Qu'est-ce qu'il ne faut pas faire pour avoir la paix !

Hello à tous !

Je vous présente un nouveau one-shot, légèrement voire complètement décalé. Considérez cela comme « le délire de l'artiste » (cf. Le Père Noël est une ordure) donc ne m'en tenez pas rigueur si je malmène un peu notre couple d'amoureux.

Ceci est un cadeau d'anniversaire pour Charles !


Disclaimer : Les personnages appartiennent à leur créateur E. KRIPKE et à la CW. Seule l'intrigue m'appartient.

Format : One shot.

Genre : Humour/Famille/Romance

Rating : K+

Pairing : Dean/Castiel.

Cet os s'inscrit dans la saison 5 mais ne tient pas compte des remarques formulées par l'archange Balthazar à propos de Dean et de Castiel, ni de la mort de l'archange Gabriel. Il prend place dans la vie quotidienne de nos boys. Ou pas.

Enjoy it !


Un merci tout particulier à mon amie Barjy pour son indéfectible soutien dans cette aventure qui l'aura fait grincer des dents


Dans un lieu invisible des hommes et hors de portée des anges...

L'archange Gabriel profitait, une fois n'est pas coutume, de ces délicieuses sucreries dont les humains avaient le secret. Un large sourire illuminant ses traits, le regard malicieux dirigé vers la grosse bonbonnière qui lui faisait face, il s'interrogeait sur la nature de la prochaine friandise qu'il s'offrirait. Le choix était si vaste qu'il ne savait où donner de la tête. Entre berlingots, fraises tagada, caramels mous, sucettes aux parfums variés, carrés de chocolat, etc.

Gourmand jusqu'au bout des ongles, il portait déjà sa main à l'intérieur du support en verre à la recherche de la précieuse confiserie qui aurait l'honneur de passer la barrière de ses lèvres angéliques lorsqu'un bruit d'ailes caractéristique lui fit stopper son geste.

Sans même se retourner vers l'importun, - après tout, peu pouvait se targuer de connaître le lieu exact de sa retraite -, il se contenta de lui lancer par-dessus l'épaule, le regard déçu et la moue boudeuse de ne pouvoir continuer sa dégustation en paix :

- Salut Balthazar !

- Salut Gab' !

- Alors quoi de neuf au pays des bipèdes ? interrogea-t-il, les yeux rivés sur la bonbonnière comme un faucon sur sa proie. L'Apocalypse est-elle toujours d'actualité ? Des nouvelles de nos amis les Winchesters ? Ont-ils trouvé ce qu'ils cherchaient la dernière fois ou bien notre petit angelot a-t-il dû intervenir ? Quelle bande de...

- …

Il riait déjà en sourdine de sa remarque lorsqu'il nota l'absence de réponse et de réaction de son frère, pourtant porté sur l'humour caustique tout comme lui. Ce qui l'incita à se détourner de son occupation initiale. Ce qu'il découvrit alors le figea.

Balthazar avait sa tête des mauvais jours.

Ce n'est pas comme si il n'en avait pas l'habitude mais là, avec sa tenue débraillée, - comprendre la veste ouverte et une partie de son t-shirt hors de son jean -, et son verre de scotch vide à la main, il ne fallait pas être devin pour comprendre qu'un événement dramatique avait dû se produire là-haut ou en bas, en fonction du lieu où on se plaçait pour le situer. Un événement suffisamment important en tous cas pour interrompre l'activité de boisson de son frère.

Et comme de bien entendu, qui venait-on voir ou chercher lorsque ça tournait mal ? Bibi, voyons !

Dieu sait pourtant qu'il s'arrangeait toujours pour disparaître de la circulation et échapper à tous ces empêcheurs de tourner en rond, même si ça ne durait qu'un temps. A croire qu'il n'aurait jamais la paix. Bref, il ne manquait plus que cela pour gâcher sa journée.

Désabusé, il jeta un dernier regard sur les objets de sa convoitise. Ce n'était pas encore aujourd'hui qu'il aurait moyen de se goinfrer en toute tranquillité... Adieu fraises tagada ! Adieu sucettes à l'anis ! Adieu bonbons acidulés !

Soufflant de dépit, il enchaîna ne pouvant se retenir de le taquiner et de tenter de le dérider :

- Bon. C'est quoi le problème, cette fois ? Céline Dion a encore fait des siennes avec le Titanic ? Une nouvelle g...

