Disclaimer: JKR pour le monde et certains des personnages. Au moment où les Monsieur, etc sont en italique, c'est parce que Gabrielle s'exprime en anglais, et lâche parfois des mots en français. Vous reconnaîtrez ce genre de moments, je n'en dis pas plus. Bonne lecture !


Eleusis


Partie I


An 30, Nouveau-Mexique.

-Trouvez-la ! Retentit une voix au loin.

Une jeune femme frissonna, accolée au mur de sa cachette. En-dehors, les sorts pleuvaient, les cris retentissaient, et sans même qu'elle ne s'en rende compte, des larmes coulaient sur son visage ambré. Tremblante, elle sortit de sa sacoche un livre à la couverture en cuir usée, et s'agenouilla par terre.

-Ici et maintenant, je t'ordonne de rester caché, moi Eleusis, psalmodia-t-elle, jusqu'à ce que quelqu'un, aux intentions pures et vivant dans un monde en paix, te trouve. Garde nos secrets, le monde sorcier est en péril, aujourd'hui c'est la guerre, et je crains de ne pouvoir te protéger plus longtemps. Que la terre, l'air, l'eau et le feu te protègent et te gardent en leur sein, qu'ils te dissimulent aux yeux des envieux, et t'offrent au plus méritant d'entre nous, sorciers.

Des mèches noires tombèrent sur le livre et prirent feu. Un sourire triste naquit sur les lèvres de la noiraude, et une fois son rite achevé, elle posa un baiser sur son livre, et prit la fuite.

Sur la couverture, d'une couleur or, les lettres d'un prénom s'agitaient, semblables à des petites flammes : Eleusis.

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Avril 2011, Lyon.

-Mademoiselle Delacour, vous partez en mission au Nouveau-Mexique avec un collaborateur anglais du Magimusée de Londres.

Une jeune femme, aux cheveux blonds attachés en une queue haute négligée, une frange sur le côté retombant sensuellement près de sa joue droite, se retourna dans un couloir, l'air singulièrement agacée, ses grands yeux aigue-marine dardant méchamment son supérieur.

-Ce n'est pas parce que ma soeur aînée a épousé un Anglais que je dois me coltiner toutes les missions avec eux ! S'indigna Gabrielle Delacour.

Gabrielle venait de fêter ses vingt-cinq ans et ne ressemblait plus en rien à la petite fille coquette et soignée qu'avait connu Harry Potter quand celle-ci était venue à Poudlard pour le Tournoi des Trois Sorciers pour une tâche de Fleur. La gamine blonde, un peu trop bavarde, s'était transformée en une grande jeune femme longiligne et un peu masculine. Sa passion : l'archéomagilogie. Découvrir des objets sorciers datant de plusieurs siècles, trouver des terrains méconnus ayant abrité des sorciers, s'imprégner d'histoire sorcière, tel était le but de sa vie. Plus de place pour le maquillage, plus de place pour les vêtements de grande marque ; Gabrielle ne s'y intéressait plus -ou que, trop peu- au grand dam de sa mère Apolline, qui avait toujours vu en sa cadette une femme du monde, qui épouserait un noble français et qui reprendrait son entreprise d'organisation de mariages.

Peine perdue, Gabrielle avait curieusement changé du tout au tout après un voyage avec une organisation sorcière au Brésil à ses seize ans. Le déclencheur de toute cette passion pour la nature sauvage et les secrets encore enfouis un peu partout dans le monde.

-Qu'importe, Mademoiselle. Vous êtes la plus calée sur le Nouveau-Mexique dans tous les disponibles. Robert est déjà sur un projet au Nigeria et c'était le seul plus apte que vous à remplir cette mission.

-J'ai un Anglais déplorable, tenta Gabrielle, essayant sans succès de jouer de son sang de Vélane.

Son patron était bien le seul homme que Gabrielle connaissait et qui était quasi-imperméable à l'appel de son sang. Et bien heureusement, sinon elle ne savait pas si elle aurait réussi à repousser ses avances en plus de celles de tous ses collègues masculins.

-Vous passez tous les ans au moins deux semaines chez votre soeur en Angleterre, et vous ne fréquentez que des Anglais là-bas ; oseriez-vous Delacour me ressortir encore ce mensonge pitoyable ?

