En retard. Ils étaient encore en retard. Et toujours pour la même raison ! Parfois, toute cette histoire d'horoscope tapait vraiment sur les nerfs de Takao. Puisque les signes astrologiques ne passaient jamais dans le même ordre, il fallait parfois attendre jusqu'à la fin de l'émission pour savoir ce qu'il en était des cancers. Et Midorima refusait catégoriquement de quitter la maison sans connaître ses ordres pour la journée. Après ça, ils devaient encore aller chercher l'objet porte-bonheur du jour, quelque chose de parfois réellement compliqué.
Et justement, un magasin spécialisé en chasse et pèche ouvert à sept heure du matin, c'est proprement introuvable ! Après avoir dû attendre les huit heures tapantes, heureusement que l'office ouvrait tôt, les deux élèves de Shutoku, une canne à pêche neuve sous le bras pour l'un et une tête de déterré pour l'autre, purent enfin prendre le chemin du lycée. Toujours à vélo, évidemment. Et en retard.
- Aaah, Shin-chan, y a des fois t'abuse vraiment ! Râla le conducteur, le souffle court.
Aucune réponse de la part de l'intéressé, mis à part un sobre regard, que le brun remarqua du coin de l'œil en tournant la tête, voulant clairement dire « tais-toi et pédale ». Pourquoi est-ce qu'il continuait à l'accompagner, lui, aussi ? Tous les jours c'était la même galère, et pourtant, depuis qu'ils avaient fait connaissance à l'entrée au lycée, ils ne se lâchaient plus. Enfin, le brun ne le lâchait plus. Le destin, comme dirait l'autre. Le cul d'enfer de cet « autre », d'après Takao. Et il ne parlait pas seulement de sa chance phénoménale, mais aussi bien de son attribut physique.
Et en général, mis à part dans les vestiaires, la charrette accroché à ce vélo était le meilleur endroit pour mater en toute tranquillité. Sauf quand celui qui pédalait, c'était lui. Ce qui arrivait, pour ainsi dire, toujours. Parfois le garçon à l'« œil de faucon » était persuadé que toute la malchance du jeune homme à lunette le quittait seulement pour se jeter sur lui. Sauf en match, bien sûr.
En gros, il avait la poisse, alors que son camarade était beaucoup trop chanceux pour que ce soit réellement normal. Peut-être bien qu'il allait se mettre à suivre l'horoscope lui aussi. Il ferait d'ailleurs presque n'importe quoi pour pouvoir avoir un peu de chance. Rien qu'un peu. Juste de quoi battre au moins une fois ce type aux cheveux verts au Janken. Et pouvoir tranquillement admirer son superbe popotin en mouvement, suivant les actions des muscles de ses jambes, car se rincer l'œil sur Midorima c'était le pied, mais c'était vraiment pas facile…
- Takao ! Cria alors son fantasme vivant.
- Hein ?
Trop tard. La roue avant du vélo heurta durement le poteau du panneau de signalisation qui se trouvait là, envoyant valser le rêveur contre la barre de fer. A moitié assommé, le brun frotta son crâne meurtri en se redressant. Alors là, c'était le pompon, manquerait plus que leur moyen de transport soit hors service, et il allait vraiment faire une crise de nerf. Ça lui apprendra à penser à autre chose pendant qu'il roulait. Si toute sa journée se déroulait comme ça, autant qu'il rentre chez lui tout de suite.
Après une rapide vérification de leur bolide, et une remarque cinglante de son « Shin-chan~ », ils purent enfin repartir, sans rencontrer de problème majeur, Kazunari décidant enfin de se concentrer sur la route plutôt que sur son compagnon derrière lui. Leur arrivée fût évidemment remarquée, comme toujours en fait. Faut dire qu'un étudiant se baladant avec une canne à pèche, ça ne cours pas les lycées, même à Tokyo.
Un peu fatigué, non seulement par la route, mais aussi par le fait de faire encore une fois l'affiche pour autre chose que le basket, Takao ne suivit les cours qu'à demi. Et cet as exubérant qui faisait comme si de rien était. Il devait avoir l'habitude à force. Depuis quand est-ce qu'il avait commencé cette fascination pour l'horoscope ? Il faudrait que le brun pense à lui demander. Plus tard. Là, il hésitait fortement entre lui mettre son poing dans la figure, ou sa main aux fesses. Bien que la première solution soit probablement moins dangereuse pour lui.
Avec un soupire à fendre l'âme, sa tête heurta le bois de sa table, s'attirant un regard foudroyant de son professeur, déjà énervé par leur retard. Manquerait plus qu'il se prenne une colle tiens. Ses yeux, par habitude, cherchèrent son partenaire, et il dû se retourner pour lui faire face. Encore un fait irritant, Midorima se trouvait directement derrière lui en cours, dans la rangée sous les fenêtres, au milieu. Vachement discret le 180 degré pour lui adresser la parole. Ses iris grises rencontrèrent les vertes.
- Qu'y a-t'il, Takao ?
« J'ai envie de t'embrasser », qu'il aurait voulu lui répondre. Pour sûr, il lui aurait cloué le bec avec ça. Il le fixa un instant, examinant son visage. Et se rendit compte qu'il ne l'avait encore jamais vu sans ses lunettes. Il faudrait remédier à ça rapidement.
- Rien. Finit-il par dire avec un sourire effronté et provocateur, sachant parfaitement que ça attiserait l'énervement du numéro six.
