Et voici une nouvelle fic, en 3 chapitres.

Alors on va croire que c'est une obsession mais encore une fois, dans cette fic , Hermione sera à nouveau plus vieille que Ron ! Bonne lecture !

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Essuyant d'un revers de manche les gouttelettes de transpiration qui perlaient sur son front et commençaient à dégouliner dans ses yeux, Hermione Granger posa sa masse et s'appuya sur le piquet qu'elle venait de finir d'enfoncer : elle en avait encore une centaine à mettre et avait en deux jours réussi à en placer le même nombre autour de la propriété qu'elle avait acquis il y avait deux mois déjà. Mais malgré la chaleur de ce mois d'août, cela ne la découragea pas: elle avait tant attendu pour réaliser son rêve de petite fille que cela valait bien quelques efforts et un peu de transpiration.

Son rêve : une vieille maison, pas très grande mais chaleureuse, au milieu du Massif Central, perdue au milieu de nulle part, qu'elle avait commencé à retaper. "Enfin, nulle part, il ne faut rien exagérer", songea-t-elle. Le village comptait quand même une cinquantaine d'habitations, pour moitié vides, ce qui réduisait le nombre d'habitants à trente-six exactement, pour la plupart des vieux ou des paysans. "Trente-sept, maintenant !" ajouta-t-elle souriant en son for intérieur. Et reprenant sa masse, elle reprit sa besogne ingrate : environ 40 coups de masse pour chaque piquet enfoncé. La masse était lourde et le bois lui glissait dans la main dont la paume couverte d'ampoules maintenant éclatées lui était affreusement douloureuse. Elle avait eu beau les sécher à l'aide d'éosine, les protéger à l'aide d'un pansement épais, le pansement finissait par glisser, imbibé de sa transpiration, et se retrouvait à pendre lamentablement sur son poignet où il perdait alors toute son utilité. "Il faudra absolument que j'aille en ville chercher des gants solides", se dit-elle en grimaçant.

La bourgade la plus proche, où on trouvait un minimum d'objets nécessaires à la vie courante, était située à une trentaine de kilomètres, ce qui était encore acceptable : l'épicier passait deux fois par semaine, le boucher une fois, le boulanger tous les jours sauf le mardi. Ce n'était pas comme si elle était coupée du monde. Mais quand elle avait annoncé à sa mère, il y avait un an déjà, son projet de venir s'installer dans cette région perdue, celle-ci avait levé les yeux vers le ciel en grimaçant, comme en proie à un haut-le-cœur : "Mon Dieu, mais que vas-tu aller faire dans un endroit pareil, Hermione ? Tu n'as jamais quitté la région parisienne !" Mais c'était son argent à elle qu'elle allait dépenser, qu'elle avait reçu en héritage de son père, et elle savait qu'il aurait approuvé son choix s'il n'avait été emporté par une crise cardiaque il y avait un an et demi.

Quand elle y repensait, c'était la mort de son père qui l'avait fait réagir : sans cela, elle serait toujours avec Viktor. Viktor Krum, ce médecin d'origine bulgare de 10 ans de plus qu'elle, qu'elle avait rencontré pendant un de ses stages dans un hôpital de Paris. Viktor qui l'avait séduite, naïve comme elle l'était, à coup de sourires Colgate, de plaisanteries fines, de galanteries, de restau et soirées branchés, qui l'avait époustouflée par sa culture. Elle avait rapidement quitté son petit studio de la banlieue parisienne pour emménager dans le duplex spacieux et confortable du seizième que lui offrait Viktor. Les premiers mois furent grisants: Viktor était galant, attentionné, lui préparant son petit déjeuner le dimanche, la complimentant pour un rien, lui faisant l'amour presque tous les jours, cérémonieusement. Elle se sentait belle et désirée.