-Au moins, j'aurais essayé, ronchonna Gabrielle.

-Ne soyez pas fâchée, ma petite Gabrielle. Vous allez adorer cette mission : un brave sorcier aurait découvert près de la Gila des vieux parchemins sorciers avec des indications sur une salle cachée qui regrouperait des anciens objets de culte sorcier, des objets disparus depuis des siècles devenus des légendes... Vous savez de quoi je parle j'espère ?

Gabrielle cligna des yeux, ne pouvant se résoudre à croire ce qu'insinuait son supérieur. Y'avait-il une chance pour que le livre d'Eleusis fasse partie de ces objets dont il parlait ? Le livre d'Eleusis, la plus belle légende du monde, disparu des siècles plus tôt. Un livre dans lequel serait retranscrit le secret des débuts de la magie, un livre qui révélerait les plus grandes formes de magie blanche, un livre refermant tous les savoirs de premiers magiciens, les plus puissants.

-Je vois très bien Monsieur, répondit Gabrielle d'une voix blanche.

Si il était possible de retrouver ce livre, et qu'elle en soit une des principales actrices... alors, elle ne devait pas hésiter une seule seconde. Même si pour ça, elle devait encore travailler avec un Anglais trop imbu de lui-même, prétentieux, et à la façon d'être trop maniérée, ou encore avec un Anglais rustre et peu commode. Ses anciennes missions avec eux avaient toujours été de vraies épreuves et elle ne souhaitait pour rien au monde recommencer.

-Tant que je ne travaille pas avec Anton Spencer, John Packblood et Kevin Murdle, ça me va, posa Gabrielle comme conditions.

-L'Angleterre a décidé de nous envoyer un de leurs meilleurs agents, et c'est une nouvelle recrue. Il bossait avant en tant que Langue-de-Plomb, mais pour une raison non précisée, il a voulu changer du tout au tout et se spécialiser dans l'archéomagilogie.

Gabrielle fut étonnée... Un ancien Langue-de-Plomb reconverti dans l'archéomagilogie, c'était louche, et surtout très rare. Peut-être avait-il trouvé des informations sur le livre d'Eleusis au Département des Mystères, et en ayant fait part à ses supérieurs, ceux-ci l'avaient réorienté. En tout cas, il était certain qu'il allait être assez taciturne, et un peu sec. Qu'importe, tant qu'il ne l'ennuyait pas... et qu'il arrivait à contrôler ses hormones.

-Son nom, Monsieur ? Demanda Gabrielle à son supérieur.

-Stephen Cornfoot, mais ils ne m'ont donné aucun dossier, juste quelques vagues informations comme quoi il travaillait avant en tant que Langue-de-Plomb, s'est spécialisé en archéomagilogie, et a donc tout l'entraînement nécessaire à cette mission.

Vu qu'aucun dossier n'avait été fourni, Gabrielle se demanda un instant si ce fameux Stephen Cornfoot avait été dans la promotion de la famille de son beau-frère William -elle préférait l'appeler comme ça-, ou peut-être était-ce même un homme à l'aube de la quarantaine, plus en très bonne forme. Gabrielle ne savait pas à quoi s'attendre de cet homme, et cela la frustrait quelque peu. Etait-il blond ? Ou un roux comme tous les autres ? Pas que Gabrielle n'aimât point les roux mais en fréquenter dès qu'elle allait en Angleterre l'énervait un peu. Ils étaient tous roux dans la famille Weasley, pas un seul blond ou brun, non, tous roux, sans exception aucune. Enfin heureusement que les hommes Weasley avaient épousé des filles brunes et noiraudes, à part sa soeur, évitant ainsi que tous leurs enfants soient roux. Seuls la petite Rose, Dominique, sa nièce, et Lily n'avaient pu échapper à la couleur si vive qu'était le roux.

-Le départ est prévu pour quand ?

-Tenez, c'est le dossier avec toutes les informations qui vous seront nécessaires. Monsieur Cornfoot vous retrouvera à Paris demain matin à midi, à La licorne. Vous pouvez rentrer chez vous pour vous préparer et vous documenter comme il le faut.