Le brun se retourna ensuite à nouveau vers l'avant de la salle, fuyant l'expression exaspérée du vert. Il ne se lasserait jamais de l'embêter, Shin-chan était si mignon quand il se mettait en colère ! Même si après il devait payer les frais de sa mauvaise humeur pendant des heures, ils étaient aussi têtus l'un que l'autre, donc ça pouvait durer longtemps, et ils finissaient même en général par oublier pourquoi ils s'étaient prit la tête à l'origine.
Comme prévu, monsieur premier de la classe prit la décision de l'ignorer royalement pendant le reste de la matinée. Bon, il l'avait un peu cherché, mais c'était quand même une attitude sacrément extrémiste ça ! Et profondément frustrante aussi. S'ennuyant à mourir tout seul, Kazunari se mit en tête, pendant la pause déjeuner, de faire réagir son stoïque compagnon. Tâche ardue, encore plus quand celui-ci n'avait pas l'air franchement motivé à lui adresser la parole. Et pourtant…
- Takao ! Arrête ça immédiatement !
Sourire victorieux du camp adverse. « Gagné ! ».
Midorima restait toujours en classe pour manger, et son ami aussi, par extension, celui-ci s'était tourné face à lui, et avait envahit son bureau pour engloutir le plus rapidement possible son bento. Une fois fait, il avait regardé le vert déguster lentement son propre repas, le mettant visiblement mal à l'aise et en colère. Mais ça ne fonctionnait pas. Donc l'enquiquineur avait prit ses baguettes dans sa main droite, et avait piqué le boudeur à intervalle régulier pendant un bon moment avant qu'il ne craque enfin.
- Ce que tu es borné, Shin-chan ! J'ai dû faire ça pendant un quart d'heure avant de te faire réagir ! Enfin, mis à part ton tique au sourcil. Se moqua le numéro dix en riant de bon cœur.
- Regardez qui dit ça. Tu es tellement puéril parfois. Rétorqua l'autre, blasé, ignorant la dernière remarque.
Le brun posa sa tête sur sa main gauche, regardant son tsundere, qui était retourné à son bento, avec un sourire, ses yeux gris à demi fermés.
- Vraiment ?
Il n'eut pas de réponse et se perdit dans sa contemplation. Il avait envie de tendre sa main pour attrapée celle, bandée ou non, voir même les deux, de Midorima. Il voulait le toucher, lui caresser la joue, jouer avec ses cheveux, et ôter ces vilains verres qui lui cachaient une partie de son visage. Oui, Takao Kazunari était complètement accro à son coéquipier, et ce, depuis la première fois qu'il l'avait vu. Peut-être, comme le dirait le vert si il était à sa place, que c'était dû à leur compatibilité astrologique. Ou le coup de foudre, tout simplement.
De toute façon, que ce soit l'un ou l'autre, ça l'avait mit dans une situation désagréable. Le voir tout les jours, être près de lui sans pouvoir rien faire lui était de plus en plus difficile. Et c'était sans parler de l'entraînement… mais qui avait eu la stupide idée de faire des vestiaires collectifs, sérieusement ? Le voir se dénuder sous son nez était une vraie torture. Un soupire le sortit de sa rêverie.
- Tu comptes encore me fixer longtemps ?
- Sois pas si timide !
- Je ne le suis pas, c'est juste exaspérant.
- Tu n'aimes pas que je te regarde ? Demanda d'un coup le brun, sérieux, mettant les pieds dans le plat.
Y sautant à pieds joints plutôt… et au vu de l'air surprit de Shintaro, il avait fait mouche. Celui-ci cligna lentement des yeux avant de répondre.
- Là n'est pas la question, ça n'a rien à voir.
Il ne répondrait pas, il ne s'était même pas rendu compte de la profondeur de ces paroles, ne faisant que les survoler, les prendre dans le sens premier sans chercher ce qu'il y avait en dessous, le brun le savait. Et lui préféra ne pas insister plus, il avait déjà laissé échapper trop d'indices sur son indécent secret.
- Laisse tomber. Marmonna-t-il.
Déçu et triste, sans rien laisser paraître, le numéro six se remit dans le bon sens, face au bureau du professeur, qui n'allait sûrement plus tarder à arriver. Il sentait le regard perçant de Midorima dans son dos, et laissa tomber sa tête entre ses bras croisés. C'était douloureux. Pourquoi est-ce que c'était si compliqué ? Si il avait été une fille, il aurait pu se déclarer à lui, au risque de se prendre un vent, mais personne n'aurait trouvé ça bizarre, ou anormal.
Quoi que, si il avait été une fille, il n'aurait peut-être pas connu le vert comme ça. Peut-être qu'il devrait se contenter de cette relation amicale, bien qu'ambigüe, pour le restant de ses jours. Pourtant, regarder les autres adolescents, surtout la gente féminine, pour se sortir ce dingue de l'horoscope de la tête, il avait essayé ! Mais tous ses efforts l'avaient mené vers une seule et même conclusion : il avait Midorima dans la peau. Il lui collait au corps et à l'esprit, c'était pire qu'un tatouage, une marque au fer rouge en pleine poitrine. Impossible de s'en débarrasser. Mais le voulait-il seulement ?
Un poing s'écrasant sur sa table le fit sursauter, l'arrachant à son raisonnement qui le déprimait de plus en plus.
- On se réveille, Takao. Lui intima le professeur, avant de reprendre son chemin entre les rangs des élèves.
