Note de l'auteur : J'ai eu l'idée de cette histoire il y a quelques temps déjà. J'ai les lignes directrices en tête, mais je ne sais pas encore exactement où tout cela va me mener.

Tout ce que vous reconnaissez appartient bien entendu à JK Rowling. En fait seul le personnage d'Isis m'appartient. J'ai emprunté quelques passages des livres, pour donner un côté plus "réel" à l'histoire.

Toute critique constructive, remarque, idée ou je ne sais quoi est plus que la bienvenue.

1. Etranges découvertes.

Isis Fairfax se doutait bien que la plupart des enfants de son âge n'attendait plus que leurs pères viennent leur raconter une histoire pour enfin s'endormir, mais peu lui importait. C'était devenu une sorte de rituel entre eux ; une fois qu'elle avait fini de manger, elle montait se préparer pour la nuit, sélectionnait un livre, et attendait que son père ait fini de ranger la cuisine et la rejoigne dans sa chambre pour lui raconter une histoire. Aujourd'hui, elle avait choisi le livre de JM Barrie, Peter Pan. Depuis qu'elle avait découvert cette histoire, elle espérait secrètement qu'un jour Peter vienne frapper à sa fenêtre, et l'emmène avec lui au Pays Imaginaire, pour qu'elle puisse commencer une nouvelle vie. Bien sûr, ce n'était pas comme si elle était malheureuse, mais au fond d'elle-même elle sentait que cela aurait pu être beaucoup mieux. Elle jeta un coup d'œil à son réveil. Qu'est-ce qui prenait autant de temps à son père ce soir ? Elle l'avait pourtant aidé à débarrasser la table, il ne lui restait qu'à faire la vaisselle. Alors qu'elle allait descendre pour le chercher, ce dernier fit irruption dans sa chambre.

-Ah, Papa, pourquoi tu as mis aussi longtemps ?

-Isis, écoute-moi, tu vas rester là jusqu'à ce que je vienne te chercher, d'accord ?

-Oui mais mon histoire…

-Isis ma puce, écoute je suis désolé mais il n'y aura pas d'histoire ce soir. Tu dois me promettre que tu vas rester ici, sans faire de bruit, jusqu'à ce que je vienne te chercher, d'accord ?

Isis sentait bien que son père lui cachait quelque chose, mais surtout, elle sentait que ce soir elle ne devait pas protester, et simplement faire ce que son père lui demandait. Il semblait assez inquiet, ne cessant de jeter des coups d'œil suspicieux dans chaque recoin de sa petite chambre, du placard à la fenêtre, en passant par sa maison de poupée et son lit. De plus, il se passait frénétiquement la main dans ses cheveux grisonnants, chose qu'il ne faisait uniquement qu'en cas de stress.

-D'accord, je te le promets Papa.

-Bien. Et même si tu entends du bruit, je veux que tu restes bien cachée sous ta couette. Allez ma puce, ne t'inquiètes pas, je reviens très vite.

Et sur ces derniers mots, il lui embrassa le front, remonta les couvertures sur sa tête, éteignit la lumière, et sortit de la chambre en fermant la porte bien soigneusement. Elle l'entendit descendre les escaliers, puis le silence se fit dans la maison. Un sentiment d'inconfort la saisit alors, et sa respiration se fit plus saccadée. Elle savait qu'elle n'arriverait pas à dormir sans son histoire, et ce que lui avait demandé son père l'inquiétait beaucoup plus qu'elle ne l'aurait voulu. Dehors, le vent se leva soudainement, faisant frapper les branches du pommier du voisin contre sa fenêtre. Isis n'était pas sûre de pouvoir tenir la promesse faite à son père s'il se mettait à faire orage. Elle détestait l'orage plus que tout. Plus encore que les araignées, les serpents, le noir, les fantômes, et toutes ces autres choses effrayantes auxquelles elle ne préférait même pas penser.