-Une mission comme ça ne se prépare pas en une soirée ! Contra la jeune femme, peu incline à préparer une mission de cette envergure -il ne fallait pas oublier que le livre d'Eleusis était peut-être dans la salle cachée- en une seule soirée. Une nuit blanche et plusieurs cafés allait être de mise pour être complètement opérationnelle quand elle allait rencontrer son nouveau coéquipier. L'Anglais.

Un frisson amer la traversa : elle bossait toujours avec des Anglais ou des Allemands. Son supérieur ne pouvait-il pas faire un geste, et la faire travailler avec des Espagnols ou des Italiens, de réputation plus amicale ? C'était trop demander ?

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Comme prévu, Gabrielle avait fait nuit blanche, bu quatre cafés depuis que l'aube avait pointé le bout de son nez, et elle bouclait à l'instant son sac de voyage pour transplaner sur Paris, sa ville natale. Et malheureusement, le hibou qu'elle avait envoyé en express à sa soeur pour qu'elle demande à ses beaux-frères si le nom de Stephen Cornfoot leur disait quelque chose, n'était pas encore revenu avec une réponse qui aurait pu l'éclairer un peu.

-Et merde, jura la blonde en se cognant le genou dans sa table basse, s'étant penchée pour chercher sa pince porte-bonheur sous son lit.

Son jean venait de se déchirer légèrement au niveau du genou et Gabrielle soupira ; elle allait avoir belle allure devant l'Anglais et si c'était un maniaque, elle ne donnait pas cher de sa peau. Déjà, elle en était certaine, il allait la considérer comme une jeune écervelée incompétente si il était un vieux croûton bourru, et pour une potentielle proie si il avait entre vingt-cinq et trente-cinq ans.

Et justement, pour ne pas éventuellement froisser un maniaque, et pour ne pas appâter un dragueur, Gabrielle avait enfilé des vêtements simples : un tee-shirt blanc en coton au minuscule col en V, une veste sobre noire, un jean et des chaussures confortables. Aucun maquillage, aucune coiffure sophistiquée ; elle était là pour le boulot et elle entendait bien le faire comprendre à Stephen Cornfoot, quel qu'il soit.

Le livre d'Eleusis était une légende, le rêve de tout archéomagilogue, et elle avait une chance de le réaliser à seulement vingt-cinq ans... Ce n'était sûrement pas un Anglais qui allait l'en empêcher, ou gâcher son plaisir.

Non, elle n'était pas raciste mais le fait que sa soeur ait quitté la France pour soi-disant perfectionner son anglais pour ensuite s'acoquiner avec l'un d'entre eux, lui était resté en travers de la gorge.

Et puis, en Angleterre, il faisait toujours gris et froid. Pas qu'à Paris, c'était mieux, mais voilà quoi, elle était réputée pour être la ville la plus romantique au monde -enfin, presque- alors que Londres était connu pour quoi hein ? Son inutile Big Ben et sa famille royale.

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Avril 2011, Paris.

Une nausée passagère la prit, mais Gabrielle la surmonta aisément, ayant pris l'habitude des conséquences un peu abruptes du transplanage.

La ruelle de Paris dans laquelle elle avait transplané était équipée d'un Repousse-Moldu, et elle distingua un transplanage imminent à quelques pas d'elle. La belle blonde salua l'inconnu d'un geste de tête, remonta la bretelle de son sac sur son épaule et marcha d'un pas décidé vers les rues bondées de Paris, direction La licorne, qui n'était qu'à quelques rues.

Elle y fut en trois minutes, et quand Gabrielle Delacour entra, toutes les têtes masculines se tournèrent vers elle. Comme d'habitude. Et quand c'était sa soeur, c'était pire. A quelques mètres d'elle, les hommes ne pouvaient s'empêcher de lui adresser la parole, au grand dam de Bill Weasley.

D'un coup d'oeil, Gabrielle crut reconnaître Stephen Cornfoot en le seul roux du bistrot sorcier, qui donnait sur leur monde magique, comme à Londres et dans toutes les capitales du monde d'ailleurs. Un roux un peu hautain, maniéré, qui la jaugeait d'un air appréciateur, mais au physique sportif et aux larges épaules. Il lui faisait d'ailleurs penser à un Indiana Jones, film moldu qu'un de ses petits amis lui avait fait découvrir, jeune.

