Bonjour à tous!
Après avoir testé quelques one-shots, me voilà partie pour une fiction à plusieurs chapitres. Je ne sais pas encore jusqu'où cette fic va me mener, j'aime me faire la surprise! (même si, en tant qu'auteur, ce comportement est tout à fait illogique... /brique/) Sur ces mots forts éclairés, place à l'action!
Chap. 1 - L'attrait du côté opposé
Rangeant ses sabres dans leur fourreaux, l'homme contempla un instant les corps inanimés qui gisaient devant lui, au beau milieu d'une mare de sang.
Deux d'entre eux avaient été égorgés, puni de leur inattention. Les autres avaient été quant à eux éliminés de manière plus classique : un coup de sabre en travers de la poitrine, ou tranchés purement et simplement. Il avait pris particulièrement plaisir au combat lorsqu'il s'était retrouvé acculé contre mur avec face à lui une vingtaine de monstres armés de dagues recourbées. Il aimait les challenges.
La plupart étaient des Noméds, mais parmi eux se trouvaient les ignobles Gloms, plus fourbes et plus résistants. Malgré ses réflexes surhumains et l'adrénaline qui avait dopé ses aptitudes au combat, il lui avait fallut plus de temps que prévu pour s'en débarrasser.
Les hostilités terminées, il tentait enfin de reprendre son souffle. Combien de temps lui restait-il ? Il sortit son télétransmetteur et remarqua qu'il avait reçu deux alertes. Son sang se glaça. Il était arrivé quelque chose aux autres.
Une sirène retentit au loin. Le meurtrier poussa un grognement agacé. Les ennuis arrivaient, c'était bien sa veine. Tout en prenant soin de rabattre sa capuche sur sa tête, il s'enfonça prestement dans une ruelle sombre, laissant derrière lui un joli carnage. Non, il ne prenait pas la fuite. Il n'aurait fait qu'une bouchée des forces spéciales s'il l'avait voulu. Mais il s'était attardé trop longtemps à l'extérieur, et les siens semblaient être en difficulté. Il n 'avait pas le temps de jouer au gendarme et au voleur.
Arrivé à une intersection, il hésita. A gauche ou à droite ? Après quelques secondes de réflexion, il se décida pour la voie de gauche. Elle était plus sombre que l'autre, et dégageait des odeurs des plus nauséabondes. N'importe qui aurait choisi la rue éclairée par les lampadaires, qui était de loin plus accueillante et plus sûre, mais pas lui. Il était de ceux dont les ténèbres et la puanteur faisaient partie de l'environnement quotidien. La lumière avait pour lui le même effet que des rayons UV sur une peau claire: c'était désagréable au départ, et ça pouvait devenir dangereux après une trop longue exposition...
Le ciel, sombre et menaçant, se mit à gronder, et quelques gouttes de pluie commencèrent à tomber. Au bout de quelques secondes, la pluie fine et légère se transforma en averse, et le tueur se retrouva rapidement trempé. Le bruit de ses bottes dans les flaques d'eau et de son souffle rapide résonnaient contre les murs de l'étroite ruelle. Il avait l'impression d'être un animal traqué dans la jungle... Ce qui n'était pas tout à fait faux après réflexion.
Il sentit soudainement l'air se déformer autour de lui, et eut tout juste le temps de se jeter sur le côté pour éviter un rayon de lumière. Le mur auprès duquel il se tenait vola littéralement en éclat, laissant à la place un trou béant large d'au moins deux mètres. S'il ne s'était pas écarté à temps, il n'aurait plus de tête... Et de corps non plus.
Se redressant rapidement, le traqué dirigea son regard vers les hauteurs afin de repérer celui qui avait eu l'audace de l'attaquer. Face à lui, un homme se tenait debout sur les toitures en acier d'un immeuble. Il était vêtu d'une armure sophistiquée qui lui donnait des allures d'androïde. Celle-ci était entièrement recouverte d'un métal qui brillait, couleur platine à la lueur de la Lune. Il portait un masque lisse et tout aussi métallique qui recouvrait entièrement sa tête. Un sourire froid se dessina sur les lèvres de l'assassin. Les sans-visage l'avaient retrouvé en un temps record cette fois-ci...
Lorsque l'ennemi porta une main à sa tempe, le guerrier encapuchonné comprit que le sans-visage appelait du renfort. Serrant les dents, il sortit de nouveau ses sabres et se campa sur ses jambes pour prendre de l'élan. Il fallait qu'il se dépêche d'agir, s'il ne voulait pas se retrouver face au reste des unités spéciales. Inspirant profondément, il concentra son énergie maléfique dans ses sabres, avant de s'élancer brusquement vers les hauteurs, en direction de son ennemi métallisé.
Grimpant avec rapidité de fenêtres en fenêtres, le sabreur abattit ses lames sur le sans-visage, qui esquiva l'attaque en faisant un salto arrière. Loin de se laisser démonter, le guerrier continua l'offensive, ne laissant aucun répit à son adversaire.
Soudain, l'homme à l'armure enclencha son jet-pack[1] et s'envola sur quelques mètres, avant de tendre le bras vers le sabreur. Une lueur aveuglante se forma au niveau de son poignet métallique, et quelques centièmes de secondes plus tard, un rayon manqua de peu la tête de l'assassin. Ce dernier ne laissa pas le temps à son ennemi volant de rectifier le tir, et fit se déferler un souffle dévastateur à l'aide de ses sabres.
L'homme, surpris, n'eut pas le temps d'esquiver, et se prit l'attaque de plein fouet. Il fit une chute monumentale, son appareil lui permettant de léviter endommagé, et il s'écrasa sur le toit bétonné d'un logement collectif. Le digne représentant d'Icare[2]voulu se relever mais le guerrier aux katanas l'en empêcha en plaquant son pied sur sa poitrine. Il persista et brandit une nouvelle fois son poing vers le sabreur, mais ce dernier le lui trancha violemment. Le sans-visage poussa un hurlement de douleur, agrippant son bras réduit à l'état de moignon.
- Sans tes fichus gadgets, commenta le guerrier d'une voix glaciale, tu n'es rien de plus qu'un homme parmi tant d'autres...
- C... Comment t'as fait... Gémit le blessé, son masque lisse et inexpressif dirigé vers son ennemi, mon bras... Cette armure est censé être aussi solide que du diamant...
Son vis-à-vis poussa un petit ricanement méprisant tout en approchant la pointe de l'un de ses sabres vers la gorge de son ennemi.
-Rien ne peut résister à mes sabres...
