagner de l'argent, comme elle avait vendu bien des affaires de son père et de sa mère pour payer le loyer lors des mois difficile, lorsque les affaires de la taverne marchaient mal mais elle n'avait jamais eu le cœur de se séparer de cette arme. C'était ce qu'il lui restait de son père, bien qu'elle doute qu'il s'en ait réellement servi un jour. Mais elle, elle s'en servait. Benjamin savait très bien se battre après avoir passé des années à vivre dans le Sud de la France où son père était soldat et lorsqu'il revenait, souvent, à Paris pour voir sa mère, il acceptait toujours de l'entraîner avec son poignard et lui prêtait également son épée pour le lui enseigner. Elle avait l'impression que Benjamin la prenait des fois pour un garçon, mais il l'aimait bien et elle aussi. Grâce à lui, elle était fière aujourd'hui d'être parfaitement capable de se défendre tant qu'elle avait sa lame près d'elle et un jour, elle s'était jurée de s'acheter une belle et fine épée. Elle économisait déjà pour cela. Après tout, avec tout le travail qu'elle avait fait jusque ici pour sa mère, pour la maison, elle estimait être en droit aujourd'hui de s'offrir un petit plaisir même si cela lui prendrait du temps pour obtenir la somme nécessaire.

Adeline sentit alors un mouvement dans l'obscurité derrière, une ombre se mouvant qui la tira de ses pensées. Elle prit grand soin de ne pas changer le rythme de ses pas ni de jeter un coup d'œil en arrière, de toute manière elle n'en avait pas besoin. Comme bien souvent, quelques délurés l'avait pris en filature et attendait l'occasion pour la pousser dans un coin sombre et isolé où ils pourrait abuser d'elle. Elle était habituée à ces violeurs, ce n'était pas la première fois qu'elle y avait à faire. Jusque ici, elle avait toujours su gérer et elle prit son poignard en main. Elle n'avait absolument pas peur. Au contraire, elle dirait même qu'elle était quelque peu excitée et impatiente. Le danger avait toujours cet effet là sur elle. L'attente du combat l'enivrait littéralement. Elle était toujours satisfaite de voir l'air éberlué des hommes qui l'attaquaient, totalement pris au dépourvu qu'une femme puisse leur résister. C'était sûrement ce qu'il y avait de plus jouissif, en réalité. Leur surprise. Dans quelques minutes, elle serait contrainte de tourner à gauche pour prendre la direction de chez elle et elle passerait devant une obscure allé qui menait à un cul de sac qu'elle avait souvent remarqué en passant par là à cause de sa mauvaise odeur. Elle était certaine que pour eux, ce serait l'occasion et elle se tenait prête.

Et en effet, quand elle tourna au croisement des battisses en bois pourri, elle sentit une main lui saisir brusquement le bras tandis qu'une voix surexcitée lança :

- Attends, ma jolie, j'ai quelque chose à te montrer…

Adeline saisit alors son poignard, se retournant d'un coup dans l'intention de le planter dans le ventre de l'homme qui la tenait, mais alors qu'elle allait donner le coup, elle vit une ombre passer derrière l'homme et d'un coup, une main passa si vite devant la gorge de l'homme qu'elle aurait été incapable de la voir si elle n'avait pas été aussi près, et une immense entaille apparût sur le cou du violeur, du sang giclant sur elle tandis qu'il pris son cou dans ses mains, les yeux écarquillés en gargouillant quelques secondes avant de s'effondrer. L'ombre, l'homme dont elle ne pouvait voir le visage tellement il se mouvait vite, passa devant le second individu qui comptait l'agresser et lui réserva le même sort, avant de sortir une épée qu'il planta brusquement dans le ventre du troisième. En moins d'une minute, les trois violeurs étaient morts, égorgés et éventrés, à ses pieds.

Adeline les regarda quelques secondes, encore sous le choc d'une telle rapidité, quand une main se posa sur son épaule et elle se dégagea d'instinct, mais l'homme devant elle leva alors les mains dans un geste de paix et elle put enfin mieux le voir. C'était un jeune homme. A peine plus âgé qu'elle, elle en était certaine. Tout a fait charmant. Des cheveux bruns longs ramenés en une queue-de-cheval, de grands yeux marron. Un visage qu'elle aurait décrit immédiatement comme celui d'un noble, aux traits fins et élégants, malgré sa légère barbe qui le rendait un peu négligé. Il avait l'air sincèrement inquiet et lui demanda alors d'une voix très agréable :

- Vous n'avez rien ? Je ne crois pas qu'ils aient eu le temps de vous faire du mal.

Cela réveilla Adeline de sa surprise et elle ne put alors s'empêcher d'être quelque peu déçue de ne pas avoir pu se servir de son arme. Pendant une seconde, elle ressentit de l'exaspération envers le mignon jeune homme face à elle, même si elle savait qu'il n'avait eu sûrement que de bonnes intentions en intervenant ainsi. Elle marmonna d'un air bougon :

- Merci, mais je n'avais pas besoin de vous. Ce n'est pas la première fois que ce genre de choses se produit, vous savez.

Il sourit alors d'un air amusé, presque tolérant, ce qui ne fit que monter son exaspération. Encore un qui prenait les femmes pour de pauvres petites créatures fragiles qu'il fallait protéger, certainement. Si il ne l'avait pas aidée ainsi, elle lui aurait montré de quoi était capable la petite créature. Bien qu'elle n'était pas certaine de pouvoir réussir à le battre. Comment diable arrivait-il se mouvoir aussi vite, bon sang ? Si elle s'écouterait, elle se montrerait désagréable avec cet homme mais elle se savait injuste et méchante, il n'avait fait que vouloir l'aider, après tout. Et elle ne voulait pas le dissuader à l'avenir de répéter cette action pour une fille qui en aurait plus besoin qu'elle, alors se força à lui sourire et à dire :

- Merci encore. Vous êtes un homme bon… d'aider les femmes ainsi. Mais vous m'excuserez, il faut que je rentre chez moi.

- Vous ne devriez pas vous promener toute seule la nuit dans la Cour des Miracles, mademoiselle, intervint-il, l'air grave. C'est bien trop dangereux. Voulez-vous que je vous escorte jusqu'à chez vous ?

Adeline rit doucement en secouant la tête alors qu'elle reprenait déjà son chemin, se retournant pour le regarder et lui lancer :

- Je fais ce chemin tous les jours depuis neuf ans, je crois que ça ira, merci. Allez aider des personnes qui ont plus besoin de vous que moi, je me débrouillerai.