Le regard froid que son frère lui retourna le dissuada de poursuivre plus avant sa plaisanterie. Il déglutit bruyamment et attendit que Balthazar prenne la parole. Ce qui ne tarda pas.

- Tu savais ? demanda-t-il, de but en blanc.

La question le prit totalement au dépourvu. De quoi pouvait donc bien parler son frère ? Parce qu'évidemment, posée comme ça, l'interrogation n'avait de sens que pour celui qui la posait.

- Je savais quoi ?, le singeant.

Les yeux bleu métallisé se focalisèrent sur lui, le sondant silencieusement. Puis sa voix s'éleva, glaciale :

- Pour Castiel.

- Quoi Castiel ?

Tout en le fixant, Gabriel s'efforçait de comprendre où voulait en venir Balthazar. A voir son état d'énervement, il faut croire que leur petit frère avait encore dû commettre une bévue. Et de taille s'il vous plaît.

Dieu que ne donnerait-il pas pour être seul ? Sans frère ni sœur. Juste lui. Lui et les sucreries dont le manque se faisait déjà cruellement ressentir au creux de son estomac.

- Pour ce Winchester de malheur. Pour..., murmura Balthazar.

Gabriel tiqua quelques secondes. Winchester, Winchester... Qu'est-ce que ces frères avaient encore manigancé ? Dans quoi avaient-ils encore entraîné son petit frère adoré ? A sa connaissance, il n'y avait pas eu de truc particulier depuis quelques semaines les concernant. Pour autant, cela ne signifiait rien. Jusqu'à ce que plusieurs flashs d'images se matérialisent devant lui et soudain tout fut clair dans son esprit.

- Ah « ça » ! lança-t-il à l'adresse de son frère d'un ton nettement plus joyeux.

- Oui, « ça » comme tu dis, cracha ce dernier balançant son verre de rage à travers la pièce.

Gabriel sursauta face à ce geste.

Décidément, quelque chose ne tournait pas rond chez son frère. En règle générale, Balthazar s'amusait souvent lui aussi des premiers émois que rencontraient parfois leurs benjamins lorsqu'ils prenaient forme humaine et que la tentation de la chair se dessinait insidieusement à travers leur vaisseau. Toutefois là, en l'occurrence, cela n'avait pas l'heur de lui plaire. Mais pourquoi, telle était la question ?

Bien décidé à consommer sans modération sa réserve de bonbons sans être dérangé à tout bout de champ et à se débarrasser de lui, il attrapa le taureau par les cornes et fonça tête baissée, énonçant d'un air malin :

- Balty, c'est quoi le problème ? Que Cassou soit enfin intéressé par autre chose que son devoir devrait pourtant te satisfaire, non ? A moins que...

- Là n'est pas la question, Gab', maugréa-t-il. Bien sûr que le voir se décoincer quelque peu me fait plaisir mais merde à la fin... Pourquoi lui ?

- Et pourquoi pas ?

- Comme si il n'y avait pas assez d'êtres humains sur la Terre pour combler ses lacunes et expérimenter. Non, Monsieur a choisi le pire d'entre eux, s'agaçait Balthazar, ne tenant nullement compte de l'interruption de son frère.

- A toute fin utile, je te rappelle que Papa lui a donné l'ordre de ramener l'être vertueux des Enfers. Qu'on y a même envoyé un escadron pour ce faire et que seul Cas en est revenu. Enfin je dis ça, je dis rien...

- Et bien il aurait mieux fait de l'y laisser, gronda-t-il en retour. Dean Winchester, l'homme vertueux, mon cul, oui ! T'as vu comment il le traite ? Je vais lui faire passer l'envie de se foutre de sa gueule et de ne l'appeler que pour régler ses besoins terrestres, moi !

A présent, la fureur irradiait à travers tous les pores de sa peau. Sa grâce fulminait à mesure que son ire augmentait. Gabriel commençait d'ailleurs à s'inquiéter de son état lorsqu'une idée germa dans son esprit tordu. Peut-être que...

- Balthazar, serais-tu jaloux ? osa-t-il demander à brûle-pourpoint.

Celui-ci explosa littéralement à ces mots.

- Non mais que vas-tu encore imaginer Gab'? Je suis juste écœuré de voir mon frère roulé dans la farine par cet énergumène qui saute sur tout ce qui bouge et qui a de gros seins de préférence.

