Je dois avouer que je suis un peu (comprenez énormément) nerveuse. Je n'ai jamais posté d'histoire sur ce fandom.
Cette histoire est un UA.
Merci à lrtw d'avoir corrigé ce chapitre.
1
Sad girl
Un écran de fumée le séparait de la réalité.
Il était là, hors du temps, allongé sur un matelas déchiqueté dont les ressorts lui sciaient le dos. Les secondes s'étirèrent, ses battements de cœur se ralentirent, son souffle s'apaisa. Et il le perçut enfin. Cet instant où il basculait dans un monde fantasmagorique, peuplé de démons aux traits angéliques. S'il avait été encore pourvu d'une enveloppe charnelle, alors il aurait tendu les mains dans le fol espoir de saisir cette si précieuse seconde.
Trop tard.
C'était toujours trop tard. Il pouvait clairement l'entendre désormais. Ce silence. Un silence d'une telle perfection qu'il ne pouvait qu'être irréel. Pas une seule respiration, pas un seul bruit étranger. Rien, le vide total.
Ce fabuleux néant aux allures de foyer était parfois traversé de visions hallucinatoires. C'était meilleur que la coke, le LSD, l'ecstasy, les amphétamines, la meth, l'héroïne, le sexe, les seins de Pamela Anderson, le physique d'adonis de Brad Pitt, les sourcils de Spock, la libération de 45, mieux qu'un disque des Sex Pistols, qu'une bague Vivienne Westwood, qu'un milk-shake à la vanille, un muffin au spéculoos, un mojito, le sac à main de Mary Poppins. Mieux que la liberté. Mieux que la vie.
Et tandis qu'il naviguait sur les rives du Styx, un apaisement total l'envahit, lui faisant oublier tout jusqu'à son propre nom.
*O*P*I*U*M*
Hermione appuya si fort sur sa plume qu'elle en déchira le papier. Elle se figea, contemplant la tache d'encre rouge être absorbée par le papier.
Sa vie était actuellement à l'image de cette feuille. Déchirée, couverte de ratures sanguinolentes, parsemée de fibres qui se désagrégeaient. Mais contrairement à cette feuille, aucun recyclage n'était possible pour elle. Elle aurait aimé pouvoir être jetée dans une poubelle, son corps aurait alors été automatiquement déclaré hors d'usage. Voilà deux semaines qu'elle était ainsi, se rapprochant tellement de l'inutilité qu'elle finirait assurément par s'oublier. Elle n'avait jamais considéré un être humain comme dépourvu d'intérêt. Elle avait toujours été intimement convaincue que chaque personne existait pour une raison, qu'elle soit bonne ou mauvaise. On ne pouvait décemment pas ne pas laisser de trace de son passage sur Terre, c'était impossible. Cependant, quand elle se réveillait le matin en ayant l'impression de ne pas s'être reposée une seule seconde, s'avançant d'un pas chancelant vers son miroir comme si le moindre souffle de vent pourrait la briser, elle se posait une multitude de questions et se sentait cruellement inutile.
Le doute s'était emparé d'elle, l'enserrant dans un puissant étau, ne lui laissant aucun espoir de sortie. Si elle était incapable de venir en aide à l'homme qui partageait sa vie depuis maintenant six ans, comment pourrait-elle espérer faire convenablement quelque chose d'autre ?
Les jointures blanchies à force de serrer son stylo plume, elle se laissa aller contre le dossier de sa chaise. Si seulement elle pouvait compter jusqu'à dix. À la fin de ce compte à rebours, tout serait redevenu comme avant.
Comme avant.
Il était trop tard n'est-ce pas ?
Son bonheur lui avait été impitoyablement arraché, avant même qu'elle ne se rende compte de sa valeur.
Elle qui avait eu l'amour pour principe, l'ordre pour base, le progrès pour but, elle n'avait plus rien depuis deux semaines.
À bien y penser, les choses avaient commencé à mal tourner il y a six mois. Elle aurait dû le sentir, aurait dû réagir. Faire quelque chose, n'importe quoi. Elle réalisait maintenant à quel point elle avait été aveugle.
Ron était rentré chez eux plus tôt que prévu. Hermione ignorait d'où il venait, elle qui le croyait au bureau. Aucune question n'avait été posée car en apercevant le visage parsemé de tâches de rousseur de son petit ami, elle avait tout oublié. Ce jour-là, c'était non un homme qu'elle avait contemplé, mais la personnification même du bonheur. Il avait dit avoir trouvé la solution à tous leurs problèmes.
Il avait appris il y a un an qu'il était atteint d'une maladie neuronale incurable, passant la plupart de son temps alité, ravagé par d'horribles douleurs.
En le voyant sourire comme auparavant, quand la vie ne représentait pas un fardeau pour ses épaules, Hermione avait lâché le paquet de copies qu'elle était censée corriger.
Il n'avait pas menti. Tout s'était arrangé, et ce très rapidement. Les intervalles entre les crises de douleurs s'étaient allongés, les souffrances elles-mêmes s'étaient apaisées. Il avait repris son travail à un rythme régulier. Parfois, il cuisinait rien que pour lui faire plaisir, quand elle rentrait tard suite à des cours particuliers avec certains élèves en difficulté. Une odeur de brûlé régnait dans la maison. Elle feignait de ne pas la sentir et de trouver son plat délicieux. C'était peut-être un mensonge, mais le plaisir qui en ressortait n'avait rien de factice.
Puis tout avait basculé il y a deux semaines. Sans signe avant-coureur, il avait été transporté à l'hôpital le plus proche. Hermione avait accouru aussi vite que possible. À ce moment-là, elle s'était surprise à détester son corps si faible, incapable de courir plus vite, d'aller plus rapidement vers cette personne chère à son cœur.
Il avait été retrouvé dans une ruelle, face contre terre. C'était un couple qui passait par là qui avait appelé les secours. Aucun signe d'agression, de passage à tabac ou de quoi que ce soit de ce genre. Tout était affreusement normal.
Il avait été aussitôt déclaré qu'il avait basculé dans un coma végétatif. Hermione s'était mise à détester ce terme. Elle refusait d'être amoureuse d'un simple légume. Cela reviendrait pour elle à dire que le fruit était pourri, bon pour la poubelle.
Elle avait demandé des explications. Il était important pour elle de connaître la raison de ce coma. Elle avait parlé de son état stable depuis six mois. Ils avaient répondu que c'était impossible. Alors elle avait supplié qu'ils poussent davantage leurs recherches. Ils lui avaient fait comprendre que cela ne servait à rien.
Les légumes sont définitivement inintéressants.
Elle refusait cependant de se résigner, résignation qui l'aurait automatiquement conduite à un désespoir confirmé. Il fallait qu'elle avance, peu importe quelle forme prendrait le chemin, peu importe qu'elle ne sache tout simplement pas où aller. On ne va jamais aussi loin que lorsqu'on ne sait pas où l'on va.
Elle reprit son stylo en main et chassa ses sombres pensées. Elle imagina que le nuage de corbeaux qui obscurcissait son esprit disparaissait à l'horizon. Elle se sentit mieux, du moins se força-t-elle à le croire.
- Professeur ?