De mauvaise humeur, le jeune homme se demanda comment réagirait son camarade derrière lui, si il ne lui adressait plus la parole de la journée. La réponse fût sans appelle, tous les deux n'échangèrent aucuns mots de toute l'après-midi, restant chacun de son côté. Tellement englué dans sa bouderie, Kazunari ne remarqua pas les quelques regards interrogateurs que lui lançait parfois le vert, intrigué de ces quelques heures de tranquillité qui s'éternisaient, et qui l'auraient sûrement encouragés à reprendre une attitude normale.
Ce n'était pas tant que le silence du numéro six le gênait pendant les cours, il ne lui répondait jamais dans ces moments-là de toute façon, que ce soit aujourd'hui ou un autre jour, mais là, même pendant les pauses, il n'y avait aucun échange. Avait-il si peu de considération pour lui qu'il n'allait même pas lui demander ce qui n'allait pas ? Après tout, il ne se comportait pas comme d'habitude ! Ou pire, peut-être qu'il ne l'avait même pas remarqué. Et le garçon aux yeux de faucon s'en voulait d'être tellement éprit d'un homme aussi froid.
Il y pensa jusqu'à la fin des cours, et sortit, presque le premier, de la salle pour pouvoir se rendre au plus vite à l'entraînement. Se défouler un peu ne pourrait lui faire que du bien, et l'aider à oublier ses idées noires. Le capitaine et le coach étaient déjà dans le gymnase, comme toujours, quand il y entra. Il les salua avant de foncer au vestiaire pour se changer. Une fois fait, il enferma ses affaires dans son casier et se retourna pour croiser des yeux verts mécontents.
Etait-ce le fait qu'il ne l'avait pas attendu qui le mettait en colère ? Cette idée le réjouit bizarrement, au moins ça lui prouvait que Midorima s'était pleinement habitué à sa présence, et qu'il la désirait peut-être, au moins un peu. Le plus petit oubliait parfois, dans ses coups de blues, plutôt récurrents depuis quelques temps, qu'il avait affaire à un tsundere coincé. Il lui lança alors un de ses sourires espiègles, avant de quitter joyeusement la pièce qui se remplissait de joueurs, en les saluant eux aussi.
Comme toujours, il n'eut le temps de ne penser à rien pendant les exercices, la concentration et l'effort physique que ça lui demandait primant sur ses états d'âme. Et puis, même si il aimait énormément le basket, les punitions de l'entraîneur, quand il remarquait que l'un des élèves, surtout titulaire, n'était pas à fond dedans, n'étaient pas une partie de plaisir. Tout ce passa bien jusqu'à ce qu'ils décident de finir sur un match.
L'horoscope ne devait pas être en faveur des cancers aujourd'hui, et ce, malgré l'objet porte-bonheur qui trônait fièrement sur un des bancs contre le mur. Vers la fin, le vert, qui se préparait à marquer, au grand damne des adversaires, fit un faux pas et perdit l'équilibre, comme ça arrivait parfois, même aux meilleurs joueurs, sa jambe le lâchant au plus mauvais moment. Il bascula sur la droite, prêt au choc, mais n'ayant pas prévu que son partenaire au dossard dix se trouverait là en même temps.
En effet, celui-ci, plus en avant sur le terrain, et voyant l'action habituelle de son coéquipier, avait tout naturellement commencé à remonter le terrain, pour retourner en défense. Il arrivait au niveau de Midorima quand celui-ci s'écroula, le heurtant violemment au passage, et les faisant tout les deux s'écrouler sur le parquet. Tout s'était passé très rapidement, et les cris alarmés des autres joueurs résonnèrent en même temps que le coup de sifflet strident du coach.
- Ça va, vous deux ? S'enquit Otsubo, le premier à s'être accroupit près d'eux, l'air un peu inquiet.
Sacrée collision. Un peu sonné, Kazunari l'entendit à peine. La seule chose qu'il sentait clairement pour l'instant, c'était un corps plus lourd que le siens, qui appuyait durement contre son ventre, lui coupant presque la respiration. Il allait vivement manifester son mécontentement, quand la pression s'allégea, sans pour autant disparaître totalement. Mais au moins, il pouvait faire le plein d'oxygène et analyser la situation.
Il n'avait rien vu venir, tout ce qu'il savait, c'était qu'il courait, puis quelque chose, ou plutôt quelqu'un, lui était rentré dedans, et qu'il s'était retrouvé par terre. En ouvrant les yeux, qu'il ne se souvenait pas avoir fermés, il remarqua que le fautif n'était autre que Midorima, toujours à moitié allongé sur lui. Dans un autre contexte, ça aurait pu être une situation très réjouissante. Frustration bonjour ! « Mais quelle journée de merde… ». Au vu la tête que tirait le vert, ils avaient dû penser la même chose.
Le capitaine, après s'être assuré qu'ils pouvaient bouger sans danger, soulagea enfin Takao du reste de la pression en aidant l'autre joueur à se relever. Le brun se redressa sur ses coudes, s'auto-examinant pour vérifier qu'il ne prenait pas de risques à se lever, avant que leurs coéquipiers ne lui donnent un coup de main pour se remettre debout. Par précaution, l'entraîneur préféra les envoyer tout les deux faire un check-up à l'infirmerie, et proposa de les faire accompagner, ce qu'ils refusèrent.
- On est déjà deux, on saura bien se débrouiller tout seuls. Argumenta le plus petit des « blessés », en se dirigeant déjà vers la sortie.