Mais au bout de quelques mois, lui apparurent vite des défauts qu'elle essaya de se cacher : prétentieux, très imbu de sa personne, il ne voulait que le meilleur, vêtements, appartement, voiture, nourriture, travail, et exigeait de même d'Hermione. Il la poussa à poursuivre des études pour se spécialiser, une fois son diplôme d'infirmière acquis, ce qu'elle refusa. Il fit la tête quelques temps, puis essaya de remettre régulièrement la chose sur le tapis, espérant la faire changer d'avis. Il était pédant, étalant son savoir et sa situation, aimant avoir une cour autour de lui pour l'encenser. C'est alors qu'elle comprit : elle n'était pour lui rien d'autre qu'un autre objet décoratif pour son intérieur. Il faut dire qu'Hermione était une jolie fille, elle-même le reconnaissait volontiers quand elle s'admirait dans sa glace. De longs cheveux châtains et ondulés qui étaient si épais que lorsqu'elle les détachait, ils prenaient instantanément du volume autour de sa tête, formant une crinière indomptable, c'est pourquoi elle les attachait toujours au travail ; de magnifiques yeux noisettes aux reflets dorés, on ne voyait qu'eux lorsqu'on la regardait ; un petit nez adorable, légèrement retroussé, un grand front ; de jolies fossettes au coin de ses lèvres pulpeuses se dessinaient lorsqu'elle souriait ce qui lui arrivait souvent, car elle était d'un naturel enjoué et d'un caractère bon vivant hérité de son père ; sa poitrine sans être grosse, était suffisante pour qu'elle se permette de porter des décolletés lorsqu'elle sortait sans s'affubler d'un Wonderbra ou autres artifices ; sa taille, un mètre soixante -quatre précisément, n'était ni trop grande ni trop petite, sa silhouette ni trop maigre, ni trop ronde, et ses jambes fines, lui permettaient de s'habiller comme elle le voulait. Mais sa beauté, si elle lui avait permis d'attirer le regard de Viktor la première fois qu'il l'avait vue, ne lui sembla plus un atout à compter de ce jour.

Après cette révélation, elle n'eut d'abord pas le courage de le quitter. Se disant que tout allait bien - pas de disputes, ou rarement, il lui faisait toujours l'amour très souvent, et lui disait sans cesse qu'il l'aimait - elle poursuivit donc sa vie maintenant rôdée. Les mois passaient, et il finit par lui faire une demande en mariage : elle venait d'avoir vingt-trois ans. Ce fut une demande tout ce qu'il y avait de classique, le repas au restaurant, le champagne, les bougies, et soudain, lui à genoux, prenant sa main… Elle avait machinalement articulé un oui en réponse, trop surprise pour répondre autre chose : qu'elle voulait y réfléchir, qu'elle était trop jeune, que c'était trop rapide … Souriant, fier comme un empereur venant de conquérir un nouveau territoire, il sortit alors une bague d'un écrin noir, sertie d'un énorme diamant en son centre - le genre de bague tape-à-l'œil que détestait Hermione - et lui passa au doigt.

Les jours suivants lui permirent d'oublier, ils faisaient mille projets pour le mariage, décidant de l'endroit, de la date, des invités, de la cérémonie … Ils l'annoncèrent aux parents d'Hermione le dimanche suivant. La mère d'Hermione fut ravie et les félicita aussitôt en les serrant dans ses bras, mais le regard de son père s'assombrit. Il n'avait jamais aimé Viktor, Hermione le savait, même si il ne lui avait jamais dit. Mais les regards en biais, le sourire forcé, la froideur dans ses paroles quand il s'adressait à lui, lui qui était si chaleureux avec Hermione, montraient le contraire. Néanmoins, il les félicita. Ce fut lorsqu'il put retrouver en tête à tête avec sa fille qu'il la questionna : "Es-tu sûr, ma fille ? C'est ce que tu souhaites vraiment, faire ta vie avec lui ?" Elle bafouilla un oui trop hésitant pour être vrai et il comprit. Il tenta de la raisonner mais elle n'avait pas le courage de faire demi-tour. Pas encore… Les préparatifs commencèrent, le prêtre fut contacté …

Ce qui la fit changer d'avis fut deux choses : le brusque décès de son père un mois plus tard, et trois mois après, une discussion avec Viktor.

Ils étaient couchés et discutaient du mariage, la date étant maintenant fixée, et Hermione demanda si l'achat d'une autre maison ou appartement se ferait rapidement, maintenant que son père lui avait laissé une bonne somme via son héritage, ils n'auraient plus besoin d'attendre.

- Un autre appartement ? Celui-là ne te plait pas ?

- Si mais malgré son grand espace, il n'a qu'une chambre…

- Et alors …

- Alors, pour les enfants, il en faudra au moins une autre …

- Des enfants, mais, mon amour, on n'est pas bien tous les deux ?! l'interrompit-il étonné. Avec des enfants, on ne pourra plus rien faire, sortir, diner en amoureux… On est bien comme ça, c'est le bonheur parfait !

- Tu veux dire que tu ne veux pas d'enfants ?! demanda Hermione estomaquée.

- Tu ne veux pas gâcher une vie parfaite, et un corps parfait, pour un marmot qui va passer ses nuits à nous réveiller en chialant et prendre tout notre temps ?