- Si tu le dis, se contenta de répliquer Gabriel, plutôt sceptique quant à la réponse donnée.

- Gab', je t'assure que tu fais fausse route, rétorqua-t-il suivant lui aussi le cheminement de ses pensées. Par contre, je ne vais pas laisser Cassou se faire maltraité de la sorte. Va lui falloir un sacré coup de main, si on veut changer la donne. Et ...

- C'est donc la raison de ta présence ici, le coupa-t-il, soudain beaucoup moins enjoué.

- Oui, quoi d'autre sinon ?

- Euh... Rien, répondit finalement Gabriel préférant ne pas ajouter d'huile sur le feu.

- Alors tu marches avec moi ?

- Ce n'est pas comme si j'avais vraiment le choix, si ?

- Gab'...

- Okay, okay, glissa-t-il. T'as aucun sens de l'humour aujourd'hui. Ça promet.

Un claquement de doigts et hop, la pièce fut désertée. La bonbonnière aux reflets multicolores abandonnée sur le passe-plat.

XXX

Au même moment, dans un motel bas de gamme aux portes de la ville d'Austin…

Deux voix familières s'élevaient de la chambre 4570. Et à l'intonation de l'une d'entre elles, on sentait bien l'agacement poindre :

- Cas, combien de fois t'ai-je dit déjà de ne pas envahir mon espace personnel ?

- Pardon Dean, s'excusa l'ange en reculant de deux pas.

- Pff… Fais un effort, ce n'est quand même pas sorcier ! Même un gosse de cinq ans comprend ça ! Alors un ange de ton acabit devrait pouvoir retenir cette simple consigne, le tança le chasseur d'un regard sévère tout en le contournant pour finir de s'habiller, attrapant les vêtements propres qu'il avait jetés sur le lit un quart d'heure plus tôt. Parfois ton incompréhension vis-à-vis de nos mœurs me dépasse. T'es sûr de nous avoir bien observés ?

Mal à l'aise, Castiel détourna le regard vers la fenêtre qui donnait sur le parking du motel. Fidèle à lui-même, il écoutait sans rien dire les remontrances de son protégé. Que pourrait-il lui donner comme raison pour expliquer son incapacité à ne pas l'approcher ?

Oui il était un ange. C'était un fait établi. Un ange aux commandes d'une garnison fut un temps. Il n'était donc ni faible ni idiot. Tout le contraire même. Au Paradis, il était un ange respecté, bienveillant et juste. Il avait toujours soif d'apprendre. Mais parcourir le monde sous les traits d'un homme était si éloigné de ses connaissances théoriques.

Tout cela le déroutait.

Depuis que cette mission lui avait été confiée par son Père, Dean était sa seule et unique priorité. Il se devait à la conservation de cet être fragile pour qu'il accomplisse sa mission en tant que vaisseau de l'archange Michael. Il se devait de protéger cet homme vertueux dont l'âme avait été torturée, brisée en mille morceaux mais dont l'éclat de pureté avait perduré au-delà de la noirceur des enfers. Peu importe les actes qu'il aurait à commettre tant que sa sécurité serait garantie.

Mais depuis qu'il avait pris possession du corps de Jimmy Novak, ses perceptions changeaient. Et ce qui n'était qu'un simple devoir d'obéissance envers les siens prenait à présent une autre forme. Des sentiments jusque-là méconnus, nouveaux, plus humains, s'invitaient désormais dans sa vie millénaire. De ses doutes latents qui s'amplifiaient au contact de ces hommes de chair et de sang à ses accès de faiblesse qui le saisissaient parfois au détour d'un chemin. Sa grâce, elle-même, était sujette à ces fluctuations d'énergie.

Sans parler des sensations physiques auxquelles il ne savait pas toujours faire face. En particulier lorsqu'une certaine partie de son anatomie se réveillait. Comme à cet instant où il avait surpris Dean à moitié nu, le corps encore couvert de gouttelettes, à la sortie de la douche. Inconsciemment, son regard céruléen avait suivi la course de l'une d'entre elles se faufiler sous le drap de bain. Son pouls avait soudainement accéléré. Son corps avait frissonné. Mû par un réflexe instinctif, il avait eu l'envie de toucher ce corps qu'il avait reconstruit avec sa grâce, avec ses mains, y laissant l'empreinte de sa paume céleste sur son épaule. Il s'était donc approché. A pas de velours. La main tendue vers l'avant, à quelques centimètres du Graal. La minute suivante, il s'était statufié sous le regard interrogateur et dur de Dean. Ce dernier n'avait visiblement pas apprécié d'être l'objet de cette attention précise. Ce qui avait conduit à un rappel à l'ordre dans les règles de l'art.