Puis il enfonça brutalement son arme dans l'armure jusqu'à atteindre la chair de sa proie, qui laissa échapper un cri d'horreur avant de s'éteindre presque aussitôt. Le tueur avait retiré sa lame de la trachée de son adversaire et s'apprêtait à filer à l'anglaise, lorsqu'un bruit derrière lui le fit se retourner. Devant lui se tenaient une demi-douzaine de sans-visages, dont l'un portait une armure plus sophistiquée que celle des autres : elle avait été recouverte d'un alliage plus résistant, la phyllolythe, qui donnait une couleur gris-vert au revêtement. Un gradé... Jurant entre ses dents, l'assassin se maudit de ne pas avoir été assez rapide, et surtout d'avoir préféré l'amusement à la sécurité de ses camarades. Son instinct combatif finira par le perdre...
Inspectant un à un ses ennemis, l'assassin évaluait la situation. Un seul sans-visage, c'était du gâteau. Mais six, dont un de rang supérieur, c'était corsé. Et il n'avait pas de temps à perdre. Il devait lui rester une bonne demi-heure à errer dans ces ruelles tortueuses avant d'atteindre la planque. Il allait devoir se la jouer fine...
Profitant de ses songes, l'un des sans-visage s'élança vers lui, une épée à la main. Le guerrier para aussitôt l'attaque, mais au même moment il sentit une déformation de l'air dans son dos. Avec une rapidité hors du commun, il empoigna le sans-visage qui lui faisait face et s'en servit comme bouclier. Le rayon laser destiné au tueur frappa l'armure scintillante et y laissa une crevasse large comme la paume de la main. Si l'homme ne portait pas cette armure, il aurait certainement été coupé en deux. Profitant du moment d'hésitation du tireur, le sabreur lui balança le miraculé, avant de sortir ses trois sabres et se préparer à utiliser son attaque la plus puissante sur le reste de la troupe. Avec eux, le seul moyen de s'en sortir, c'était de foncer dans le tas.
Alliant la vivacité d'un fauve à la puissance d'un char d'assaut, il s'élança vers ses adversaires. Les sans-visages face à lui évitèrent l'attaque dévastatrice grâce à leur jet-pack. Mais loin d'être surpris, le guerrier continua sa course droit devant lui, et sauta dans le vide. Les ennemis ne réalisèrent que trop tard que cette attaque n'était autre qu'un leurre. Il s'était servi de la puissance de cette dernière et de son élan pour prendre la fuite. C'était lâche, peut-être, mais il avait des priorités...
Atterrissant souplement sur ses pieds, il disparu dans les ténèbres des ruelles étroites. Il ne devait pas s'arrêter. Il fallait qu'il retourne le plus vite possible à la planque.
Il crut au début qu'il avait réussi son coup : personne ne l'avait suivi. Peu à peu malgré tout, il sentit que quelque chose clochait. Les battements de son cœur se faisaient de moins en moins réguliers, il suait à grosses gouttes, sa vision était moins nette que d'habitude, et sa respiration était anormalement saccadée. Il prit appui sur le mur d'une main et s'arrêta un instant afin de reprendre son souffle. Une forme sombre sur sa gauche attira son regard. Il tourna brusquement la tête, craignant d'avoir à faire à un ennemi.
Il fut cependant soulagé de voir que ce n'était que sa propre image qui se reflétait dans la vitrine crasseuse d'un apothicaire. Il examina son reflet, et se fit la réflexion qu'il avait vraiment l'apparence d'un criminel. Il portait une longue cape noire à capuche qui camouflait entièrement son visage, dont l'extrémité était usée à force de traîner au sol. Le reste de ses vêtements, à savoir chemise, pantalon et bottes, étaient également noirs, si bien qu'on aurait pu le prendre pour un gothique. Enfin, ses trois sabres qu'il portait fièrement à la ceinture, intimaient les passants à y réfléchir à deux fois avant de l'aborder pour demander leur chemin.
Un détail lui fit froncer les sourcils. Quelque chose semblait dépasser de son dos. Il porta fébrilement une main à l'étrange objet et le retira d'un coup sec. C'était un petit cylindre long de quelques centimètres, terminé par une pointe. Une fléchette paralysante. Retenant un juron, il se maudit d'avoir été assez distrait pour s'être fait avoir de la sorte. La sirène retentit de nouveau.
Il releva la tête et tendit l'oreille en retenant son souffle, avant de reprendre la route promptement. Ils n'étaient pas loin. Il avait peut-être encore le temps...
Mais au fur et à mesure que les minutes passaient, ses pas se faisaient moins assurés, et sa vision devenait de plus en plus trouble. Il continua à avancer en titubant, tentant d'ignorer les élancements qui se faisaient ressentir au niveau de sa blessure.
C'est psychologique. Tout ça c'est dans ta tête. Tu ne sentais rien avant de te rendre compte que tu t'étais fait avoir! Y a pas de raison que ça te fasse mal maintenant! C'est pas le moment de flancher, pas quand ils sont à ton cul !
Ses jambes se mirent à trembler, et il trébucha. Il se rattrapa in extremis, et repris sa marche d'un pas mal assuré.
Regarde-moi ça, tu sais même plus marcher... Tu parles d'un puissant guerrier...
Il progressait de plus en plus lentement, comme si son corps était fait de plomb. Il se sentit vaciller, et son épaule rencontra brutalement le mur de droite. Alors qu'il cherchait désespérément à reprendre sa respiration et poursuivre sa marche indécise, ses membres ne lui répondirent plus.
Bouge.
Ses jambes cédèrent sous son poids. Il sentit son épaule frotter contre la paroi rugueuse du béton tandis qu'il se laissait glisser sur le sol.
Bouge ! Allez, bouge !
Il avait à présent l'impression que son corps était fait de coton et de guimauve. Il se sentait incapable de faire un seul geste. Le sédatif faisait effet.
Putain... Fait... Chier...
Les sons aux alentours devinrent diffus, indescriptibles, indiscernables. Comme si on lui avait mis la tête sous l'eau. Puis tout devint sombre.
Il ouvrit les yeux avec difficulté. Il était allongé sur un lit. Aussitôt il se redressa, les sens en alerte, prêt à en découdre. Mais la pièce était plongée dans l'obscurité, et il ne ressentait aucune présence autour de lui. Sa nature lui permettant de voir dans l'obscurité, il se concentra pour dilater ses pupilles et inspecter avec attention les alentours. Une armoire, une commode, une étagère remplie de livres, un bureau visiblement encombré par la paperasse. A première vue, il n'était pas dans une cellule de la FNAR. C'était déjà ça.
