La petite Sybille Trelawney, du haut de ses six ans, trépignait d'impatience. Elle allait enfin pouvoir entrer dans cette pièce mystérieuse, passer la lourde porte en chêne qui était toujours fermée aux jeunes Trelawney. Une fois, quand elle était plus petite – elle avait quatre ans –, elle avait essayé de tourner la poignée de la porte, mais sa mère l'avait attrapée avant qu'elle ne puisse l'ouvrir et lui avait tout expliqué.

« Ton arrière-arrière-grand-maman était Cassandra Trelawney, une voyante connue partout à travers le monde. Cette pièce contient tous ses instruments – ses cartes de tarot, ses boules de cristal, ses collections de thé. Tous ses châles, aussi. Depuis sa mort, le jour de ses six ans – l'âge auquel se manifeste le don de voyance –, chacun de ses descendantes peut entrer et tester si celui-ci est présent chez elle. Aujourd'hui, Sybou, tu as quatre ans. Alors, tu sais combien de temps tu dois attendre encore ? »

Il avait fallu qu'elle attende deux ans. Deux longues années durant lesquelles elle avait effleuré la porte des doigts chaque fois qu'elle passait devant. Et aujourd'hui, enfin, c'était son sixième anniversaire ! Elle n'était pas intéressée, cette année, à recevoir ses cadeaux ni à manger son gâteau : elle voulait juste voir les instruments de divination de son aïeule.

Enfin, alors que Sybille avait attendu pour ce qui lui semblait des heures et des heures – et n'était en vérité qu'une quinzaine de minutes –, sa mère apparut dans le salon. Elle prit sa fille par la main, la guida jusqu'à la porte et sortit sa baguette de sa poche. Avant de lancer le sortilège qui la déverrouillerait, elle baissa les yeux vers Sybille.

— Prête, Sybou ?

La petite hocha frénétiquement la tête, ses couettes brunes bondissant, alors, avec un petit rire, madame Trelawney ouvrit la porte.

Sybille entra lentement dans la pièce, toute son excitation et sa nervosité évaporées et remplacées par un sentiment de paix et de bien-être. Elle avait l'impression d'avoir attendu toute sa vie pour être exactement où elle se trouvait à ce moment-là.

C'était à cause de l'odeur. Sa mère, ses tantes, sa grand-mère, elles faisaient toutes brûler de l'encens et des chandelles aromatiques ; mais ici, l'odeur était décuplée, elle semblait sortir de partout, des murs, des rideaux, de l'épais tapis qui étouffait le son de ses pas. Sybille sourit en lâchant la main de sa mère pour admirer tous les mystérieux objets dans les lourdes étagères de bois. Madame Trelawney la regarda faire pendant un long moment, un sourire aux lèvres. Elle se souvenait de son propre rite de passage, quand elle avait le même âge. Elle n'avait exhibé aucun signe de don, évidemment, mais le moment n'en avait pas moins été excitant.

Finalement, Sybille se tourna vers sa mère.

— Qu'est-ce qu'il faut que je fasse ?
— Ce que tu veux, ma chérie. Ce qui t'attire.

Sans hésitation, Sybille tendit deux petits bras et attrapa une grosse boule de cristal, qu'elle transporta tant bien que mal à la table au centre de la pièce. Elle grimpa sur la chaise et se mit à fixer la boule. Sa mère s'avança d'un pas, l'espoir et la curiosité se mêlant dans son esprit. Si sa fille montrait des signes du don, pour la première fois en trois générations, elle gagnerait enfin contre ses trois sœurs plus âgées, dont les filles n'avaient rien réussi…

— Tu vois quelque chose, Sybou ? murmura-t-elle.
— Il y a de la brume, beaucoup de brume, répondit la petite à voix basse. Et puis… quelque chose qui s'approche… Quelque chose de petit et noir… Une araignée ! Il y a une araignée dans la brume ! Qu'est-ce que ça veut dire, maman ?

Madame Trelawney soupira en regardant l'araignée que sa fille avait vue à travers la boule de cristal traverser la table. Et une autre Trelawney sans don, une !