J'avais besoin de faire une pose dans Ad Vitam Æternam et mes vieux cours de philo trainaient dans un coin donc... Voilà.

Disclaimer: Saint Seiya, ses personnages et son univers ne m'appartient pas.


Camus s'avança doucement face au déambulatoire dont le mur n'était qu'un vaste entrecroisement de vitraux aux couleurs mâtes. Leurs éclats portaient sur le sol de pavés blancs et sur les grandes colonnes, des teintes disparates qui pourtant apportaient en son cœur une impression de familiarité. Rien ne semblait se dégager véritablement de cette fresque de verre, sinon quelques arabesques confuses. Donc ce soir aussi...

Le verseau s'arrêta, le regard perdu sur les motifs alors que sa longue tunique brossait le sol, soulevant un peu de poussière. Depuis combien de temps ce retrouvait-il dans ce lieu, ce temple aux allures de cathédrale gothique ? Il n'y avait rien ici, pas un bruit pas un souffle, ni même d'autel ou tentures se balançant dans une brise fantomatique. Seul cet espace recouvert de vitraux et peut être derrière lui, entre les deux colonnes menant à la nef, les ténèbres rampant sur la pierre.

Les rêves, pour la plupart des chevaliers, n'étaient que d'étranges chimères qui aussitôt le jour levé, disparaissaient. Bien sûr, ce n'était pas son cas il fallait toujours que le verseau soit différent. Se retrouver chaque nuit dans cet étrange espace n'était pas ce qu'il y avait de plus dramatique, non en soit c'était presque agréable. La compagnie elle par contre...

« Et comme chaque soir, une fois la nuit tombée tu apparais. »

Camus foudroya du regard le dieu qui de l'obscurité se découvrit, sa voix teintée de moquerie. Le chevalier se retourna bien vite, ne faisant pas le plaisir à l'être de soutenir son regard. Après tout, ils jouaient à ce petit jeu depuis maintenant des mois et il devait s'avouer de plus en plus fatigué.

Drapé dans un longue toge d'un tissue sombre, Hadès s'avança jusqu'à l'humain à pas de loup. Ce dernier ne dit pas un mot, comme si ses lèvres avaient été cousues : où était passé sa répartie légendaire ? Lui qui ne ratait pourtant jamais une occasion de remettre quiconque à sa place, particulièrement le seigneur des Enfers lui même. Non, cette fois là le dieu ne fit accueilli que par un lourd silence alors que l'homme continuait sa contemplation. Bien.

Camus demeurait immobile a observer le jeu d'ombre et de lumière qui s'offrait à eux, sans un bruit et en rien perturbé par la présence. Il connaissait cette fresque par cœur, chaque courbe, chaque angle, les dessins que l'on pouvait y voir et ceux qui manquaient cruellement. Si il l'avait voulut, même éveiller il aurait put la retracer du bout de ses doigts. Il le faisait parfois, lorsqu'il était perdu dans ses pensées à la façon dont un musicien qui battait inconsciemment la mesure, le verseau dessinait cette image gravée dans sa tête.

« Pourquoi une église?, demanda-t-il soudainement, les yeux toujours rivés sur les pièces de verre.

- C'est à toi de me répondre, ne sommes-nous pas dans ton esprit après tout ? », répondit le dieu avec un sourire ironique.

Le chevalier baissa légèrement la tête, perdu de nouveau dans ses pensées. Il était fatigué, il avait du mal à se l'avouer lui-même mais il était fatigué. La paix avait été gagné, le mal repoussé et pourtant les voici, les fiers combattant d'Athéna marchant sur terre sous leur lourds armures alors que jamais ils n'auraient du voir de nouveau le jour.

« Vous êtes mort., chuchota Camus à lui-même.