Une jeune femme arborant de grosses lunettes vertes lui faisait face, une main posée sur son bureau. La plupart des élèves quittaient la classe. Elle n'avait même pas entendu la sonnerie et à en juger par l'air inquiet que prenait le visage de son élève, elle n'avait pas non plus réagi à ses appels.
- Oui ? répondit-elle en lui accordant un doux sourire tout en se redressant sur son siège.
Les prunelles de l'étudiante croisèrent les siennes. On aurait dit deux petites malachites. L'élève portait un débardeur vert. Hermione songea qu'elle ressemblait à une grosse pomme ainsi vêtue.
- Je voulais savoir si je pouvais prendre le portrait de Dorian Gray comme sujet d'étude.
Hermione dissimula rapidement la feuille tâchée d'encre rouge derrière une pile de livres, espérant vainement que son étudiante ne l'ait pas d'ores et déjà aperçue. Un professeur qui déchirait ses copies, ce n'est pas du meilleur effet.
- Bien sûr, tant que c'est une œuvre ayant pour sujet l'hédonisme, répondit-elle.
L'étudiante aux volumineuses lunettes ne put retenir un sourire en la remerciant. Elle s'éloigna, le regard distrait d'Hermione suivant ses mouvements.
Lentement, un souffle d'espoir s'insinua en elle. Cette femme qui avait perdu le goût de la vie, ce n'était pas elle. Elle n'avait pas le droit de baisser les bras, de s'enfermer dans un cocon de mélancolie, oublieuse du monde extérieur.
Elle fourra rapidement ses affaires dans son sac noir et s'en fut de la salle de classe surchauffée.
Les couloirs de l'université de Londres étaient bondés à cette heure-ci. La plus grande majorité des étudiants venait d'assister à leur dernier cours et se précipitaient au dehors pour discuter avec leurs amis. Hermione se fraya un chemin dans la foule, jouant de son statut de professeur pour éviter de se faire bousculer.
Cette année scolaire était sa première en tant qu'enseignante. Obtenir un poste dans une université de la capitale avait été la chance de sa vie. Décidant de ne pas changer les bonnes habitudes, elle s'était plongée avec assiduité dans son travail, fournissant des cours qu'elle espérait excellent à ses élèves. Résonnaient continuellement dans son esprit les paroles du professeur de lettres qu'elle avait eu en première année d'études supérieures. Elle s'était tout d'abord orientée dans un cursus d'avocate, pour changer quelques mois plus tard. Elle s'était trompée de salle de classe, une chose qui ne lui était jusqu'alors jamais arrivée. Il faut dire qu'elle était très distraite ce matin-là après avoir croisé un Ron au visage livide, hanté par des douleurs encore inexpliquées.
Seulement, une fois installée dans cette salle qui n'était pas la sienne, elle avait été incapable de détourner son attention du cours qui se déroulait devant elle. Cet homme, le professeur Dumbledore, avait fait miroiter devant ses yeux toutes les fabuleuses connaissances que contenaient les livres. Elle qui était incapable d'en laisser passer un sans le dévorer, elle avait été saisie d'une nouvelle frénésie. Apprendre ne lui suffisait plus, elle voulait savoir. Encore plus, elle voulait enseigner.
Deux semaines plus tard, elle intégrait la section littéraire pour obtenir six ans après le droit d'enseigner.
Perdue dans ses pensées, elle manqua une marche et se rattrapa à un élève pour ne pas tomber. Un rayon de soleil l'éblouit tandis qu'elle s'excusait. Elle avisa un taxi et le héla.
- Rue des mandragores, annonça-t-elle en s'engouffrant dans l'habitacle.
Le conducteur acquiesça et démarra. Hermione s'approcha de la vitre, son sang pulsant à ses oreilles à un rythme régulier. Elle pouvait sentir la vie s'agiter autour d'elle. Elle était au cœur de l'Angleterre, passant d'artère en veine. Elle n'était qu'un simple globule rouge au milieu de toute cette agitation. Et comme tout un chacun, elle avait un rôle à jouer.
Elle posa son sac sur ses genoux. Elle pouvait le sentir s'alourdir au fur et à mesure que le taxi s'approchait de sa destination finale. C'était certainement la seule chose à faire pour le moment. Elle se fustigeait autant qu'elle se félicitait d'avoir eu cette idée.
- Quel numéro ? s'exclama le taxi driver en la regardant d'un air étrange par le rétroviseur.
Elle rencontra son regard et aperçut son visage. Sa peau avait tant pâli qu'elle virait à l'albâtre. Elle s'était si fort mordu la lèvre qu'une goutte pourpre y perlait. Elle s'empressa d'y passer sa langue, accueillant un goût métallique sur son palet. Écœurée, elle répondit en affichant des traits crispés.
- Trente-trois.
Il hocha la tête et reporta son attention sur la route. Hermione ne put s'empêcher de se demander ce qu'il pensait actuellement d'elle. Il la prenait certainement pour une junkie. Avec son air maladif et ses mains qui tremblaient, n'importe qui l'aurait confondue avec une droguée en manque. Mortifiée par cette idée, elle baissa les yeux et se prépara à payer sa course, avant de sortir en vitesse du véhicule.
Elle était devant une petite maison en brique au jardin parfaitement entretenue. Rien qu'en apercevant la multitude de fleurs qui y poussaient, on pouvait deviner qui y vivait. La jeune femme aux cheveux rebelles s'avança dans l'allée qui serpentait entre des bégonias et appuya sur la sonnette. Elle ne s'attendait pas à ce qu'on lui ouvre. Elle ne s'attendait également pas à ce que la porte soit fermée. Alors elle entra.
L'entrée était dans un tel désordre qu'elle se prit les pieds dans un tapis à moitié recouvert de terre. Maudissant son équilibre qui semblait l'avoir abandonné aujourd'hui, elle alla dans la seule pièce où elle était susceptible de trouver celui qu'elle cherchait.
Il était là, comme prévu, penché derrière une plante aux feuilles touffues et aux fleurs jaune vif. De grandes lunettes recouvraient la moitié de son visage, protégeant également son nez. Il ne s'en séparait jamais depuis qu'une plante carnivore particulièrement récalcitrante l'avait mordu. Sachant parfaitement ce qui allait suivre quand il se rendrait compte de sa présence, elle prit une chaise et la plaça soigneusement derrière lui.
- Neville, dit-elle.
Neville sursauta si violemment qu'il en perdit l'équilibre. Il tomba et atterrit sur la chaise. Hermione se plaça derrière avant que celle-ci ne tombe également.
- Hermione ? s'étonna le jeune homme en retirant ses lunettes.
Un petit sourire éclaira le visage de son amie. C'était bête mais elle ne pouvait s'empêcher de sourire en compagnie du botaniste. Mais contrairement à Ron, elle ne riait jamais ouvertement. À la pensée de son petit ami plongé dans le coma, son expression s'assombrit.
- Que fais-tu là ?
- Tu devrais penser à fermer ta porte à clé. Tu vas finir par te faire cambrioler.
Un air joyeux qui ne convenait absolument pas à la conversation s'empara de son visage rond.
- Personne ne me cambriolera car les plantes n'intéressent personne.
- C'est faux ! contra aussitôt Hermione en s'asseyant précautionneusement sur un plan de travail. J'ai beaucoup aimé celle que tu m'as offerte à mon anniversaire.
