Précisions sur cette fiction présentes sur mon profil d'auteur. Bonne lecture, autrement !
...Bref, c'est ça, Canard City. La ville française de tous les possibles, où toutes les personnes ambitieuses espèrent atteindre un grand destin. Malheureusement, seules les plus mauvaises d'entre elles y parviennent. Et c'est mon rôle de fouiller dans leurs sales petites affaires, de les dévoiler au grand jour et de les arrêter. Et toi, mon gars, tu fais partie des malheureux qui ont croisé ma route. T'as compris la leçon, j'espère ?
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« Ben, en fait, j'ai pas tout suivi. C'est pas facile d'écouter quand on se fait tabasser en même temps… »
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Tu mets ma patience à l'épreuve, espèce d'inconscient. J'ai tué des gens pour moins que ça.
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« T'es sérieux ? Faudrait peut-être penser à consulter un psychologue, ou faire du yoga. »
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C'est ce que cet emplumé de canard jaune me dit tout le temps, mais les gars de ton espèce m'empêchent de me défouler autrement. En plus, le dernier psy que j'ai consulté a fini à l'hôpital.
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« Ouais, en fait, t'as vraiment un problème, mec. »
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C'est pas ce que tu crois : le bureau qui lui avait été loué était un vrai taudis. Il s'est pris un morceau du plafond pendant une de nos consultations. Le voisin du dessus jouait à un de ces stupides jeux de danses et son poids a eu raison de son plancher ; par contre, ce mécréant a échappé à la chute. Pour la peine, je suis revenu chez lui la nuit suivante pour lui casser la gueule.
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« Eh, ce serait pas un comportement grossophob-… »
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La justice a payé, c'est tout ce qui compte ! Et grâce à moi, il a réussi à perdre quarante-trois kilos en une nuit. Si ça, ce n'est pas un régime efficace, alors je ne sais pas comment on pourrait l'appeler.
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« Attends, ce serait pas le mec à qui on a coupé les deux jambes il y a deux mois ? »
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Ce n'est qu'un détail ; seule la morale de l'histoire compte vraiment.
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« Humpf, tu parles d'une morale de justicier… Quelle morale ! »
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Et qu'est-ce que tu y connais à la morale en général, hein ?! Nous étions censé vivre dans une société où tout le monde se respecterait normalement ; où les puissants devaient contribuer à la vie des plus faibles ; où la police devait être libre de ses mouvements pour pouvoir arrêter les vilenies et les félons de ton espèce ; où les gens biens devaient vivre en paix et en sécurité. Mais ça n'est jamais arrivé et nous en sommes arrivés au point où mon intervention était nécessaire, pour répondre aux besoins des personnes désespérées.
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« Euh, j'ai pas le souvenir que quelqu'un ait souhaité qu'un mec déguisé en rapace vienne tuer des gens en masse. »
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Ouais, bah, j'ai pas encore trouvé une personne qui voulait vraiment de moi dans la ville. Mais tant que la police me laisse tranquille, je continuerai de faire ce que Canard Man n'arrive pas à faire… La seule action vraiment utile à cette société pourrie jusqu'à la moelle.
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« Savoir tendre l'autre joue et promouvoir un bon comportement citoyen ? »
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Mais non, envoyer tous les criminels de cette ville au cimetière ! Je reconnais qu'il fait ce que tu dis de temps à autre, mais des fois, j'ai l'impression que c'est lui qu'il faudrait emprisonner.
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« Et pas vous… ? »
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Non, ce serait prématuré.
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« Ah bon. Si vous le dites. »
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…Je sens une pointe d'ironie, là.
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« Bah, moi, tout ce que je sens, pour le moment, ce sont mes côtes cassées. Au-dessus du cou, je ne sens plus rien du tout. »
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J'ai pas tapé si fort que ça ; tu cherches à me vexer, c'est ça ?! Et puis, ce ne serait pas arriver si tu n'avais pas volé le sac de cette innocente vielle dame. Elle ne serait pas morte sur la route si tu n'avais pas commis ce crime de bas étage.
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« Eh, j'ai juste arraché son sac de ses mains ! C'est vous qui l'avez percuté de plein fouet quand vous avez engagé la poursuite ! »
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Autant de perfidie mériterait une correction supplémentaire, mais il faut bien que la justice de cette ville puisse faire son travail. Profites bien de tes derniers instants de liberté !
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« En fait, vous m'écoutez plus du tout, là… »
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Bref, j'espère que tout ce que je viens de te raconter va te servir de leçon. Voler les personnes qui veulent vivre tranquillement, c'est mal ! Et s'il faut que je vienne jusque dans ta cellule pour t'apprendre les bonnes manières, je n'hésiterai pas un seul instant. Et alors là, tu regretteras que ce ne soit pas Canard Man qui t'ait arrêté !
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« C'est bon, te fâche pas ! J'ai compris, je recommencerai pas, même si on m'y force. De toute façon, je pourrai rien faire de plus, maintenant, vu que vous m'avez brisé les jambes… »
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T'en fais pas pour ça, je te paierai les frais médicaux.
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« C'est vrai ?! »
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Non.
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« Je me disais, aussi… C'est bien à ça qu'on te reconnaît, l'Aigle de la Nuit ! »
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Pardon ?!
Une heure et demi plus tard, sur la chaîne d'information « Le Canard Informé » :
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Ici Daisy Tales, en direct d'une ruelle du huitième district de la ville où un affrontement des plus sanglants semble s'être déroulé. D'après la police, ce serait l'Aigle de la Nuit – le célèbre mais néanmoins contesté héros de Canard City – qui l'aurait trouvé en patrouillant dans le quartier et contacté les forces de l'ordre pour les prévenir. La victime trouvée sur place est toujours vivante, mais dans un état critique. Elle a été emmenée d'urgence à l'hôpital pour y être opéré et soigné. L'enquête n'en est encore qu'à ses balbutiements, mais tout porte à croire qu'un nouveau criminel courre les rues de Canard City. Ce dernier a laissé un message planté dans la poitrine de la victime avec un couteau de combat, dont le contenu ne comportait qu'un seul mot : « Pygargue ». Si personne ne sait ce que ce message signifie, il n'en reste pas moins que la police conseille à tous les citoyens de rester prudent dans les jours à venir, et de les appeler immédiatement s'ils possèdent des informations concernant ce mystérieux agresseur. C'était Daisy Tales, pour « Le Canard Informé » ; à vous les studios !
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…Ils ne comprendront donc jamais ? Bordel, pourquoi je me casse le cul à les protéger ?!
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« J'en sais rien, mais si vous pouviez taper moins fort, ce serait sympa de votre part, monsieur l'Aigle… »
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Humpf… Cette nuit va vraiment être très longue.
