Disclaimer : certains personnages ne m'appartiennent pas, ils sont la propriété de RTD et la BBC. Je ne fais que jouer avec.

Béta : Arianrhod

NB : Histoire qui débute après Children of Earth, saison 3 de Torchwood. Il s'agit de la suite d'Entropia, que vous trouverez sur mon profil, si vous ne connaissez pas. Je précise car je reprends quelques personnages, fait des allusions pas forcément compréhensibles si vous ne l'avez pas lu. Mais j'espère que vous apprécierez...


Chapitre 1: Un visiteur



Un vent violent souleva la poussière de brique. Un nuage rouge flotta au gré du souffle venu de nulle part. Une forme humaine se dessina peu à peu au milieu d'une lumière irréelle. Le vent s'éteignit brutalement. L'homme se redressa au milieu du nuage qui retombait en volutes infernales. Il éternua violemment, trois fois, l'écho se répercuta le long des murs de briques sombres et sales. Une lumière sourde éclairait doucement les lieux, lui permettant de s'orienter. Il découvrait l'endroit comme pour la première fois. Des murs de briques écroulées, des monceaux de poussières, un reste d'arcade le long d'un mur de béton brut. Il explora la pièce où il venait d'apparaître. Rien ne ressemblait à ses souvenirs. Il frémit intérieurement. Cela ressemblait à une cave, à des sous-sols rescapés d'un quelconque cataclysme post-nucléaire. Il gagna le fond de la salle et palpa le mur de béton rugueux. Il lui semblait récent. Il marchait au milieu des décombres de la pièce, l'air alourdi par l'odeur de poussière qui revenait lui chatouiller les narines. Il éternua à nouveau. Il fit le tour de la pièce, environ cent mètres. Un rectangle vidé de toute chose intéressante, seulement des ruines. Comment ressortir s'il ne savait pas où il se trouvait exactement ?

Un message écrit à la peinture noire dans une écriture élégante sur un reste de mur ébranlé lui apprit qu'il se trouvait dans les sous-sols. Il ne l'aurait jamais deviné, pensa-t-il ironiquement. Tout semblait avoir été chamboulé ici. Mais il distingua finalement près du mur du fond comme une porte murée. Il soupira. Il allait devoir faire des travaux de force, pour défoncer ce passage. Il se sentait tellement fatigué. Il ramassa une barre de fer qui trainait sur le sol et en frappa le béton encore frais qui céda plus facilement qu'il ne s'y attendait. En quelques minutes, il avait dégagé un espace suffisant pour s'y glisser. Il récupéra son sac, garni d'appareils et de matériel. Il y prit une torche et le glissa au travers de son corps. Il passa de l'autre coté du mur, un couloir de béton s'ouvrait devant lui. Il balaya à droite et à gauche, sans détecter de présence humaine ou autre. Aucun bruit, aucune lumière n'indiquait que le couloir était couramment utilisé. Il regarda sa montre, option heure partout dans le monde, podomètre et surtout boussole.

Ok le nord à droite, le sud à gauche autant suivre le sud. Il marcha silencieusement, tentant de se réchauffer. Il était devenu si sensible au froid depuis quelques mois. Il faisait attention, guettant des signes de vie autour de lui. Mais aucun son ne troublait les couloirs obscurs où il déambulait. Plus de poussière et une odeur indubitable de peinture fraiche. Ces couloirs étaient récent, sans nul doute. Il découvrit à l'aide de sa lampe des inscriptions. Bas. -6. Il en déduisit qu'il se trouvait au 6ème sous-sol d'un nouveau bâtiment.

Il devait s'éloigner de son lieu d'arrivée en direction de la mer, vers le sud-est, s'il ne se trompait pas. Il arriva enfin à un palier d'escalier aux marches polies par les siècles. Il s'interrogea, devait-il monter dans les étages au risque de croiser des gens et de devoir expliquer ce qu'il faisait ici ou bien affronter les profondeurs de l'escalier ?

Il préféra descendre. Il se rappelait cet escalier qui menait vers les égouts de la ville. Il avait un sentiment bizarre, celui de n'avoir aucune envie de rencontrer les nouveaux possesseurs des lieux. Des bruits venus des étages le convainquirent tout à fait de descendre.