Plus vite ils y seraient, plus vite ils pourraient revenir. Ça l'énervait déjà de devoir manquer un temps d'entraînement pour quelque chose qu'il qualifierait de presque normal. Les chutes et les coups involontaires étaient monnaie courante dans le sport, mais bon, la sécurité avant tout, pas vrai ? Enfin, c'est ce que disait le coach, et, règle numéro un, on ne contredit pas le coach. Au moins, ça lui donnait une bonne occasion d'embêter un peu son partenaire.
- N'empêche, Shin-chan, je ne te croyais pas aussi audacieux !
- Qu'est-ce que tu veux dire par là, Takao ? Demanda le numéro six dans un soupire, sentant bien venir l'embrouille.
- Tu n'avais pas besoin de te jeter sur moi comme ça, je sais bien que tu m'aimes, mais fais un peu attention à la marchandise. Rétorqua le brun, presque aguicheur, profitant pleinement de la situation.
Après tout, ça ne lui ferait pas de mal de lui faire un peu de rentre-dedans, Midorima avait l'habitude, même si il ne comprenait strictement rien, ou faisait semblant de ne pas percevoir ce qu'il y avait sous les paroles amusées. Et puis, du point de vu du faucon, là c'était lui qui avait commencé.
- Quand tu auras finis de raconter n'importe quoi, tu pourras peut-être remarquer qu'on y est. Lâcha le vert en remontant ses lunettes, totalement indifférents aux efforts de son acolyte.
En effet, le trajet était court, étant donné qu'il fallait pouvoir avoir des soins rapidement, au cas où il y aurait un accident grave pendant les clubs sportifs qui, par conséquents, se regroupait autour du petit bâtiment qui servait d'infirmerie. Le médecin scolaire, qui était un homme, et non une femme comme souvent dans les établissements, ce que certains regrettaient, notamment les garçons pervers ou les filles trop pudiques, vint les accueillir.
- Le club de basket, n'est-ce pas ? Qu'est-ce qui vous amène ? Demanda-t-il d'un ton plutôt professionnel, mais non moins gentil.
Pendant qu'ils lui expliquaient le problème, il les fit assoir à son bureau pour les écouter, avant de faire se relever Kazunari, qu'il voulait examiner en premier, au cas où il aurait eu un mauvais coup à la tête en heurtant le sol. Le jeune homme pensait que, si ça avait été le cas, il l'aurait sentit plus tôt, mais bon, c'était pas lui, le toubib. Il s'installa donc presque sagement sur un lit, pendant que le docteur tirait le rideau blanc lumineux qui séparait le coin « bureau », du coin « auscultation ».
Finalement, rien à signaler, mais l'adulte lui ordonna de rester au repos au moins jusqu'au lendemain, histoire d'être sûr que tout allait bien. C'est d'humeur un peu boudeuse que le brun échangea sa place avec Shintaro, et attendit qu'ils aient finit. Malheureusement ils furent interrompus par l'arrivée en catastrophe de deux élèves de deuxième année, dont l'un semblait très malade. En tout cas c'est ce que supposa le dossard dix d'après les bruits qui s'échappaient de la salle de repos, où le médecin avait immédiatement conduit les nouveaux venus.
« Lucky. ». C'était sa chance de retourner taquiner son joueur préféré. Ni une, ni deux, il passa le rideau clair qui les séparait et se planta devant lui. Le vert lui lança un regard mécontent, comme toujours quand il estimait qu'il faisait, allait faire, ou pensait à une bêtise. Et au vu de la fréquence de ces regards, c'était presque toute la journée. Ou peut-être que c'était tout simplement son air naturel. Mais peu importe.
- Tu ne t'es toujours pas excusé de m'avoir sauté dessus devant tout le monde. Se moqua Takao, intentionnellement tendancieux.
« Bien que ça ne me dérangerais pas dans un autre contexte. » sous-entendait-il. On ne pouvait vraiment pas faire plus clair, et il avait bien la confirmation que son cher ami faisait exprès d'éviter ses doubles sens. Ou alors il était vraiment idiot et aveugle de ce point de vue là.
- Je ne vois pas pourquoi je le devrais, tu t'es mis dans la trajectoire de ma chute. Chute que je ne pouvais pas contrôler, ni pour l'arrêter, ni pour t'éviter.
- Mmh, si je suis ton raisonnement, c'est de ma faute, c'est ça ?
- Exactement.
Ce qui le fit éclater de rire. Ce fan de l'horoscope était d'une telle mauvaise foi ! Bon, peut-être que lui aussi… mais juste un peu. Il remarqua d'ailleurs que Midorima n'avait pas prit son précieux porte bonheur avec lui. Ça arrivait assez rarement pour qu'il le note. Prit d'une pulsion soudaine, qu'il avait eu envie d'assouvir depuis le matin même, le brun s'approcha rapidement, empiétant sans gêne sur l'espace privé de son camarade. Toujours aussi vif, il avança ses mains, ses doigts frôlant les pommettes soudainement rougissantes, de gêne ou d'énervement, il ne saurait le dire, et attrapa les branches des lunettes à montants noirs pour les retirer.
Un petit bond vers l'arrière, et il sortit de la portée de son Shin-chan complètement myope, et passablement irrité. Mais ça valait bien toutes les bouderies du monde, Kazunari avait enfin l'occasion de voir l'adorable faciès de son coéquipier complètement découvert, et il ne regrettait absolument pas son geste. Il le fixa ouvertement avec envie, se retenant d'aller se coller à lui pour couvrir son joli visage de baisers brûlants. Au moins autant que la colère qui enflammait les iris émeraude.
- Rends-moi ça, Takao. Ordonna l'ancien joueur de Teiko, presque menaçant, les yeux plissés pour tenter de l'apercevoir à travers le flou total de sa mauvaise vision.