-Stephen Cornfoot ? Demanda-t-elle, en essayant de cacher le plus possible son accent français.

Son supérieur avait raison, elle savait parler anglais presque couramment, mais gardait toujours cet accent français déplorable, qu'elle abhorrait.

-Je ne vois point de quoi vous parlez, lui répondit sèchement le sorcier.

Ah. Ce n'était pas lui, Stephen Cornfoot. Bon, d'accord. Gabrielle hésitait, aucun des hommes présents ne lui semblait correspondre au profil d'un ancien Langue-de-Plomb, ayant pu se reconvertir dans l'archéomagilogie.

-Mademoiselle Delacour ? Demanda un homme derrière elle.

Gabrielle se retourna, prête à faire face à son nouveau coéquipier en toute dignité, mais ne vit que le serveur, avec une pointe de déception.

-Comment savez-vous qui je suis ? Questionna-t-elle, étonnée.

-Monsieur Cornfoot vous attend dans l'arrière-salle, il m'a chargé de vous transmettre le message.

-Merci bien, répondit Gabrielle.

Alors comme ça, Monsieur Cornfoot l'attendait dans l'arrière-salle. Un lieu privé, intime, où les oreilles ne traînaient pas. Gabrielle prit une profonde inspiration et se dirigea d'un pas décidé vers l'endroit où s'était assis ce cher Monsieur Cornfoot.

Quand elle passa la porte et la referma soigneusement derrière elle, Gabrielle s'était attendue à tout, vraiment tout, que ça. Elle qui avait plutôt imaginé un roux ou un blond pépiant dans la majorité des cas, se retrouvait face à un homme très grand, à la chevelure noire épaisse lui flattant la nuque, aux yeux gris perçants et à la musculature bien constituée, transparaissant à travers son tee-shirt et son jean, adossé au bar.

-Monsieur Cornfoot ?

-Miss Delacour, la salua-t-il.

Voix rauque, plutôt taciturne à première vue et dans une posture à la fois amicale et distante ; Gabrielle retrouvait plus du Langue-de-Plomb que de l'archéomagilogue en Stephen Cornfoot. Mais elle n'y prit pas garde, priant seulement Morgane que celui-là ne lui pose pas trop de problème et ne louerait pas la Grande-Bretagne à chacun de leurs pas.

-Vos supérieurs n'ont pas cru bon de nous transmettre votre dossier mais je vois que vous, vous êtes renseignés sur moi, lâcha Gabrielle en remarquant un dossier avec sa photo sur le bar, près de Cornfoot.

-En effet, mais disons qu'il n'existe pas de dossier transmissible à une simple organisation d'archéomagilogie, à mon sujet, répondit simplement Stephen.

Chose étrange, remarqua instantanément Gabrielle, il semblait insensible à son sang de Vélane, et uniquement pour le tester, elle essaya de distiller son charme dans l'air. Sans succès évident.

-Ne perdez pas votre temps à essayer de m'envoûter, Miss Delacour. J'ai été entraîné à résister à ce genre de choses.

Elle fit la moue ; cet homme semblait bien arrogant et confiant en lui-même, et même si le fait qu'il résiste aisément à ses charmes la rassurait, elle aurait voulu qu'il lui montre une faiblesse. Elle aurait voulu pouvoir le manipuler à n'importe quel moment, coéquipier ou pas ; elle aurait voulu voir dans ses yeux un éclat de doute ; elle aurait voulu voir son sourire en coin, arrogant en diable, s'effacer pour laisser place à de la méfiance.

-Je voulais voir si vous étiez apte à rester près de moi, … mes anciens coéquipiers ont toujours eu la fâcheuse tendance au flirt pendant les mission et j'ai très peu eu l'occasion de travailler avec des femmes, des équipes mixtes étant recommandées dans les missions.

-Si je n'y avais pas été obligé par mes supérieurs Miss Delacour, j'aurais fait équipe avec moi-même, trancha Stephen d'un ton sec.