Il hésita quelques secondes, la regardant avec les sourcils froncés mais un petit sourire finit par apparaître sur son visage et il hocha la tête, la trouvant visiblement amusante et déclara :

- Vous me rappelez quelqu'un que je connais. Très bien, comme vous voudrez, mademoiselle.

Il tourna alors les talons et esquissa un geste derrière sa tête pour ramener une capuche dessus et dès l'instant où elle l'a vit, Adeline sentit son cœur faire un bond dans sa poitrine en voyant l'apparence que cette capuche lui donnait et la première pensée qui traversa son esprit fût : un Assassin. Immédiatement, elle se mit à lui courir après mais à peine s'eut-il engouffrer dans le croisement qu'elle venait de franchir qu'elle ne le vit plus. Disparu. Juste une ombre qui était entrée sans qu'on ne l'entende et qui était parti de la même manière. Elle s'en voulut alors comme jamais d'avoir loupée une telle occasion, cette occasion qu'elle attendait depuis tellement d'années ! Et elle venait de lui passer sous le nez ! Si elle n'était pas aussi furieuse contre elle-même et déçue, elle en aurait pleurée. Mais comment n'y avait-elle pas pensée tout de suite, bon sang ? La manière dont il s'était battu, dont il avait bougé, dont il était apparu… c'était exactement ainsi que faisait les Assassins. Elle resta quelques secondes immobile à fixer la ruelle où il avait disparu, comme si il allait revenir brusquement puis se rappela qu'elle avait trois cadavres derrière elle et qu'il valait mieux éviter que des gardes tombe sur elle avec cela, même si ils ne passait quasiment jamais par ici. Elle reprit alors sa route pour rentrer chez elle, pestant contre elle-même durant tout le chemin.

Elle n'était pas censé connaître l'existence des Assassins. Cette Confrérie vivait dans l'ombre et se battait pour la liberté du peuple mais ne se faisait jamais remarquer, que ce soit par leurs cibles où le peuple qu'ils protégeaient. Si elle connaissait leur existence, c'était dû à un homme trop bavard et anéanti. Un homme qui avait travaillé pour les ennemis naturels des Assassins. Les Templiers. Pour être honnête, elle n'en savait pas autant qu'elle l'aurait voulu sur le sujet. Les seules choses qu'elle savait, elle le tenait de Gabin, le garde qui avait survécu à l'attaque où son père avait péri. Gabin qui, un soir où elle l'avait trouvé ivre dans une ruelle alors qu'elle avait onze ans, lui avait révélé que l'homme pour lequel ils travaillaient, l'homme dont ils étaient censés protéger la demeure, était un Templier. Elle n'avait pas trop compris ce que ce mot voulait dire enfant, Gabin parlant de sectes, de complots, de meurtres, de pouvoir, trop de choses incompréhensibles pour l'enfant qu'elle était. La seule chose qu'elle avait véritablement retenue, c'est que l'homme qui avait condamné la vie de son père en bloquant les entrées de son palais était un Templier et que Gabin voulait rejoindre des certains « Assassins » pour se battre contre ces monstres, comme il le disait. Quelques mois après qu'il lui ait parlé, Mélanie et elle retrouvèrent son cadavre dans une ruelle sordide de la Cour, et du haut de ses dix ans, alors qu'elle regardait le corps de Gabin qui était couché, les yeux grands ouverts vers le ciel, elle avait acquis la certitude que, qui que ce soit ses Templiers, c'était eux qui avait tué Gabin. Parce qu'il savait trop de choses et qu'il parlait trop. Connaissant Gabin et son amour du vin, elle n'avait du être qu'une parmi des vingtaines d'autres personnes à qui il avait raconté ses idées. Mais au final, peut-être qu'elle avait été la seule à véritablement le croire.

Au début, c'était devenu une obsession pour elle. Elle devait savoir qui était les Assassins, qui était les Templiers, qui avait condamné son père à mort. Mais vu le sort de Gabin, elle avait été assez maligne pour comprendre qu'il ne fallait pas poser des questions à n'importe qui autour d'elle. Elle avait d'abord commencé par Benjamin, un soir où ils s'entraînait dans le grenier de la maison de Mélanie, fusionné à la taverne où Adeline aimait passer ses journées, ne supportant plus des fois les larmes où les divagations de sa mère. Benjamin n'avait au début rien su lui dire à ce propos. Il lui avait même rit au nez en lui disant de cessez de raconter n'importe quoi mais quatre mois plus tard, alors qu'il revenait de Marseille, il en avait appris un peu plus sur le sujet, son père en sachant davantage de toute évidence, même si celui-ci avait été peu bavard sur le sujet.

C'était essentiellement des rumeurs, qu'il avait appris, rien de véritablement sûr, des rumeurs qui dirait que l'Ordre des Templiers n'a jamais disparu, contrairement à ce qu'indiquait l'Histoire où le Concile de Vienne aurait dissout les Templiers en 1312 sous la demande du roi de France Philippe le Bel et du pape Clément V. L'Ordre existerait même bien avant le Moyen-Âge et aurait continué de prospérer jusqu'à aujourd'hui, étant à la fois une sorte de secte mais aussi un rassemblement d'hommes puissants oeuvrant pour le pouvoir. Quand aux Assassins, Benjamin n'avait pas pu en apprendre autant, mais ce serait apparemment une sorte de Confrérie qui lutterait contre les Templiers afin de sauvegarder la liberté du peuple. Ils se dissimulerait dans la foule et dans les toits et se battait comme des diable, parait-ils et n'était reconnaissable que par leur capuche sensé dissimuler leurs visages aux yeux du monde. Cette Confrérie serait d'ailleurs composé autant d'hommes que de femmes. Ces derniers points, elle les avait appris en écoutant les ivrognes parler dans la taverne au fil des années.

Et alors que le temps passait, elle s'était prise à rêver d'en faire parti, de ces Assassins. Elle qui avait souvent l'impression d'être seule au monde, l'idée d'appartenir à une Confrérie… de lutter contre ceux qui cherchait à opprimer les plus faibles et aussi, quelque part, rendre justice à son père quand bien même son véritable meurtrier demeurait une ombre sans visage pour elle et le resterait sans doute à jamais. Elle aurait néanmoins eu l'impression de le venger en luttant contre tout ces Templiers. Mais si elle avait pu récolter ces informations grâce à Benjamin et aux ivrognes, jamais personne n'a pu lui dire comment trouver un Assassin où entrer en contact avec la Confrérie. Elle s'était résignée au fil des ans à ne jamais pouvoir en faire parti si ils demeuraient introuvables.

Et voilà qu'elle était certaine d'en avoir vu un. Un juste sous ses yeux. Un Assassin.