L'expression à la fois émerveillée, passionnée et joyeuse ne quittait pas le visage de Neville. Hermione avait du mal à comprendre comment des plantes pouvaient le rendre aussi heureux. Parvati Patil et Lavande Brown, deux anciennes camarades de lycée auraient affirmé que c'était une femme qu'il lui fallait. Dans tous les cas, c'était cette solution qu'elles préconisaient. Une femme, un homme. Rien d'autre, certainement car rien d'autre n'existait dans leur petites têtes d'éternelles adolescentes.
- La Dieffenbachia Compacta ! Tu l'arroses tous les trois jours n'est-ce pas ?
Hermione se demanda si elle devait lui dire que Pattenrond s'était amusé à se faire les griffes dessus. Il n'aurait certainement pas apprécié.
- Tous les trois jours, confirma-t-elle.
- Au fait, qu'est-ce qui t'amène ?
Son sac pesait si lourd qu'elle sentit ses épaules s'affaisser. Ou peut-être était-ce la culpabilité qui la faisait réagir ainsi. Malgré cela, elle sortit l'objet tabou de son sac. C'était un minuscule flacon.
- De la sève ? demanda Neville en prenant la fiole dans ses mains terreuses.
- Euh…non. Du sang.
C'était ça le plus génial avec Neville. Quand les autres voyaient du sang, lui observait de la sève. Un amas de déchets était juste du compost pour lui. Et quant aux humains… lui voyait un fascinant ensemble de molécules.
- C'est original, remarqua-t-il en faisant jouer la fiole entre ses doigts.
Hermione aurait bien aimé lui dire d'arrêter. Doué comme il était, il allait finir par la briser.
- C'est un cadeau ? questionna-t-il.
La brune ne put retenir un grand sourire. Lavande aurait crié au meurtre en voyant ne serait-ce qu'une goutte de sang. Lui prenait cela pour un cadeau.
- Je voulais savoir si tu pouvais l'étudier et me dire si tu trouves des molécules inhabituelles dedans. N'importe quoi en fait. Je ne sais vraiment pas ce que tu dois chercher, désolée. Tu pourrais faire ça pour moi ?
- Bien sûr, ça ne doit pas être si différent de la sève.
Hermione se leva et alla le serrer dans ses bras. Il lui retourna maladroitement son élan d'affection.
- Merci Neville.
- Oh… de rien. Je t'appelle quand j'ai fini.
- Parfait, appelle-moi quand tu veux.
Elle s'apprêta à s'en aller mais se ravisa au dernier moment, lui tendant un épais volume qu'elle venait de sortir de son sac.
- Je t'ai apporté ça, au cas où.
Le livre de médecine se retrouva rapidement entre les mains de Neville. Satisfaite, Hermione quitta la serre et repassa par l'entrée, évitant cette fois de se prendre les pieds dans quoi que ce soit. Elle n'avait plus qu'à attendre désormais.
Sentant un grand poids quitter ses épaules, Hermione décida qu'une petite marche jusqu'à la station de métro la plus proche lui ferait le plus grand bien.
*O*P*I*U*M*
- Oups.
Luna prit le paquet de céréales dans le mauvais sens, répandant un kilo de miel pops sur le sol de la cuisine. Sous les yeux exaspérés quoique habitués d'Hermione, elle s'installa au sol, une cuillère à la main et commença à manger.
- Tu prends pas de lait ? demanda Hermione après un moment de flottement.
Elle avait parfois du mal à oublier que Luna vivait chez elle depuis deux mois. Alors non, une jeune fille dégustant ses céréales à même le sol n'avait rien d'étonnant.
- Oh ! Bonne idée ! s'enthousiasma la blonde.
Elle s'empara de la bouteille de lait et avant même qu'Hermione n'ait pu réagir, versa le liquide sur le carrelage. Hermione laissa tomber sa tartine sous le choc, éclaboussant le sol d'une nouvelle tâche. Luna la regarda avec amusement et lança :
- Fais attention, tu vas tout salir.
Luna s'était retrouvé il y a peu sur la paille. Harry et Ginny lui avaient gentiment proposé de quitter son appartement au loyer trop élevé pour s'installer temporairement avec eux mais la jeune fille avait refusé. Pour une raison qu'elle seule comprenait, elle avait insisté pour habiter chez Hermione, dans l'ancienne maison de Nothing Hill que lui avait légué sa grand-mère il y a quatre ans. À cette demande, elle avait ajouté que la demeure se trouvait sur une concentration d'onde positive datant de la civilisation Maya. Personne n'avait osé lui dire que les Mayas n'avaient jamais posé un seul pied en Angleterre.
À la plus grande surprise de tous, Hermione avait accepté. Sans oser en parler, elle sentait bien que son couple battait de l'aile depuis quelque temps, malgré le bonheur inexplicable qui s'était emparé de Ron. Cela l'inquiétait et sans vraiment comprendre pourquoi, elle avait songé qu'une présence extérieure dans cette maison pourrait les rapprocher.
C'était sans compter le jour où Luna avait voulu faire un feu pour Mabon, une mystérieuse fête qu'elle avait célébrée en compagnie de tout aussi mystérieux individus. Et ce même dans le salon d'Hermione. Avec des gens « intéressants » selon Luna, « drogués » selon Hermione.
Puis il y avait eu cette fois où elle avait ramené une biche dans son salon. Où était-elle allée la chercher ? Personne ne le savait. Pourquoi l'avait-elle ramenée ? Ça tous le savaient mais encore une fois, personne n'avait compris. Luna avait dit qu'il fallait qu'elle aide cette biche car elle possédait un mauvais karma. Hermione ignorait que les biches avaient un karma.
Un autre jour encore, elle avait acheté trente cerfs-volants et les avait accrochés dans le salon, disant que ces cerfs-volants magiques s'animeraient grâce aux ondes positives que dégageait la maison. Là encore, Hermione n'avait pas compris.
En fait, la vie d'Hermione en compagnie de Luna était devenue assez incompréhensible. Chaque acte, chaque parole de la jeune fille étaient empreints d'une folie douce qui exaspérait le côté cartésien de la jeune femme.
Le seul avantage que l'on pouvait accorder à Luna, c'était qu'elle avait un talent certain pour donner vie à une maison. Bien qu'en y réfléchissant bien, ce ne soit peut-être pas un avantage.
- On n'a pas reçu d'appel ? questionna Hermione pour la centième fois depuis deux jours.
Avant-hier, elle était rentrée particulièrement détendue de chez Neville. Mais le lendemain, l'inquiétude et l'appréhension s'étaient à nouveau manifestées, affectant la qualité de ses cours. Aujourd'hui, nous étions samedi et Hermione espérait que le jeune homme aurait achevé son analyse.
- Si, un à trois heures du matin.
Hermione se figea.
- T'aurais dû me le dire plus tôt ! Et puis qu'est-ce que tu faisais debout à trois heures du matin ?
- J'attendais que Jupiter se montre.
- Ah. Ok.
Hermione s'approcha du combiné et appuya sur une touche verte. Aussitôt, la voix hésitante de Neville s'éleva dans la cuisine.
- Hermione, tu devrais passer, je ne suis pas sûr de ce que j'ai trouvé dans ta fiole de sang mais… enfin… viens.
Et le message s'achevait ainsi. Hermione, encore plus inquiète qu'auparavant, se dirigea vers l'entrée pour enfiler sa veste. Le temps ne cessait de se rafraîchir tandis qu'ils glissaient lentement vers l'hiver.