Il éteignit sa lampe et silencieusement descendit marche après marche. Le vacarme qu'il avait fait en démolissant le mur de la crypte où il avait atterri, devait avoir averti quelqu'un. Il n'avait vraiment pas envie d'attendre de le rencontrer. Le même sentiment d'urgence qu'il l'avait amené jusqu'ici lui intimait de descendre et de s'enfuir. Il fit attention en continuant de descendre. Les pierres devenaient de plus en plus glissantes à mesure qu'il s'approchait des égouts. Il les sentait, littéralement. Il se cogna contre une porte. Fermée.

Jurant à voix basse, il alluma sa lampe pour sortir des instruments de crochetage. Les dents serrées sur sa lampe, il ouvrit hâtivement la porte avec un grincement qui sembla déchirer le silence. Il la franchit rapidement et referma derrière lui. Il s'appuya sur le bois brut, manquant de déraper.

L'odeur des égouts lui monta à la gorge. Il se cacha la bouche de son coude, recherchant activement quelque chose pour l'aider à respirer malgré cette horreur. Rien. Il déchira le bas de sa chemise et se confectionna un bâillon, à temps pour éviter de vomir. L'odeur était véritablement suffocante, digne d'un cloaque des années victoriennes.

Il balaya de sa torche les ténèbres qui s'ouvraient devant lui. Aussi anciens qu'il s'y attendait. Des arcs de brique soutenaient des voûtes basses, qui s'éloignaient dans l'obscurité, une eau noire qui clapotait doucement le long d'étroites corniches, qui allaient s'avérer plus traitreusement glissantes que les escaliers. Il souffla doucement, il espéra ne pas se perdre dans ce dédale d'eau stagnante. Il colla son oreille à la porte. Il entendit des pas lourds, des cliquetis et des voix inaudibles.

- bon, allons-y ! s'encouragea-t-il à voix basse.

Il secoua ses boucles brunes, resserra son manteau de cuir noir autour de son corps amaigri et s'engagea sur le premier chemin des égoutiers. Sa haute taille était courbée en deux par les voûtes basses et suintantes.

Pendant plus d'une demi-heure, il avança mètre par mètre, se retenant au plafond pour ne pas déraper, et se retrouver couvert d'ordures. Il avait finalement allumé sa lampe coincée dans une boucle de son sac. Il consulta sa montre-boussole. Il se dirigeait maintenant vers l'est, vers la mer. Il perdait peu à peu le sens du temps, s'étonnant à chaque fois qu'il regardait l'heure. 11h du soir. Il n'était arrivé que depuis 1 heure mais cela lui paraissait des heures. Il écoutait de loin en loin si quelqu'un le suivait. Mais il n'y avait que le bruit de l'eau qui lentement s'écoulait, gouttait. Il pourrait facilement croire être le seul être vivant dans ces égouts. Mais il prenait garde, car les égouts pouvaient receler d'étranges créatures. Il aurait du s'armer, il se promit de le faire dès qu'il s'arrêterait.

Il arriva enfin à une plateforme de pierre, un refuge pour les égoutiers. Il s'affala contre le mur, attentifs aux sons qui portaient loin sur l'eau, même saumâtre.

Il détecta un souffle d'air frais au milieu de cette atmosphère viciée. C'était un véritable plaisir qu'il accorda à ses narines, ravies de l'aubaine. Il devait être plus proche de la mer qu'il ne le pensait. Cette nouvelle le ragaillardit, chassa un peu la fatigue qui le harcelait sans répit.

Il se releva avec une grimace, ses jambes voulaient un peu plus de repos, mais il ne pouvait rester là. Il se remit en chemin, alors que sa besace lui semblait peser des tonnes. Il se morigéna, il fallait qu'il continue, trop de choses en dépendaient. Il resserra ses doigts sur son tazer dans son sac. Il venait d'entendre des clapotis précipités derrière lui, alliés à une respiration haletante et des grognements. Quand on parlait de la faune locale ! Il étira le cou, douloureux d'être courbé depuis si longtemps. Le son lui disait quelque chose et cela ne l'enchantait guère.

Avoir affaire à un weevil dans un égout, avec juste un tazer toute arme et dans l'état où il se trouvait, était un peu téméraire. Il avança plus rapidement, s'aidant de ses mains pour aller plus vite. Il entendait la bestiole avancer dans l'eau. Il n'avait pas peur de se mettre à l'eau celui-ci, pourtant les weevils ne savent pas nager ! Il devait y avoir juste ce qu'il fallait de profondeur pour avoir pied. Il n'avait aucune envie de tester par lui-même.