Un jeune, tout comme elle. En formation peut-être encore ? Il se battait déjà pourtant si bien ! Plus elle revoyait dans sa tête comment il avait tués ces trois pervers, plus elle mourrait d'envie de savoir faire cela également et sentit à nouveau cette frénésie qui l'avait prise dans sa préadolescence quand cette obsession était née chez elle mais qui l'avait quitté à regrets au fil du temps car elle ne voyait absolument pas comment entrée dans la Confrérie. Mais son espoir était en train de renaître, elle ne pouvait pas s'en empêcher. Peut-être encore plus fort qu'avant, même car autrefois, elle avait conscience qu'elle ne pourrait pas laisser sa mère pour aller combattre pour une Confrérie. Mais aujourd'hui, plus personne ne l'attendait à maison. Plus personne n'avait besoin d'elle. Mélanie serait sans doute contrariée qu'elle ne puisse plus venir travaillée, mais elle trouverait quelqu'un d'autre en moins de temps qu'il faudrait pour qu'elle parte, les gens qui cherchaient du travail couraient chaque coin de rue. Son cœur battait à cent à l'heure dans sa poitrine. Avec un peu de chance, elle reverrait cet Assassin. Certes, elle n'avait aucune certitude qu'il en était vraiment un à part sa conviction que si, et ce n'était pas suffisant pour l'affirmer, pas plus qu'une simple capuche et une grande habilité au combat ne l'était, elle en était consciente mais cela suffisait à la convaincre pour l'instant. Il fallait qu'elle le retrouve. Si il avait été là cette nuit, c'était peut-être qu'il avait quelque chose à faire dans cette partie de Paris. Quelqu'un qu'il cherchait à la Cour des Miracles, peut-être ? Ce n'était pas le roi des Thunes, cet homme dont on ne savait quasiment rien mais qui régnait en maître sur la Cour qui allait l'aider, d'après ce qu'elle savait de cet homme mystérieux et dangereux, il n'aimait guère partager le pouvoir et n'apprécierait sans doute pas la présence d'un Assassin dans les environs.

Elle aurait aimée se débarrasser de son excitation grandissante car elle était consciente qu'il y avait aussi peu de chances qu'elle revoit cet Assassin un jour. Mais cela lui avait donnée de l'espoir. L'espoir de pouvoir finalement réaliser son rêve et enfin sortir de cette vie dont elle aurait pu se satisfaire, mais qui ne la comblera jamais vraiment. A mesure qu'elle marcha dans l'obscurité, passant entre les murs de briques grossiers et entre les feux de camps où se battait d'autres ivrognes, l'odeur de merde et de crasse lui brûlant les narines, elle finit par enfin quitter ces quartiers désolées pour arriver à la frontière de la Porte Saint-Denis qui la séparait du Marais, et où se situait son modeste appartement, au-dessus d'un tanneur qui était aussi son propriétaire, monsieur De la Croix, du genre peu bavard à tanner ses peaux d'animaux toute la journée et à encaisser le loyer quand il se présentait, mais un homme bon au fond, tolérant, il lui était déjà arrivée d'avoir des retards dans ses paiement et ils ne les avait jamais mises à la porte, sa mère et elle. Dans le fond, elle aimait bien ce vieillard bourru qui marmonnait dans sa barbe et maudissait les jeunes, les révolutionnaires, les nobles, le roi, les chats, les chiens où presque tout ce qui se trouvait sur sa route.

L'immeuble n'était pas en très bonne qualité, il aurait nettement eu besoin de travaux, d'un coup de peintures et de finitions, des fissures se faisant partout et lorsqu'il pleuvait, l'eau tombait à certains endroits en masse mais humidifier surtout les murs, créant parfois de la moisissure, que la mère d'Adeline nettoyait autrefois et qu'elle faisait-elle désormais au quotidien sans même s'en rendre compte tellement l'habitude était ancrée. Mais malgré cela, l'endroit restait assez chaud lorsqu'on y allumait un feu, étant bien isolé du vent entre deux autres immeubles, et les fenêtres étaient solides, à défaut de l'intérieur charmant. Leur partie de l'immeuble était tout l'étage du dessus, plus le grenier. L'étage était surtout composé d'une immense pièce principale, où se trouvait la cuisine et une sorte de salon de fortune, plus une petite chambre qui était jadis celle de ses parents puis celle de sa mère, Adeline s'étant installé dans le grenier qu'elle maintenait plus propre que les cuisines de l'Eclopée. Adeline s'assura de ne pas faire de bruit lorsqu'elle déverrouilla la porte d'entrée, ne voulant pas réveiller Monsieur De la Croix, et elle grimpa aussi vite que possible, se rappelant alors le sang qu'elle avait sur elle du à l'attaque. Il valait mieux qu'elle l'enlève vite et qu'elle nettoie rapidement sa veste de coton.

Adeline aurait pu se sentir seule, dans ce grand appartement depuis la mort de sa mère, mais ce n'était pas vraiment le cas. Elle n'y restait que rarement. Elle aimait l'indépendance qu'il lui offrait, mais elle passait le plus clair de son temps à l'Eclopée où dans le grenier de la maison de Mélanie quand Benjamin était là, à s'entraîner. Elle avait bien consciente que sa solitude serait bien plus dure à vivre si ils n'était pas là, ces deux là. Ils était devenus un peu sa seconde famille après la mort de son père et la chute de sa mère, qui était devenu au fil des années une étrangère pour Adeline. C'était triste à dire, mais elle détestait parler autrefois avec sa mère. Celle-ci, dans sa tête, croyait encore que Adeline avait dix ans et que son père allait rentrer d'un moment à l'autre et elle ne supportait pas d'entendre cela. Un jour, elle avait craqué alors qu'elle avait quinze ans et avait hurlé sur sa mère que son père ne rentrerait jamais, qu'il était mort, mort et enterré. Ce qui avait eu pour seul effet de faire pleurer et hurler Charlotte, avant que Adeline culpabilise et s'efforce de la calmer et de la mettre au lit. Au réveil, les divagations de sa mère avaient repris, comme si elle n'avait aucun souvenir de l'éclat de sa fille, ce qui était très probable. Après ce jour, Adeline n'avait plus jamais rien dit, et avait éviter de parler avec sa mère le plus possible, quand bien même elle aurait donner sa vie pour elle sans la moindre hésitation.

Une fois assurée que la porte d'entrée était bien fermée, Adeline alluma une bougie et monta dans le grenier, sentant l'épuisement de la journée la prendre. Elle se lava, se débarrassant du sang des violeurs et se coucha rapidement et durant tout ce temps, jusqu'à la dernière seconde où elle resta éveillé, elle ne put s'empêcher de penser encore à l'Assassin. Et à tout ce qui pourrait changer dans sa vie si, par miracle, elle le retrouvait.