Repoussant les couvertures, il voulu sortir du lit quand un vertige l'assaillit, lui rappelant les raisons pour lesquelles il s'y trouvait. Il porta une main à sa tempe et se leva lentement avant de se diriger en titubant vers la porte
Merde... Soit je suis chez un des chiens des forces spéciales, soit le type qui a fait ça est un cinglé. Qui voudrait héberger volontairement un gars de mon espèce ?
Il s'immobilisa devant l'entrée, tentant de discerner une présence quelconque de l'autre côté, mais les lieux semblaient déserts. Tournant lentement la poignée, il entrouvrit la porte juste assez pour lui permettre de se glisser hors de la pièce. Il se retrouva dans un minuscule couloir, lui aussi plongé dans l'obscurité.
Après avoir refermé la porte derrière lui le plus doucement possible, il progressa à pas de loups dans le corridor sombre et aux murs nus, au fond duquel il pouvait percevoir une petite lueur qui semblait venir d'un étage inférieur. Après quelques pas, il regarda prudemment derrière le coin du mur, et vit un escalier qui descendait vers une pièce fortement éclairée. Aveuglé par la lumière, il cligna des yeux pour tenter de chasser les taches sombres qui apparaissaient sous ses paupières. Il n'avait vraiment pas l'habitude de progresser sous la lumière pure.
Il laissa quelques instants ses yeux s'habituer à l'environnement avant de descendre les marches, toujours à pas de loup. Il espérait pouvoir filer sans se faire remarquer, afin d'éviter les ennuis, et un nouveau carnage dans le pire des cas... Il n'était pas vraiment le genre de personne à se faire héberger par pur charité.
D'une part parce que la FNAR était à ses trousses et l'avait rendu tristement célèbre en placardant son visage dans tout le pays. Et puis, aux dernières nouvelles, il s'était effondré en plein milieu d'un quartier mal famé, non loin d'un massacre. Aucune personne saine d'esprit n'aurait été le ramasser dans un endroit pareil et encore moins dans une telle situation. Il fallait dire que son apparence attirait rarement la sympathie chez les autres, sauf auprès de ses congénères. Il avait donc tout intérêt à prendre la poudre d'escampette le plus rapidement possible.
Arrivé au milieu de l'escalier, il jeta un coup d'œil discret par-dessus la rampe pour inspecter les lieux. La pièce vers laquelle il descendait était étonnamment vaste par rapport à l'étage supérieur. Une vingtaine de tables étaient réparties dans la grande salle, et les chaises étaient retournées et posées dessus. Situé du côté latéral de l'escalier, un comptoir s'étendait tout le long du mur. Plus haut, des étagères était fixées contre ce mur, chargées de verres et de bouteilles diverses et variées.
Un... Bar ?
-Déjà debout ? T'es tombé du lit ou quoi ?
Il sursauta et tourna vivement la tête vers le lieu d'où la voix masculine s'était élevée. A droite de l'escalier, au fond de la pièce, il vit sa silhouette. L'inconnu tenait avec nonchalance un balais entre les mains, et avait la tête levée dans sa direction. Le traqué se demanda comment il avait pu ne pas détecter la présence de l'homme, avant qu'il ne remarque deux formes blanches dans le dos de son hôte. Des ailes.
Je vois... Un ange.
De toutes les créatures qui vivaient sur cette planète, les anges étaient ceux qu'il haïssait le plus. Ils étaient faibles, arrogants, et on leur laissait tout passer sous prétexte qu'ils étaient soit-disant charismatiques. Pire que tout, ils étaient de ceux qui étaient susceptible de balancer leur ami le plus proche simplement pour gagner les faveurs du gouvernement. Certains d'entre eux s'étaient d'ailleurs particulièrement bien intégrés à la politique. De vraies raclures.
L'esprit plein de mépris envers l'ange, le blessé le regarda avec intensité. Il fut néanmoins surpris de voir qu'il n'y avait aucune trace d'animosité dans ce regard d'un bleu pur. Il paraissait le voir comme un égal. Zoro en fut déstabilisé. Les hommes le traitaient comme de la gangrène, alors comment un fichu emplumé pouvait-il se comporter différemment ? Stupéfait, il continua son inspection, se demandant toujours s'il n'y avait pas anguille sous roche. Ses yeux perçants détaillèrent la moindre parcelle du corps de son hôte. L'ange était vêtu d'un tablier blanc, et semblait rayonner d'une douce lueur apaisante. Sa physionomie en elle-même traduisait un calme ahurissant pour la situation. Réalisait-il qu'il faisait face à un homme recherché ?
L'hôte, voyant que son convive ne bougeait toujours pas, reprit son balayage.
-Ça va faire quelques heures que je t'ai trouvé dans les vapes. Je ne m'attendais pas à ce que tu te remette sur pieds aussi rapidement après avoir reçu une telle dose de tranquillisants. T'es vachement résistant..
Le tueur serra les dents à l'énonciation de la fléchette dont les forces spéciales de la FNAR se servaient pour maîtriser les criminels. Cependant, le pourchassé ne parvenait pas à détacher son regard de l'ange. Pendant qu'il parlait, le blond se déplaçait avec légèreté dans la pièce, remettant une par une les chaises sur leurs pieds. Ses pas ne faisaient pas un bruit. Quelques fois ses ailes battaient doucement au rythme de ses déplacements, comme si elles avaient leur propre volonté et qu'elles brûlaient d'envie d'être utilisées. Cette espèce avait vraiment une putain de chance d'être dotée d'une telle capacité. Même un guerrier confirmé ne pourrait jamais atteindre un tel niveau de déplacement.
-Oi, au lieu de rester planté là comme un abruti, descends et pose tes fesses là-dessus.
L'ange lui faisait signe de s'asseoir sur un tabouret en bout de comptoir. L'interpellé cligna des yeux, surpris. Voilà un langage qui tranchait terriblement avec cette apparence douce et rayonnante de pureté. Il se reprit aussitôt , adoptant un air renfrogné et menaçant. Il n'avait pas du tout l'habitude qu'on le traite avec autant de familiarité.
-Qui c'est que tu traites d'abruti, enfoiré ? Rétorqua-t-il tout en descendant le reste des marches et s'approchant de l'ange.
L'autre se tourna vers lui et le regarda s'avancer, sans bouger d'un millimètre.