Dire que Gabrielle Delacour fut outrée était tout à fait exact. L'arrogance de cet homme la surprenait de plus en plus. Quel âge avait-il pour être aussi sûr de lui et de ses capacités ? La trentaine ? Cela n'expliquait en rien son comportement. Il aurait tout aussi bien avoir cinquante ou vingt ans, personne ne devait être aussi confiant en lui.

-Vous vous surestimez Monsieur Cornfoot. Personne n'est capable d'assurer une telle mission seul.

-Et c'est certain qu'une femme d'à peine vingt-cinq ans me sera d'une grande aide, se moqua Stephen.

La blonde rougit brutalement et maudit à voix basse l'Anglais qui lui faisait face. Si il commençait déjà à lui faire des remarques sur son âge, ça allait chauffer pour son matricule, homme plus âgé ou pas. Il devait y avoir un certain respect mutuel et non une domination de l'un sur l'autre ; et de plus, Gabrielle Delacour n'était pas du genre à se laisser faire. Bien au contraire.

La coopération France/Angleterre promettait pour cette mission.

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Avril 2011, Nouveau-Mexique.

Gabrielle s'essuya le front d'un geste de main rapide. Il faisait atrocement chaud pour un mois d'avril, et Stephen Cornfoot, près d'elle, semblait imperméable à la chaleur étouffante et pesante. Seul un froncement de sourcils, qui lui donnaient l'air d'un aigle à l'affût, montrait qu'il la ressentait néanmoins.

La jeune femme après leur intermède assez inamical à La licorne ne lui avait presque plus adressé la parole même si elle aurait avoir plus d'informations sur l'homme qui l'accompagnait. Il était un inconnu et savait pourtant beaucoup de choses sur elle. Sur ses origines, sur ses études à Beaux-bâtons, et quelques petites choses encore qui avaient de l'importance, comme son profil psychologique.

-Est ce que vous pourriez me parler un peu de vous ? Demanda Gabrielle, brusquement, alors qu'ils marchaient en direction de leur gîte, à travers la nature verte qui les entourait telle une petite bulle paisible, troublée par leur passage.

-Non.

Agacée, la blonde joua nerveusement avec sa frange et se pinça fortement les lèvres pour ravaler des insultes peu convenables.

-Quel goujat, ne put s'empêcher de murmurer Gabrielle.

Une minute de silence passa.

-En revanche, je peux vous dire que je parle couramment français, indiqua Stephen sans se retourner.

Mais Gabrielle savait qu'il souriait de toutes ses dents en disant cela. Fier de lui, bien entendu. Quel arrogant et grossier personnage, déplora-t-elle. Sexiste, à n'en pas douter.

Sur quel énergumène était-elle encore tombée ? Les Anglais ne pouvaient-ils pas être tous des clichés ? De vrais gentlemans aux manières exquises ? … Non, pas les archéomagilogues, en tout cas. Ou alors, tout simplement, elle n'avait pas de chance.

Plus que probable.

-Puis-je savoir pourquoi vous refusez de me donner plus d'indications sur vous, Cornfoot ? S'indigna Gabrielle au bout d'une minute de silence. Je ne connais que votre nom, et vaguement ce que vous faisiez avant l'archéomagilogie. C'est trop peu ! Je ne sais même pas votre âge !

-J'ai trente-et-un ans, lâcha brusquement son coéquipier, tout en continuant à avancer à travers les hautes herbes.

Gabrielle fut surprise de la rapidité de sa réponse, et ne se permit que de lâcher un « Bien. » hautain et -elle l'espérait- détaché. Donc il avait à peine dépassé le stade de la trentaine, … Ce qui voulait dire qu'il avait sûrement été dans la promotion des beaux-frères de sa chère sœur. Des noms qui faisaient toujours autant rêver : Harry Potter, Ronald Weasley, etc... Des personnes d'exception que Gabrielle avait eu la chance de rencontrer quand sa sœur avait été sélectionnée pour le Tournoi des Trois Sorciers et qu'elle avait dû être la chose la plus précieuse à ses yeux à retrouver dans le Lac de Poudlard... Ça avait été la plus belle preuve d'amour de sa sœur pour elle, et Gabrielle se souvenait avoir été plus qu'émue à ce moment-là.

-Vous avez connu Harry Potter ?