- Cas ? Cas, tu m'écoutes ?

La voix de Dean lui parvint comme dans un brouillard et le tira de ses réflexions. Il releva son regard et croisa les émeraudes de son protégé. Leur éclat oscillait entre l'irritation et l'inquiétude.

- Oui Dean.

- Bien ! Alors reprenons, énonça celui-ci tout en attrapant une carte qu'il déplia sur la table qui servait de bureau. Ici, la ville. Là, les meurtres ! On va prendre cette route. Elle coupe à travers les champs et suivre les….

XXX

A l'extérieur de la chambre, invisibles au regard des mortels, Gabriel et Balthazar avaient assisté à toute la scène. Partagés entre consternation pour l'un et envie de meurtre pour l'autre.

Gabriel ne savait pas comment il avait réussi à retenir Balthazar de se montrer et de casser la gueule à ce connard qui ne respectait pas l'être qu'incarnait Castiel. Lui-même devait reconnaître qu'il ne portait pas l'aîné des Winchester dans son cœur mais de là à vouloir l'occire… Apparemment ce n'était pas le cas de son frère.

Il allait donc falloir ruser pour calmer tout ce petit monde et surtout arriver à faire reconnaître à Dean son attachement pour Castiel, ce qui, à vue de nez, ne serait pas une mince affaire. Mais rien de tel qu'un bon défi pour le maître de la supercherie !

En moins de deux heures, il réfléchit à un plan d'action qui ferait mouche et affûta ses armes. Hors de question que ça échoue, foi de Trickster !

Bien entendu, il ne put pas le mettre en œuvre dans la foulée, cela aurait été trop facile. Il fut donc contraint d'observer, en compagnie d'un Balthazar en proie à des pulsions meurtrières, les moindres faits et gestes des Winchester. Le tout sans se faire surprendre par leur chérubin de petit frère.

Alors qu'il allait rendre les armes, la patience n'étant pas une de ses qualités, l'occasion se présenta de manière inattendue. Habituellement, Dean sortait seul. Que ce soit pour vider des chopes de bière, draguer ou tirer un coup dans le meilleur des cas. Dans une moindre mesure, son cadet Sam l'accompagnait pour fêter une bataille difficile. Castiel, quant à lui, était rarement invité à participer à ces soirées de beuverie, en particulier depuis le fiasco de la maison close.

Mais ce soir-là, Dean l'incita à le suivre, histoire qu'il prenne la mesure de ce qu'était la vie d'un individu lambda. Et peut-être trouverait-il enfin une personne à son goût pour s'essayer aux plaisirs de la chair avant l'avènement de l'Apocalypse. Ce qui avait fait rosir d'embarras les pommettes de Castiel et naître sur les lèvres de Gabriel un sourire diabolique.

XXX

Dean avait garé l'impala à quelques rues du centre-ville, aux abords d'un quartier résidentiel. Inutile de risquer la moindre éraflure sur son bébé. Avec la circulation intense qui régnait les weekends à Austin, en particulier à proximité des boîtes de nuit et des bars d'où émergeait une jeunesse décadente et éméchée, il restait prudent.

C'est donc d'un pas rapide et décidé qu'il avait cheminé, accompagné de Castiel, vers le quartier réservé aux endroits à la mode et qui, si Google l'avait bien renseigné, devait être à moins de dix minutes à pied.

Chemin faisant, il jetait parfois un coup d'œil à son ange-gardien plus silencieux que jamais.

Secrètement, il espérait que cette sortie improvisée lui permettrait de faire le point sur leur relation. Relation qu'il n'arrivait pas à définir et qui le rendait aussi nerveux qu'un jeune adolescent boutonneux.