Tandis qu'elle attendait anxieusement les premiers coups de tonnerre, elle entendit des voix provenant du rez-de-chaussée. Des voix inconnues. Elle n'arrivait pas à comprendre ce qui se disait, cependant elle se doutait que son père n'aurait pas apprécié si elle était allée se cacher dans les escaliers pour écouter. Mais après tout, ce qu'il ignorait ne pouvait pas lui faire de mal. Le sentiment de faire quelque chose d'interdit lui procura le peu d'adrénaline qui lui manquait pour passer à l'action. Elle repoussa ses couvertures, et avança le plus silencieusement possible jusqu'à la porte de sa chambre, qu'elle ouvrit tout aussi doucement. Ses pieds heurtèrent le carrelage froid du couloir mais elle n'y prêta pas attention. Elle atteignit enfin l'escalier et s'installa sur la dernière marche, d'où elle pouvait apercevoir une partie du salon ; bien qu'en vérité, elle n'apercevait qu'une partie du canapé, voyait un bout du tapis, et parvenait à peine à distinguer les contours de la porte d'entrée. Seul le feu qui brûlait dans la cheminée produisait de la lumière, et elle vit son père faisant face à deux hommes. La première chose qui la frappa fut le fait que ces d'hommes semblaient porter des espèces de capes par-dessus leurs vêtements, et qu'ils tenaient quelque chose dans leurs mains, pointés vers son père. Elle frissonna lorsque la première idée qui lui vint à l'esprit fut qu'il s'agissait sans doute de pistolets. Puis elle se ressaisit. Pourquoi deux hommes habillés avec une cape seraient en train de menacer son père dans son propre salon ? Elle reporta son attention sur la conversation. Même de là où elle était elle n'arrivait pas à saisir tout ce qui se racontait, mais elle savait très bien que si elle descendait de quelques marches son père l'aurait repéré depuis le salon. Elle arriva à saisir quelques bribes de la conversation : « tu nous as trahis », « très déçu », « pensait t'avoir prévenu », etc. Une trahison ? C'était impossible que son père ait pu commettre une chose pareille. S'il y avait bien une valeur qu'il lui avait inculqué, c'était la loyauté. Elle n'entendit pas la réponse de son père, mais il lui sembla que son visage devenait de plus en plus tendu, ses yeux noirs s'élargissant de plus en plus, lorsqu'elle vit soudain une espèce de lueur verte irradier le salon. Intriguée, elle se pencha un peu plus, et ce qu'elle vit lui coupa le souffle. Son père gisait en plein milieu du tapis, comme totalement pétrifié et les yeux grands ouverts. Les siens s'agrandirent alors d'horreur lorsqu'elle comprit ce qui venait de se passer.

-Pourquoi tu l'as tué idiot ! Il pouvait encore nous servir, le Maître le voulait vivant !

-La ferme Wilson, je le sais tout ça ! Aide-moi plutôt à rendre tout ça un peu plus crédible aux yeux des sang-de-bourbe ok ? Et dépêche-toi un peu !

Isis n'arrivait plus à bouger. Elle regarda ces deux hommes mettre son salon sans dessus-dessous en murmurant des paroles qu'elle n'arrivait pas à comprendre. Son cerveau n'arrivait pas à se remettre en route. Ces hommes venaient de tuer son père, sous ses yeux, et elle n'avait rien vu venir. Mais surtout, comment avaient-ils fait pour le tuer sans un seul bruit et sans laisser une seule trace sur son corps ? Ce qu'ils tenaient dans leurs mains n'étaient définitivement pas des pistolets. Et qu'est-ce que c'était que les sang-de-bourbe ? Elle n'eut pas le temps de réfléchir plus longtemps lorsqu'elle comprit ce que les deux inconnus étaient en train de faire. Ils mettaient le feu à sa maison ! Isis retrouva alors sa capacité de mouvement, et un cri s'échappa de ses lèvres tandis qu'elle se relevait précipitamment. Elle vit alors avec effroi les deux hommes se figer dans le salon et se retourner vers l'escalier où elle se trouvait encore. Elle ne put voir leurs visages car ils étaient tous les deux masqués, mais cela les rendait encore plus terrifiants.

-Merde la gamine ! Attrape-la !

Aussitôt, les jambes d'Isis se mirent à bouger toutes seules, et elle partit en courant dans le couloir. Elle entendit les hommes se lancer à sa poursuite, et elle savait qu'elle ne pourrait pas leur échapper. Elle entra dans la chambre de son père et décida de se cacher dans le placard. Elle se doutait que c'était inutile, mais au moins cela retarderait le moment fatidique. Elle entendit les pas se rapprocher, puis s'arrêter non loin de la porte de la chambre.