- Bon sang de bon dieu, merde, Adeline, dépêche-toi ! Je ne te paie pas pour que tu badines avec les clients ! Où vais-je avec des employés comme ça, moi…

- J'arrive, Mélanie, j'arrive, répondit Adeline en quittant la table où elle discutait avec l'un des grands buveurs de vin de l'Eclopée en souriant, bien trop habituée à entendre Mélanie crier ainsi pour se sentir vraiment insultée.

C'était le soir et c'était le moment le plus rentable de la journée pour chaque taverne de Paris. Les hommes sortait de leur travails ingrats, mal payés, et venait soignés leur amertume avec du vin dans les tavernes, les prostituées en profitait pour venir vendre leurs charmes et l'Eclopée devenait chaque soir un véritable chaos où un accident se produisait presque à chaque fois. Et à chaque fois, ceux qui s'occupaient de servir les clients ne suffisaient pas et on appelait ceux des cuisines. Adeline étant jeune d'après les dires de ses messieurs, elle était celle qui venait le plus souvent aidée devant, et elle devait dire qu'elle aimait bien cela, cela lui laissait toujours l'occasion d'assister à des scènes très amusantes. Elle ne dirait pas qu'elle se trouve joli, cela dit. Certes, elle n'était sûrement pas désagréable à regarder mais elle n'avait rien d'une beauté. Sa peau couleur crème était lisse mais banal. Elle n'était pas très grande et avait trop de formes pour être qualifié de vraiment mince, même si elle n'était pas enrobée. Benjamin disait qu'elle avait tantôt des yeux de biches effarouchées, tantôt des yeux de tigresse furieuse. Elle, elle ne voyait que deux yeux marrons chocolat, grands certes et plutôt joli, mais n'ayant rien d'extraordinaire. La seule chose qu'elle aimait vraiment elle, c'était sa longue chevelure brune et épaisse, qu'elle entretenait avec soin et qu'elle n'aimait rien tant que de laisser à l'air libre.

Mélanie était derrière le bar, à rager et à hurler de temps à autre quand une fille avait le malheur de faire une erreur alors que Adeline passa à côté pour les rejoindre les cuisines. Elle remarqua également Benjamin, qui était à Paris depuis une semaine, assis sur l'un des tabourets à nettoyer son pistolet argenté, cadeau de son père, qu'il adorait plus que tout au point qu'il refusait catégoriquement qu'elle le touche pendant leurs entraînements. Ce pour quoi elle lui en voudrait toujours, apprendre à manier les pistolets la tentait énormément, même si elle se sentait particulièrement à l'aise avec les armes blanches. Elle sourit à Benjamin en passant, qui lui fit un clin d'œil amusée en ignorant lui aussi sa mère qui sortit brusquement du bar après avoir entendu un bruit de verre brisée au fond de la taverne, armée d'un rouleau à pain, prête à frapper la pauvre personne, quel quelle soit, qui venait de faire une bêtise.

Mélanie était une femme d'une cinquantaine année, mais avec une telle rage et une telle force vibrante en elle qu'elle en paraissait dix de moins. Un peu en surpoids, cela ne faisait que la rendre plus redoutable et on pouvait être sûr que tout le quartier la connaissait et la respectait. Mélanie la Harpie, comme on l'appelait. Avec des cheveux brun/roux mi-long encore bien vif et avec des yeux noirs plus menaçant que n'importe quel fusil de la garde, personne ne lui cherchait les noises, pas sans en payer les conséquences d'un joyeux coup de rouleau sur la terre, voir d'une bouteille jeté à la figure dans les grands cas. Mais même si on riait facilement de la fureur de Mélanie, tout le monde était tellement habitué à elle à la Porte Saint-Denis qu'Adeline doutait que ce quartier aurait pu continuer de tourner sans elle et son Eclopée.

« Derrière chez nous, y un étang, derrière chez nous y a un étang, trois beaux canards s'en vont baignant… »

Adeline entendit les buveurs et les putains entonner la chanson « V'là l'bon vent » et elle éclata de rire en remplissant les écuelles en bois du potage qu'on servait ce soir et se mit à chantonner avec eux, tout en pensant que Mélanie allait encore plus râler, elle faisait mine qu'elle détestait quand les ivrognes se mettait à chanter, que « cela lui faisait saigner les oreilles » mais en réalité, elle adorait cela et se retenait difficilement de chanter avec eux, elle l'avait prise en flagrant délit un jour, Adeline ne risquait pas de l'oublier.

Elle sortit des cuisines, trois assiettes sur les bras, se sentant joyeuse et chanta plus fort dans la salle avec les chanteurs, ce qui les enivra et le son monta alors que les paroles résonnaient dans l'Eclopée et sûrement dans toute la rue :

« V'là l'bon vent, v'là l'joli vent, v'là l'bon vent, ma mie m'appelle, v'là l'bon vent, v'là l'joli vent, v'là l'bon vent, ma mie m'attend… »

C'était les moments qu'elle préférait dans son travail. Elle aimait bien les longues journées à préparer les plats pour le soir, avec les autres cuisiniers grognons de travailler dans la chaleur alors qu'ils pourrait dormir et dont elle se moquait gentiment, mais quand venait les soirs où tout s'enivrait, où l'énergie commençait à monter en puissance, où la fièvre prenait les clients de l'Eclopée et où les chants se faisait entendre, et où souvent les sangs s'échauffait et les bagarres éclatait juste ensuite, là elle se sentait vraiment bien, il y avait avant cela un véritable sentiment de famille qui se faisait sentir dans la taverne, un sentiment qu'elle ne connaissait que dans ces instants là. Dans ces moments là, ils était tous les mêmes, tous égaux et tous frères. Elle aimait à penser que la Révolution éclatait de là à la base. De ces sentiments d'égalité qu'on pouvait ressentir par moments dans les rues de Paris.

« Le fils du roi s'en va chassant, le fils du roi s'en va chassant, avec son beau fusil d'argent, visa le noir, tua le blanc, ô fils du roi, tu es méchant, d'avoir tué mon canard blanc ! ».