Son coéquipier garda le silence quelques minutes avant de marmonner qu'il avait vaguement connu le Héros, qu'il était juste de sa promotion, sans plus. Aigri, à n'en pas douter, constata Gabrielle songeuse. Tous -ou presque- adulaient Harry Potter, qui avait sauvé le monde sorcier d'un horrible destin. Mais il y avait des jaloux, des mécontents, … Stephen Cornfoot avait-il été dans le camp du mage noire ?

-Vous étiez aussi à Gryffondor ?

-Non, Serdaigle.

Gabrielle fronça les sourcils, essayant de se rappeler quelles étaient les caractéristiques de cette maison, tout en évitant de se prendre les branchages que son coéquipier devant elle écartait de leur chemin d'un coup de baguette trop rapide pour les maintenir assez longtemps en-dehors de leur route -donc elle se les prenait en pleine figure-. Ah oui, Serdaigle, la maison des érudits et sages. Cet homme-là était un intellectuel, quoiqu'un peu trop intrépide et aventurier si elle considérait le fait qu'il avait choisi une voie aventurière après Langue-de-Plomb.

-Sang-Pur ?

-Vous posez trop de questions Miss Delacour.

-La famille Cornfoot est de Sang-Pur si je ne m'abuse. Vous avez d'ailleurs une jeune sœur, qui doit avoir quelques années de plus que moi, trois ans, voir quatre à peine... Je l'ai connue à une soirée donnée en l'honneur du mariage d'Emile De Teronne et Kate Hockle.

Stephen s'arrêta si brusquement que Gabrielle, surprise, faillit se prendre de plein fouet son sac très chargé, et qui lui aurait sans doute causé une certaine douleur. Puis il se tourna, son flegme habituel ayant disparu laissant place à une rage froide et contenue, qui hérissa Gabrielle, hésitant entre se battre ou s'écraser.

-Vous ne vous trompez pas, j'ai bien une jeune sœur, Alicia Cornfoot, vous l'avez bien rencontrée à cette soirée, et j'y étais d'ailleurs présent. Je pourrais même vous décrire la façon dont vous étiez habillée, et avec qui vous avez dansé. Et ne vous méprenez pas, je ne vous avais pas particulièrement remarqué -vous êtes aux antipodes de mon style de femme- mais moi, j'ai pour habitude de noter tous les détails.

La jolie blonde pâlit brusquement, se rendant compte qu'il insinuait qu'elle n'était qu'une vulgaire aventurière qui même si elle avait tous les diplômes nécessaires, n'était pas à la hauteur pour lui. « Mais moi, j'ai pour habitude de noter tous les détails », … l'enflure. Parce qu'elle, elle s'amusait à regarder les papillons et ne faisait pas assez attention au monde qui l'entourait ?

Et Gabrielle, extrêmement susceptible, n'attendit pas pour lui voler dans les plumes. Il était si arrogant, si sûr de lui, supérieur de tous dans son petit monde, … mais pas dans celui de Gabrielle et elle allait le lui faire comprendre.

-Vous pouvez dire ce que vous voulez Cornfoot, mais quand un homme est capable de me dire ce que j'ai fait, et comment j'étais à une soirée datant d'il y a plus de trois ans, pour moi il était clairement fasciné. Je ne pense pas que vous auriez pu en dire autant sur toutes les femmes présentes ce soir-là.

Le regard du brun cilla, et avec un sourire ironique, il se retourna et recommença à avancer à travers la masse verte, pendant que Gabrielle, outrée, marmonnait en français des injures peu flatteuses, se fichant bien de savoir qu'il comprenait parfaitement sa langue maternelle.

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Mai 2011, Nouveau-Mexique

-Je refuse catégoriquement de partager ta chambre, Cornfoot ! S'enflamma Gabrielle, les cheveux mouillés dégoulinant sur son débardeur blanc, qui devenait de plus en plus transparent.

Stephen eut une moue méprisante. Devoir l'avoir dans sa chambre ne l'enchantait pas plus que ça, mais une mini tornade avait endommagé la moitié de l'auberge dans laquelle ils se trouvaient, et il n'y en avait pas d'autres à des dizaines de kilomètres autour, tellement ils étaient dans un coin reculé.