-Où est-ce qu'elle s'est caché ? Pourquoi tu ne l'as pas stupefixié ? On va perdre du temps à la chercher maintenant !

-On pourrait la laisser brûler avec la maison.

-Et prendre le risque qu'elle s'échappe ? On a déjà tué Fairfax, le Maître ne nous pardonnera pas si on laisse en plus filer un témoin !

Dans son placard, Isis tentait vainement de calmer sa respiration pour faire le moins de bruit possible, mais la panique commençait à la gagner. Pourquoi s'était-elle cachée dans un placard ? Il n'y avait qu'une seule façon de sortir d'ici, et c'était de se jeter dans les bras de ces deux inconnus. Des larmes commencèrent à couler sur ses joues sans qu'elle ne puisse les arrêter. Elle n'avait beau avoir que dix ans, elle savait très bien que ces hommes ne l'épargneraient pas.

Prise d'un soudain élan de panique, elle se mit à tâtonner frénétiquement contre les murs qui l'entouraient, à la recherche de n'importe quel objet susceptible de l'aider. Le fait de sentir la chaleur de plus en plus proche de l'incendie qui ravageait le salon ne l'aidait pas non plus à garder son calme. Alors que sa respiration devenait de plus en plus haletante, ce qui allait sans doute la faire repérer rapidement par l'un des deux hommes, elle mit les doigts sur quelque chose qui ressemblait à une… poignée ? Elle ne prit pas le temps de réfléchir au manque de logique de la situation, à savoir comment une poignée avait pu atterrir par magie dans ce placard, elle se rua vers l'ouverture pour se retrouver dans un autre placard, qu'elle reconnut comme étant celui de sa chambre. Elle savait très bien que c'était risqué d'en sortir maintenant, mais son subconscient lui soufflait que c'était ce qu'il fallait qu'elle fasse. Elle s'extirpa donc le plus silencieusement possible de sa cachette et courut vers sa fenêtre, d'où elle réussit à atteindre les branches du pommier sur lequel elle grimpa assez facilement du fait de sa petite taille, et sans doute aussi grâce à son faible poids. On aurait dit que la peur lui donnait des ailes, car lorsqu'elle sauta pour enfin retrouver la terre ferme, elle eut plus l'impression de flotter dans les airs que de réellement tomber. Sans jeter un seul regard à sa maison qui devait maintenant vraiment bien brûler elle se précipita chez ses voisins, en espérant que les deux inconnus masqués ne l'avaient pas vue s'enfuir.

Elle se jeta sur la porte d'entrée et se mit à sonner et frapper comme si sa vie en dépendait, ce qui, en fait, était un peu le cas. Mr Allen mit quelques minutes à venir ouvrir, et c'est avec un visage encore tout endormi qu'il découvrit la fille de son voisin sur le pas de sa porte au beau milieu de la nuit.

-Isis ? Qu'est-ce que…

Le visage strié de larmes d'Isis et son air affolé le réveillèrent alors tout à fait. Il tourna la tête vers la maison voisine et vit le feu qui la dévorait.

-Oh mon Dieu ! Ellen ! ELLEN !

Mrs Allen fit alors son apparition dans l'entrée, toute aussi endormie que son mari quelques secondes auparavant.

-Jack, que se passe-t-il ?

-Occupe-toi d'Isis, j'appelle les pompiers !

-Isis ? Jack ?

C'est alors que Mrs Allen aperçut à son tour l'incendie qui ravageait la maison des Fairfax. Elle baissa les yeux vers la petite Isis, qui ne pouvait s'arrêter de pleurer et tremblait de tout son corps.

-Oh grand Dieu ! Viens là Isis, viens.

Elle la conduisit à l'intérieur et tenta de la calmer. Mr Allen vint les rejoindre après avoir appelé les pompiers, ne sachant pas vraiment quoi faire de ses dix doigts. Il regarda sa femme tenter de calmer la pauvre enfant, et quelque chose de terrible le frappa.

-Isis…, demanda-t-il d'une voix blanche, Isis, où est ton papa ?