Luna arriva derrière, sa cuillère à la main.
- Tu vas où ? Il y avait quoi dans cette fiole ?
- Du sang.
- Cool !
Luna entra dans un placard d'un air rêveur et ressortir avec une veste rouge à pois blanc. Hermione songea qu'ainsi vêtue elle ressemblait étrangement aux champignons dans les dessins animés qu'elle regardait enfant.
- Tu vas à ta boutique ?
La raison du brusque manque d'argent de la blonde était qu'elle venait d'acheter un local près d'Hyde Park, ouvrant un petit magasin vendant principalement des sachets de thé. Enfin, Hermione pensait que c'était des sachets de thé. Elle n'avait pas eu le temps d'en apprendre plus après avoir vu un bocal d'asticots censés nettoyer les oreilles.
- Non, je viens avec toi, répondit Luna en se plaçant juste derrière elle, attendant qu'elle ouvre la porte. Ça fait longtemps que je n'ai pas vu Neville.
La présence de la jeune fille n'était pas prévue dans ses plans, évidemment. En réalité, Luna n'était jamais prévue dans rien du tout. Elle avait un talent certain pour apparaître dans les endroits où l'on y attendait le moins.
Les deux colocataires sortirent de la maison rose parme et s'élancèrent à un rythme soutenu vers une station de métro. Hermione aurait bien pris un taxi mais elle avait toujours été effrayée de voir le quart de son salaire - pourtant conséquent - y passer. Dans le métro, Hermione dut tirer Luna par le bras pour empêcher la jeune fille de rejoindre une petite troupe qui jouait de la musique. Mais elle ne put cependant pas l'empêcher de sortir son harmonica et de jouer une fois les portes du métro fermées derrière elle. Elle regardait le monde qui l'entourait avec candeur. Hermione, assise en face d'elle, ne pouvait détacher son regard de la blonde.
Le monde s'ornait-il de couleurs psychédéliques pour Luna ?
Comment faisait-elle pour être à la fois sensible et imperméable aux malheurs qui l'entourait ? Cela devait être si agréable de voir le monde à travers ses grands yeux bleus. Tout devait être plus beau, plus coloré. Une simple pousse d'herbe devenait une raison de rire, un nuage constituait une chose merveilleuse. Pour Luna, le monde ne possédait pas sept merveilles. L'univers entier était merveilleux.
- Neville vit toujours dans son jardin ? demanda Luna.
Elle avait rangé son harmonica dans sa veste à pois. Hermione surprit un homme d'âge mûr regarder son amie avec stupéfaction. Elle ne put s'empêcher de sourire.
- Neville ne vit pas dans son jardin Luna, il a une serre, corrigea-t-elle de son ton de « miss-je-sais-tout » comme disait autrefois Ron.
- Une serre… comme c'est drôle. Tu crois qu'il croise des gnomes ?
- Les gnomes n'existent pas.
Luna ne l'écoutait déjà plus. Hermione se leva et fit signe à son amie de faire de même. Elles descendirent et remontèrent à la surface. Un timide soleil les accueillit. Au loin, on pouvait voir d'épais et sombres nuages avancer vers Londres. Un orage s'abattrait certainement sur la ville. Peut-être qu'Hermione aurait le droit d'assister à une cérémonie de Luna censée calmer la colère de la nature.
Elles passèrent entre les bégonias et sans même prendre la peine de sonner, entrèrent dans la petite maison. Une forte odeur de fleur s'échappait de la serre, si forte qu'elle en devenait entêtante. Luna disparut derrière un rideau de feuille, cherchant sans aucun doute des gnomes dans les recoins sombres de la pièce.
Neville était affalé sur une table, un microscope à ses côtés. Un filet de bave avait séché sur sa joue. Hermione soupira et le secoua légèrement pour le réveiller, après avoir éloigné le microscope. Neville s'éveilla en sursaut, sa tête frôlant l'objet. Il posa rapidement ses épaisses lunettes sur son nez comme si cela pouvait le protéger d'un ennemi potentiel. Les verres grossissaient ses yeux, le faisant ressembler à une mouche.
- Oh, c'est toi. Je t'attendais.
- Je vois ça, s'amusa Hermione en recueillant sur son doigt une coccinelle. Qu'as-tu trouvé….
La brune n'acheva pas sa phrase. Elle ne voulait pas prononcer ce mot à voix haute, « inquiétant ». Le penser était déjà pénible, le dire l'aurait rendu encore plus réel.
Un bruit attira leur attention. Luna avait son index dans la bouche, un verre à montre tâché de sang devant elle.
- Alors c'est vraiment du sang, s'étonna-t-elle.
Remarquant l'expression médusée de ses amis, elle se tourna en s'exclamant :
- Vous avez vu un gnome ?
Et elle s'éloigna entre les plantes. Neville se reprit enfin.
- Tu as amené Luna ?!
Hermione hausa les épaules.
- Je n'allais pas la laisser continuer à transformer ma cuisine en bol de céréales géant.
Neville ouvrit la bouche à la manière d'un poisson puis se détourna.
- Alors, qu'as-tu trouvé ? s'impatienta Hermione.
- À qui as-tu pris ce sang ? rétorqua Neville.
Le ton sur lequel était posé cette question interpella la brune. Elle déposa la coccinelle sur une plante, tournant le dos à son ami et en profita pour lui répondre :
- Un ami.
Elle se doutait que Neville n'insisterait pas. Mais elle ignorait ce qui l'avait poussé à lui mentir. Son intuition lui disait cependant de taire la provenance de ce sang.
- Eh bien je l'ai analysé comme tu me l'avais demandé et j'ai trouvé des traces de substances illicites.
Hermione se figea. Son souffle se coupa.
- J'ai d'abord cru que c'était de la morphine.
Cette fois, ces muscles se détendirent. De la morphine. Rien de bien inquiétant étant donné que…
- Mais ce n'était pas ça.
Hermione se retourna vers lui.
- C'était quoi ?
Neville la regarda, interdit. Il désirait certainement des explications, explications qu'il n'obtiendrait jamais.
- De l'opium.
Il lui sembla que le temps s'arrêtait autour d'elle. L'air devint plus lourd. C'était comme si l'atmosphère se vidait de son oxygène. Sinon, pourquoi aurait-elle la tête qui lui tournait autant ? Une horrible impression de perdre pied avec la réalité la saisit. C'était impossible. Impossible.
Hermione n'admettait pas cette vérité, elle refusait que sa vie change, pas dans cette direction. C'était trop… trop. Elle n'arrivait même pas à placer de mot sur ça. Ce genre de chose arrivait dans les livres qu'elle lisait. Elle aimait en discuter avec ses élèves, adorait passer au peigne fin le monde qui l'entourait. Mais pour la première fois de sa vie, le monde qu'elle croyait connaître s'imposait à elle d'une manière qu'elle ne pouvait rejeter. Et ça, ça c'était trop pour elle.
- D'accord. D'accord.
Elle se détourna et traversa la serre en sens inverse. Neville cria son nom mais elle ne se retourna pas une seule fois. Il pouvait garder le sang, elle en savait déjà trop. Elle croisa Luna sur son chemin et s'empara de son bras.
- On rentre, déclara-t-elle.