Adeline servi les assiettes aux trois hommes de la table en chantant gaiement près d'eux, elle se prit même à sautiller dans la salle d'un pas joyeux jusqu'au bar, retrouvant Benjamin qui la dévisageait avec un sourire amusé en secouant la tête. C'était un beau et solide jeune homme de vingt deux ans, musclé par ses derniers mois au service des soldats fédérés de Marseille aux côtés de son père. Il ne ressemblait pas trop à sa mère, à part qu'il avait les mêmes yeux noirs qu'elle mais il tenait sinon les cheveux bruns et la peau plus mate de son père du Sud de la France, père qu'elle n'avait jamais vu. Ils avait généralement du mal à le faire boire mais une fois qu'il était lancée, il était celui qui chantait le plus fort. Elle prit alors la bière derrière le bar et lui servit une importante pinte qu'elle lui tendit avec un sourire innocent. Adeline aimait bien le voir chanter, il arrivait toujours à faire une chute et à rouler par terre. C'était très comique.

- Oh, non, non, tu ne me ridiculisera pas ce soir, sale peste, ria Benjamin en repoussant la pinte de bière.

- Parle pour l'instant, mon cher, si je n'arrive pas à te faire chanter, une de ces jolies dames s'en chargera à ma place, sourit-elle en grandement en buvant elle-même la pinte, ce qui la fit grimacer. En réalité, elle préférait le vin à la bière. Quand est-ce que tu m'apprends à tirer avec ce beau jouet, dis-moi ?

- Jamais, personne ne touche à Didine, rétorqua Benjamin en lorgnant amoureusement son pistolet.

- Je me demande vraiment ce que tes frères d'armes diraient si ils savaient que tu surnommais ton pistolet « Didine ». Ah ça oui, j'aimerais le savoir.

- Ils le savent, tu vois, et je suis loin d'être le pire, y en à un qui appelle tous les soirs son fusil « ma petite cochonne ».

- Et après on s'étonne que le peuple ait pris la Bastille ! Ria Adeline en secouant la tête.

- Ne rie pas avec cela, Addie, c'est du sérieux, se renfrogna Benjamin. Nous ne sommes pas avec les nobles, nous sommes pour la Révolution.

- Ne te fâche pas, sale bourriquet, je plaisantais, c'est tout.

Une claque se fit alors sentir derrière sa tête et bien vite, Benjamin eu aussi le même sort et ils entendirent alors la charmante voix de Mélanie leur hurler dans les oreilles :

- Qu'est-ce que vous faites à ne rien faire, tout les deux, hein ? Adeline, tu à encore des plats à servir, il me semble, alors au boulot ! Le jour où tu sera mariée à mon fils, tu pourra te consacrer à lui mais ce jour n'est pas encore arrivée, alors bouge toi le cul ! Et quand à toi, sale petit vermisseau, explique-moi pourquoi tu reviens de chez ton père si c'est juste pour glander comme un feignant toute la journée dans la taverne…

- Maman, je travaille là-bas, j'aime me reposer quand je suis ici avec toi et Addie, plaida Benjamin en jetant un coup d'œil à Adeline, l'appelant au secours du regard.

- Te reposer ? Tu te moques de moi, j'espère ? Tu crois que c'est des vacances, Paris ? Ah ça non ! Il y a du boulot pour des bras d'hommes ici, mon petit, et tu vas t'y coller ! Je vais aller lui parler moi à ton père, il te met dans la tête que tu peux feignanter ici parce que monsieur à fait de lui un vrai petit soldat…

Mélanie continua sa diatribe en gesticulant devant son fils et Benjamin supplia Adeline du regard qui, elle, lui fit clairement comprendre qu'il allait devoir se débrouiller, et elle quitta le bar en écoutant avec amusement la mère passer sa colère sur son fils. Elle se demandait ce qu'elle ferait, sans ces deux-là, au quotidien. Elle savait que Mélanie était sérieuse quand elle parlait du mariage pour Benjamin et elle. Adeline travaillait depuis si longtemps dans cette taverne qu'elle savait mieux la gérer que quiconque à part Mélanie, mieux que Benjamin lui-même et à de nombreuses reprises Mélanie lui avait dit qu'elle comptait lui laisser les lieux en héritage une fois qu'elle aurait épousé Ben. Pour Mélanie, c'était assuré, sans le moindre doute, Adeline et son fils serait mariés un jour. Pour Adeline, c'était nettement moins sûr. Elle adorait Mélanie, autant qu'elle adorait Benjamin mais ce dernier était pour elle un grand frère et un ami, ni plus ni moins. Elle ne se voyait pas l'épousé. Elle ne se voyait épouser personne, de toute manière. Peu d'hommes accepteraient une femme qui s'habille en homme et qui désire s'acheter une épée et s'en servir. Et elle ne se voyait pas du tout vivre en femme au foyer, obéissante, s'occupant de la taverne et donnant des enfants à Benjamin. Des enfants. Voilà encore quelque chose qu'elle n'avait pas du tout envie d'essayer. Après sa propre enfance, elle ne voulait pas prendre le risque d'infliger éventuellement cela à un être innocent. Quand à Benjamin, elle ignorait ce qu'il pensait des certitudes de sa mère. Elle avait l'impression qu'il s'en moquait et cela l'arrangeait bien. Après tout, il passait la moitié de l'année si ce n'est plus à Marseille, il devait avoir bien des amours qui l'occupait là-bas.

« Par-dessus l'aile, il perd son sang, par les yeux lui sort des diamants, et par le bec l'or et l'argent, toutes ses plumes s'en vont au vent, trois dam's s'en vont les ramassant, v'là l'bon vent, v'là le joli vent, v'là le bon vent, ma mie m'appelle, v'là l'bon vent, v'là l'joli vent, v'là le bon vent, ma mie m'attend, c'est pour en faire un lit de camp, pour y coucher tout les passants… »

Adeline sourit et continua de chanter et les chansons défilèrent toute la soirée alors qu'elle continua de servir les plats et comme elle le prédit, Benjamin avait cédé à l'appelle de la bière et chantait désormais à tue-tête debout sur une table, une fille de joie jolie comme tout riant à ses pieds. Adeline savait qu'elle le ramasserait endormi sur un banc le lendemain matin, en écoutant Mélanie rager sur son bon à rien et ivrogne de fils. Mais la nuit était loin d'être fini et il y aurait encore beaucoup de boulot. Alors qu'elle alla emmener une énième tournée de bière cette fois dans la salle, Adeline leva les yeux vers l'entrée par hasard et se figea à l'entrée du bar, son sang ne faisant qu'un tour.

Il était là. L'Assassin.