-Tu vois quelqu'un d'autre ici ? Répondit le blond avec ennui
Face à l'insolence de l'ange, le criminel sentit son sang bouillonner en lui. Ses gênes reprenaient le dessus, et lui procurait une furieuse envie d'en découdre avec son hôte, qui faisait preuve d'une fierté agaçante. Il avait envie de le détruire de ses propres mains, et son instinct de tueur lui ordonnait de déplumer cet oiseau de malheur. Mais sa raison quant à elle, lui demandait de se calmer et de quitter ce lieu avant d'être repéré par les forces spéciales. Il n'avait que trop traîné dans les parages. Le télétransmetteur lui revint en tête, et l'urgence de la situation l'intima à se calmer. Inspirant profondément, il tenta de faire le vide en lui.
-Je perds mon temps... Finit-il par marmonner avant de se détourner.
Il avait presque atteint la porte lorsque l'ange lui dit d'une voix forte :
-Roronoa Zoro, chasseur de démon, et par ailleurs shinigami. Il semblerait que tu ais des ennuis avec les troupes de la Force Nationale Anti-Rébellion, n'est-ce pas ?
Le shinigami s'arrêta aussitôt, la main sur la poignée.
Nous y voilà...
Lentement, Zoro se retourna pour faire face à son interlocuteur. Celui-ci le regardait d'un air tranquille, appuyé avec nonchalance sur son balai, un air rusé peint sur le visage. De nouveau, le flot de violence qui habitait les veines du shinigami afflua à vive allure dans tout son corps. L'envie de tuer se fit de plus en plus forte, et il porta instinctivement une main à ses sabres.
-En effet... prononça-t-il d'une voix sombre, pourquoi, ça te pose un problème ?
Le sourire de l'ange se fit plus mystérieux, et son aura devint plus lumineuse encore. La créature paraissait faire exprès de provoquer son interlocuteur.
-Peut-être bien...
Aussitôt, la pièce s'emplit d'une atmosphère combative, et les deux êtres se regardèrent avec défi. Roronoa Zoro dégaina un de ses sabres et jaugea rapidement son adversaire. Derrière cette gueule d'ange se cachait un ennemi qui en savait déjà beaucoup trop. Il avait cru au premier abord avoir affaire à un être innocent et insignifiant, mais les propos qu'il avait utilisé indiquaient clairement le contraire.
Ce type avait l'intention de le balancer à la FNAR, si ça n'était pas déjà fait. Il fallait qu'il en finisse, et vite. Brusquement, il s'élança à une vitesse ahurissante vers l'ange, et abattit son sabre sur lui. Mais au moment où la lame allait atteindre l'ennemi, celui-ci disparu, comme s'il n'avait été qu'un mirage. Le shinigami eut tout juste le temps de lever la tête pour voir que son adversaire se trouvait au-dessus et qu'il s'apprêtait à lui fendre le crâne d'un violent coup de pied. Il réussit à parer le coup in extremis avec son bras droit, et il sentit sa puissance résonner dans son corps tout entier. La surprise laissa place à l'ahurissement.
Pas mal, pour un maudit piaf.
Le shinigami ne perdit cependant pas une seconde et donna un nouveau coup de sabre, qui ne rencontra que de l'air. L'ange lui avait de nouveau échappé d'un rapide coup d'aile, et se tenait dorénavant devant lui, un sourire moqueur sur ses lèvres. Tandis qu'il foudroyait son adversaire du regard, le guerrier ne pu s'empêcher d'éprouver une certaine admiration envers la puissance dont il faisait preuve. Le talon de l'ange lui avait presque broyé le bras.
Comment une créature censé être aussi faible peut-elle porter de tels coups, juste avec son pied? Ce type est pas normal...
La colère du départ laissa place à un intérêt particulier, et son instinct refit surface. Il ne désirait plus se battre simplement pour réduire un gêneur au silence. Il voulait se battre pour voir ce qu'il avait dans le ventre, pour étudier ses mouvements lestes et d'une rapidité ahurissante. Il lui fallait décortiquer ce style de combat qui alliait puissance, adresse et légèreté...
Au moment où Zoro allait s'élancer sur son opposant, quelqu'un se mit à tambouriner sur la porte. Surpris, les deux combattants tournèrent la tête à l'unisson vers l'origine du vacarme.
-On est fermé ! Lança l'ange en direction de la porte, revenez demain !
-Ouvrez ! Au nom du Grand Pacificateur !
A l'énonciation du chef de l'Etat, Zoro jura silencieusement. Il était dans une merde noire. Mais il n'eut pas le temps d'esquisser un geste, qu'une main s'empara de la sienne et l'attira derrière le comptoir. Abasourdi, le shinigami regarda l'ange avec des yeux ronds tandis que celui-ci l'intimait d'un geste silencieux de descendre par une trappe dissimulée sous le tapis.
-J'arrive, j'arrive ! S'exclama-t-il alors qu'il foudroyait Zoro du regard, l'intimant de s'exécuter.
De son côté, le guerrier ne comprenait plus rien. L'adrénaline était retombée si violemment que son esprit combatif ne suivait plus. Il était comme un enfant interrompu en pleine bagarre et qui regardait ses camarades en demandant :« Ben alors ? On joue plus ? ». Voyant qu'il ne bougeait toujours pas, l'ange perdit patience et ouvrit d'un coup de pied la trappe avant de pousser le bretteur dans l'ouverture et de la refermer sur lui. Prit de court, Zoro tomba sur le dos, et l'atterrissage sur le sol dur et rugueux lui arracha une grimace de douleur.
Après s'être remis de ses émotions, il se redressa vivement avec la ferme intention de faire avaler ses propres plumes à cet ange de malheur, mais s'immobilisa presque aussitôt. Il pouvait entendre les soldats des forces spéciales se déplacer au-dessus de lui. Dégainant ses sabres, il se préparait d'ores et déjà à un combat sans merci, quand les paroles qui retentirent dans la pièce le laissèrent muet de stupeur.
-Que faites-vous ici ? Demanda la voix tranquille de l'ange, vous n'avez rien à faire dans mon bar, à moins que vous ne vouliez prendre un verre...
-Roronoa Zoro a été aperçu dans les parages! L'interrompit une autre voix, et si tu n'étais pas au courant, il a été ordonné de le capturer mort ou vif ! L'as-tu vu ?
-Quand on demande quelque chose, il faut savoir proposer autre chose en échange... Répondit l'ange avec cynisme.
Il y eut de nouveaux bruits de pas, et un coup sourd retentit.
-Te fous pas de ma gueule, l'ange ! Gronda la voix de l'inconnu, c'est pas parce que t'as une belle trombine que tu peux te permettre de me parler sur ce ton ! Crache le morceau ! Tu sais quelque chose oui ou merde ?