Luna, qui était à moitié cachée derrière des hortensias ne fit aucun commentaire en apercevant le visage de son amie. Hermione lui en fut intérieurement reconnaissante.
Elles se dirigèrent en silence vers la station de métro deux rues plus loin. Ce fut dans le brouillard qu'Hermione suivit Luna jusque chez elles. Elle n'arrivait toujours pas à y croire. Et pourtant, plus elle avançait dans les rues de Londres, plus cette triste réalité devenait plausible à ses yeux. Sur le pas de sa maison rose, une seule question résonnait en elle « pourquoi pas ? ».
En montant dans sa chambre sans adresser un mot à Luna, elle était habitée d'une certitude toute nouvelle.
Ron se droguait à l'opium.
Elle se jeta sur son lit et posa son ordinateur portable sur ses genoux. Il lui suffisait de taper ne serait-ce quelques lettres pour voir déferler des milliers de propositions sur son écran, livrant en désordre des morceaux de phrases et des bribes de textes qui l'entraînaient dans un excitant jeu de piste. C'était comme si l'ensemble des connaissances que portait le monde lui était offert sur un plateau d'argent. Regarder un Coppola, commander des tonnes de glace, savoir quel temps il fait à Djakarta, compter le nombres de rides sur le visage de Brigitte Bardot. Devenir une autre personne. Tout cela était à sa portée. Dans cet univers virtuel, l'autre était une personne désincarnée sans voix ni odeurs qui ne pouvait s'immiscer dans sa vie privée. Et une fois que l'on devenait accro à ce monde plongé dans un éternel renouveau, le clic sautillant de la souris devenait la mesure du temps.
Ce fut presque naturellement qu'elle tapa le mot devenu tabou.
Opium.
Elle aurait aimé balayer ce mot d'un geste de la main, le faire voler le plus loin possible d'elle et de sa vie déjà assez catastrophique depuis deux semaines.
Wikipédia fut le premier site qui s'afficha. Ce qu'elle y lut confirma ses craintes.
« L'opium est une préparation psychotrope obtenue à partir du latex du pavot somnifère. Ses effets provoquent notamment une somnolence chez le consommateur. »
Son ouïe n'avait pas été victime d'une déformation, ses connaissances sur cette drogue étaient véridiques. Mais ce qui l'inquiétait davantage, c'était où Ron avait pu se procurer de l'opium. Cette drogue était courante à l'époque victorienne, il suffisait de descendre dans les bas quartiers de Londres pour y trouver multitude de bars à opiums. Mais aujourd'hui, cette drogue dont les effets se rapprochaient de la morphine n'était consommée qu'en Iran, Birmanie ou encore Thaïlande.
Hermione ne comprenait vraiment pas. Qu'est-ce qui avait pu amener Ron à recourir à cette drogue pour soulager ses douleurs ? Ce n'était pas l'homme qu'elle connaissait, celui dont elle était tombée amoureuse adolescente.
En refermant son ordinateur, elle sut qu'elle n'allait pas en rester là.
Elle se dirigea vers sa bibliothèque. Sa main survola les volumes mais elle se stoppa en se rappelant que Ron n'avait pu découvrir l'opium en tant que drogue idéalisée par de nombreux écrivains. Il aurait déjà fallu qu'il se décide à ouvrir un livre.
Hermione sortit de sa chambre et toqua à celle de Luna.
- Luna, j'ai envie de sortir, t'as quelque chose de prévu ce soir ? s'exclama-t-elle en s'asseyant dans un fauteuil fuchsia.
La blonde la regarda de son habituel air rêveur et répondit :
- Oui, je t'ai préparé une tenue.
Hermione fronça les sourcils.
- Comment tu savais que j'allais t'accompagner ?
- Il m'a prévenu.
Hermione eut envie de lui demande si le fameux " il " ressemblait à de la farine sans pour autant en être.
- Je peux pas y aller comme ça ? essaya-t-elle.
- Non.
Cette réponse claire et concise vexa Hermione, qui se renferma davantage en voyant la tenue que lui proposait son amie. C'était un ensemble en cuir noir, si sombre qu'elle n'aurait aucun mal à se fondre dans la nuit. Elle avait toujours cru impossible de porter autant de cuir.
- J'ai pensé que tu pourrais te déguiser en Trinity, expliqua Luna.
- Comme dans Matrix ? T'es sérieuse ?
- Ça t'ira très bien tu verras.
- Et toi, tu te déguises en quoi ?
- Alice au pays des merveilles.
Hermione sourit et dit qu'elle aurait dû s'en douter. Elles enfilèrent leurs tenues. Hermione se regarda ensuite dans une glace avec dégoût, ne se reconnaissant pas en cette femme tout habillée de cuir. En voyant Luna brandir un épais crayon noir, elle s'éloigna vivement, disant que Trinity ne se maquillait pas. La blonde, heureusement, la laissa en paix.
Hermione était ravie que son amie ne lui ait pas posé plus de questions. Elle ne l'avait jamais accompagné à l'une de ses étranges soirées. Ginny en avait déjà fait l'expérience, une seule et unique fois. Elle avait refusé d'en parler mais son visage disait clairement qu'elle ne retenterait pas l'expérience. Hermione ignorait à quoi elle allait assister ce soir, où elle allait se rendre, mais cela promettait d'être intéressant. Car s'il y avait un milieu où l'on pouvait trouver des dealers, c'était le milieu que fréquentait Luna Lovegood.
Oh bien sûr, Luna ne se droguait pas. Enfin… pas qu'elle sache.
Hermione suivit son amie hors de sa maison. Elle était décidée à connaître tous les lieux où l'on pouvait consommer de l'opium. Et pour les connaître, il fallait parler aux personnes concernées. Ce n'étant pas en restant enfermer dans ses livres qu'elle allait trouver des bars à opium.
Vingt minutes plus tard, Luna et elle passèrent devant une boîte au nom des plus étranges.
- Eh regarde cette boîte, l'anus d'Hadès. J'ai jamais vu un nom aussi ridicule.
- C'est là qu'on va ! Génial non ?
Hermione l'observa s'élancer vers un groupe de gens. Le sourire figé, elle marmonna :
- Ouais… génial.
Elle fit la connaissance de Meredith, une fille toute de noire vêtue qui déclara de but en blanc qu'elle aimait le sado-masochisme. Vint ensuite Big Chili, un petit écossais arborant un kilt traditionnel. Hermione lui demanda pourquoi il avait incorporé le mot « chili » dans son nom d'emprunt. Avait-il vécu de folles expériences au Chili ? Non, il aimait juste en manger. On lui présenta également Mona, un drag queen aux cheveux bleus, Vincent, un autre drag queen déguisé en schtroumpfette.
- J'adore ton déguisement, lui glissa-t-il en touchant le cuir de son haut.
Hermione ne fut pas gênée de ce geste, répondant au sourire avenant de Vincent.
- Pourquoi on se déguise en fait ?
- Pour la Samain, répondit-il.
- La quoi ?
- Halloween.
- Mais c'est dans une semaine !
- Pourquoi ne profiter des bonnes choses qu'un seul jour ? Le calendrier est d'une telle cruauté.
- C'est justement la rareté d'Halloween qui est excitante.
Il posa son doigt sur le nez légèrement parsemé de taches de rousseur d'Hermione et déclara malicieusement :
- Toi, je t'aime bien !