Hermione resta sans voix. Le choc de la mort de son père avait déjà était horrible à surmonter, mais ça en plus maintenant, apprendre qu'il ne désirait pas d'enfants, ce fut trop. Les paroles de son père firent écho dans sa mémoire: "C'est ce que tu souhaites vraiment, faire ta vie avec lui ?" Et bien non, elle ne le souhaitait pas, elle ne l'avait jamais souhaité. Tout était clair maintenant...

Elle fronça les sourcils et laissa aller sa colère :

- Et bien si ! C'est ce que je voulais ! Mais je viens juste comprendre que je ne veux pas gâcher ma vie avec toi! Je te quitte, Viktor, nous ne sommes pas faits l'un pour l'autre, nous ne l'avons jamais été, malgré les apparences….

- Quoi ! Qu'est-ce que tu racontes ? Attends… Ma chérie … C'est de la folie !

Mais Hermione s'était déjà levée, avait saisi son sac rangé dans le dressing et y fourrait rageusement ses affaires, étouffant les sanglots nerveux qui montaient de sa poitrine.

Viktor tenta de la raisonner, essaya les cris, les pleurs, la douceur, rajouta même qu'"il lui ferait son gosse, si ça lui tenait tellement à cœur", mais Hermione ne changea pas sa décision.

Elle laissa un Viktor dérouté et abattu, alors qu'elle-même se sentait plus vivante que jamais, en quittant leur appartement. "Merci, papa !" murmura-t-elle, et elle retourna vivre chez sa mère. Sa mère l'accueillit à bras ouverts, mais même si elle ne posa pas trop de questions, elle montra son désaccord. Sa fille quittait un homme qui avait une situation confortable, un médecin, qui avait des manières, du savoir-vivre …

- Il ne m'aurait pas rendu heureuse, maman, répondit juste Hermione, et sa mère n'insista pas.

Hermione resta quelques mois chez sa mère, histoire de se retrouver et de se ressourcer. Bien sûr, la maison familiale semblait tellement vide sans son père, mais Hermione et sa mère se soutenaient. Hermione profita de cette trêve pour réfléchir longuement à sa vie : certes, elle savait maintenant ce qu'elle ne désirait pas, mais que voulait-elle vraiment ? Elle n'eut pas longtemps à réfléchir : la réponse lui vint en feuilletant nostalgiquement les albums photos familiaux. Sur des pages et des pages, des photos de vacances dans la petite résidence secondaire des Alpes, un endroit qu'Hermione avait toujours adoré quand ils allaient y passer leurs vacances, été comme hiver. Les balades en forêt, dans les pâturages, le lait frais et crémeux de la ferme voisine le matin, le chant des oiseaux, le calme, le grand air. Elle avait toujours rêvé de posséder plus tard une petite maison au milieu de nulle part, avec un jardin, qu'elle pourrait entretenir et où elle pourrait vivre comme bon lui semble… Son autre rêve : les chevaux. Elle avait longtemps pratiqué à Paris l'équitation dans un centre équestre, et avait un bon niveau, mais son rêve était de monter en plein air, de faire de grandes randonnées et d'avoir son propre cheval, ou même deux, qui sait ?

C'est alors qu'elle se rendit compte que ces deux rêves n'étaient pas inaccessibles avec son métier : elle venait d'exercer deux ans en hôpital, munie de son diplôme d'état. Elle pouvait donc maintenant exercer en tant qu'infirmière libérale, être à son compte. Et elle fit un projet : tout plaquer, acheter une maison ou une ferme, même à refaire, dans un endroit peu habité, sillonner la campagne pour voir les patients, et acheter un ou deux chevaux… Elle se grisa toute la nuit de son idée, la tournant et la retournant dans sa tête, l'examinant sous tous ses aspects, n'arrivant pas à fermer l'œil. Pour l'instant, ce n'était qu'une ébauche, il fallait voir s'il était réalisable.

Heureusement pour Hermione, tout se fit très rapidement : elle chercha sur Internet dans les sites d'annonces gratuites de particuliers, s'évitant à l'avance des frais d'agence souvent onéreux. Recherchant d'abord dans les Alpes, par souvenir pour sa maison d'enfance revendue quelques années en arrière, elle fut dans l'obligation de se résoudre à l'évidence, les prix y étaient beaucoup trop chers. Etendant sa recherche à toute la France, elle tomba sur de nombreux corps de ferme dans le Puy de Dôme, et décida d'aller voir sur place après de nombreux emails et coups de fils. Elle en visita cinq au total en un week-end, ce qui ne lui laissa guère le temps pour faire du tourisme. Les quatre premières visites ne l'inspirèrent pas : les fermes étaient attenantes à d'autres maisons, ou vraiment en état de délabrement avancé, ce qui aurait nécessité trop de frais et de temps avant que la maison ne soit habitable.