-Vous fatiguez pas, chef, rétorqua une autre voix, il ne sait rien. Ça se saurait sinon. Ce meurtrier lui aurait déjà démonté la gueule s'il était passé par ici...
Il y eut un temps de silence, puis les pas s'éloignèrent du comptoir.
-Tu as raison, soldat. On perd notre temps...
La porte s'ouvrit de nouveau, et le bruit des bottes à crampons résonna au loin, révélant que les soldats se trouvaient de nouveau dans la rue.
-Si jamais t'as des nouvelles de Roronoa, ajouta le supérieur, souviens-toi de moi.
La porte se referma sur les éclats de rire des soldats. Il y eut un temps de silence, puis un bruit de raclement, comme si on relevait quelque chose, et des pas retentirent juste au-dessus de la tête du shinigami. La trappe s'ouvrit doucement, illuminant la planque dans laquelle avait été laissé de force le bretteur. Ce dernier, encore abasourdi par la scène, sortit sans rien dire de sa cachette. Les yeux sombres de Zoro s'agrandirent de stupeur alors qu'il regardait celui qui l'avait couvert : une trace étrange était légèrement visible sous les mèches de cheveux de l'ange. Ce dernier ne semblait d'ailleurs pas s'en préoccuper, se contentant de sortir un paquet de cigarettes de la poche de son pantalon. Il s'en alluma une tranquillement et souffla une bouffée de fumée en fermant les yeux, l'air apaisé.
-Ils ne devraient pas revenir de sitôt, dit-il en le regardant fixement. Tu devrais avoir la paix pour quelques temps...
Une vague de fureur envahi le shinigami tandis que ses yeux sombres restaient rivés sur l'hématome qui se formait sous l'œil gauche de l'ange. Cela expliquait le coup sourd qu'il avait entendu auparavant : le type de la FNAR avait dû le frapper. Tandis que le blond reprenait son balai pour le ranger, Zoro serra rageusement les poings. Ses cellules démoniaques tournaient à plein régime. Il avait VRAIMENT envie de lui casser la gueule.
Sans même s'en rendre compte, il traversa la pièce en quelques secondes et empoigna l'ange par le col. Ce dernier se contenta de le fixer sans broncher. C'est à ce moment-là que l'épéiste remarqua la forme étrange de ses sourcils, qui formaient une sorte de boucle. Les anges avaient-ils tous les sourcils bouclés ? Écartant ce fait étrange de ses pensées, Zoro se concentra de nouveau sur sa fureur.
-Pourquoi t'as fait ça ? Grogna-t-il d'un ton menaçant, je t'ai rien demandé ! J'ai pas besoin d'aide !
L'ange lui rendit son regard haineux et écarta d'un geste sec le bras du shinigami.
-Ah ouais ? Rétorqua l'autre en tirant sur sa cigarette avant d'en souffler la fumée, c'est pas ce que j'ai cru comprendre en voyant ta carcasse malodorante commencer à pourrir devant chez moi.
Les pupilles ébènes se firent plus menaçantes encore, et une aura sombre se forma autour des deux créatures.
-Ne m'enterre pas aussi vite... Siffla le bretteur sur un ton de mise en garde.
-Pourtant, c'est ce que tu risques si tu continues à te frotter aux types de la FNAR...
A l'évocation des sans-visages, le shinigami poussa un reniflement dédaigneux.
-Je peux m'en charger seul sans aucun problème.
-Ah ouais ? Ricana l'ange en aspirant une nouvelle dose de nicotine, c'est pas ce qu'il m'a semblé voir tout à l'heure. J'avais plutôt l'impression que t'étais en train de délirer dans les méandres de la drogue anesthésiante...
Sa colère redoublée, Zoro s'approcha de l'ange dans le but de l'intimider, mais ce dernier ne bougea pas d'un pouce. Leur visage n'étaient plus qu'à quelques centimètres l'un de l'autre, et chacun pouvait sentir le souffle de l'autre.
-C'est toi qui va ressentir une certaine faiblesse après avoir goûté à mes sabres... Gronda-t-il en sortant un katana de quelques centimètres de son fourreau avec son pouce, saleté de canari !
-… Canari ? Répéta l'ange d'un air surpris.
Loin d'être intimidé, le blond éclata d'un rire cristallin qui déstabilisa complètement le bretteur. Quel son agréable. Il se surpris à ressentir un certain pincement au cœur. Depuis combien de temps n'avait-il pas entendu une chose pareille ?
- Tu crois que tu me fais peur avec tes petits couteaux ? Ajouta l'ange en croisant les bras sur sa poitrine, j'en manie des bien plus impressionnants que ça.
Zoro allait rétorquer, lorsque des coups sourds résonnèrent de nouveau contre le panneau de la porte d'entrée. Les deux hommes eurent à peine le temps de tourner la tête qu'un craquement sinistre retentit. Deux centièmes de secondes plus tard, la porte fut réduite en morceaux. Le shinigami allait sortir ses sabres, mais le blond l'en empêcha d'un geste.
-Attends, dit-il en s'avançant en direction des débris de bois, je reconnais ce type d'entrée fracassante...
Au même instant, tout une troupe pénétra dans la pièce principale, ne se souciant guère de ce qu'ils piétinaient, paillasson ou non. Zoro dénombra en tout sept personnes. Tous les nouveaux venus se tenaient juste sous le lustre de l'entrée, et la lumière excessive qui les éclairait altérait la vue du shinigami. Il dû se concentrer d'avantage pour modifier sa vision, et tandis que ses pupilles se rétractaient lentement, les silhouettes difformes devinrent peu à peu visibles.
-Sanji ! S'exclama bruyamment un jeune homme portant un curieux chapeau en paille, j'ai faim ! Fais-nous cuir de la viande !
Mais alors qu'il s'approchait d'une table pour faire basculer les chaises, une jeune femme habillée de manière exagérément provocatrice l'attrapa par le col de son tee-shirt et le secoua comme un prunier.
-Hé Luffy ! Répliqua la rouquine, je t'ai déjà dit de ne pas rentrer comme ça ! Il n'a pas que ça à faire de réparer tes bêtises !
-Mais Nami, j'ai faim moi !
Tandis que l'homme au chapeau de paille tentait de calmer les foudres de l'hystérique, un jeune garçon qui devait avoir à peine une quinzaine d'années se précipita en courant vers l'ange pour lui sauter dans les bras.
-Sannjiii ! S'exclama-t-il avec des yeux brillants. Devine quoi ! J'ai réussi ! Ça y est, je suis passé !
-C'est vrai ? Demanda le blond avec un grand sourire, félicitations ! Il faut fêter ça !