Il arriva à une sorte de grande salle, où une forêt de piliers soutenait une architecture de brique, arrondie comme une nef étrange. Des grilles rouillées permettaient de traverser, non sans éprouver une certaine appréhension. Il parvint à un nouveau refuge situé dans le fond de cette cathédrale de pestilence, à la pointe d'un petit îlot au milieu d'une rivière de déchets, où il put enfin se tenir debout sans se cogner la tête. Il se plaqua contre un énorme pilastre humide et attendit l'arrivée du monstre qui le talonnait, tazer au poing.

Quelque chose avait dû l'avertir que sa future proie allait se montrer récalcitrante, car il faisait moins de bruit, comme si la bête avait reniflé le piège. Mais il approchait tout de même. L'homme savait qu'un weevil sur son territoire n'avait pas peur de s'attaquer à un individu esseulé. Et il ne se sentait pas en mesure de l'affronter à la loyale. Mais ce weevil ne semblait heureusement pas briller par son intelligence.

Il l'entendait maintenant approcher à sa droite, claquant des dents et reniflant. L'homme tenta de ne faire qu'un avec le mur, prêt à tirer dès qu'il montrerait son sale museau. Il l'entendait suivre sa trace, flairant son odeur. En voilà un qui n'était pas rebuté par la senteur particulière des égouts.

L'homme sourit de la bêtise de la créature. Il l'attendait et il ne devait pas s'attendre à cela. Mais l'attaque ne vint pas du coté droit, mais du coté gauche. Le weevil l'avait contourné et venait de lui plonger dessus ! Ses réflexes s'étaient drôlement émoussés pour s'être laissé avoir ainsi. Et la bestiole plus maligne qu'il ne le pensait. A moins que ce fut l'acoustique particulière du lieu méphitique. Il grimaça tout en repoussant la gueule hérissée de dents effilées qui cherchait sa gorge. Son tazer glissa de sa main et tomba dans l'eau. Il jura, il tenait le weevil par les poignets et celui-ci forçait, faisant claquer ses mâchoires à quelques centimètres de son visage. Il se rejeta en arrière et lui abattit trois coups de tête successifs sur le museau qui le laissa étourdi.

Lui-même sentit la douleur lui martelait le front. Il décocha un violent coup de pied dans ce qui lui servait de genoux pour le faire plier et l'attrapa par le cou. Il lui plongea la tête dans l'eau putride alors que l'être hurlait sa douleur. Il le maintint du mieux qu'il le put, à genoux sur le sol éclaboussé de fange. L'autre se débattait avec la conscience qu'il allait mourir. La peur lui donnait une force inconsidérée. Finalement, la bête se relâcha sous ses doigts, quelques bulles remontèrent à la surface, et ce fut tout.

La lutte mortelle n'avait pas duré plus de quelques minutes, mais elle l'avait exténué. Il le lâcha et le regarda s'éloigner au gré du courant qui entrainait tous les déchets vers la mer. Il n'aimait pas donner la mort, même quand il s'agissait d'une nécessité. Il se releva et suivit, pantelant, le corps qui lui montrait la voie de sortie. Bientôt l'odeur marine se fit plus forte, plus vivifiante. Il atteignit la fin de ce tunnel fétide et répugnant.

Une grille bloquait l'accès, vétuste, rouillée, maintenue par un verrou pas forcément en meilleur état. Il eut tôt fait de le faire sauter. Il se trouvait à 10 mètres au-dessus de la mer. Le vent faisait claquer son manteau de cuir contre son corps. Il regarda en bas, l'écume qui jaillissait en gerbes folles ne l'incitait pas à sauter, d'autant qu'en plein mois de février, il gèlerait surement. Il fouilla dans son sac, il avait exactement ce qu'il lui fallait pour grimper le long de la falaise. Un grappin pliable avec un filin si fin qu'il ne pesait rien. Il le déplia et le lança. La chance était avec lui. Son premier lancer fut le bon, car le grappin accrocha immédiatement au rebord de la falaise. Il jeta un dernier regard vers la mer, où le corps du weevil se faisait déchiqueter par les rochers en contrebas. Heureusement qu'il n'éprouvait pas le moindre vertige, c'était une vue atroce.