Elle se désespérait de ne rien trouver, quand le dernier vendeur, un monsieur aux cheveux grisonnants qui lui avait donné rendez-vous dans une bourgade voisine, la conduisit à travers les lacets d'une charmante petite route, menant à un minuscule village entouré de prés et de bois. Ce ne fut qu'à la sortie de ce village qu'il s'arrêta et là, Hermione eut la révélation, c'était la maison qu'elle désirait… C'était presque comme si la petite maison de pierres l'appelait, lui tendait les bras… Une sensation d'être enfin arrivé chez soi, de se sentir dans son refuge, dans son cocon… Le propriétaire n'avait pas encore réussi à ouvrir la vieille porte en chêne dont le pêne avait du mal à céder qu'elle avait déjà décidé : ce serait celle-là !

Les travaux n'étaient pas négligeables, loin de là, ce qui avait sans doute repoussé d'éventuels acheteurs la précédant, mais au moins la maison serait immédiatement habitable. Il y avait de l'eau, pas chaude mais au moins froide, les sanitaires étaient fonctionnels, l'étage était entièrement à réaménager mais la toiture était en excellent état. "Je l'avais fait refaire 5 ans avant le décès de mon père." expliqua le propriétaire âgé d'une soixantaine d'années, qui ayant hérité au décès de son père cette maison dans laquelle le vieil homme avait toujours habité, ne savait qu'en faire, habitant maintenant dans la ville de Lyon. Lorsqu'il lui fit visiter le terrain attenant, Hermione fut émerveillée : un grand terrain en friche entouré par une haie serrée et sauvage d'environ mille mètres carrés, longé sur la droite par une grange en bois, pas très grande mais encore en bon état pour son âge elle aussi. "Il reste un tas de vieux outils là-dedans, mais je peux m'arranger pour vous la faire vider si vous le souhaitez." ajouta le propriétaire, en poussant la porte. Le sol de terre battu sentait la poussière et le renfermé, mais Hermione vit tout de suite comment elle allait l'aménager : il y aurait largement de quoi faire deux boxes, une petite sellerie, et la place pour stocker son foin et sa paille. De vieux clapiers trainaient à l'arrière de la grange : Hermione songea qu'elle pourrait y mettre quelques lapins.

Puis, l'homme la conduisit à l'arrière du terrain. "5000 m2 de terrain", disait l'annonce. En effet, derrière la haie de prunelliers, d'aubépines, de sureaux et autres arbustes, s'étendait un pâturage largement en friche, dont les fils avaient disparu, et dont ne restaient que de vieux piquets vermoulus. Pas de quoi nourrir ses futurs chevaux, mais de quoi les laisser largement se dégourdir les pattes quand elle n'aurait pas le temps de les monter, dans sa semaine de travail. L'homme expliqua que son père avait fait quelques moutons et chèvres, et qu'il les parquait là. Puis, soupirant, il demanda :

- Dites-moi la vérité : comme les autres, vous trouvez que j'en demande trop et vous allez me demander de baisser le prix, n'est-ce pas ? Je ne peux pas me permettre de baisser, je dois payer les frais de placement en maison spécialisée de ma mère, ils sont terriblement élevés, vous savez, je ne peux pas vous proposer une baisse de plus de cinq mille euros du prix indiqué dans l'annonce…

- C'est inutile, j'achète, et au prix indiqué…

- C'est vrai ? La face rougeaude du bonhomme s'éclaira d'un sourire sincère et soulagé.

- Oui, dès que possible, votre notaire envoie les papiers au mien, et je vous règle tout ça rapidement.

- Vous verrez, vous serez bien ici, j'y ai vécu un bout de temps, le village ne change quasi pas, c'est pareil que dans mon enfance, c'est d'un calme, vous serez bien, répéta-t-il.

