« Non pas sur la bouche
Même si c'est louche
Puisque ma langue
A le goût de ta vertu
De ton honneur perdu

Non pas sur les lèvres
Même si j'en rêve
Même si je tremble »

Elle m'ensorcelle. Impossible de de l'oublier. Je crois bien avoir perdu le contrôle ce soir là. Je l'avais suivi après le dîner, et au premier coin sombre, je l'avais entraîné à ma suite, ne lui laissant aucun moyen de riposter. J'ouvris la première porte qui se présenta à moi. La salle sur demande. Doucement je la plaquais contre le mur. Une fois qu'elle m'eut reconnu, elle avança son bassin, puis se détacha, frôlant le mien sans cesse. Je rêvais de l'embrasser. Mais nous nous étions mis d'accord. Du sexe. Pas de sentiment. Et pourtant ! Dieu sait à quel point j'aurais voulu poser mes lèvres sur les siennes, les mordiller, les lécher, les savourer. Mais céder à mes pulsions aurait été reconnaître mes sentiments et pour l'instant, je ne m'en sentais pas capable.

« Et bien que mon cœur soit nu
Mon âme est revêtue
De pudeur et d'impudence
Sans te faire offense
Mieux ne vaut pas tenter sa chance
Rien ne dure
Au-dessus de la ceinture »

Il sait ce que je ressens, ce que je pense. Même si je ne le dis pas explicitement, il devine. Nous nous comprenons d'un seul regard. Il sait quels sont les tabous et les non-dits. Apparemment cela ne le gêne pas que tout soit implicite entre nous, et il ne semble pas prendre le mal le fait que je ne veuille pas divulguer à toute l'école notre relation. Se cacher est tellement plus excitant. J'aime lorsqu'il m'entraîne dans la pénombre, ou lorsqu'il me fait entrée dans une salle vide. Du sexe. Rien que du sexe. De toute façon, rien d'autre ne pourrait marcher entre nous. Du physique. Pas de chimie.

« Non, pas sur la bouche
Même sous la douche
Même si c'est dur
Je te mordrai
C'est promis
Tous les coups sont permis »

Je prends tellement de plaisir à braver les interdits. Pour elle, pour nous. Que diraient les gens s'ils apprenaient notre relation ? Le Serpent et le Lionne. La rouge et le vert. Le sang pur et la sang de bourbe. Mais elle avait raison -comme toujours- passer notre relation sous silence est tellement plus euphorisant, tellement plus aphrodisiaque ! J'aime la surprendre dans des lieux incongrus. Comme ce matin dans la douche. Finalement être préfet en chef à du bon. Partager tout les deux la même salle de bain pouvait se révéler bénéfique. Une découverte de nouvelles saveur. De nouvelles sensations. De nouveaux plaisirs.

« Non, pas sur la bouche
Je sais, je touche
Le fond du lac
Le temps des cerises est mort
Le diable est dans le corps »

Je ne peux plus résister. Lorsqu'il me regardes droit dans les yeux, avec cette petite lueur taquine au fond de tes pupilles, je sens les poils de mon échine s'hérisser délicieusement, un frisson me parcoure tout entière. Tout en lui appelle à la luxure. Ses cheveux d'or, sa fine musculature, son visage d'ange, son sourire, ses mains, ses longs doigts. Et ses lèvres. Sa bouche a parcouru la moindre parcelle de mon épiderme. Sauf mes lèvres.

« Non, pas sur les lèvres
Non c'est pas mièvre
C'est pas le trac
Mais je préfère me donner crue
Sans revers, ni refus »

J'avais l'habitude de prendre l'initiative. Je voyais les coup d'œils qu'elle me jetait, emplis de désirs. Et pour une fois dans ma vie, je décidais de ne rien faire. De la laisser venir jusqu'à moi. D'elle même. Pendant une semaine je fis mine de l'ignorer. Je la voyais devenir folle. Et j'en jouais. Je m'amusais à la frôler dans les couloirs, à me presser contre elle lorsque nous étions pris dans la foule, à flirter avec d'autres filles sous ses yeux.

« Rendons nous à l'évidence
Tout est cuit d'avance
Mieux vaut pas tenter sa chance
Rien ne dure...
Au-dessus de la ceinture »

Peut être devrions nous arrêter ? Notre relation est vouée à l'échec. Le sexe ne nous suffira pas éternellement. Un jour où l'autre, l'un de nous tombera amoureux, et je doute que l'aimé en question apprécie que nous couchions avec d'autres. Mais ne réfléchissons pas à notre avenir. Jouissons de l'instant présent.

« Non pas sur la bouche
Je sais c'est louche
Puisque ma peau
A l'odeur de ton odeur
Au dehors il fait chaud »

J'aimerais ne jamais avoir à quitter cette chambre. Nos corps blottis l'un contre l'autre. Nos odeurs mélangées. Nos sueurs unies. Se faire l'amour. Lui faire l'amour. Car nous ne parlons plus de coucher. Cet acte charnel a pris une nouvelle définition : Faire l'amour.

« Non, pas sur les lèvres
Jamais de trêve
Et pas d'assaut
Le bonheur est en attente
Entre le sol et le vent
Entre l'oubli et l'oubli
Mais l'oiseau du paradis [..] »

Moment de bonheur. Après l'amour, l'ivresse. Quelque part en suspension loin de tout. Loin d'eux. Loin de nos obligations. Mais cessons de réfléchir. Contentant nous de célébrer nos corps. Sans penser, sans réfléchir. Profitons de l'amour. Du sexe.

« Joue plutôt aux jeux interdits
Rien ne dure...
Au-dessus de la ceinture »