Il faut dire que depuis sa résurrection et l'apparition de Castiel dans sa vie de misère, il n'avait pas vraiment eu le temps de se pencher honnêtement sur la question. Et il devait l'avouer, cela lui convenait très bien ainsi. Tant qu'on ne l'empêchait pas de vivre sa vie comme il l'entendait, il n'en voyait pas l'intérêt. Mais le regard de concupiscence sur son corps qu'il avait surpris ce matin-même dans les yeux bleus de Cas l'avait averti qu'il était peut-être temps de réviser sa position.

Même si leur relation avait plutôt mal démarré, aujourd'hui il ne pouvait que noter l'amélioration de leurs rapports. En sa compagnie, l'ange avait fini par ne plus être ce pantin dévoué aux ordres angéliques. Il apprenait le libre-arbitre, révélait les doutes qu'il avait à propos de sa hiérarchie, des combats qu'il avait à mener. Ce qui comblait Dean de satisfaction, lui-même étant par nature rebelle à toute autorité excepté celle de son défunt père.

En outre, il ne pouvait nier le pouvoir attractif de l'ange sur lui. Que ce soit par la manière dont il portait le costume et cet horrible trench-coat qui le caractérisait. Que ce soit par ses cheveux éternellement décoiffés qui lui donnaient l'air de sortir du lit après une séance intensive de sexe. Que ce soit par sa simple présence au moment les plus inopportuns ou son absence totale de savoir-vivre, en particulier en ce qui concernait son espace vital.

Et puis jamais auparavant il ne s'était autant impliqué avec quelqu'un, si on excluait Sam ou encore sa relation fracassante avec la belle Cassie. Etait-ce dû à son statut d'être céleste ? Il l'ignorait pourtant les faits étaient là.

Rien que le diminutif qu'il lui avait attribué quasiment dès leur rencontre était un signe. Mais comme il était allergique à toute démonstration sentimentale, qu'elle soit amicale ou amoureuse, il était beaucoup plus aisé pour lui de rejeter ces petits frissons, ces accélérations cardiaques qui le saisissaient parfois lorsqu'il se croyait à l'abri des regards indiscrets et qu'il songeait à lui. Et surtout il lui était plus simple de se comporter comme un abruti de première avec Cas. Et comme celui-ci n'y entendait rien dans les rapports sociaux, cela l'arrangeait bien.

Il aurait pu disserter encore longtemps sur cet ange qui le suivait dans son sillage lorsque sa voix rauque le tira du cours de ses pensées.

- Dean ?

- Mmm ?

- Dans quel établissement allons-nous ?, lui indiquant d'un geste ample les bars et restaurants qui longeaient l'avenue.

- Eh bien, choisis !

- Je…

- Cas, si tu n'y mets pas un peu du tien, tu ne progresseras jamais. Alors ce soir, je te suis !

L'ange tiqua mais finit par se ranger à son avis et commença à arpenter le trottoir, s'arrêtant devant chaque vitrine pour s'absorber dans la contemplation de l'intérieur, évitant certains édifices sans aucune raison apparente. Ce petit jeu dura un bon moment et il était à bout de patience lorsqu'enfin Cas consentit à ouvrir une porte sur sa droite. Avant de lui emboîter le pas, il jeta un œil au nom de l'établissement qui s'apprêtait à les accueillir : MOOD'S BAR. Avec un nom pareil et le peu de musique résonnant sur le trottoir, le gérant ne devait pas attirer les foules.

Il eut tort.

A peine entré il fut happé par l'atmosphère étrange du lieu. Immédiatement sur le qui-vive, son instinct de chasseur à l'affût, il étudia le long et étroit corridor qui menait à une volée de marches. Des sons étouffés lui parvenaient du niveau inférieur. L'endroit n'était donc pas désert mais cela ne le rassurait pas pour autant. Il n'avait aucune arme sur lui en cas d'attaque massive. Il ouvrait déjà la bouche pour prévenir Cas d'un potentiel danger lorsqu'il réalisa que ce dernier avait disparu au détour du colimaçon. Un « Bordel de merde » fusa de ses lèvres et il rejoignit au pas de course son satané ange gardien.

Indifférent à son état d'esprit, Castiel patientait devant d'épais rideaux pourpres. La musique était nettement plus forte, les cris aussi d'ailleurs. Au contraire de son protégé, les sons ne semblaient pas le faire réagir outre mesure. Et une fois assuré que Dean l'eut rejoint, il tira sur le rideau et la scène s'ouvrit.