La pauvre éclata encore plus en sanglots, ce qui ne laissa plus aucun doute sur l'horrible issue de toute cette histoire. Mrs Allen se mit lentement à pleurer en serrant Iris contre elle, et Mr Allen ne cessait de se passer la main sur le visage en répétant « oh mon Dieu, oh mon Dieu ». On ne pouvait pas dire qu'il était très proche des Fairfax, mais ils avaient toujours été des voisins aimables et discrets, toujours prêts à rendre service et sans jamais rien demander en retour. Le genre de voisins qu'on aimait bien avoir en somme. Et puis Isis avait le même âge que leurs petits-enfants, et elle était le modèle même de la petite fille sage et polie que tout le monde adorait au premier coup d'œil. Ses adorables boucles blondes entouraient son visage joliment dessiné, et ses petits yeux gris complétaient ce magnifique tableau en y ajoutant une petite pointe de malice. De toute façon, c'était toujours aux gens biens qu'il arrivait des choses affreuses.

Les pompiers arrivèrent enfin, mais ils ne purent que constater les dégâts déjà faits par les flammes, et empêcher que l'incendie ne se propage aux autres maisons du quartier. Ce qui fut étrangement facile, la puissance du feu semblant s'être presque évanouie une fois la maison des Fairfax complètement détruite. Le corps de Mr Fairfax fut retrouver au milieu des décombres, et Mr Allen se porta volontaire pour aller reconnaître le corps ; ce que l'officier de police dépêché sur les lieux s'empressa d'accepter, une telle chose ne pouvant décemment pas être demandé à une petite fille de 10 ans. Dieu seul savait ce qu'elle avait dû endurer pour s'extirper de cette maison, il était inutile de lui rajouter des souffrances en plus de ces horribles souvenirs qu'elle garderait sûrement toute sa vie. Il fut aussi convenu qu'elle passerait le reste de la nuit chez les Allen, mais ils devraient la ramener le lendemain au poste de police, c'était malheureusement la procédure à suivre. Isis venait de perdre son père, son seul parent connu encore en vie, il ne faisait aucun doute qu'elle allait finir placer dans un orphelinat sous la bonne garde de l'Etat. Oui, définitivement, les choses les plus affreuses arrivaient toujours aux gens biens, pensa Mr Allen en allant se recoucher, et il ne put réussir à s'endormir après tous ces évènements.

Le lendemain matin, les Allen durent comme convenu amener Isis au poste de police, pour qu'un agent puisse lui poser quelques questions et que quelqu'un la prenne en charge.

-Bonjour Isis, je m'appelle Stanley, se présenta un jeune officier. Je sais que tu ne dois pas avoir très envie de répondre à mes questions maintenant, mais je suis obligé de te les poser, tu comprends ?

Isis hocha la tête.

-Bien. Alors est-ce que tu peux me dire exactement ce qui s'est passé hier soir, jusqu'à ce que tu ailles frapper chez les Allen ?

Isis ouvrit la bouche pour répondre au jeune homme qu'elle trouvait plutôt réconfortant, mais le fait d'être fixée par toutes les autres personnes présentes dans la pièce ne la mettait pas vraiment à l'aise, aussi elle s'arrêta avant même d'avoir commencé sa phrase. Heureusement, le dénommé Stanley sembla comprendre son malaise, et il l'entraîna dans un petit bureau inoccupé, qui selon lui serait plus propice à la mettre en confiance. Ce qui sembla marcher, puisqu'elle commença à lui raconter toute la soirée en détails. Il tiqua lorsqu'il entendit parler de capes, de sang-de-bourbe, et d'hommes masqués. Tout cela lui semblait quelque étrange, mais une chose était sûre, cet incendie était loin d'être un accident. Fairfax avait dû se retrouver dans une louche affaire, il avait sans doute voulu se retirer pour ne pas avoir d'ennuis, et ses anciens « amis » n'avaient probablement pas apprécié. Tout cela ne facilitait pas l'affaire. Il allait devoir mener l'enquête pour retrouver des hommes masqués et portant des capes noires, hommes qui, comme par hasard, s'étaient évanouis dans la nature. De plus, le nom de Wilson ne lui rappelait absolument rien, il faudrait qu'il fasse quelques recherches supplémentaires dans la base de données.

-Au fait Isis, tu ne m'as pas dit comment tu avais réussi à atteindre la fenêtre de ta chambre ?

La petite releva la tête et le fixa, apeurée.

-Ce n'est pas grave si tu ne te souviens pas exactement de tout. Tu devais être sacrément effrayée hein ? En tout cas, c'est un vrai miracle que tu ne te sois pas blessée en sautant de l'arbre. Tu vas sans doute devenir une petite championne d'escalade !