Dans son esprit, il avait vainement espéré qu'elle se soumette dès leur arrivée au Nouveau-Mexique mais ça n'avait fait qu'empirer. Cette française était indomptable et dotée d'un caractère de feu : il ne reconnaissait plus la jeune femme qu'il avait brièvement aperçue trois ans plus tôt et qui semblait plus féminine, plus douce, plus chatte que lionne. En même temps, elle se devait de faire bonne figure dans ce genre de mondanités, mais là, elle était seule avec lui, dans un pays étranger, et ne se formalisait pas des convenances. Aucunement.

Seul changement notable : ils étaient passés du vouvoiement au tutoiement.

-Delacour, je te ferais remarquer qu'il n'y a plus aucune chambre de disponible, et à moins que tu ne veuilles vivre comme une sauvage dans ta tente pendant les prochaines semaines -non, en fait tout le temps que durera notre mission-, tu es obligée d'accepter mon offre.

Ton blasé, il n'en pouvait plus qu'elle conteste chacune de ses décisions, quelles qu'elles soient. C'en était trop.

Voyant qu'elle s'apprêtait à répliquer, Stephen attrapa fermement son poignet d'une main, et son sac de l'autre, et la traîna littéralement jusqu'à la porte de sa chambre pendant que Gabrielle se retenait à grande peine de ne pas hurler devant l'hôtelier et les autres « vacanciers », passablement irrités. Puis, arrivés à destination, il ouvrit la porte et la jeta sans ménagement à l'intérieur de la pièce.

-Mais t'es malade ou quoi ? Si tu voulais me faire l'amour, fallait user de moyens un peu moins homme des cavernes, le railla-t-elle tout en massant son poignet endolori.

-Le jour où j'accepterais de faire l'amour avec toi, Delacour, c'est que j'aurais bu. Et maintenant, tu t'installes, c'est ton nouveau chez toi, et dépêche, on va faire une sortie, je crois avoir repéré un coin plutôt intéressant.

Ils ne disaient jamais à voix haute ce qu'ils cherchaient, craignant trop que des mercenaires ou autres ne les suivent pour essayer de leur dérober leur trouvaille ensuite... Dans le monde de l'archéomagilogie, il existait des fous alliés, trop -beaucoup trop- passionnés, et Stephen et Gabrielle savaient bien que leur mission comportait quelques risques majeurs, aussi bien dans leur quête que dans le monde autour. Donc ils se soutenaient autant qu'ils … pouvaient se supporter. Chose ardue, mais possible.

-Ben il a intérêt d'être vraiment intéressant ton coin, sinon je t'en collerais une !

-Tss, Delacour, où est passé ta féminité ? Se moqua Stephen, joueur.

Depuis qu'ils étaient obligés de se supporter presque vingt-quatre heures sur vingt-quatre, Stephen s'était un peu laissé aller, laissant de côté son caractère taciturne, à la grande surprise de Gabrielle. Et maintenant, dès qu'il le pouvait, il lui envoyait des piques -donc d'un certain côté, elle regrettait qu'il ait changé ce trait de caractère au bout d'un mois de cohabitation- et ne se gênait pas pour la critiquer ou pour la remettre à sa place quand il en ressentait le besoin... C'est à dire, tout le temps.

-Dans ton short, Cornfoot.


Je sais, je suis censée bosser comme une tarée (ce que je fais d'ailleurs, j'en peux plus, j'adore ça mais j'en peux plus) mais ce truc traînait sur mon mac depuis les vacances et il me restait plus que la fin de la première partie à commencer. J'aime bien ma Delacour et il faut que j'affine un peu plus mon Stephen Cornfoot, pas encore bien cerné mon personnage. Y'a une petite intrigue autour d'un livre mystérieux qui renfermerait pas mal de secrets, et j'irais plus en profondeur dans la deuxième partie, sachant que ce sera en trois parties, … Normalement.

En décembre, j'aurais des vacances et un peu plus de temps pour vous poster la deuxième partie. J'espère que la première vous a plu et mis l'eau à la bouche ahah (enfin si l'écriture est pas trop mauvaise...).

Des bisous, Valouw qui a des cernes de trois kilomètres de long, et dont le nouveau meilleur ami est le café.