Il devait être complètement maso pour être soudainement aussi excité de l'entendre prononcer son nom comme ça. La gorge un peu sèche et la respiration plus rapide, il déglutit avant de se lécher les lèvres du bout de la langue. « Mais qu'est-ce que je fabrique ? ». La porte qui grinça sur ses gonds le fit violemment sursauter, et le réveilla par la même occasion.
- Excusez-moi, j'ai été un peu long… tout va bien ? S'inquiéta le médecin en sentant la tension dans la pièce.
Sans répondre, le brun redit le plus vite possible les lunettes à leur propriétaire, qui n'avait rien vu, à proprement parler, de son trouble, et fila se rassoir sur un siège en face du bureau, histoire de se calmer. La clé, c'était juste de respirer calmement. Eviter d'attirer encore plus l'attention sur lui. Se détendre. Et surtout ne plus penser à cette image imprimée dans ses rétines. Le destin lui faisait regretter d'avoir voulu aller trop loin. Et pourtant il voulait plus, encore plus, toujours plus. « Si égoïste… ».
Il secoua la tête, faisant voleter ses cheveux noirs, pour s'aider à reprendre ses esprits. Quelques instants plus tard, le rideau séparatif était tiré, et il récupéra son coéquipier, qui avait reçu la même consigne que lui. Le retour au gymnase se fit dans un silence des plus tendu, chacun étant enfermé dans ses propres pensées. Une fois là-bas, et la situation mise au clair avec le coach, ils partirent se changer avec les autres, qui avaient finis le match, et donc l'entraînement, en leur absence.
Ce n'est qu'une fois rentré chez lui, après avoir raccompagné son Shin-chan en râlant parce que « j'ai pas le droit de faire du basket, mais je suis obligé de pédaler ! », que Kazunari pu enfin souffler. Il fila directement dans sa chambre, évitant habilement famille et chats, respectivement au nombre de trois et deux, puis s'écroula lamentablement sur son lit avec un râle d'agonie digne des pires zombies de jeux vidéos. Le brun resta ainsi un moment, le visage enfouit dans le moelleux des oreillers de son lit défait, sans bouger, sans penser, en profitant juste d'un moment de repos qu'il jugeait bien mérité.
- Aaah, Shin-chan, traîner avec toi est vraiment trop fatiguant…
- C'est qui Shin-chan ? Ta petite copine ?
Le jeune homme releva la tête et ouvrit un œil, tombant sur le visage curieux, orné de deux grands yeux plus gris que les siens, de sa petite sœur. Depuis le jour de sa naissance, quatorze ans auparavant, il l'avait adoré, et elle lui rendait bien. Bien que, comme dans n'importe quelle fratrie, il arrivait qu'ils se disputent, ça ne durait jamais très longtemps. Mais là, honnêtement, il aurait bien voulu qu'elle fasse son entrée un peu plus tard… surtout que sa question venait de plomber le peu de moral qu'il avait réussit à retrouver.
- Nana, t'as pas autre chose à faire que m'espionner ? Soupira-t-il en se retournant lourdement sur le dos.
- Je t'espionne pas ! Rétorqua la cadette en gonflant ses joues, vexée. Maman m'a envoyée te dire qu'on passe à table. Et t'as pas répondu à ma question !
- C'est pas ma petite amie… c'est même pas une fille, d'ailleurs.
Il aurait peut-être dû inverser l'ordre de ses réponses. Heureusement que le vert ne pouvait pas entendre cette conversation. Mais il n'y pouvait rien si ça le décevait tellement de ne pas avoir ce genre de relation avec lui ! Ses réflexions devaient se lire sur son visage, car sa benjamine le regardait d'un air étrange. Le lycéen se redressa alors vivement, scotchant un sourire joyeux sur son visage. Autant éviter de la traumatiser en la laissant penser, même si c'était le cas, que son grand-frère chéri pourrait aimer un autre garçon.
Après le repas, et une rapide course-poursuite dans la maison pour atteindre la salle de bain en premier, Takao pénétra avec délectation, après s'être lavé, dans la baignoire remplie d'eau presque brûlante, qui déborda allègrement sur le carrelage bleu clair. Y a pas à dire, c'était bien le meilleur moment de son horrible et stressante journée. Il se sentait quand même un peu mal de n'avoir pas plus profité de la présence de Midorima quand il en avait l'occasion, il lui manquait déjà. Et puisque c'était à présent le week-end, il ne pourrait le voir qu'à l'entraînement.
- Je suis trop con…
Il se leva alors, attrapa son portable, qui se trouvait sur une étagère, près de ses vêtements, et refila aussi sec faire trempette. L'amoureux transit composa ensuite le numéro qu'il connaissait par cœur, sans prendre la peine de le chercher dans son répertoire. Son interlocuteur décrocha à la deuxième sonnerie.
- Takao, tu n'as pas autre chose à faire de ta soirée ?
- Même si j'avais autre chose à faire, je louperais pas le coup de fil quotidien de Shin-chan ! Rétorqua le jeune homme, tout joyeux d'entendre la voix aimée.
- Sauf que je ne t'appel jamais.
- Ce que tu es froid… digne de ton tsundere intérieur, hein ? Se moqua-t-il en s'installant plus confortablement, faisant clapoter l'eau qui prenait son temps pour refroidir, sa chaleur rougissant sa peau.
- Je vais raccrocher.
- Pourquoi ? Tu es occupé ?