La surprise les cloua sur place. Leurs regards se croisèrent puis se reportèrent sur les autres convives. Dans quel guêpier étaient-ils tombés ?

Face à eux, plusieurs groupes de personnes s'amusaient, s'affrontaient dans ce qui ressemblait à une soirée à thème : déguisements haut en couleur voire carrément flippants pour certains, boissons à gogo, décor d'ambiance. Et d'après ce qu'il en voyait, individus assoupis ou ivres morts sur les larges banquettes, l'alcool devait déjà couler à flot depuis plusieurs heures.

Il réfléchissait déjà au moyen de se retirer ni vu ni connu lorsqu'une jolie blondinette les aperçut et cria aux autres avec un charmant accent texan : « Hey en v'là d'autres ! ».

En moins d'une seconde, tous les regards convergèrent vers eux. Pour un repli stratégique c'était raté.

Bien éméchée, la fille poursuivit sur sa lancée :

- Venez les gars, on ne va pas vous manger ! Juste vous déshabiller et jouer un peu avec votre corps, n'est-ce pas les minettes ?

Un peu plus loin, un autre groupe acquiesça bruyamment et ils furent bientôt cernés de toute part. Il chercha à se débattre pour la forme même si ça l'amusait beaucoup au fond. Autant de filles en chaleur, la soirée promettait d'être divertissante. Il lança un regard en coin à Cas pour voir sa réaction. Curieusement, celui-ci restait de marbre, observant cet attroupement de femmes autour de lui. Il n'était pas apeuré, juste intrigué. Son penchement de tête caractéristique se manifestant instantanément.

- Dean ? Que fait-on à présent ?, lui parvint la voix basse de l'ange.

- Eh bien…, répondit-il tout en esquissant un regard aimable à la rouquine qui se pendait à son bras, jouons le jeu ! Après tout, tu as choisi ce bar, donc…

Il n'avait pas terminé sa phrase qu'une voix étrangement masculine résonna au creux de son oreille et qu'un corps se colla contre lui, une main baladeuse s'attardant sur sa veste.

- Alors messieurs, on cherche à s'encanailler, on dirait ?

Dean se dégagea vivement et fit face à l'homme. Enfin, si ça en était bien un parce que là, il hésitait franchement. Avec sa longue chevelure bouclée aux reflets bleutés, les couches de maquillage et les lentilles de contact, sans parler de sa tenue outrageusement décolletée, il était difficile de savoir.

- Allons mon gars, du calme ! s'esclaffa l'être qu'il se refusa à catégoriser. C'est votre première fois, ici ?

Seul le silence lui répondit.

- Je vois… Venez au bar, je vous offre un coup à boire et promis rien de plus. Ca vous va ?

- D'accord, se contenta de répondre Dean. Ainsi vous pourrez m'en dire plus sur cet endroit.

Les filles lâchèrent leurs proies en criant de désespoir et s'en retournèrent avec leurs amis qui continuaient à se faire face, encourageant les malheureux qui se retrouvaient au milieu d'un cercle.

Accoudé au bar, Dean buvait avec avidité sa bière tout en écoutant les explications données par le, la barman. C'est ainsi qu'il apprit que le bar servait de refuge aux étudiants en effets spéciaux qui venaient fêter la fin de leurs examens semestriels. Qu'au cours de ces soirées, tout était permis. La débauche était la règle. Et si des malheureux s'égaraient dans ce lieu, c'était à leur risque et péril. Ils devaient alors se plier à leurs moindres exigences. Bien entendu, aucune violence n'était commise à l'encontre de ceux qui refusaient de jouer, ils portaient simplement un bonnet d'âne et étaient priés d'évacuer les locaux.

- Okay… Si je comprends bien, on n'est pas sorti d'affaire.

- Pas du tout. Là, vous bénéficiez d'un court répit, répliqua-t-il avec un sourire de faussaire. Et puis avec votre belle gueule, ça va être dur de vous défiler. Et votre ami aussi, lui lançant un regard entendu.

Il n'eut pas le temps de s'interroger sur le sous-entendu qu'il était déjà tiré en arrière par des mains puissantes. C'est à peine s'il put reposer sa bouteille sur le comptoir qu'il était embarqué vers le cercle qu'il avait entraperçu quelques minutes plus tôt. Castiel sur les talons.