- Et pourtant me voici, sortant des ténèbres chaque fois que tu refermes les yeux. Mort ? Cela serait bien trop simple, il faut que je reste vivant juste pour pouvoir te hanter. Pour pouvoir me faufiler dans ta conscience et te chuchoter à voix basse ce que te cries ton esprit. C'est ce que tu penses, je me trompe ? »

Le verseau répondit au rictus exaspérant du dieu par un regard bien plus noir qu'auparavant. Il ne pouvait nier un mot du dieu, et c'est ce qui l'exaspérait le plus. Quelques choses dans les yeux bleus d'Hadès s'adoucie pourtant alors qu'il perdit son sourire moqueur pour un air bien plus serein.

« Pourquoi tant de tracas ? Les hommes peuvent enfin vivre en toute sérénité, n'était-ce pas ton plus grand désire ?

- Le plus grand désire d'Athéna, je le crains.

- Et par extension, le tien. Tu es son serviteur après tout. »

Camus réprimanda difficilement une grimace. Bien sûr que la paix était une chose formidable, mais tellement fausse... Ce concept de bien et mal qu'avait érigé la déesse, à quel prix l'avait-elle maintenu ? Oui, les hommes n'avaient plus rien à craindre des dieux, mais pour combien de temps ? Durant toute son existence, le chevalier avait apprit qu'il n'y avait rien de plus traitre que des vertus qu'on projetait sur un être alors qu'elles n'avaient pas raison d'être.

Du haut de ses 22 ans à présent, 21 si on oubliait l'année qu'il avait passé parmi les morts, le verseau avait vu à quel point leur existence était futile, d'autant plus lorsque l'on voulait servir une divinité. Tuer des innocents étaient l'une des choses que tenait le plus en horreur la déesse de la victoire, c'était pour cette raison qu'on apprenait aux apprentis dès le début de leur entrainement à n'être rien de plus qu'une armes. On avait beaucoup de culpabilité à voir un objet se briser qu'un enfant à mourir, pourtant c'était bien ce qui se passait. Il en avait vu défiler en Russie, des gamins plein de rêve et d'espoir pour finir geler dans le meilleur des cas. Camus ne se souvenait pas de leur nom, de leur visage ni même de leur voix, lui qui pourtant fut leur gardien.

Le chevalier serra les points et enfonça ses ongles dans sa chaire : il haïssait cette indifférence qu'il portait mais c'était une nécessité pour lui. Malgré tout les discours sucrée de la déesse, il était une arme, les autres étaient une arme et leur existence avait autant d'importance que celle d'un insecte. Eux, les humains qui avaient réussis à libérer un pouvoir cacher, à enflammer leur cosmos, étaient les être les plus remplaçables.

« Qu'est-ce dans ce cas ? »

Camus le regarda, soudainement perdu.

« Je vous demande pardon ?

- Ton plus grand désire ? Quel est-il ?, fit le dieu visiblement amusé.

- Je... Je crains ne pas savoir... »

L'homme détourna les yeux vers les vitraux, comme attiré par la lumière qu'ils projetaient. Il ne put voir la compassion sur les traies de l'entité mais s'en douta pour une raison qui lui échappait. Il réfléchit quelques instant, cherchant de près ou de loin ce qu'il pouvait bien vouloir et se sentit bien seul. La présence du dieu à ses côtés n'était rien par rapport au néant qui derrière lui se creusait. Cette endroit, cette cathédrale était vaste pourtant jamais il n'avait prit le temps de la visiter.

« Mourir je suppose... »

Les mots lui échappèrent mais étrangement, il s'en moquait : ce n'était qu'un rêve après tout, un comme tant d'autre.

« Vraiment ? » demanda le dieu, sceptique.

Hadès croisa un bras sur sa poitrine et posa sa main sous son menton, semblant réfléchir. Le verseau n'avait pas vraiment de désir, ni d'ambition et le fait que la personne même du dieu des morts vienne hanter ses rêves étaient surement suffisant pour affirmer son envie de ne plus exister. Pourtant le dieu reprit calmement :

« Ton âme est âgée Camus, bien plus que ce que tu ne penses et les combats que tu as mené sous d'autres noms l'ont épuisée.