C'était lui. Elle n'eut aucun mal à le reconnaître. Dans la frénésie et l'ivrognerie générale, personne ne fit attention à lui et il se fondait parfaitement dans la masse, même avec sa capuche bleue, mais elle, elle le remarqua immédiatement. Elle devait rêver, tout de même. Dans la nuit, elle s'était quelque part convaincue que jamais elle ne le reverrait, quelles en étaient les chances, après tout ? Et voilà qu'elle le retrouvait à peine le lendemain ? Elle qui n'avait jamais vraiment en cru en Dieu, elle commençait à avoir des doutes, peut-être existait-il après tout et qu'il avait décidé de se pencher sur elle ce soir.

L'Assassin alla à l'encontre de quelqu'un assis à une table, un homme seul qui commandait bière sur bière depuis le début de la soirée et qui avait l'air bien malheureux, sans chanter, sans même lever la tête, son visage enfoui dans ses bras, le sortant juste pour siroter sa bière. Adeline continua alors son travail mine de rien mais fit en sorte de ne surtout pas le quitter du regard durant tout le temps qu'il fut là. Son cœur battait à en risquer l'arrêt dans sa poitrine. Elle se sentait prête à agir d'un instant à l'autre. Est-ce que cela venait de l'excitation habituelle de la soirée où bien était-ce la sienne qui avait monté d'un coup à la vue de l'Assassin, elle l'ignorait, mais elle savait que cette fois, elle ne passerait pas à côté de cette chance. Bon, elle ne savait pas trop ce qu'elle comptait faire en réalité, mais elle savait qu'il faudrait qu'elle tente quelque chose au risque de voir passer sa dernière chance sous le nez.

L'Assassin parla pendant un long moment avec l'homme sur la table et Adeline s'assura de ne pas les quitter des yeux sans trop non plus les regarder, de crainte qu'ils remarquent quelque chose. Elle n'avait pas l'impression que l'ivrogne avait vraiment conscience que l'Assassin lui parlait, mais au bout d'une bonne demi heure, elle vit l'Assassin se lever de table et laissez l'homme seul avant de se diriger vers la sortie, disparaissant déjà dans la foule de clients. Sans même réfléchir une seconde, Adeline jeta le chiffon avec lequel elle était en d'essuyer des verres et s'engouffra à son tour dans la foule, déterminée à ne pas le perdre cette fois.

Elle se retrouva rapidement dehors et vit l'Assassin marcher d'un pas tranquille dans les rues, bien visible devant elle étant donné qu'à cet heure-ci, les rues était plutôt vides à part les prostituées, leurs clients, les ivrognes et bien entendu, les gardes qui patrouillait partout dans Paris quel que soit l'heure. Ne savant pas trop quoi faire dans un premier temps, elle suivit son instinct et se mit à suivre l'Assassin, marchant à un pas éloigné du sien, lentement en essayant d'avoir l'air décontractée et surtout désintéressée. Elle aurait pu certes allait lui parler directement mais allez savoir pourquoi, elle sentait l'étrange besoin de prouver à cet homme qu'elle était capable de le suivre sans qu'il le remarque. Elle ne connaissait pas tout de la Confrérie, mais elle savait que la discrétion était de mise au sein de ses frères d'armes et elle savait que bien des fois, on était obligés de filer ses cibles pour les atteindre. Si elle lui montrait déjà qu'elle savait faire cela… bien qu'elle doutait de savoir le faire vraiment, mais si par bonheur elle y arrivait, cela lui ferait marquer des points.

L'Assassin marcha pendant longtemps. Ce qui finit par surprendre Adeline et instauré le doute en elle. L'avait-il remarqué ? Faisait-il exprès de traîner, bien à vu, alors qu'il pourrait disparaître aussi facilement qu'il l'avait fait la veille ? Où bien était-elle vraiment en train de réussir ? Elle doutait sincèrement de cette dernière hypothèse mais après tout, il ne fallait pas perdre espoir… Elle eut sincèrement l'impression qu'ils étaient en train de traverser toute la Porte Saint-Denis. Elle remarqua d'ailleurs que l'Assassin contournait volontairement la Cour des Miracles et passait les côtés, ce qui le poussait à faire un détour vu la direction qu'il semblait prendre. Adeline continua de le suivre dans une plus large ruelle au sol escarpé et cabossé, où les bâtiments délabrés et sales se succédaient les uns aux autres. Ils passèrent devant d'autres tavernes où la musique se faisait encore entendre malgré l'heure avancée de la nuit et Adeline évita à de nombreuses reprises sur sa route des chariots renversés où des tonneaux brisés. Elle ne put s'empêcher de penser que cette partie de la ville aurait besoin plus que n'importe laquelle de travaux, de peintures. Les murs était gris, sales, ne restait que quelques traces des anciennes couleurs. Mais avec la Révolution qui grondait dans tout Paris, rénover les coins pauvres de la ville était certainement le cadet des soucis de ceux qui pourraient se le permettre.

Au bout d'un moment, l'Assassin tourna dans une ruelle étroite, disparaissant de sa vue et Adeline accéléra pour le suivre mais lorsqu'elle se retrouva dans la ruelle obscure et déserte, elle ne vit personne alors que cette rue menait à un cul de sac, face à un puits. Adeline fronça les sourcils. Comment diable avait-il pu disparaître ici ? Il n'y avait aucun endroit où aller ! Alors qu'elle commença à sentir la déception l'envahir, un souffle de vent passa derrière elle, comme si quelqu'un était passé brusquement et au moment où elle allait se retourner, une main la saisit tout à coup à la gorge et la plaqua contre le mur, lui coupant la respiration et elle sentit alors quelque chose de froid et d'aiguiser pressé contre sa gorge. Elle n'avait pas besoin de baisser les yeux pour savoir qu'il s'agissait d'une lame, une lame prête à lui trancher la jugulaire et elle sentit la peur l'envahir lentement mais lorsqu'elle vit qui était son agresseur, sa peur se calma un peu et elle ne put s'empêcher d'être prise d'un rire nerveux.

- Tu vas me dire pourquoi tu me suis, et rapidement, déclara tout bas l'Assassin d'une voix menaçante, ayant de toute évidence choisi d'ignorer son rire, ce qui ne fit que l'augmenter.

- Bien entendu, rétorqua-t-elle, mais d'abord répondez moi honnêtement, s'il vous plait : depuis quand a-tu senti que je te suivais, Assassin ?

Le jeune homme parût légèrement pris au dépourvu par sa question, s'étant apparemment attendu à ce que l'étrange lame qui lui sortait du poignet sans qu'il ne la tienne aucunement, comme si cette lame était accroché à une sorte de bracelet, suffise à la terrifiée. Pour être honnête, elle avait peur, il aurait suffit qu'il appuie un peu pour lui trancher la gorge et elle n'aurait pas survécu plus de quelques minutes. Mais pas autant qu'elle le devrait, sans doute et si il y a bien une chose qu'elle avait appris en se tirant de nombreuses agressions quand elle passait dans la Cour des Miracles, c'est qu'il ne fallait jamais montrer sa peur, cela surprenait toujours l'ennemi. Même les Assassins, de toute évidence, bien que malgré le fait qu'il était en train de la menacer d'une lame, elle ne parvenait pas à le considérer comme un ennemi.