Il se mit à escalader la paroi, à la force des bras, priant pour que le filin soit aussi solide que promis. Les pierres roulaient sous ses pieds, les prises s'effritaient sous son poids. Le son des vagues s'écrasant contre la falaise rythmait ses efforts, le poussait à avancer, malgré son épuisement. En quelques minutes, il fut couvert d'une sueur froide, issue de la fatigue, de l'angoisse et de l'adrénaline. Il toucha enfin le sommet en un dernier effort, et s'échoua sur le rebord de la falaise. Il roula sur le dos, dans l'herbe tendre. Il soufflait profondément, les membres frémissants de l'effort. L'air vif chassait les miasmes dans sa poitrine. Il resta plusieurs longues minutes dans cette position à reprendre sa respiration malmenée par l'escalade.

- je jure de reprendre le sport, dit-il à voix haute en se rétablissant sur ses jambes tremblantes. Maintenant, direction le centre-ville.

Il secoua ses vêtements, brossa les taches de boue de son mieux. Finalement, il haussa les épaules et se mit en route. Il était à environ 10 km de son point d'arrivée. Il sentait la fatigue bruler ses membres, irradier dans ses os. Mais il fallait qu'il tienne, du moins jusqu'à son point de chute. Il sortit une sorte d'agenda électronique et consulta l'adresse de son ami, 5, Adelaïde Street. Il soupira. Il fallait qu'il se refasse tout le trajet à l'envers. Il espérait tomber sur un taxi ou même un bus de transport public. L'espace d'un instant, il se maudit pour ne pas avoir fait connaître sa présence tout à l'heure. Mais les lieux avaient tellement changés, peut-être que ce n'était plus ses amis les maitres des lieux désormais. Il fallait être méfiant. On ne sait jamais.

Il marchait lentement maintenant, traversant les friches industrielles qui séparaient le cœur de la ville de la mer. Le vent qui soufflait sans discontinuer ne le gênait pas vraiment. Seuls le froid et la fatigue le harcelaient. Il aurait donné n'importe quoi pour se reposer, pour dormir du sommeil du juste et se réchauffer, enfin. Mais pour l'heure, il lui fallait continuer. Encore quelques efforts, et il pourrait récupérer chez son double. Il arriva enfin dans un quartier plus fréquenté, et visiblement noctambule. Les réverbères n'étaient plus abimés et des passants déambulaient dans les rues, de bars en bars, passablement éméchés. Nul ne faisait attention à lui, sauf un homme qui s'était figé à son passage. Il l'ignora, même s'il n'aimait pas particulièrement être dévisagé. Il se dirigea vers une station de taxi. Il monta dans le premier de la file et donna son adresse. Il reposa sa tête sur le dossier, savourant le silence et le repos, de courte durée.

- alors, en ville pour affaire ou pour le plaisir ? commença le chauffeur avec un rire entendu.

- un peu des deux, répondit-il d'un air blasé, ce qui fit éclater de rire le chauffeur, sous sa moustache rousse.

- Vous voulez des adresses ? parce que le quartier où vous voulez aller, ce n'est pas vraiment l'animation le soir !

-Ah bon ? dit d'un ton interrogateur l'homme en noir.

-Ben, vous étiez où, ces derniers mois ? on ne parlait que de ça aux infos !

- On va dire, que je n'étais pas au pays de Galles, dernièrement.

- Ben, vous avez loupé pas mal de chose, je vous le dis. Les gamins qui ont été emmené par l'armée dans une de leurs bases. Le mien fait encore des cauchemars la nuit. Tout ça pour une injection, ils sont pas prêts à ce que je leur refasse confiance de sitôt. Même que ça a touché toute l'Europe, qu'il parait.

- Quand même, fit l'homme soudain intéressé.

- Et puis avant ça, il y a eu l'attentat à Cardiff Bay. Toute la place Roald Dahl a explosé, sans dessus dessous, je vous le dis. Depuis ce sont les militaires qui gardent le périmètre, comme ils disent, pas moyen d'approcher. Autant dire que l'ambiance a drôlement changé depuis 7 mois. En plus, ils ne sortent pas de leur base, ils ne font pas marcher le commerce.

- Ils se sont installé sur la place.

- Sur et dans la place, il parait. On dit qu'un institut secret faisait des recherches sur les aliens, là-dessous. Comme si les aliens existaient !

-Vous seriez surpris, dit l'homme en croisant son regard dans le rétroviseur, un regard bleu acier, sévère qu'adoucissaient à peine les boucles soyeuses de sa chevelure.