- Pas spécialement, mais tu m'ennuis. Lui répondit le vert.
Le brun sourit, sachant qu'il ne l'avait pas encore assez énervé pour qu'il lui raccroche au nez, comme c'était déjà arrivé… presque à chaque fois en fait. Il décida donc de l'embêter un peu, histoire de ne pas casser les habitudes.
- Au fait, tu sais que ça ne te va pas les lunettes ? Vraiment, essais les lentilles.
- Je ne vois pas en quoi mon aspect physique, et surtout ce que j'en fais, te regarde. Tiqua Midorima, habitué aux changements de sujet soudain de son coéquipier. Et la prochaine fois que tu prends mes lunettes, je te le ferais regretter.
- Même si je demande la permission ?
- Tu ne l'auras pas.
« C'est ce que tu crois. »
Il allait lui répondre, quand des coups se firent entendre à la porte de la salle de bain.
- Kazu-nii ! Dépêches-toi un peu ! Cria Nana, impatiente, de l'autre côté du battant en verre flouté.
- Une minute ! Lui répondit-il de même.
- Qu'est-ce qui se passe ? Demanda la voix dans son téléphone.
- Ma sœur qui veut que je sorte du bain.
- Tu m'appelles depuis ta baignoire ?
Pour le coup, le jeune homme avait l'air franchement surprit.
- Oui…
Il aurait voulu ajouter encore une phrase tendancieuse, ou peut-être même perverse, de son cru, mais les coups se firent plus insistants, depuis le couloir cette fois, sa cadette ayant dû quitter la pièce.
- Je te laisse Shin-chan, ta douce voix me manque déjà !
- C'est ça…
La conversation fût coupée sur ces mots soupirés d'un ton agacé. Décidemment, il le faisait exprès de ne rien comprendre ! Ou de faire mine de ne pas se rendre compte de ce qu'il voulait lui dire… Si ça continuait, il allait vraiment devoir l'agresser physiquement pour lui montrer son attirance. Quoi que c'était probablement pas une bonne idée.
Le brun soupira, et laissa finalement la place à l'adolescente irritée, qui attendait qu'il sorte de là. Il lui ébouriffa les cheveux, plus clairs que les siens, qu'elle portait aux épaules, au passage, et alla se réfugier dans sa chambre. Il vira le chaton tout blanc, nommé Coton par Nana, à qui il appartenait, du nid qu'il s'était fait avec sa couette, et se glissa sous elle en position fœtale. Omega, son chat à lui, aux poils couleur écailles de tortue, sentant peut-être son désarroi, vint paresseusement se faufiler entre ses bras, lui lécha le menton, et s'installa pour dormir.
Tout en lui grattant la tête, entre les deux oreilles, Takao réfléchissait. La situation actuelle lui déplaisait, mais si il faisait quelque chose, en plus des efforts qu'il fournissait déjà, il n'était pas sûr qu'elle s'arrange. En fait il était même plutôt persuadé du contraire. Mais ça ne pouvait plus durer comme ça, il allait finir par exploser. Car en plus du fait de se sentir rejeté, et donc moralement à plat, il avait aussi couramment un léger problème d'ordre plus… physique. Après tout, il n'était qu'un homme.
MT
- C'est quoi cette tête depuis ce matin, Takao ?
Le brun ne répondit pas, continuant à répandre son aura déprimée partout dans le couloir du lycée, où ils venaient d'entrer. Pour une fois, ils étaient à l'heure, l'objet porte-bonheur du jour étant une petite peluche à l'effigie d'un chaton blanc, qui lui avait immédiatement fait penser à Coton, accentuant encore sa mauvaise humeur. Midorima devait avoir une sacrée collection d'objet, depuis le temps, et son coéquipier ne l'avait jamais vu jeter quoi que ce soit. Cela faisait une semaine qu'il cherchait une solution à son problème, et rien ne paraissait marcher. Et il sentait que ses nerfs étaient sur le point de craquer.
Il resta d'ailleurs morose toute la journée, s'attirant des regards de plus en plus insistants de son partenaire. Heureusement, l'entrainement du soir eut le mérite de lui redonner un peu de sa morgue naturelle, et c'est d'humeur plus joyeuse et taquine qu'il attendit, déjà installé sur sa selle, le vert pour rentrer, après s'être changé dans les vestiaires. Mais apparemment, l'as de l'équipe avait décidé de trainer ce soir…
- Ça y est, t'as finis de te pomponner ? Demanda-t-il d'une voix forte en voyant le retardataire arriver enfin.
- La ferme, Takao.
- Je t'ai refilé ma mauvaise humeur ?
- Pas vraiment. Allons-y.
Le plus petit le regarda s'installer dans la charrette. Qu'est-ce qui lui prenait ? Il ne lui avait pourtant rien fait de particulier aujourd'hui… des problèmes avec quelqu'un d'autre ? Il préférait lui laisser le temps de se calmer avant de l'interroger, sinon ça ne servirait à rien, vu la tête peu avenante qu'il tirait, le brun risquait juste de se faire rembarrer. Alors, quand ils arrivèrent chez Midorima, le jeune homme décida de le retenir avant qu'il n'entre, debout devant l'entrée que la nuit assombrissait.
- Shin-chan…
- Takao…
Ils s'arrêtèrent de parler en même temps, surprit.
- Tu as quelque chose à me dire ? Demanda le plus petit, étonné.
C'était plutôt rare de la part de Shintaro de vouloir lui parler, surtout le soir.
- Toi aussi.
- C'est pas important. Mentit-il.