-C'est bien pour ça qu'on est là ! Ajouta le destructeur de portes avant de scander, un barbecue ! Un barbecue ! Un barbecue !
-Ferme-la ! s'exaspéra la dénommée Nami en lui frappant sur le crâne.
Des coups de marteaux retentirent derrière eux et soudainement, la porte retrouva sa position originelle. Le responsable de ce miracle de réparation était un homme gigantesque avec des cheveux bleus coiffés en banane. Faisant tourner un marteau entre ses doigts, il dressa un pouce victorieux vers ses spectateurs aux regards ébahis.
-Aw ! Réparation terminée ! S'exclama-t-il avec fierté
-Trop fort ! Hurla le gamin au chapeau de paille.
-Ah, merci Franky ! Fit l'ange blond, répondant au nom de Sanji.
-Sanji, interrogea le petit garçon aux cheveux châtains en montrant son hématome. Tu es blessé ? Que s'est-il passé ? Laisse-moi regarder !
Toute l'attention du groupe fut dirigée vers la-dite blessure du blond, qui la dissimula avec maladresse derrière ses mèches dorées.
-Ce n'est rien, ne t'en fais pas !
-Mais, Sanji...
De son côté, Zoro regardait avec perplexité le groupe d'humains qui entourait l'ange. Comment était-il possible qu'ils s'entendent aussi bien ? Le shinigami ne comprenait pas ce qui unissait ces personnes. Lui qui n'avait connu que l'insensibilité des membres de la FNAR, et les conversations formelles de ses frères d'arme, ce genre de relations lui était totalement étrangère. Qu'est-ce que ça leur apportait de toute manière ? Ça n'était certainement pas avec ce genre de dialogue enthousiaste que l'on se débarrassait de ses ennemis..
Complètement déstabilisé par cette bonne humeur ambiante à laquelle il n'était absolument pas habitué, le guerrier bourru voulu filer en douce. Mais au moment où il se retourna pour se faufiler par une quelconque porte de derrière, il se retrouva nez-à-nez avec un visage décharné. Stupéfait, Zoro recula précipitamment de quelques pas. Devant lui se tenait un homme squelettique, vêtu de vieux habits élimés. Il y avait quelque chose en lui d'effrayant, mais le shinigami ne savait si c'était à cause de ses cernes longues de dix centimètre ou de son énorme coupe afro. Une chose était sûre : ce type n'était pas humain.
Une goule... Ou un zombie.. Non, plutôt une liche. Aucune importance, ce truc est un démon, je dois le tuer...
Son sang démoniaque afflua de plus en plus rapidement dans ses veines, et l'envie de trancher cette chose commença à poindre dans son esprit. Alors qu'il portait une main à ses sabres, l'impensable arriva. Le démon ouvrit sa bouche démesurée.
-Yohohohoho ! S'exclama-t-il tout en ôtant son chapeau pour saluer le guerrier à cape noire, ravi de faire votre connaissance cher monsieur ! Seriez-vous un nouveau membre du groupe ? Veuillez m'excuser pour mon impolitesse, mais à cause de mon absence prolongée nous n'avons visiblement pas été présenté...
Ébahi, le shinigami regarda l'être étrange avec des yeux exorbités. Comment pouvait-il parler ? Les démons n'étaient pas dotés de parole ! Stupéfait, Zoro n'eut cependant pas l'occasion de répondre, l'ange venait de poser sa main sur le bras qui était paré à dégainer.
-Ne t'inquiète pas, Brook, le rassura Sanji avec un sourire, ce gars n'est pas avec nous, tu n'es pas encore sénile.
-Vraiment ? Demanda l'autre en écarquillant les yeux, ce qui lui faisait un visage plus terrifiant encore, mais alors que fait-il ici ?
Du coin de l'œil, le shinigami put voir que les autres l'observaient silencieusement. L'un d'entre eux, à savoir le plus jeune, le fixait d'un air particulièrement inquiet. Remarquant l'anxiété du garçon, la rouquine lui tapota doucement l'épaule et lui fit un pauvre sourire. Le gamin leva la tête vers elle, et Zoro vit deux perles de rosée couler le long de ses petites joues. Le shinigami comprit que le gamin était en train de pleurer, acte étrange que seuls les humains avait la capacité d'effectuer. Ses yeux ébènes se focalisèrent sur le petit être chagriné, s'interrogeant sur ce qui avait pu provoquer cette réaction.
Les seules fois où je vois un humain pleurer, c'est juste avant que je ne le tue... Est-ce que ça veut dire que je dois tuer ce gamin ? Mais pour quelle raison ? Est-ce que c'est parce qu'il va m'attaquer ? Parce qu'il sait quelque chose sur moi ? Oui, c'est sûrement ça, il sait quelque chose. Il va prévenir les troupes spéciales...
Déterminé à assurer sa propre sécurité, il se demanda tout de même s'il devait le supprimer à l'instant, devant tout le monde, ou s'il devait attendre d'être dehors une fois séparé.Son regard méfiant embrassa la petite communauté qui lui faisait face, ne sachant pas quelle attitude adoptée. Il était mal à l'aise. Il avait l'impression d'étouffer dans cette pièce pleine d'inconnus et excessivement éclairée.
L'ange sentit la nervosité du bretteur et se tourna vers ses amis, leur offrant un sourire apaisant.
-Et si vous vous asseyez ? Demanda-t-il tout en passant derrière le comptoir. Il faut fêter la réussite de Chopper à son concours!
-Ouais ! S'exclama le prénommé Luffy en sautillant sur place. Je veux de la viande et des grillades !
-Abruti, s'énerva de nouveau la rousse. Il ne va pas te faire des grillades à 5 heures du matin !
-Mais j'ai faim moi !
L'enthousiasme de l'homme au chapeau de paille eut vite fait de détendre l'atmosphère, et tout le monde se dirigea vers le comptoir tandis que Sanji sortait des verres. L'homme gigantesque à la banane bleue, voyant qu'il ne réagissait toujours pas, se dirigea vers Zoro, qui l'avisa avec méfiance. Il avait vraiment dû utiliser une tonne de gel pour donner une telle forme à ses cheveux. Les deux hommes se fixèrent longuement, étudiant le comportement de l'autre. Après quelques secondes d'échange silencieux, le géant à la coiffure étrange prit la parole :
-Dis-moi mec, t'as pas vraiment l'air d'être habitué à boire...