Ils pénétrèrent dans la boîte. Aussitôt, des sons étranges envahirent les oreilles du groupe de jeunes gens, envoutant mélange de Lykke Li, Crystal Castles et Crim3s. Hermione suivit Vincent dans la foule. Les lumières changeaient constamment de couleur, plongeant la salle dans une véritable effervescence. Une odeur de parfum et d'alcool lui parvint. Tout était sombre, les visages des gens qui l'entouraient apparaissaient en flash, parfois si près d'elle qu'elle prenait peur, parfois si loin qu'elle s'étonnait de cette distance.
Cette terreur qui l'envahissait, accompagnée d'une intense euphorie était si prenante que ce fut naturellement qu'elle se mit à danser, évoluant dans ce monde inconnu comme si elle était née et mourrait ici.
Ici tout se mélangeait, le passé des gens, leurs préoccupations ou leurs actes, plus rien n'avait d'importance. Cette partie méconnue de la société lui fit penser à un cocktail explosif. Pour la première fois, elle comprit pourquoi Luna riait. Elle riait pour tout et rien à la fois, ses rires étaient un va te faire foutre déguisé, un hurlement de liberté adressé au conformisme. Luna riait pour rien et pour tout, comme tous les gens présents dans cette salle. Alors Hermione éclata de rire, accompagnée de Vincent. Et au fond, ce rire sans raison était bien plus jouissif que tout autre rire.
Hermione leva les mains, comme pour attraper l'obscurité qui l'entourait. Tout d'un coup, elle avait envie de tout saisir. Ne profiter de rien aurait été un sacrilège. Tout lui semblait à portée de main. De sa main gauche, elle caressait doucement la liberté, et de la droite, elle effleurait l'ivresse.
Elle fut cependant ramenée sur terre par un coup de coude qu'elle reçut dans les côtes. Une silhouette bleu cyan passa derrière elle. Intriguée et poussée par la curiosité, elle suivit la silhouette dans la boîte surchauffée. Elle ne remarqua pas que Vincent la suivait.
Un éclair de lumière blanche révéla un homme aux mèches cuivré. Il s'approcha d'un groupe de gens adeptes des piercings, s'adressant à une fille portant un haut en résille. Ce qui se passa ensuite attisa aussitôt l'intérêt d'Hermione.
Ils échangèrent une poignée de main.
Et l'homme aux mèches cuivré s'éloigna.
On n'échange généralement pas de poignet de main avec une fille. Déterminée à ne rien lâcher, elle suivit l'homme. Elle accéléra, sautant au-dessus d'un canapé en velours rouge. Elle évita plusieurs groupes de fêtards et finit par poser sa main sur le tissu bleu de sa veste. Il se retourna en l'espace d'une fraction de seconde. Ses yeux bridés la jaugèrent de haut en bas.
- Tu veux quoi ?
- Tu sais ce que je veux, rétorqua Hermione en tentant d'imiter le ton qu'aurait pris Trinity dans cette situation.
Après tout, elle portait son costume, pourquoi ne pas en profiter ?
Un mince sourire étira les traits de l'Asiatique. Il se pencha vers son oreille. Hermione se força à ne pas reculer.
- Combien de grammes ?
- Dix.
- Ça fera cent livres.
Ce fut uniquement à cet instant qu'Hermione se souvint qu'elle n'avait pas d'argent sur elle. Une main surgit brutalement derrière elle, tenant une liasse billet. Ils échangèrent une poignée de main et Hermione se félicita intérieurement pour son esprit de déduction. Puis elle se tourna et rencontra le regard bleu électrique de Vincent. Il enroula un doigt dans sa perruque blonde et déclara :
- Chérie, je te croyais pas accro à la cocaïne.
Il lui tendit un petit sachet rempli de poudre blanche. Hermione le glissa aussitôt dans la seule et unique poche que contenait sa tenue de cuir : son soutien-gorge. Un sourire narquois de la part de Vincent répondit à ce geste.
- Peut-être parce que je ne le suis pas.
- Alors comment expliques-tu ce brusque intérêt pour la co-ca-ïne ?
Il avait dit cela au rythme de la musique, faisant balloter sa tête de gauche à droite.
- C'est purement scientifique, prétendit-elle.
- Oh ! Trinity ! J'adore cette attitude !
Il lâcha sa mèche de cheveux et lui fit signe de le suivre. Ils se faufilèrent dans la foule. Hermione aperçut Luna qui dansait comme si elle était en pleine apesanteur. Rien ne pourrait jamais changer son amie. Maintenant qu'elle avait entraperçu de quoi était composé son univers, il lui était difficile de trouver une raison de changer. Sans pour autant vouloir mener une vie définie par les murs de ce club, Hermione ne pouvait s'empêcher d'éprouver une certaine fascination pour le vent de liberté qui le traversait.
Vincent la mena dans un étroit escalier aux marches raides. Ils arrivèrent ensuite dans une petite pièce plongée dans la pénombre. Les mains de Vincent se posèrent instinctivement sur une porte qu'il poussa. Celle-ci s'ouvrit largement, dévoilant une nuit sans étoile. Même la lune s'était cachée derrière un voile de nuages. Ils avancèrent sur le toit avec le fabuleux sentiment de surplomber le Londres tout entier. Les lumières de la ville brillant dans les prunelles noisette de la jeune fille, elle se pencha en avant et observa la rue. Il était difficile de croire que dans une rue aussi calme pouvait régner un tel désordre dans les sous-sols. Vincent surprit son air fasciné et souffla :
- Tu vois ces deux boites en face ?
Hermione observa les deux clubs séparés par une petite boutique fermée à cette heure tardive. Le plus à gauche s'appelait « l'utérus d'Athéna » et celui à droite « la flèche d'Artémis ».
- C'est une habitude de donner des noms sans queue ni tête ?
Vincent rigola.
- Un peu oui. Enfin, selon le propriétaire, cela à un sens. Il paraît que l'anus d'Hadès fait référence au trou du cul des enfers, un endroit qui doit être fort fascinant. L'utérus d'Athéna… eh bien étant donné qu'elle est vierge, c'est un lieu inexploré. En y entrant, on se croit en pleine forêt amazonienne. Quant à la flèche d'Artèmis, on ne peut pas le voir dans cette obscurité mais la façade penche toujours un peu plus en avant chaque année. Le propriétaire a dû croire qu'elle finirait par rejoindre l'anus d'Hadès, qui sera bien baisé quand ça arrivera.
Hermione le fixait avec stupéfaction.
- T'es en train de prétendre que ce triangle a un sens ?
- Oui. Quand on sait que même des œuvres abstraites ont un sens.
- Eh bien ces œuvres abstraites ont un sens uniquement pour leur propriétaire. Qui est un vrai poète d'ailleurs, acheva-t-elle ironiquement.
Elle s'assit sur le toit, bientôt rejointe de Vincent.
- Elles appartiennent toutes au même homme ?
- Évidemment, ce serait trop de concurrence si ce n'était pas le cas. Elles sont même reliées par des souterrains, on peut visiter les parties inexplorées d'Athéna si tu veux.
Hermione sourit à l'allusion.
- Ça ira pour cette nuit.
- Tu vois cette tour ?
Il pointa un point à l'horizon.