Le chauffeur haussa les épaules. L'homme qu'il avait pris en charge avait un drôle de charme, un visage d'ange à la voix rauque, aux inflexions douces. Ses vêtements et son cache-poussière de cuir noir avait surement connu des jours meilleurs tout comme lui, apparemment. Son regard perçant que surmontait un front soucieux lui donnait des frissons. Il avait l'air si mystérieux, si pâle, maladif, fatigué au delà de l'expression.

- Tiens, ça se voit encore l'explosion, l'Assemblée Nationale en a tremblé, y'a des fissures partout. Du coup, le quartier est bouclé. On ne peut même pas passer, je vais devoir faire un détour pour vous amener près de Hope street, ça vous va ?

- J'ai le choix ? fit l'homme avec un aboiement de rire.

- Ben, non, en fait. Mais je ne vous le compte pas si vous me dites d'où vous venez.

- De très, très loin. Je ne connaissais pas ces infos.

- Pour ça, vous venez vraiment de très loin. Tout le Pays est au courant, à moins d'avoir été un ermite, je ne comprends pas.

- J'étais loin d'imaginer que c'était aussi important, que cela avait pris de telles proportions.

- Pour ça, ça a drôlement été important, fit le chauffeur avec une moue, y'en a qui disent que ce n'est pas encore fini. Du coup, la peur est toujours en ville. On essaye de faire avec mais dans certains coins, faut mieux ne pas se retrouver seul. Croyez-moi, y'a des choses pas très nettes.

- Je veux bien vous croire, dit l'homme, en repensant à sa rencontre dans les égouts.

- Bon, je ne peux pas aller plus loin, le quartier est interdit aux voitures, mais vous n'êtes vraiment pas très loin.

- Je sais, dit-il lapidaire.

- Vous êtes sûr de vouloir rester là ? Vous savez, y'a mieux comme quartier en ce moment.

- Je dois retrouver un ami, c'est important.

- Bon, c'est vous qui savez, fit le chauffeur en se tournant vers lui, tenez, c'est ma carte. Si vous avez besoin d'un taxi ou que vous savez pas où crécher, vous m'appelez, je viendrais.

- Merci, c'est sympa de votre part, fit le jeune homme en le regardant par en-dessous.

- Bah, entre gallois, il faut s'entraider, hein ?

Il lui tendit la main pour le saluer. L'homme la serra de façon un peu mécanique et sortit du taxi. Il s'orienta rapidement. Le taxi l'avait laissé à l'entrée de l'artère principale Hope Street. Adelaïde Street se trouvait plus loin sur la droite. Il passa sans la remarquer une barrière qui interdisait l'accès aux véhicules. Il s'approchait enfin de son but. L'épuisement lui tomba dessus en une lourde chape de plomb. Ses forces l'abandonnaient. Le voyage en voiture lui avait fait du bien mais il sentait qu'il lui fallait récupérer. Il espéra un café, chaud, brulant, divin, spécialité de son futur hôte. Il se hâta, ragaillardi par cette pensée.

Il dépassa un pub, désert, sans se rendre compte qu'il n'y avait personne dans cette rue. Au fond de la rue, il atteignit l'impasse et l'immeuble où vivait son ami. Il entra et grimpa les escaliers, lentement, ses jambes lourdes de sa marche forcée, jusqu'à l'adresse qu'il avait conservée pendant trois ans. Le nom était toujours libellé sur la porte. « Ianto Jones » Il frappa. Personne ne répondit. Il écouta à la porte, aucun bruit ne filtrait. Il farfouilla dans son sac, ressortit ses outils de crochetage. En quelques secondes, il ouvrit la porte. Il poussa le bouton pour illuminer le couloir de l'entrée mais il n'y avait pas d'électricité.

Il prit sa torche et balaya les lieux. Poussière, poussière sur des draps qui couvraient les meubles. Tout était poussé le long des murs, le piano droit, le canapé, les tapis. Il reconnaissait l'appartement, il était au bon endroit mais il n'y avait personne ici depuis longtemps. L'épuisement et le désarroi l'achevèrent, ses jambes tremblaient, ne le supportaient plus. Il se rattrapa au dossier du canapé. Il fallait vraiment qu'il se repose. Il chercherait des réponses après un somme. Ses pensées se faisaient lentes, difficile, comme ralenties. Il sombra sur les coussins moelleux, s'enveloppant dans le drap blanc qui couvrait le canapé. A peine sa tête toucha l'accoudoir, qu'il s'enfonçait dans un sommeil profond. Quelques minutes plus tard, sa torche tomba sur le sol, sans qu'il ne trésaille. Il se reposait enfin.


A suivre ...