Isis tenta de lui sourire, mais cela sonnait faux. Elle ne savait pas exactement pourquoi elle ne lui avait pas parlé de l'épisode du placard et de la poignée sortie de nulle part. Elle avait eu le temps de repenser à ce qui c'était passé, et elle était certaine, absolument certaine, que cette porte reliant le placard de son père au sien n'existait pas auparavant. Elle avait suffisamment exploré tous les recoins de sa maison pour en être sûre. Et une petite voix lui soufflait que l'officier Stanley risquait de ne pas gober cette histoire. Lui, ni personne d'autre d'ailleurs. Elle décida donc de garder ce détail pour elle-même. Il lui posa encore une ou deux questions, puis il lui expliqua que maintenant Mrs Simmons allait prendre soin d'elle, et l'emmener dans une grande maison avec plein d'autres jeunes filles de son âge ; le temps qu'il fasse quelque recherche sur sa famille éloignée, afin de voir s'ils étaient réellement tous morts. Stanley la regarda partir, résignée, et il se dit que parfois, il détestait vraiment son métier. Pauvre petite. Et dire que dans deux jours elle allait avoir 11 ans…

-Joyeux anniversaire Isis !

Mr et Mrs Allen avaient décidé de lui rendre visite à l'orphelinat, tentant de rendre ce jour un peu moins triste ; mais Isis n'était pas vraiment réceptive à toutes leurs attentions. C'était son anniversaire, certes, mais il était loin d'être joyeux. Elle tenta malgré tout de faire un sourire à ses anciens voisins, et fit sembla de faire un vœu avant de souffler les bougies du gâteau au chocolat qu'ils lui avaient apporté. Elle savait qu'ils faisaient tous ces efforts pour lui faire plaisir, alors elle avait préféré ne pas leur dire que son père et elle ne fêtait jamais son anniversaire d'habitude. Elle fit aussi son maximum pour paraître ravie du cadeau qu'ils lui avaient acheté. C'était un très beau livre, Alice aux Pays des merveilles de Lewis Carroll, et Isis était sûre qu'elle aurait vraiment adoré ce cadeau s'il lui avait été fait un autre jour. Cependant, elle était touchée que Mr et Mrs Allen se souviennent de sa grande passion pour les livres, notamment tout ce qui se rapportait de près ou de loin à des mondes magiques. Elle n'avait pas vraiment envie de lire pour le moment, encore trop embuée dans ses souvenirs et ne parvenant pas à oublier cette horrible soirée, deux nuits plus tôt. Elle posa donc le livre dans un coin, et essaya de suivre la conversation de Mr et Mrs Allen.

Bien sûr, ceux-ci n'étaient pas dupes et voyaient bien que la petite était loin d'apprécier cette journée, mais après tout, qui aurait pu lui en vouloir ? Elle n'avait que 11 ans et avait déjà perdu tous les membres de sa famille. S'ils avaient été un peu plus jeunes, Mr Allen était certain que sa femme aurait insisté pour qu'ils accueillent Isis chez eux, au lieu de la laisser grandir dans cet orphelinat, mais malheureusement, ils avaient tous les deux passé la soixantaine, et il n'était pas sûr que s'occuper d'une fillette de 11 ans soit encore dans leurs cordes.

Lorsque l'après-midi fut bien entamé, ils décidèrent qu'ils avaient fait tout leur possible pour tenter de distraire Isis, et ils la quittèrent donc, en lui promettant de revenir la voir le plus tôt possible. Cette dernière se contenta d'acquiescer et de les remercier pour le gâteau et le livre ; et une fois qu'ils furent partis, elle retourna s'asseoir sur son lit, d'où elle pouvait apercevoir tout ce qui se passait dans la rue. Dehors, le temps était gris, et il menaçait de pleuvoir. Isis soupira. Son regard se porta dubitativement sur sa petite chambre. Celle-ci était simplement meublée d'un lit, d'une petite armoire et d'un bureau, et les murs étaient peints d'une couleur gris clair, ce qui ne donnait pas un rendu très joyeux. On était bien loin de sa chambre aux couleurs chaudes, rouges, orangées et jaunes ; avec mille et un voiles pour créer une ambiance un peu mystique, et surtout, son immense bibliothèque lui manquait. Elle se demandait ce qu'elle allait bien pouvoir faire pour s'occuper un peu l'esprit, lorsqu'on frappa à la porte de sa chambre. Miss Davis, la responsable de son étage, passa sa petite tête joufflue à l'intérieur.