- Depuis que nous avons dépassé l'église, déclara-t-il durement, se reprenant visiblement, appuyant la lame de quelques centimètres de plus. Pourquoi me suivais-tu ?

- Ah ! Vous voyez ! S'écria-t-elle, un immense sourire apparaissant sur ses lèvres, sentant la joie l'envahir et un peu de fierté aussi. Vous ne l'aviez pas remarqué immédiatement, que j'étais derrière vous ! Nous avons dépassés l'église il y à peine dix minutes et cela fait au moins une demi-heure que je vous suis. Oh, je voulais juste vous parlez, c'est tout, vous êtes parti avant que je puisse le faire hier soir.

L'Assassin secoua la tête, et elle put voir dans ses yeux qu'il la pensait complètement folle. Sans doute était-il en train de regretter de l'avoir aidé, hier. Bah, elle l'était peut-être après tout, mais elle s'en moquait éperdument. Elle avait réussi à filer un Assassin pendant vingt minutes sans qu'il ne s'en rende compte et cela, elle en était fière et son sourire ne disparaîtrait pas de sitôt.

- Ah oui ? Eh bien, je suis là, c'est peut-être ta dernière occasion de le faire, tu peux me croire, alors si j'étais toi, je me dépêcherais.

Elle n'allait pas se le faire dire deux fois. Bien qu'elle doutait qu'il irait jusqu'à la tuer malgré ses menaces, allez savoir pourquoi.

- Je sais ce que tu es, Assassin, dit-elle, son sourire s'agrandissant, décidant d'aller droit au but. Je sais ce que vous êtes, toi et ta Confrérie. Je sais que vous essayez d'être discret, mais vous devez bien savoir que c'est impossible de le cacher au monde entier. Je sais qui vous êtes et ce que vous faite et je veux en faire parti. Je veux devenir un Assassin.

Adeline se sentait exaltée de pouvoir dire cela enfin à voix haute à quelqu'un de cette Confrérie. Elle sentait son cœur battre la chamade dans sa poitrine, s'accélérant un peu plus alors que le silence de l'Assassin s'éternisait devant elle tandis qu'il l'a dévisageait d'un air indéchiffrable. Elle avait l'impression que tout s'accélérait d'un coup, comme si elle avait attendu ce moment là toute sa vie. Depuis que l'annonce de la mort de son père s'était répandue dans tout le quartier. Et encore plus depuis la mort de sa mère. Pour dire la vérité, depuis que celle-ci était morte, Adeline avait l'impression de vivre dans l'attente perpétuelle de quelque chose. Et à cet instant précis, elle avait l'impression que ce quelque chose se produisait enfin et cela l'exaltait. Elle regarda l'Assassin, dans l'attente de sa réaction, de ce qu'il allait pouvoir dire. Elle s'était attendue à tout. A un refus violent, à une offre éventuelle d'aide ce qu'elle espérait plus que tout, à ce qu'il disparaisse sans répondre mais elle ne s'était certainement pas attendu à ce qu'il éclate de rire au point d'en baisser sa lame. Ah ça non, elle ne l'avait pas vu venir. Et dire qu'elle en fut vexée était un euphémisme. Il la lâcha, s'éloignant d'elle toujours en riant et en secouant la tête et elle croisa les bras, sentant l'exaspération l'envahir au fil des secondes qu'elle passa à le regarder se moquer d'elle.

- Je ne vois vraiment ce qu'il y a de drôle dans ce que je viens de dire. Vraiment pas.

- Non ? S'étonna l'imbécile. C'est encore plus drôle, alors. Ecoute, il vaut mieux que tu rentres chez toi et que tu oublies ce que tu viens de dire, ainsi que ce que tu sais sur les Assassins. Ce n'est pas une vie amusante et pleine d'aventures, contrairement à ce que tu crois. Tu ne sais pas du tout ce dans quoi tu veux t'engager, alors renonce-y maintenant. Tu à l'air de quelqu'un de bien et de gentil. Cette vie n'est pas faite pour toi. Et cela vaut mieux, tu peux me croire.

Il était devenu bien plus sérieux, et après son petit discours, tourna les talons dans le but évident de la laisser ici sans davantage de réponse. Adeline resta quelques secondes interloqué par ce qu'il venait de dire, non pas parce que ses mots avait fait mouche mais parce qu'ils la mettait hors d'elle et sa colère monta bien avant qu'il n'ait eu le temps de quitter le coin sombre où il l'avait entraîné.

- Attends ! Je n'avais pas fini ! Qui est-tu pour me dire ce qui est fait où non pour moi ? S'écria-t-elle en s'approchant de lui. Tu peux me dire d'où tu me connais pour prétendre dire que tu sais ce qui est bon pour moi ? Tu crois que je veux entrer dans la Confrérie parce que cela m'amuse ? Parce que j'ai une vie ennuyeuse et que je cherche quelque chose de plus palpitant ? Va te faire voir, crétin ! Si je tiens à en faire parti, c'est parce que je sais ce que vos ennemis font. Je sais ce qu'ils font parce que j'en ai été la victime, comme bien d'autres à travers le monde, j'en suis sûre !

Elle baissa un peu le ton en voyant qu'il s'était arrêté de marcher et qu'il écoutait ce qu'il disait bien qu'il lui tournait le dos. Adeline le contourna alors d'un pas énergique afin de lui faire face pour voir son expression. Une expression noir mais c'était mieux que de la moquerie. L'idée qu'il ait pu croire qu'elle puisse vouloir intégrer les rangs de la Confrérie pour s'amuser la rendait dingue. Furieuse. Elle avait l'impression qu'il venait de cracher sur la mémoire de son père. Ainsi que sur ses espoirs de pouvoir un jour lutter pour la justice. Elle le regarda droit dans les yeux, le cœur battant quand elle continua plus bas mais de manière tout aussi énergique :

- Si je veux faire parti des vôtres, ce n'est pas pour m'amuser. Ni même pour me venger, en fait. Je veux rejoindre votre Confrérie parce que je veux lutter contre l'injustice de ce monde. Qu'il soit causés par les Templiers où par qui que ce soit d'autres. Je veux me battre pour que ce qui m'est arrivée arrive au moins de gens possible. Et je pensais que je frapperais à la bonne porte en m'adressant aux Assassins. Je me suis trompée, alors ?