Et effectivement, Hermione s'était tout de suite sentie bien … Une fois la vente officielle et toute la paperasse réglée, elle avait fait ses bagages et était partie : elle avait déjà donné sa démission à l'hôpital, qui avait surpris tout le monde, collègue et supérieurs, la nouvelle de sa rupture récente circula alors et ce fut des regards de pitié qui se posèrent sur elle à son passage, ce qui l'irrita légèrement. Elle avait également fait une demande pour devenir indépendante. En attendant les réponses des divers organismes, elle avait eu quelques mois de tranquillité pour tout refaire dans sa maison. La première chose fut d'ouvrir une ligne téléphonique : bien sûr, ici elle n'avait pas de haut débit mais pouvait quand même avoir Internet, même si elle savait qu'elle ne l'utiliserait plus beaucoup, elle l'avait pris quand même. Entamant un peu plus l'héritage de son père qui était encore largement conséquent, elle avait fait refaire toute l'isolation et changé les vieilles fenêtres qui laissaient passer l'air et le froid pour des doubles vitrages modernes : elle se gardait juste la pose des papiers peints et la pose de radiateurs dans les chambres, qui compléteraient l'hiver le chauffage de la grosse cheminée ouverte dans le séjour. Elle avait également fait installer un chauffe-eau et avait apprécié de ne plus se doucher à l'eau glacée.

Les muscles de ses bras et de ses épaules douloureux firent soudain capituler Hermione et perdre le cours de ses pensées : elle fit retomber la masse sur le sol et s'essuya à nouveau le front. "Ce sera bien pour aujourd'hui !" se dit-elle.

Elle rangea son matériel dans la grange, et retourna à sa maison par la porte située à l'arrière et qui donnait dans la cuisine. Elle laissa ses chaussures à l'entrée et remit ses chaussons qui la protégeaient du froid du carrelage, puis se lava les mains. Le simple contact de l'eau sur ses blessures à vif la fit grimacer : elle devrait se faire des soins après la douche. Puis tamponnant délicatement les mains avec une serviette propre pour les essuyer, elle contempla sa cuisine, satisfaite : elle y avait conservé le carrelage ancien, dont elle avait aimé les motifs de tomette, et le vieil mais encore acceptable évier en pierre pour garder l'esprit de la pièce.

Elle passa alors par le séjour pour monter dans sa chambre : dans le séjour, elle avait dû faire changer le carrelage, en trop mauvais état, mais elle avait conservé la grande cheminée en pierre, qu'elle venait de faire ramoner, et dont elle se faisait un plaisir d'avance à l'idée d'y allumer un bon feu lors des froides soirées d'hiver. Elle emprunta l'escalier en chêne grinçant, où elle s'était contentée d'un bon nettoyage et cirage, pour accéder à l'étage, où trois chambres l'attendaient. En réalité, au départ, l'étage était un immense grenier d'une seule pièce, mais elle avait choisi de scinder cet espace en trois plus petites pièces, l'une étant sa chambre, l'autre, pas encore finie servirait de chambre d'ami, et la troisième, pour l'instant, servait de débarras. Elle entra dans sa chambre, qui pour l'instant n'était pas tapissée : elle se servit dans la grande armoire achetée chez un antiquaire et prit un slip, un short et un débardeur propres, puis redescendit à la salle de bains, attenante à la cuisine. La salle de bains non plus n'était pas tout à fait finie mais le plus gros était fait. Elle avait tenu à garder une baignoire, mais l'ancienne était vraiment trop abimée, elle en avait donc fait poser une neuve, et avait refait faire toute la tuyauterie. Elle se fit couler un bain, dans lequel elle se glissa. La chaleur de l'eau détendit aussitôt ses muscles douloureux et elle s'assoupit une vingtaine de minutes, songeant à ses projets restant pour parfaire sa maison. Puis, se réveillant tout à fait, elle se lava rapidement car l'eau maintenant tiède n'était plus aussi agréable, se sécha et s'habilla. Elle entreprit alors de soigner ses ampoules, les couvrant généreusement d'une pommade cicatrisante, puis les protégeant par des compresses et un solide bandage. Sortant de la salle de bain, elle se prépara un léger repas pour le soir : depuis qu'elle était ici, son appétit se réduisait, et pourtant elle se sentait en pleine forme. Elle mangea devant le journal télé et se refit mentalement le programme de la journée du lendemain. Elle devait faire une pause dans les piquets à planter, sinon, ses mains n'y survivraient pas: elle en profiterait pour se rendre en ville chercher ses gants et se renseigner pour les derniers documents qui lui manquaient pour pouvoir exercer en libéral. Enfin, elle se trouva un film sympa à la télé et alla se coucher à la fin du film, fatiguée mais satisfaite. Dans cet endroit, le calme était si apaisant qu'elle parvenait à faire sans peine des nuits de neuf ou dix heures, ce qui ne lui était pas arrivé depuis son adolescence. Elle s'endormit sans effort…