-Tu as de la visite Isis. On dirait que pas mal de gens ont pensé à toi pour ton anniversaire !

Isis la regarda étonnée. Elle ne voyait pas vraiment qui d'autre que les Allen aurait pu venir la voir. Peut-être l'officier Stanley ? Mais lorsque Miss Davis s'effaça pour laisser entrer son visiteur, Isis fut encore plus surprise. Devant elle se tenait un homme assez âgé, avec une barbe grise qui descendait jusqu'à sa poitrine, et de longs cheveux gris-blancs. Il portait des lunettes en forme de demi-lunes, qui était posées sur son nez aquilin. Il était aussi vêtu d'une façon un peu étrange. Enfin, étrange n'était pas le mot qui convenait. On aurait simplement dit qu'il ne savait pas vraiment associer ses vêtements. Ou alors peut-être que cela était une nouvelle mode, Isis n'en savait vraiment rien. Le visiteur attendit que Miss Davis les laisse en refermant la porte pour commencer à parler.

-Bonjour Isis, je m'appelle Albus Dumbledore.

Elle ignorait pourquoi, mais le sourire que lui adressa le vieil homme en cet instant la mit totalement en confiance, et elle se sentit tout de suite à l'aise. Elle fut même capable de répondre à son sourire, sans trop se forcer.

-Bonjour.

-Cela ne te dérange pas si je t'emprunte cette chaise pour m'asseoir ?

-Non, bien sûr, allez-y.

Il s'assit donc en face d'elle, et la fixa un instant sans parler, comme s'il cherchait les bons mots.

-Tu n'aimes pas qu'on te souhaite un bon anniversaire, je me trompe ?

Elle le fixa à son tour, surprise.

-Non, c'est vrai. On ne fête jamais mon anniversaire, d'habitude.

-C'est bien ce que je pensais. Néanmoins, cette année ton anniversaire est particulier. Pas seulement à cause de ce qui est arrivé à ton père, et j'en suis d'ailleurs profondément désolé, mais aussi parce que cette année, il est de mon devoir de te remettre ceci.

Et il lui tendit une enveloppe sur laquelle on pouvait lire « Miss Isis Fairfax, Orphelinat Thompson et Thomas, Chambre 106, Londres ». Elle leva les yeux vers son interlocuteur, intriguée, et celui-ci se contenta de lui adresser un sourire mystérieux. Elle se dépêcha donc d'ouvrir l'enveloppe et de lire l'adresse qu'elle contenait.

COLLEGE POUDLARD, ECOLE DE SORCELLERIE

Directeur : Albus Dumbledore, Commandeur du Grand-Ordre de Merlin ; Directeur ès Sorcellerie, Enchanteur-en-chef, Manitou suprême de la Confédération internationale des Mages et Sorciers.

Chère Miss Fairfax,

Nous avons le plaisir de vous informer que vous bénéficiez d'ores et déjà d'une inscription au collège Poudlard. Vous trouverez ci-joint la liste des ouvrages et équipements nécessaires au bon déroulement de votre scolarité.

La rentrée étant fixée au 1er septembre, nous attendons votre hibou le 31 juillet au plus tard.

Veuillez croire, Miss Fairfax, en l'expression de nos sentiments distingués.

Minerva McGonagall

Directrice-adjointe

Lorsqu'elle eut fini sa lecture, Isis releva les yeux vers son visiteur qui, si l'on en croyait la lettre qu'elle tenait entre ses mains, n'était autre que le directeur d'une école de sorcellerie.

-C'est une blague ?

Albus Dumbledore la regarda d'un air bienveillant avant de rire légèrement.

-Je ne sais pas pourquoi, mais je m'attendais à ce genre de question. Ce n'est pas une blague Isis. Je dirige bel et bien une école de sorcellerie. Et je suis un sorcier, tout comme toi tu es une sorcière. Je pense qu'une preuve ne serait pas de trop, n'est-ce pas ?