Le vert garda le silence, puis remonta nerveusement ses lunettes. Le brun examina son manège, curieux. Qu'avait-il de si gênant pour qu'il hésite à lui dire ? Une idée saugrenue lui traversa l'esprit, et il eut un sourire amusé.
- Tu veux me faire une déclaration ?
- Qu'est-ce que tu racontes encore ? C'est pas ça… Répondit Midorima, du rose venant tout de même colorer ses pommettes.
« Trop mignon, Shin-chan… ». Un sourire un peu niais vint orner son visage, lui attirant un regard étrange de son coéquipier. Mais il n'y pouvait rien si il craquait complètement pour ce tsundere si froid. Il fallut encore quelques secondes pour que le vert ouvre à nouveau la bouche.
- Pourquoi est-ce que tu me suis ?
Takao cligna des paupières, pas sûr de comprendre.
- Pourquoi… est-ce que tu restes avec moi ?
- Oh !
Le grand Midorima Shintaro aurait-il des problèmes de confiance en soit ? En même temps, il ne devait pas être tellement habitué à avoir quelqu'un prêt de lui à tout moment, on ne pouvait pas dire qu'il était facile à supporter, de part son caractère, mais aussi à cause de son obsession pour l'horoscope, qui souvent pouvait agacer. Il lui répondit donc tout naturellement.
- Parce que j'en ai envie, j'aime être avec toi.
Bon, vu l'air qu'il prenait, sa réponse n'était pas satisfaisante. Mais c'était la stricte vérité ! Enfin, peut-être qu'il pourrait lui préciser le fond de sa pensée.
- Parce que je t'aime, Shin-chan.
Le soupire que poussa le plus grand eut le don de l'énerver. Il ne le croyait pas. Mais qu'est-ce qu'y lui fallait de plus ? Peu importe ce qu'il faisait, jamais le numéro six ne l'avait prit au sérieux. Est-ce qu'il pensait vraiment qu'il se moquait de lui depuis tout ce temps ? Alors d'accord, ils étaient peut-être des hommes tous les deux, et il ne voulait pas le voir comme un partenaire potentiel, mais il y avait des limites ! Il ne demandait pas qu'il accepte ses sentiments, même si il le désirait, mais au moins qu'il s'en rende compte !
- Shin-chan.
L'interpellé, qui allait ouvrir la porte de chez lui, se retourna. Takao l'attrapa fermement par le col et le força à se baisser, avant de plaquer ses lèvres brûlantes contre les siennes, tellement froide. Comme le reste de sa personne. Il n'arriva pas à apprécier cette parodie de baiser, et le relâcha, presque dégouté. Midorima, lui avait l'air choqué, et posa sa main contre sa bouche en fuyant son regard.
- Quand quelqu'un prend son courage à deux mains pour se déclarer, la moindre des choses c'est de répondre, tu crois pas ? Lança le brun avec hargne.
- Arrête cette plaisanterie…
- Qui se moque de l'autre, ici ?! Le coupa-t-il.
Il avait crié. Un silence tendu et pesant les enveloppa. Pourquoi le vert ne réagissait-il pas plus ? En bien ou en mal, au point où il en était, Takao s'en fichait éperdument, il voulait qu'il le regarde, qu'il lui parle, qu'il s'énerve, peu importe, mais quelque chose ! Mais rien, pas même le plus petit signe d'une colère qui aurait été légitime. Alors il s'en alla, et même si il l'avait supplié silencieusement dans sa tête, Midorima ne le retint pas.
Le trajet pour rentrer chez lui se fit sans qu'il s'en aperçoive, ce n'est qu'en refermant la porte de sa chambre qu'il se rendit vraiment compte de ce qu'il venait de faire. Et à qui il l'avait fait. Il venait tout simplement de briser leur relation en moins de quelques minutes. C'était foutu, jamais il ne pourrait se faire pardonner ça.
- Merde…
Il se laissa aller au sol, sa tête reposant sur le rebord de son lit, complètement vidé. La gorge serrée, il avait envie de pleurer. On toqua à sa porte, et elle s'entrouvrit.
- Kazu-nii !
- C'est pas le moment, Nana…
La jeune fille, coupé dans son élan, entra complètement dans la chambre de son frère, intriguée et inquiétée par sa voix basse et rauque. Le voyant trembler légèrement, elle s'assit à côté de lui et frotta doucement sa main sur son dos. Gentiment, la brune passa ses petits bras autour des épaules de son ainé, et le serra contre elle jusqu'à ce qu'il se soit calmé.
- C'est moi qui suis censé donner l'exemple, de quoi j'ai l'air. Marmonna-t-il avec un pauvre sourire.
- D'un Kazu-nii triste. Et ton nez est tout rouge. Lui répondit sa cadette, sans aucune gêne, avec un air concentré très sérieux.
Ça eut au moins le mérite de le faire rire. Il prit le mouchoir qu'elle lui tendait et lui ébouriffa vivement les cheveux, la faisant râler, et se redressa.
- Ah, mais qu'est-ce que je ferais sans toi !
- Je me le demande bien ! Déclara-t-elle d'un air fier, avant de lui sourire. Ça va aller maintenant.
Il soupira.
- Je l'espère…
- Mais oui ! Je vais te faire couler un bain, tu en profiteras pour te nettoyer le visage.