Conduits sous bonne escorte au centre du cercle qui avait été tracé au sol à la craie, des étudiants leur enlevèrent leurs manteaux. L'ange ne comprit pas le geste et tenta de s'y opposer jusqu'à ce qu'il rencontre le regard de Dean posé sur lui et qui lui intimait de n'en rien faire.

- Alors par lequel allons-nous commencer ? demanda à l'assemblée une petite fée aux boucles cuivrées. Le blond aux tâches de rousseur ou le brun aux cheveux décoiffés ?

Des voix fusèrent de tout côté. Apparemment lui et Cas étaient autant appréciés l'un que l'autre et le jeu n'avait pas vraiment débuté. Il espérait juste que tout cela ne virerait pas au drame. En attendant, c'était l'occasion rêvée pour Cas d'en apprendre plus sur les mœurs humaines, de les expérimenter.

- Toi, dit-elle en désignant l'ange. Quel est ton nom ?

- Castiel.

- Bien. Tu as l'air timide, nous allons t'aider à te sentir mieux, n'est-ce pas ? Alors dis-moi, action ou vérité ?

Il jeta un regard perdu à Dean qui s'était figé à l'entente de la question. Les mains sur les côtes, il retenait un fou rire. Non sérieusement, ils avaient passé l'âge de jouer à ça. C'était une plaisanterie de mauvais goût.

- Je ne comprends pas la référence, j'en suis désolé.

- Oh, voyons… Je vais te rafraichir la mémoire : soit tu me dis action et je te donne un gage à exécuter, soit tu me dis vérité et je te pose une question à laquelle tu devras répondre sincèrement. Alors je t'écoute, quel est ton choix ?

Castiel sembla soudain mal à l'aise, ce qui était à cocher d'une croix rouge.

- Vérité.

- Castiel, as-tu déjà aimé ?

- Et bien oui. Mon père m'a appris à aimer tous les êtres de la création. De l'infiniment petite à la plus grande. J'ai…

Un coup de coude dans les côtes le dissuada de poursuivre plus avant ses explications. Il lança un regard incertain à son protégé qui lui glissa à l'oreille :

- Ne t'étends pas. Réponds juste par oui ou par non à la question. C'est tout.

- Mais Dean, c'est…

- C'est tout, répéta ce dernier en s'éloignant le regard noir.

- Notre ami semble impatient de participer. Alors nous allons de suite répondre à ces attentes. Que choisis-tu… ?

- Dean. Pour vous servir !

- Monsieur a le sens de l'humour. Très bien ! Que le jeu commence !

La partie dura une heure et demie. Castiel et Dean se partageant les questions et les actions. Au fur et à mesure, le chasseur eut le sentiment que l'ange prenait ses marques et appréciait le jeu. Jusqu'à ce qu'une question bouleverse toute leur soirée.

- A ton tour Castiel. Voici la dernière question : as-tu déjà embrassé ?

- Non.

- Non ? Avec ton physique, tu m'en vois fort déçue, répondit la maîtresse du jeu. Mais peut-être que ce soir est le moment idéal pour remédier à ça ? Qu'en penses-tu ?

- Je…

- Laquelle d'entre vous se dévoue pour ce beau mâle ici présent ? cria-t-elle sans tenir compte de l'objection de Castiel.

Beaucoup levèrent la main dans l'espoir d'être choisie mais aucune ne retient l'attention de Castiel. Son regard céruléen s'était posé sur Dean qui sifflotait d'admiration devant le succès de l'ange. Ce qui n'échappa pas à leur hôtesse qui modifia l'orientation de sa question.

- Mais peut-être qu'un homme te satisferait davantage ? Que préfères-tu ? Tu es libre de ton choix, Castiel. Aucun de nous ne te jugera pour tes préférences.

L'ange baissa le regard sur ses chaussures. Décidément les hommes avaient des jeux étranges. Leurs questions étaient précises et le mensonge n'était pas de mise. Il était ange. L'appartenance sexuelle n'existait pas sous sa forme éthérée. Il n'était qu'énergie pure. Et là il devait répondre à une question matérielle qui n'avait aucun sens pour lui. Mais si il y réfléchissait alors oui il préférait embrasser un homme à une femme. Cependant un seul homme répondait à ce critère : Dean. Et Dean n'aime pas les hommes.