Il sortit donc une espèce de morceau de bois d'une de ses poches, et avec il tapota le pied du lit d'Isis. Celui-ci se changea alors en cactus, avant de reprendre sa forme originale lorsque Dumbledore tapota à nouveau dessus. La bouche d'Isis s'ouvrit d'étonnement, et ses yeux allèrent du pied de son lit au bout de bois, du bout de bois au vieil homme, avant de revenir se poser sur le bout de bois.

-Est-ce que… c'est une baguette magique ?

-En effet, c'en est une. Et tu posséderas bientôt la tienne.

-Je ne comprends pas. Qu'est-ce que cette école a à voir avec moi ? Je ne suis pas capable de faire de telles choses.

-Tu en es sûre ?, questionna Dumbledore. Il n'y a rien que tu aies fais qui ne te revienne en mémoire et qui te semble un peu étrange, avec le recul ?

Isis réfléchit un instant, et elle se rappela cette nuit, cachée dans le placard. Elle souhaitait tellement fort trouver un moyen de s'enfuir… Et puis cette impression qu'elle avait eu de flotter en sautant du pommier… Elle plongea ses yeux dans ceux du sorcier.

-Est-ce que… Est-ce que c'est possible de faire apparaître une porte ? Et de flotter dans les airs ?

-Eh bien c'est le genre de magie que les novices comme toi me semblent être capables de faire, oui. Ton cas est un peu particulier. Habituellement, les jeunes sorciers découvrent leurs pouvoirs beaucoup plus tôt, ce qui d'ailleurs est parfois un vrai casse-tête pour les parents, ajouta-t-il en souriant.

-Alors c'est vrai ? Je suis une sorcière ?

-Oui, c'est ce que tu es. Et à Poudlard tu pourras apprendre à maîtriser tes pouvoirs.

-Mais… les sorciers sont méchants, non ? Enfin c'est qu'ils disent dans les livres. Les magiciens sont les gentils, et les sorciers, eh bien, ils font le mal.

-Les moldus et leurs contes… C'est ainsi que nous appelons ceux qui n'ont pas de pouvoirs magiques, ajouta-t-il en voyant l'incompréhension d'Isis. En vérité, les sorciers font de la magie, on peut donc dire d'une certaine façon qu'ils sont magiciens. Il n'y a pas de différence. Bien sûr, il existe malheureusement de mauvais sorciers, qui utilisent leurs pouvoirs pour faire le mal, mais il ne s'agit que d'une minorité.

Isis hocha la tête pour bien montrer qu'elle comprenait. Puis, quelque chose la frappa alors qu'elle fixait à nouveau la baguette magique du sorcier.

-C'étaient des sorciers, ces hommes qui étaient chez moi l'autre nuit, n'est-ce pas ?

Sa voix n'était plus qu'un murmure, et Dumbledore la regarda un instant, à la fois peiné et attendri.

-Je ne peux pas te l'affirmer, mais d'après ce que j'ai entendu, oui il s'agissait de deux sorciers. Je suis désolé qu'ils aient tué ton père.

Isis acquiesça et tenta de retenir ses larmes. Elle jeta un nouveau coup d'œil à la lettre qu'elle tenait toujours.

-Mais sur la lettre il y a écrit qu'ils attendaient mon hibou avant le 31 juillet. Et nous sommes le 25 août. Et puis, pourquoi mon hibou ?

-Nous utilisons les hiboux pour envoyer notre courrier. Et ne t'inquiètes pas pour cette histoire de date, je t'ai déjà dit que ton cas était particulier, alors nous allons faire une petite exception. Je suis le directeur après tout ! Il est temps pour moi de te laisser, je reviendrais demain, à 10 heures pour t'emmener acheter tout ce dont tu auras besoin.

-D'accord. Mais est-ce qu'ils vont me laisser partir d'ici ?

-Eh bien, il va nous falloir réfléchir à une excuse je crois. La magie ne fait pas tout parfois.

Et sur un dernier sourire, il partit. Isis se dépêcha de faire aussitôt ses valises. Elle ne voulait pas perdre une minute le lendemain, lorsque le Professeur Dumbledore reviendrait la chercher. En se couchant, elle se dit qu'elle avait été bien bête d'attendre que Peter Pan vienne la chercher. Ce qui lui arrivait était de loin mieux que tout ce qui aurait pu se passer au Pays Imaginaire. Et c'est sur cette dernière pensée qu'elle s'endormit, impatiente d'être enfin au lendemain.