Pris au dépourvu, Zoro ne répondit pas tout de suite. Il ne voyait pas où il voulait en venir. Le dénommé Franky avait l'air sérieux, et ne paraissait pas avoir d'intentions malveillantes. Cela ressemblait presque à un défi. Un défi pour savoir lequel des deux était un homme, un vrai. Le shinigami sentit son sang bouillir. Après tout, les challenges lui permettaient de vivre chaque jour pleinement. Se désintéressant totalement de sa cible, il avisa d'un air fier son nouvel adversaire.
-... Tu paries ? Finit-il par dire en lui lançant un sourire narquois.
Les dés étaient jetés. Aussitôt, les deux hommes se joignirent à la troupe et commandèrent une ligne de cinq shots pour commencer la soirée sur les chapeaux de roues. Après avoir fini à égalité, ils ralentirent la cadence pour pouvoir prendre le temps de parler .
Au départ, Zoro ne faisait qu'écouter avec désintérêt le flot de paroles de Franky, au sujet de son métier de charpentier. Au fil des verres, le bretteur commençait à prendre plaisir à cette nouvelle compagnie. Il finit par même s'intéresser aux autres personnes présentes dans la pièce. La momie ambulante était en fait un véritable humain, un musicien qui avait été enfermé pendant plusieurs mois en prison pour cause de « musique contraire à l'idéologie du gouvernement ».
Il venait tout juste d'être libéré, et le fait qu'il soit un peu à l'ouest pouvait s'expliquer par le type d'incarcération qu'il avait subit : seul dans une cellule plongée dans l'obscurité, avec tout juste à boire et à manger pour survivre, et pour seul loisir des heures de tortures hebdomadaires. Pourtant en cet instant, il était en train de boire gaiement en éclatant régulièrement de son rire particulier. Heureux sont les imbéciles...
Pour ce qui était du jeune Chopper, qu'il avait surveillé du coin de l'œil toute la soirée, il venait tout juste de réussir son concours d'entrée au « laboratoire supérieur de traitement des maladies infectieuses et épidémies rares ». Un hospice de bras cassés quoi.
-Mais certains gamins de sa promo étaient jaloux, ajouta-t-il d'un air sombre, je leur ai donc appris les good manners, si tu vois c'que j'veux dire...
L'homme fit craquer ses jointures pour imager ses dires, et Zoro ne pu empêcher un sourire naître sur ses lèvres. Il aimait bien ce type. Il reporta son regard sur le gamin, et remarqua que son air attristé avait disparu. Son comportement étrange pouvait sûrement être expliqué par sa récente promotion, qui avait du l'émouvoir. Zoro ne prêta plus attention au gamin.
Il y avait aussi cette rouquine et cet imbécile apparent qui étaient visiblement en couple, même si la fille passait son temps à corriger le chapeau de paille. Mais Franky ne s'attarda pas sur eux, et préféra pointer de son gros doigt de charpentier, une femme aux cheveux noirs de jais que Zoro n'avait pas remarqué tant elle s'était faite discrète.
-Et elle, c'est ma wife ! Elle est super canon, hein ?
Intrigué, le bretteur l'inspecta d'un coup d'œil rapide. Silhouette fine aux formes généreuses, cheveux longs et fins descendant jusqu'à la taille, un air mystérieux de peint sur le visage. Ses yeux bleus reflétaient une intelligence déroutante. Pour un humain, on pouvait effectivement dire qu'elle était une bombe. Mais pour lui, un shinigami, rien de tout cela n'avait de sens. La seule chose qui attirait son intérêt, c'était le soin qu'elle prenait pour parler assez doucement pour que seul Sanji ne l'entende. L'ange avait d'ailleurs un visage très sérieux tandis qu'il écoutait avec attention l'étrange femme.
Le shinigami ne put avoir le loisir d'espionner plus longtemps leur conversation, car à cet instant la jeune femme le remarqua et lui fit un petit sourire. Pris sur le fait, Zoro détourna précipitamment la tête, gêné de s'être fait repéré. Il attendit quelques secondes avant de leur lancer un regard en coin, mais la discussion entre eux semblait close. Sanji était en train de faire cuire des grillades pour le gros gourmand, et la femme écoutait le musicien chanter la complainte qu'il avait composé en prison. Toujours méfiant, le guerrier fut cependant détourné de ses pensées par un nouvel arrivage de boisson. Il ne s'intéressa plus à la femme. L'alcool passait avant tout...
Une demi-heure plus tard, le baraqué à la banane bleu était déjà bien entamé, et ses bavardages devenaient de moins en moins logiques...
-Toi, t'es mon pote, s'exclamait-il, les yeux embués par l'alcool, tout en donnant des bourrades dans l'épaule du shinigami. Jamais personne n'avait réussi à me suivre aussi loin !
-Rien de bien étonnant... Commenta Zoro en lorgnant avec dédain sur les verres de jus de fruit du jeune Chopper et du chapeau de paille.
-Ouais, c'est des gamins, ils ne font pas le poids face à notre virilité d'homme ! Approuva l'autre avant de tendre son énorme main. Moi c'est Franky mec !
Le shinigami regarda la main tendue avec hésitation. Bien que son apparence était inconnue du public, son nom l'était bien moins. Mais d'un autre côté, il avait bien profité de la soirée. C'était un prix à payer pour avoir descendu une demi-douzaine de bouteilles d'alcool fort...
-Zoro. Finit-il par dire en lui serrant la main.
A la mention de ce nom, Franky ouvrit grand les yeux, l'air admiratif, prenant de court le criminel.
-T'es sérieux mec ? Wow, je suis face au SUPER shinigami ? Sanji ! Ajouta-t-il en lui faisant signe à l'autre bout du comptoir, sors-nous une autre bouteille ! 'Faut fêter ça !
Effaré, Zoro le regarda ouvrir une nouvelle bouteille et lui servir un verre généreux de saké. Bien vite, l'odeur fortement alcoolisé lui fit oublier sa surprise, et il vida sa coupe d'un trait. Le saké avait de très bonnes vertus diplomatiques. Certains politiciens devraient en consommer bien plus souvent...
Lorsque la pendule murale afficha sept heures du matin, les camarades décidèrent qu'il était temps de rentrer. Luffy et Nami furent les premiers à quitter le bar, la rousse traînant le chapeau de paille hors de la pièce avec des poings menaçants. De son côté, Chopper dormait à poings fermés sur le comptoir, la tête entre les bras, après avoir accepté de boire un verre de la part de Franky. La jeune femme aux cheveux noirs de jais, qui était restée étonnement silencieuse pendant le reste de la soirée, le réveilla doucement en lui secouant le bras. Le jeune promu ne fit que grogner dans son sommeil, sans bouger d'un pouce. Voyant cela, Franky le prit doucement dans les bras et le porta jusqu'à la porte de sortie, l'étrange femme sur ses talons.