L'Assassin ne répondit pas, se contentant de la dévisager, les yeux plissés comme si il réfléchissait. Ce qui l'exaspéra quelque peu. Elle dépendait de son bon vouloir et elle détestait cela, en réalité. Si elle s'écoutait, elle irait le secouer comme un pruneau afin qu'il lui réponde plus vite. Car elle savait très bien que si il refusait de l'aider pour rejoindre la Confrérie, elle n'y entrerait probablement jamais. Il y avait très peu de chances qu'une telle occasion se présente à nouveau dans sa vie. Et si elle manquait celle-là à cause d'un abruti à peine plus âgé qu'elle qui voulait lui faire des leçons de morales, elle l'aurait en travers de la gorge. Tout en se disant qu'elle aurait peut-être pu faire les choses différemment pour le convaincre.

Adeline avait vraiment l'impression que toute sa vie, tout ce que son avenir pourrait lui apporter, se jouait maintenant. Que ce qu'allait dire l'Assassin, quel que soit sa réponse, déciderait de son sort pour le restant de ses jours.

Finalement l'Assassin eut un rire sec et baissa les yeux, secouant la tête encore une fois avec un demi sourire sur les lèvres, mais ce n'était pas un geste négatif. Plutôt un geste qui voulait dire qu'il n'aurait pas cru tomber sur une folle comme cette fille qu'elle était un jour dans sa vie. Il finit par lever ses yeux marrons sur elle et par déclarer d'un ton mi amusé mi agacé :

- Déjà, si tu veux devenir un Assassin, il faudrait que tu apprennes à ne pas le hurler dans les rues.

Adeline fit la moue et croisa les bras, mais elle devait admettre qu'il avait raison sur ce point, elle n'aurait pas du crier comme elle venait de le faire. Ce n'était pas… discret. Mais c'était lui le responsable de cette colère.

- C'est de ta faute, lui rétorqua-t-elle. Tu me juges sans me connaître. Cela doit être joyeux si tu fais cela avec tout le monde.

- Peut-être. Je continue de penser que tu ne sais pas dans quoi tu veux t'engager. Mais tu à raison sur un point, je n'ai pas à te dire ce qui est bon où non pour toi, ni te dicter ta conduite. C'est à toi d'en décider. De toute manière, ce n'est pas avec moi que tu dois parler de tout cela. Si tu veux faire parti de la Confrérie des Assassins, il faudra en parler à son conseil et à ses mentors.

Adeline ne dit rien pendant une seconde, sentant l'inquiétude la prendre légèrement à l'idée qu'il pouvait encore refuser. Elle ne put alors s'empêcher de demander :

- Et… tu veux bien m'emmener à eux, alors ?

L'Assassin la regarda encore quelques instants sans qu'elle ne parvienne à deviner ce qu'il était en train de penser. Elle mourrait d'envie de l'étriper de la faire mariner ainsi. Ce n'était pas son avenir à lui qui était en jeu, cela se voyait. Peut-être qu'il hésitait encore, malgré ce qu'il venait de dire. Pourquoi l'aiderait-il, après tout, c'est vrai ? Elle ne représentait rien pour lui, rien à part peut-être une nouvelle gêne dont il devrait se débarrasser. Nom de Dieu, allait-il répondre, oui où non, avant qu'elle ne commence à imaginer les pires scénarios ?

Finalement, un léger sourire apparût sur le visage du crétin et il finit par soupirer et par dire en reprenant son chemin :

- Suis-moi.

Elle eut un léger hoquet de surprise mais très vite, la surprise fut remplacée par un intense bonheur, un bonheur qui lui fit presque monter les larmes aux yeux. Larmes qui ne coulerait pas cela dit, et elle tâcherait de montrer le moins possible sa joie pour qu'il ne croit pas qu'elle prenait vraiment cela à la légère. Il ne pourrait de toute évidence pas comprendre ce que cela pourrait représenter pour elle. Il ne pourrait pas voir que cela pourrait donner le sens à sa vie qu'elle cherchait plus que tout. Qu'elle aurait enfin le sentiment de faire quelque chose de juste et de bien. Non seulement pour son père, pour elle-même mais aussi pour tout Paris. Lutter contre ceux qui ont tués froidement des hommes qui les protégeaient, sans le moindre remords du moment qu'ils sauvaient leurs propres vies. Et qui commettait sans doute des crimes encore plus effroyables. Ces Templiers… Elle en savait peu sur eux mais ce qu'elle en avait vu lui disait une seule chose : il fallait lutter contre eux. Coûte que coûte. Contre eux et contre tout ceux qui commettait les mêmes crimes abominables.

Adeline s'empressa donc de suivre l'Assassin, se retenant de sautiller littéralement à ses côtés, se contentant de sourire en regardant le ciel qui était dégagé ce soir, la première fois depuis une bonne semaine de pluie et de vent glaciale. Les étoiles illuminaient à nouveau Paris. Comme elles illuminaient peut-être son avenir, ce soir. Son avenir qui allait totalement changer. Toute la colère qu'elle avait pu ressentir contre l'imbécile à côté d'elle s'évanouit alors. Elle se sentit tout simplement bien, bien et enthousiaste. Confiante pour l'avenir. Elle se tourna alors avec un sourire amusé vers l'Assassin et lui dit joyeusement :

- Et dit, l'Assassin, je pourrais quand même savoir ton nom, non ? Si tes mentors veulent bien de moi, on risque de se voir souvent, je pense. Je m'appelle Adeline. Adeline Lormay.

Il baissa les yeux vers elle, étant nettement plus grand, et lui jeta un regard sceptique. Peut-être doutait-il de la décision de ces fameux mentors, à moins qu'il n'ait pas l'intention de trop s'attarder auprès d'elle, même si elle était acceptée. Elle s'en moquait éperdument, mais l'idée de l'embêter avec cela plus tard risquait d'être tentante, cela dit. Il finit par lui rendre son sourire au bout de quelques minutes, un sourire sincère cette fois tandis qu'ils s'enfonçaient tout les deux dans les rues de Paris, et il déclara alors :

- Mon nom est Arno. Arno Victor Dorian.


NOTE : "Vl'a le bon vent" est une véritable chanson chantée à l'époque de la Révolution Française. Pour l'écrire, j'ai écoutée la version reprise pour l'OST d'Assassin's Creed, si vous en avez envie allez l'écoutez sur YouTube en tapant "Assassin's Creed Unity Vl'a le bon vent" la reprise est magnifiquement bien faite :)