- Je le sais. J'ai c'est images parfois, ses sensations qui... qui chevauchent ma réalité. Comme des rappelles de ce que je fus et que plus jamais je ne serais cependant... J'ai l'impression de revivre la même chose. J'ai l'impression que le seul combat que je mène encore est pour une liberté que je sais ne jamais pouvoir avoir. Peu importe le nombre de fois où je meurs, le nombre de fois où j'entre en Enfers, quoique je fasse je finis toujours par ouvrir les yeux dans une réalité que j'exècre. »

Le verseau reprit son souffle un instant, sous le regard désolé du dieu. Le jeune homme avait cette impression de tourner indéniablement en rond car c'était ce qu'on attendait de lui. Le même chemin, le même destin, encore et encore au point que son âme s'en ennuie.

« C'est la liberté que tu désires. C'est pour cette raison que j'hante tes nuits, n'est-ce pas ? »

Camus tourna alors soudainement les yeux vers lui, abasourdie par ce que venait de lui souffler le seigneur des Enfers. Il pencha la tête légèrement sur le côté, confus.

« Je ne saisis pas vraiment le sens de vos paroles mon seigneur.

- Nous savons tout les deux que cela est faux Camus. »

Le chevalier ne répliqua rien, sondant son propre esprit à la recherche de la moindre réponse. Il observa la lumière danser avec les nuances de couleurs, silencieusement. Peut être n'avait-il au fond pas envie de trouver de réponse.

« Sais-tu ce que représente l'église? », lui demanda le dieu dans un souffle.

Camus releva les yeux vers lui, intrigué.

« On dit que cela indique que l'on est à la recherche d'un guide, d'une lumière. Parfois, continua-t-il en se tournant vers l'humain, c'est une représentation de l'âme et un besoin de trouver une chaleur, une sécurité perdue.

- Et qu'est-ce que cela veut dire lorsque le seigneur des Enfers se cache en son obscurité ? »

Un maigre sourire amusé apparu sur les lèvres du dieu avant qu'il ne détourne le regard de nouveau vers la fresque qui s'offrait à eux. Pourtant, le chevalier continuait de l'observait, attendant patiemment qu'on l'éclaire enfin, lui qui était perdu dans ses propres ténèbres.

« Cette question mérite réflexion. Je t'obsède, tu me maintiens désespérément en vie au plus profond de toi, au chœur même de ce Sanctuaire que tu a toi-même crée. Pourquoi moi ? Après tout, c'est Athéna que tu sers, alors pourquoi s'accrocher à l'image d'un piètre dieu comme moi ?

- Je... »

L'homme chercha à répondre, se défendre alors que son regard ne se déroba, mais sa gorge se serra. Il n'avait aucune idée, rien, pas d'indice qui lui permettrait de comprendre ce qui le poussait à chaque nuit rêver du dieu qui manqua de causer la plus grande des misères.

« Suis-je vivant, ou ne suis-je plus qu'un pâle souvenir ? Une voix te guidant parmi tes propres doutes et te tenir compagnie au cœur même de ton âme. Ne suis-je qu'un rêve ou bien plus, dis le moi Camus. »

Le souffle du dieu flotta dans le silence, frappant de ses mots le verseau. Ce dernier se frotta légèrement l'avant bras, froissant sa tunique brune. C'était étrange, jamais il ne portait ce genre de vêtement dans la réalité...

« Je l'ignore..., finit-il par avouer d'une voix faible. Peut être, il est possible que vous soyez encore vivant malgré le coup porté par Athéna... Le domaine des rêves est après tout dans votre Royaume. Ce qui pourrait impliquer que vous n'êtes pas une illusion et que vous venez délibérément me tourmenter... »

Le dieu releva légèrement la tête, une lueur indigo vint alors trancher son visage. Sur sa peau d'albâtre, ce pâle air de tranquillité qui hantait le visage des statues.