Le shinigami les regarda partir avec un sentiment particulier. Un étrange vide se formait dans sa poitrine, comme si on lui avait retiré des organes. Un brusque sentiment de nostalgie s'empara de lui, sans qu'il ne sache pour autant ce qu'était que « la nostalgie ». Ça ne lui ressemblait pas. Quelque chose clochait chez lui depuis quelques heures. Depuis quand était-il devenu sociable ? Depuis quand était-il capable de ressentir ces choses ? Il croyait pourtant n'être plus capable de sentir quoi que ce soit depuis bien longtemps...
-Je n'aurais jamais cru que tu te soit aussi bien intégré à la bande. Commenta le barman aux cheveux clairs avec un sourire. Moi qui te prenais pour une sorte de robot insensible... Bien que j'en connaisse un qui fasse exception à la règle...
-Franky, hein ?
-Ah, t'avais remarqué ? Demanda Sanji avec surprise. Pas mal, pour un gothique...
-Où tu vois un gothique ? Grogna le concerné en lui lançant un regard mauvais.
L'ange laissa échapper un petit rire, tout en passant un coup de chiffon sur le comptoir pour nettoyer les quelques gouttes d'alcool qui y étaient tombées.
-Robin m'a dit que tu pourrais sortir d'ici aux alentours de dix heures.
-Qui ça ?
-La beauté aux cheveux noirs de jais.
…Alors comme ça ils parlaient de moi...
-Il paraît que le Grand Pacificateur va faire un défilé surprise avec son armée dans les rues de la ville, pour exposer sa puissance. Ajouta le blond en commençant à nettoyer les verres.
Suspicieux, Zoro le regarda en fonçant les sourcils.
-Comment peut-elle le savoir, si c'est un défilé surprise ?
-Elle travaille dans les bureaux du gouvernement.
Brusquement, le shinigami se redressa de sa chaise et attrapa le col du blond par-dessus le comptoir.
-Tu veux dire qu' un chien du gouvernement se trouvait dans cette pièce ?
-Relax. Rétorqua Sanji en le regardant d'un air blasé, elle est avec nous.
Pas rassuré le moins du monde, Zoro le foudroya du regard, raffermissant sa prise.
- « Nous »? C'est quoi ça ? Qui c'est ce « nous »?
- Tous ceux qui étaient présents ici. « Les mugiwaras ».
Le nom résonna dans la pièce vide. Le shinigami regarda avec stupeur le barman, afin de voir s'il se fichait de lui. Les Mugiwaras était un groupe de rebelles à l'origine d'attentats et d'autres actes illégaux dirigés contre le gouvernement. Zoro les avait toujours pris pour une bande d'illuminés naïfs, car personne ne pouvait rien contre le gouvernement. Mais ils avaient les couilles de le faire, et ça, le guerrier l'appréciait.
Relâchant lentement l'ange, il plongea ses yeux ébènes dans les saphirs de son interlocuteur. Un ange. Un androïde gigantesque. Un gamin bossant pour « médecins sans frontière ». Un affamé avec une grande gueule. Une hystérique avec une gueule encore plus grande. Un sac d'os légèrement siphonné du ciboulot. Une asociale bossant pour le gouvernement. C'était une équipe très... Particulière.
Zoro s'apprêtait à poser d'autres questions, lorsqu'il sentit son télé-transmetteur vibrer dans sa poche. Il le sortit fébrilement, se maudissant d'avoir oublié ce détail important et regarda avec appréhension l'écran. Trois alertes. « Quittez la ville ». C'était TRES mauvais.
-Merde ! S'exclama-t-il en se détournant brusquement pour prendre la porte.
Il s'arrêta cependant au moment où il l'ouvrait, et se retourna, posant son regard sur l'ange. C'était peut-être la dernière fois qu'il le voyait. Sûrement même. A nouveau, il sentit un profond vide dans sa poitrine, comme s'il s'était pris un rayon laser des sans-visages de plein fouet. La nostalgie l'envahit, et il se demanda pour la seconde fois dans la soirée ce qui pouvait lui manquer à ce point pour que ça lui fasse aussi mal. Pour la première fois depuis qu'il s'était éveillé en shinigami, le passé qui lui était inconnu semblait vouloir se manifester en lui. C'était étrange, et douloureux. Il ne savait pas s'il voulait vraiment se souvenir de ce qu'il était AVANT. Mais une chose était sûre : le mur s'effritait.
-... Heu... Merci... Enfin, je suppose... Balbutia t-il en se rendant compte qu'il fixait l'ange depuis quelques secondes sans rien dire.
Le blond lui fit un sourire rayonnant et un bref signe de la main en guise de réponse.
-A un de ces quatre !
Zoro lui adressa un léger signe de tête et sortit. Tandis qu'il cherchait un endroit couvert pour se dissimuler en attendant dix heures, le visage de l'ange lui revint en tête.
« A un de ces quatre »... Stupide emplumé, comme si j'allais revenir...
Mais tandis qu'il marchait avec rapidité, il sentait en lui une certaine hésitation. Comme si quelque chose en lui faiblissait. Il avait l'impression qu'il serait plus ardu que ça de ne pas céder à la tentation. Il avait déjà envie de revenir dans ce bar. Les rires, les conversations, les sourires de cette bande. Tout cela lui manquait déjà. La nostalgie... Était-ce ça qui l'avait produite ? Le télé-transmetteur vibra de nouveau dans sa poche, et Zoro décida de mettre ça de côté, accélérant l'allure. Il fallait qu'il retourne à la planque.
[1] Pour ceux qui n'ont jamais joué à GTA ou autres jeux-vidéo de guerre ou d'action, un jet-pack ressemble à une sorte de sac à dos équipé de deux petits réacteurs, permettant ainsi à l'utilisateur de s'élever dans le firmament~
[2] Héros de la mythologie grecque qui s'était accroché des ailes en cire dans le dos. Le pauvre garçon s'est écrasé dans la mer, après que ses ailes aient fondues en volant trop près du soleil... (cf. l'Encyclopédie Universelle du Savoir Absoolu - ouioui, avec 2 "O"- pour plus d'infos sur le mythe !)
Merci à toutes et à tous de me laisser une mini review~ Ça me ferait beaucoup plaisir!
Pour les plus fainéants, un simple "merci", m'encouragerais beaucoup pour écrire la suite, juste histoire de me montrer que vous m'avez lu et que vous souhaitez en voir d'autres! 3