- Je vais t'offrir un merveilleux cadeau Castiel, reprit-elle. Vu que tu es indécis, tu embrasseras à la fois une femme et un homme. Ainsi tu pourras déterminer ce qui te plaît le mieux. Il serait dommage que tu ne puisses pas te faire ta propre opinion.

Discrètement elle fit signe à une jeune femme aux cheveux auburn qui s'approcha de l'ange. Avec une lenteur délibérée elle déposa ses lèvres chastement sur les siennes, ne cherchant pas à approfondir le baiser. Surpris, il se laissa faire et n'initia aucun contact. Sans un mot la jeune femme recula et rejoignit ses amies.

- Et maintenant…

Un homme grand et fin, portant un loup sur le haut du visage, se dirigea d'un pas décidé vers Castiel. Il avait un côté magnétique indéniable et les étudiantes en soupirèrent de jalousie. Lorsque sa voix retentit, tous retinrent leurs souffles :

- Castiel m'autorisez-vous à vous donner votre premier baiser ?

Ce dernier acquiesça et se rapprocha de l'individu masqué lorsque la voix étrangement grave de Dean s'éleva :

- Tu ne vas quand même pas l'embrasser, Cas ?

- Et pourquoi pas Dean ? lui répondit ce dernier, la voix cassante, sans même le regarder, ses yeux plongés dans ceux de son vis-à-vis.

- Peut-être que ton ami voudrait être ce premier, Castiel ? osa l'inconnu, en se reculant d'un pas pour céder sa place.

Dean en rougit jusqu'à la pointe des oreilles, se massant machinalement la nuque au passage. Non mais de quoi il se mêlait ce mec-là. Il n'était pas homo d'accord. Il n'était pas homophobe non plus. Il aimait juste les femmes, leurs courbes harmonieuses. C'était pas compliqué à comprendre alors pourquoi avait-il le sentiment que tous les gens qui l'entouraient voulaient le caser avec Cas ?

- Non. Dean n'aime pas les hommes.

Un frémissement de colère secoua l'assemblée à ces mots.

- Ce n'est pas vrai Cas. Tu…

- Je quoi Dean ? En es-tu sûr ? Pourquoi veux-tu toujours me mettre avec une femme lors de nos sorties ? Pourquoi ma présence dans ton espace vital te pose-t-elle autant de problème ? Pour…

- Arrête Cas ! hurla Dean en proie à une irritation croissante.

- Soit ! annonça l'ange sans plus un regard pour son protégé. Monsieur, je suis à votre disposition.

Délibérément il colla son corps contre l'autre homme et choisit de se laisser guider. Leurs bouches n'étaient qu'à quelques millimètres l'une de l'autre lorsque Castiel fut tiré violemment des bras de l'homme pour atterrir dans ceux d'un Dean ivre de jalousie.

Et sous le regard abasourdi de toute la foule, celui-ci l'embrassa avec fougue. Sa main agrippa sa nuque. Leurs bouches se rencontrèrent, leurs lèvres s'ouvrirent, leurs dents s'entrechoquèrent et leurs langues dansèrent. Leur baiser n'avait rien de chaste. Il était brûlant, dévorant et dévastateur. A l'image de leur relation.

XXX

02 heures 30.

Epuisé, Gabriel rejoignait enfin sa garçonnière, son home sweet home. Mais surtout il accourait vers les appétissantes sucreries qu'il avait dû abandonner en cours de route pour répondre à la sollicitation de Balthazar.

Et là, maintenant au milieu de son salon, dans un silence religieux, il dégustait avec une irrépressible joie toutes ces gourmandises délaissées. Sa bouche emplie de goûts acidulés, de parfums originaux ou terriblement amers. Ses yeux pétillants d'extase sous l'avalanche de sensations exquises qui éclataient sur sa langue.

Un bonheur ne venant jamais seul, il finit par s'asseoir confortablement devant son écran de télévision et visionna le film qu'il avait tourné en secret de cette soirée mémorable, privilégiant le délicieux passage où Balthazar avait failli rouler une pelle à son petit frère juste pour faire réagir cet imbécile de Dean Winchester.

Non mais qu'est-ce qu'il ne fallait pas faire pour avoir cinq minutes de paix !

FIN


Tadam !

Pas de lancer de tomates en perspective, du moins je l'espère. Sinon faites-vous plaisir, les review sont aussi là pour ça !

Au plaisir de vous lire

Marianclea