« Et si je n'étais qu'un rêve, le produit de ton imagination ?

- Alors... Vous..., Camus faiblit un instant avant de murmurer. Alors je serai celui qui a un problème. »

Le regard bleu lointain de la déité vint reposer sur l'homme qui ne trouvait pas le courage de relever la tête.

« Pourquoi continue-tu de porter un tel masque ?, murmura Hadès à lui-même avec désarroi. Même au plus de tes rêves, tu continues de t'en parer. »

Cette indifférence auquel Camus s'accrochait n'avait aucun sens, pas quand il était dans cet endroit pourtant il ne trouvait pas la forcer de s'en décrocher. C'était la seule chose qui lui permettait de rester en vie, seulement nuit après nuit, il avait la sensation que cette protection tombait lentement en poussière. Tout ce qu'il avait demandé, c'était de comprendre.

Le verseau s'approcha d'un pas et du bout des doigts, caressa le verre des vitraux.

« J'aimerai pouvoir disparaitre, même l'espace d'un instant. »

La matière était glaciale, malgré les couleurs qui la teintait. Si beau, si chatoyant et pourtant si froide, caractères opposés qui pourtant constituaient la fresque.

« Vous l'avez dit vous-même, mon âme est bien plus âgée que ce que je peux penser et pourtant, j'ai toujours eu l'impression d'avoir toujours été ainsi. N'y a-t-il donc rien en moi de plus que le gèle ? Je n'arrive pas à croire, je n'arrive pas à nier tout ce temps passer et pourtant me voici, vivant. Je n'ai jamais cru en l'éternité alors est-ce ça un châtiment, mon seigneur ?

- Un châtiment ? Non, répondit le dieu en secouant légèrement la tête de droite à gauche, une bénédiction Camus.

- Pardonnez-moi alors de ne trouver en cette bénédiction la moindre délivrance. J'ai tant marché sur cette terre, à chasser le mal sans me rendre compte que tout ce que je poursuivais n'était que du vent, que j'en ai perdu le goût de l'immortalité. Peut être suis-je différent, peut être me pose-je trop de question mais je ne trouve plus en moi la force de continuer à croire aveuglément en des valeurs que l'on m'impose. J'aimerai être plus qu'une arme mais en ai-je vraiment le droit ? Je suis humain après tout, jamais je n'ai voulu d'un destin quelconque, ni de ses limites dont on m'entrave malgré moi. »

Le verseau se stoppa un court instant, reprenant son souffle alors qu'il recula doucement sa main des vitraux. Il laissa son regard tomber sur le bout de ses doigts, désormais glacé.

« J'aimerai comprendre mon seigneur..., souffla-t-il. J'aimerai comprendre ces émotions qui me hante et pourquoi la seule chose qui apaise mon âme est votre image. Vous que je dois haïr presque autant que ma réalité. »

Hadès s'approcha alors à son tour, lentement et sans toucher l'humain, observa avec attention le chevalier. Celui-ci n'osa pas en faire de même, laissant à la place ses yeux flous être hypnotiser par les motifs arc-en-ciel.

« Est-ce donc ce qui se cache sous le masque ? »

Une respiration, troublant la sérénité des lieux quand Camus ferma ses paupières. Le temps glissait doucement entre ses mains alors que déjà, il pouvait sentir sur sa peau la caresse des rayons chaud du soleil.

« Je le crains mon seigneur. »


Je n'ai pas trop d'explication pour cette histoire, c'est juste arrivé. Il y aura peut être des updates, auquel cas je changerai le statue de l'histoire, cependant je ne suis encore sûre de rien. Pour moi, c'est (pour l'instant) finit.

J'avoue que c'est étrange mais j'avais envie d'un truc un peu philosophique et plus particulièrement une conversation entre Camus et Hadès. Cherchez pas, j'ai souvent ce genre d'envie.