Et elle sortit en trottinant. Malgré la bonne humeur que sa sœur avait ramenée chez lui, Takao appréhendait la journée du lendemain. Et son mauvais pressentiment persista à son réveil, devenant de plus en plus écrasant au fur et à mesure qu'il se préparait pour aller en cours. Ou peut-être était-ce juste de la peur ? Si Midorima avait reprit ses esprits, et était redevenu le Shin-chan qu'il connaissait, il allait probablement se faire tuer. Dans le meilleur des cas.
- Kazu-nii !
- Guoi ? Grogna-t-il, sa brosse à dent dans la bouche.
- Y a un grand type avec des lunettes qui t'attends dehors.
Il lui fallut un moment avant que l'information ne soit réellement comprise par son cerveau, pendant l'analyse il eut le temps de s'étouffer avec le dentifrice, avaler, recracher, se noyer à moitié dans son verre d'eau, et enfin réussir à sortir vivant de la salle de bain. Nana, qui le regardait faire avec de grands yeux, pouffa légèrement en voyant sa mine défaite et lui tapota le torse.
- C'est lui « Shin-chan », hein ?
- Toi, il faudra qu'on ait une discussion quand je rentre. « Si je suis toujours en état de parler, voir même de bouger… ».
Elle lui fit un clin d'œil, avant de filer dans la cuisine. Marchant vers son destin, et c'était le cas de le dire, Takao se sentit de plus en plus nerveux. Arrivé à la porte, après avoir attrapé son sac et enfilé ses chaussures, il avait envie de partir en courant. Il s'ébroua.
- Allez, c'est pas la mer à boire non plus…
S'auto-persuadant de cela, il prit une grande inspiration et ouvrit la porte en lançant une tonitruante salutation, qui relevait plus de son état d'anxiété avancé que d'une réelle bonne humeur. Il eut encore un fois le droit à une drôle de tête de la part de Midorima. Est-ce que ce mec pouvait au moins sourire ? Enfin, autre chose que ses sourires sadiques réservés au terrain de basket. Et puis qu'est-ce qu'il faisait là d'abord, le brun ne savait même pas qu'il connaissait son adresse.
- Takao. Commença-t-il avec un ton qui ne lui disait rien qui vaille. Tu as du dentifrice au coin de la bouche.
- Hein ? Répondit très intelligemment le plus petit, qui s'était déjà préparé à encaisser un coup, en clignant bêtement des paupières.
Le vert soupira, un son tellement naturel et habituel qu'il surprit le faucon, remonta ses lunettes et s'approcha, levant sa main droite, et passa son pouce sur les lèvres d'un Kazunari complètement perdu, pour faire disparaitre la petite trace blanche. Avant de rapidement remplacer son doigt par ses propres lèvres. Il recula ensuite, son regard vert croisant les yeux gris écarquillés.
- Euh…
Le brun avait vraiment l'impression d'avoir laissé son cerveau sur son oreiller ce matin. Il n'arrivait pas à réfléchir, encore moins maintenant que Midorima faisait des choses sans queue ni tête. Même si c'était des choses très agréables.
- Ne fait pas cette tête d'ahuri, ça ne te va pas du tout.
Toujours aussi aimable… il le regarda tourner les talons et se diriger de façon complètement normale vers leur étonnant moyen de transport quotidien. Vu sa façon de parler, c'était bien son Shin-chan, et non pas un alien métamorphe, comme se l'était furtivement suggéré Takao.
- Tu comptes rester planté là toute la journée ?
Même sa répartie l'avait quittée, en plus de sa matière grise. Décidant de garder la bouche fermée pour le moment, de peur de lancer encore des onomatopées inutiles, le plus petit s'avança vers le vélo comme un automate, et lança un regard à l'occupant de la charrette. Réponse à sa question précédente : oui, ce mec était bien capable de sourire. Et joliment en plus. Le rouge lui montant soudain aux joues, il fût bien content de devoir lui tourner le dos pour grimper en selle. Il eut l'impression que son regard lui brûlait le dos tout le temps que dura le trajet, et était encore une fois à bout de nerf en arrivant au lycée, en retard, et ne pouvait plus retenir sa langue.
- Vraiment, peu importe comment on voit ça, être avec toi c'est crevant… se plaignit-il, avachit sur le guidon, toujours assit sur le vélo.
- Tu ne disais pas ça, hier. Fit remarquer le vert en quittant souplement leur bolide.
- … ce que j'ai dit hier vaut encore.
- C'est ce que je voulais entendre. Murmura Midorima près de son oreille gauche.
Une main aux doigts bandés se posa sur la poignée du vélo, s'appuyant dessus, et une bouche, pour une fois tiède, se posa contre sa pommette, la faisant rougir. Takao tourna la tête vers la gauche, et pu enfin attraper ces lèvres qui lui faisaient tellement envie, leur propriétaire répondant cette fois à son baiser. Elles se touchaient doucement, s'effleuraient, presque timides, et se caressaient affectueusement. C'était bien meilleur que les deux qu'ils avaient échangés avant, consentit ou non. Surtout non en fait. Et c'est cet instant là que le jeune homme décida d'appeler leur premier baiser.
Hellow !
Me revoilà avec un nouvel OS, encore, oui je sais, mais y a tellement de couples intéressants dans KnB ! *o* J'espère qu'il vous a plu, sur le même principe que "Les Vestiaires de Kaijo", il finira en Two-Shot si vous me demandez une suite ^^
Pour celles et ceux qui me suivent, j'essayerais de poster le prologue de ma fic AoKuro encore ce week-end, mais pour ça je dois le finir ! :p
Voilà, si vous avez des questions, des demandes, n'importe quoi, ma boîte mail est grande ouverte ! :D
Kissus,
Nyny :3