- Big Ben ?
- Mon père m'y a emmené quand j'étais jeune. Arrivé en haut, il a contemplé les chaussures que ma mère venait de m'acheter. Elles étaient hors de prix mais j'avais fait tant de caprices qu'on avait fini par me les offrir. Puis il a sauté de la Tour.
Hermione se tourna vers lui.
- Ces chaussures coûtaient si cher que ma mère avait dû prendre de l'argent à mon père. Il n'avait pas pu s'acheter sa dose de cocaïne, il était en manque depuis deux semaines. Alors il s'est suicidé.
- Ton père a sauté du haut de Big Ben ? répéta Hermione.
Vincent lui retourna son regard. Un sourire mutin apparut sur son visage.
- Non. Je suis jamais monté dans Big Ben et mon père s'est contenté d'avaler tant de Xanax qu'il s'est jamais réveillé. C'est moins glorieux pas vrai ?
- Pourquoi tu me racontes ça ? questionna Hermione, particulièrement troublée.
- Je sais pas ce que tu compte faire de cette cocaïne. Mais fais juste attention. Elle est aussi dangereuse que les personnes qui la dealent.
Il se leva et passa derrière elle. Quand elle se retourna, il avait disparu. Hermione aurait bien aimé lui poser davantage de questions. Elle savait bien qu'il n'était pas juste le genre de mec à raconter ses malheurs pour attendrir son interlocuteur. C'était plus que ça. Il voulait vraiment la mettre en garde. Hermione savait pertinemment qu'elle devait l'écouter, devait faire ce qu'il conseillait. Mais elle en était incapable. Chaque fois que la possibilité de faire demi-tour se frayait un chemin dans ses pensées, l'image de Ron allongé dans son lit d'hôpital telle une statue s'imposait à elle. Et cela la poussait à continuer.
Elle retourna en bas et prévint Luna qu'elle partait. La jeune fille lui adressa un regard vague et sourit. Hermione en déduisit qu'elle avait compris mais préférer rester encore un peu. En reprenant sa veste, elle piqua un peu d'argent dans le porte-monnaie de Luna, se promettant de lui rendre plus tard. Elle traversa la rue plongée dans un silence presque surréaliste. Il y avait là une femme qui s'éloignait dans une ruelle perpendiculaire, une seringue à la main. Ici un homme appuyé contre un mur, les yeux aux pupilles tellement dilatées qu'elles paraissaient éclatées. Et il y avait ce jeune homme qui titubait, comme le jour de ses premiers pas. Cette nuit, c'était ses premiers pas de drogué.
En s'engouffrant dans un taxi, préférant éviter le métro à cette heure tardive, Hermione sut qu'elle reviendrait dans cette rue, dans ce triangle incompréhensible.
Elle tendit un billet au taxi driver et lui laissa la monnaie. Alors qu'elle allait glisser sa clé dans sa serrure, des cris attirèrent son attention.
Un homme habillé d'une veste bleu cyan cognait une porte en hurlant dans la nuit. Elle reconnut aussitôt le dealer qui lui avait vendu la coke. Son intuition lui conseilla de s'approcher de lui. Elle remit les clés derrière une brique amovible et s'approcha du dealer. Comme tout à l'heure, elle posa une main sur son épaule. Cette fois, il se retourna moins rapidement, preuve qu'il était défoncé. Il tenta tout d'abord de lui donner un coup de poing que par miracle la jeune fille évita de peu.
- Oh, c'est toi.
Son air de déception contraria particulièrement Hermione, encore plus quand il recommença à taper comme un forcené sur la porte noire. Cette fois-ci, elle secoua vivement son épaule. Il lui fit à nouveau face, plus hargneux qu'il y a quelques secondes. Hermione ne sut pas ce qui la fit réagir ainsi, peut-être était-ce la peur ou son costume de Trinity qui lui donnait des ailes. Peut-être les deux.
- Dégage d'ici.
Il s'humecta les lèvres.
- Et qu'est-ce qu'une fille comme toi a à me proposer pour me faire quitter cet endroit ?
Elle plaça ses mains dans son dos pour ne pas qu'il ne voit ses tremblements.
- La fille comme moi bosse dans la police.
Elle pria pour que ses mains cessent de trembler et tapota son soutien-gorge.
- Et cette fille a la preuve que tu deale. Alors dégage.
- Montre-moi donc ton badge.
- Crois-moi tu veux pas le voir, car si tu le vois, je serai obligée de te ramener au poste.
C'était sans aucun doute la coke qui déformait la perception de la réalité du dealer car en temps normal, Hermione était quasiment certaine qu'il n'aurait pas pris un air si paniqué.
- C'est lui que tu veux pas vrai ? Vas-y mais fous moi la paix ! Je fais que vendre moi, je dirige rien de rien !
À sa manière de balancer aussi rapidement celui qui manifestement était placé au-dessus de lui, Hermione comprit que cette mystérieuse personne habitait juste derrière cette porte noire.
- Va-t-en, ce n'est pas toi que je cherche cette nuit. Mais deale encore une seule fois et je te retrouverai comme je l'ai retrouvé.
Les yeux bridés du dealer s'agrandirent de peur. En un instant, il s'était retourné et courait comme si les chiens des enfers étaient à ses trousses. Tandis qu'il disparaissait au coin de la rue, Hermione laissa retomber ses mains le long de son corps, stupéfaite par ce qu'elle venait de faire. Si elle n'avait pas été épuisée, elle se serait mise à sautiller comme une enfant dans la rue, euphorique. Elle n'avait jamais été une très bonne menteuse. Et pourtant… Un immense sourire aux lèvres, elle ne put éviter les mains qui la happèrent dans la nuit.
Son cri fut aussitôt étouffé par l'une de ces mains qui venait de se déplacer sur ses lèvres. Elle était dans pièce entièrement plongée dans les ténèbres. Un souffle caressait la base de son cou, un bras lui enserrait le corps. Le cœur d'Hermione battait si fort que cela ne l'aurait pas étonné qu'il s'échappe de sa poitrine. Une peur sans nom se saisit d'elle. Une idée absurde lui vint à l'esprit. La mort venait la chercher plus tôt que prévu. Mais aucun film de sa vie ne défilait devant ses yeux. Elle aurait bien aimé avoir eu le temps de porter plainte à Hollywood. N'était-ce pas eux qui leur faisaient miroiter une fin touchante dans laquelle on assisterait avec émotion aux moments fort de sa vie ?
Que dalle.
Aucun film, aucune image, rien du tout si ce n'est une peur si intense qu'elle devenait douleur lancinante. Dans un bref moment de lucidité, elle se promit d'aller à Los Angeles et d'engueuler l'imbécile qui avait osé prétendre qu'on pouvait revivre sa vie avant de la quitter définitivement. C'était qu'un tissu de conneries.
Exactement comme l'idiot qui avait un jour prétendu qu'un paradis existait pour chacun d'entre nous. Peu importe qu'il s'appelle Dieu ou Jésus, promettre une telle chose basée sur des preuves totalement vaseuses devrait être interdit. Peut-être qu'ils avaient dit ça tout simplement parce que la vérité était trop dure à accepter. La vérité, c'était qu'alors qu'Hermione craignait plus que tout au monde que sa vie ne s'achève, aucune porte du paradis ne paraissait s'ouvrir devant elle. Elle retournerait simplement au néant.
Le plus triste, c'est que dans son égoïsme, elle ne pensa même pas aux gens qu'elle aimait. Elle constatait juste que de la même manière que l'on naissait seul, on mourrait seul.
- Satisfaite de ton petit manège ? glissa une voix dans son oreille.
Hermione était si terrifiée qu'elle fut incapable d'émettre autre chose qu'un petit couinement. Elle fut relâchée, balancée contre un mur, se cognant la tête au passage.
- Les vrais policiers n'ont pas les mains qui tremblent.
Une silhouette indistincte s'approcha d'elle et posa un bras contre le mur, la coinçant dans un coin.
- Si t'es une junkie, retourne sagement chez toi. Mais si t'es quelque chose d'autre, alors qu'est-ce que tu veux ?
Hermione reprit quelque peu confiance en elle. C'était parfait. Elle n'était pas encore morte. Enfin, ce n'était pas réellement ce qu'on attendait de la définition de la perfection mais elle allait se contenter de cela pour le moment.
- Tu veux plutôt dire « pourquoi tu m'as aidé » ?
Elle était persuadée que s'ils avaient été en pleine lumière, elle aurait pu le voir sourire.
- J'en sais rien, t'as l'air d'être un mec plutôt sympa.
Elle tapota son front endolori pour illustrer ses dires. Une matière gluante se propagea sur ses doigts. En plus de ne pas avoir pu voir l'hypothétique film de sa vie étant donné que sa fin n'était pas encore trop proche, un flot de sang allait tâcher les vêtements de Luna.
- Et toi d'une fille particulièrement suicidaire. Allez viens.
Hermione se figea. Une lumière venait de s'allumer. Elle était dans une entrée carrelée de blanc. Des boiseries noires recouvraient les murs, plongeant la pièce dans une atmosphère étrange. Un homme à la peau d'ébène et aux yeux d'obsidiennes lui faisait face, lui montrant une pièce sur la droite faiblement éclairée par le lustre de l'entrée. Son expression était neutre. Mais était-ce un sourire qu'elle apercevait aux coins de ses lèvres ?
- Les gens suicidaires ont toujours été les plus intéressants, ajouta-t-il.
Voyant qu'elle ne se décidait pas à le suivre, il passa dans le salon et alluma encore une fois les lumières. Hermione en fut éblouie après être restée plusieurs minutes dans le noir le plus complet.
Elle vit les jambes de son agresseur et comprit qu'il venait de se jeter dans un fauteuil. Hésitante, elle le rejoignit. Une délicieuse odeur d'encens régnait dans la pièce. Elle s'installa sur un autre fauteuil noir, hypnotisée par un tableau uniquement constitué de dégradés de vert. Elle ignorait ce qu'il représentait. Ou plutôt, elle ne pouvait placer de mot sur cela. Car la vague d'émotions qui la traversa en contemplant cette peinture était si forte qu'elle en avait perdu tout son vocabulaire. Une certaine mélancolie se dégageait du tableau, presque imperceptible, camouflée par des traits brusques. Il n'y avait aucun équilibre, l'œil était incapable de s'accrocher à un point précis. La peinture était une énigme qu'Hermione brûlait d'élucider.
- Qui a peint ceci ? demanda-t-elle en oubliant momentanément qu'elle s'adressait à celui qui venait juste de lui causer la peur de sa vie.
- Un ami, répondit-il évasivement.
Il prit un verre contenant un liquide ocre sur la table basse et observa avec attention celle qui lui faisait face. Il resta plusieurs instants bloqué sur sa chevelure, comme étonné que des cheveux puissent être autant emmêlés. Il se pencha en avant et dit sur le ton des confidences.
- Il est peint avec des feuilles de coca.
Cette information attira l'attention de la jeune fille.
- C'est vraiment toute ta vie la cocaïne ?
Ce n'était pas vraiment une question, plutôt une affirmation.
- Eh bien c'est mon argent, et certains se plaisent à dire que la vie c'est de l'argent. Alors oui.
- Pourquoi ?
- Pourquoi quoi ?
- Pourquoi tu fais tout ça ?
- Ah je vois, ce fameux pourquoi. Tu peux demander pourquoi à chaque chose « réelle » en ce bas monde. Tu n'obtiendras jamais de réponse. Tiens, tu vois ce fauteuil sur lequel t'as posé ton magnifique petit cul, il est tout droit sorti de l'imaginaire de quelqu'un. Pourquoi ? On sait pas, faut dire qu'on s'en fout pas mal aussi, et puis ça t'as pas empêché de t'asseoir dessus. Mais ce que je veux dire par là c'est que ce fauteuil est pas réel, il est né de l'imaginaire et il reste imaginaire malgré la tentative de l'homme de le rendre réel. Et la coke, elle abat les frontières de l'irréel et te défile le tapis rouge devant les portes de l'imaginaire. Rien de plus réel que ça.
- Donc selon toi on vit dans l'irréel ? résuma Hermione.
- T'as tout compris, répondit-il d'un ton séducteur en prenant une gorgée de sa boisson.
- Pourtant, il n'y avait rien de plus réel que le coup que je me suis pris il y a quelques minutes.
Il éclata de rire et se leva. Quand il revint, il lui tendait une serviette d'un blanc immaculée. Hermione n'eut aucun scrupule à la tacher de son sang.
- Tu veux bien me dire pourquoi tu te fais passer pour un membre de l'autorité ?
- Je voulais… en fait je voulais te poser une question.
- À moi ? C'est fantastique, des gens qui ne me connaissent même pas requièrent mon aide. Je n'aurai jamais cru être si populaire…
- Où je peux trouver de l'opium ? le coupa-t-elle.
- T'es sérieuse ? rétorqua-t-il après une temps de stupéfaction.
- On ne peut plus sérieuse.
- Je ne te le dirai pas, décida-t-il.
Hermione eut envie de pousser un cri de stupéfaction. Tout d'abord il lui causait une telle frayeur qu'elle se croyait au seuil de la mort, il la blessait à la tête pour finir par lui refuser des informations qu'elle méritait amplement après avoir éloigné un homme qui ne lui voulait visiblement pas beaucoup de bien.
- Crois-moi, ce ne sont pas des endroits pout toi, tu ne souhaites pas vraiment y aller, poursuivit-il.
- Tu as raison, je ne veux pas y aller. Je dois y aller.
- Se droguer c'est une obligation pour toi ? C'est génial.
Il s'approcha d'elle et la força à se lever. Il posa ses mains sur ses épaules et déclara :
- Écoute-moi, t'es une petite fille triste, ne devient pas une petite opiomane triste. Rentre chez toi, soigne cette blessure et dors un coup, ça te fera pas de mal.
Il la poussa dans le dos, l'encourageant à quitter sa maison. Hermione lui adressa un regard assassin, sans réelle conviction cependant car la conversation qu'elle avait eue avec cet homme l'avait quelque peu perturbé. Tandis qu'elle quittait cette maison sans vraiment se rendre compte de ce qu'elle faisait, elle réalisa que ce qui la perturbait davantage, c'était qu'elle avait aimé cette conversation.
Alors la petite fille triste rentra sagement chez elle.
Rien n'assurait qu'elle soit sage demain.
Je suis prête à recevoir vos critiques, bonnes ou mauvaises !
