Хорошие поцелуи России,

bons baisers de Russie, chapitre pilot.

Auteur: ben moi

Disclaimer: Rien n'est à moi que les idées, et c'est bien ça le problème.

Musique: Slot, slot, lumen, slot, encore slot, et toujours slot. Cherchez sur Deezer!

Petite note:

Hello!

Une fois n'est pas coutume, cette petite note rique de se faire longue. Voici à peu près deux ans que je suis restée silencieuse sur Fanfiction. La première année pour raison d'un grand poil dans la main qui refusaient de se laisser épiler. La deuxième année pour raison inverse, ou comment le fait de faire Santé vous empêche de mener une vie d'être humain et vous transforme en droïde à mémoire numérique-gruyère, équivalent du cerveau à trous rempli des trucs insipides qui rendent "The Big Bang Theory" si drôle.

Bref.

En faisant le ménage dans mon Pc à la fin de cette année, j'ai découvert quelques chapitres oubliés datant de cette année de flemme, que je n'avais même pas eu le courage de "uploader". Pour réparer l'affront je vous propose une version corrigée pilot de l'un de ces petits oubliés.

A vous de me dire ce que vous voulez en faire, "suite ou pas suite?", voyez avec le petit bouton tout en bas.


Хорошие поцелуи России

Bons baisers de Russie

Chapitre 1 : Au cœur de l'hiver

Lorsque le téléphone entama sa cinquième sonnerie, la jeune femme avança une main timide vers le combiné. « Allô » fit-elle, d'une voix qu'elle aurait voulue plus ferme.

« Avez-vous reçu la lettre ? » fit la voix, à l'autre bout du fil. Elle marqua un temps d'arrêt, sans que la jeune femme réponde, puis continua, sure d'elle. « Parfait. Réfléchissez-y, je vous re-contacterais la semaine prochaine. Sachez prendre la bonne décision, deux avenirs sont en jeu à partir de maintenant… »

Une minute encore, la jeune femme garda le combiné à son oreille, sourde aux échos de tonalité qui résonnaient dans l'appareil. Son esprit voguait, loin, en direction de ces deux avenirs qui ignoraient encore jusqu'à leur étroite liaison.

o0o

L'enfant laissait ses mains glisser sur les touches blanches et noires, avec dextérité. Il ne jouait pas vraiment comme si ça vie en dépendait, non, plutôt comme si rien n'aurait pu lui apporter plus de plaisir que de caresser les petits morceaux d'ivoire. Et sa technique s'en ressentait, époustouflante de précision. Pas une erreur, pas une fausse note, sa main trouvait d'elle-même le juste écart, la bonne distance. Au fur et à mesure que ses doigts courraient sur le clavier, l'atmosphère se modifiait. Elle devenait plus épaisse, plus profonde, plus colorée aussi, emplie d'une histoire, nourrie par une vie qui renaissait sans cesse sous la caresse de l'enfant.

Et même si ses pupilles blanches restaient fixées devant lui, vers un point invisible, Draco était sûr qu'au fond de lui-même, Gricha recréait cet univers qu'il imaginait chaque jour durant, aidé en cela par la profondeur de la musique.

Derrière le petit corps gracile, Draco commençait à entrevoir l'homme talentueux qui s'éveillait. Il était fier. Son élève progressait à vive allure, apprenant mieux que n'importe quel autre élève et, plus que cela, animé d'une réelle passion, un don véritable. Bientôt, il atteindrait des sommets pour un enfant de cet âge. Il serait alors temps de le présenter à qui de droit, afin de lui ouvrir les portes du Saint des saints.

Mais en attendant, Draco se contentait d'esquisser un sourire. L'autre ne le verrait pas, mais Draco savait qu'il pouvait deviner lorsqu'il souriait. Il était d'ailleurs le seul qui avait su percer le masque froid de l'adulte à jour, et le seul qui ne se fiait plus à ses seules remarques sarcastiques. Draco avait l'intime conviction que, derrière ses yeux morts s'en cachaient d'autres, capables de voir dans l'âme des gens. Son sourire s'agrandit un peu plus.

« Gricha, c'est bon pour aujourd'hui. Tu travailleras ce mouvement pour la prochaine fois. Et revois Tchaïkovski aussi.» fit l'homme en russe. Puis, Draco se tu. Il n'aimait pas parler pour ne rien dire. En silence, l'enfant ramassa ses livres en braille et les glissa dans sa besace, avant de quitter la petite salle de musique de l'établissement.

Draco se leva de son tabouret et s'approcha de la fenêtre. Le ciel était gris et lourd dehors. Il neigerait bientôt, probablement. Un instant, il laissa errer ses yeux sur les toits du quartier. De petites maisons, pas plus de trois étages, où s'entassaient souvent plusieurs familles. Pas qu'ils soient pauvres, mais, en Russie, il valait parfois mieux vivre sa vie dans son coin sans trop se faire remarquer, si on voulait vivre en paix. Pas trop riche, pas trop pauvre. Ne pas se mêler des affaires des autres, surtout pas de celles de l'Etat. Quelques règles qui permettaient de ne pas trop mal s'en sortir. Draco les suivait au pied de la lettre.

D'un geste précis qui trahissait une habitude encrée, il se saisit du cordon du rideau et le tira. La journée touchait à sa fin, mieux valait rentrer avant la nuit.

Lorsque Draco s'approcha du portail de tôle, couvert de tags plus ou moins vulgaires, qui masquaient son domicile aux regards curieux des passants, le ciel s'était mis à pleurer ses douces larmes d'un blanc soutenu. Draco aimait beaucoup la neige. Elle lui rappelait sa mère, froide mais douce, tendre et caressante, elle se perdait parmi ses cheveux blonds, comme le faisaient les doigts de Narcissa Malfoy, avant. Une lueur enfantine dans le regard, il s'amusa à cueillir un flocon de ses lèvres violettes de froid, tout en cherchant ses clefs, dans sa poche. Puis il se rendit compte de l'immaturité de son geste et ferma la bouche. Enfin, il enfonça la clef ensorcelée dans l'énorme cadenas qui fermait le portail. On n'était jamais trop prudent, surtout dans les quartiers peu touristiques, comme celui-ci. Draco poussa la lourde porte de l'épaule et passa le seuil de sa propriété. Devant lui s'étendait un minuscule jardin à l'abandon. Les mauvaises herbes y poussaient dans tous les sens, sur le sol gelé, et se recouvraient petit à petit de neige poudreuse. Un petit chemin de pierres froides reliait l'espace depuis le portail jusqu'au hangar de tôle grise réaménagé en studio. Rien de bien classieux pour le dernier des Malfoy, juste un bâtiment qui aurait fait fuir n'importe quel acheteur potentiel. Et c'était plus ou moins le but.

« Je peux entrer ? » fit une voix derrière Draco en anglais. Le blond eut un sursaut qu'il masqua dans un demi-tour plein de grâce, sa main sur la couture de la poche où se cachait sa baguette magique.

Quand il reconnu la personne qui s'était ainsi adressée à lui, Draco eut un sourire et se détendit imperceptiblement. Amusé, il s'inclina devant Pansy Parkinson en une révérence digne d'un serviteur invitant son maître à entrer. La jeune femme brune engagea son fauteuil roulant dans l'allée pendant que Draco refermait derrière elle. Puis il se précipita devant son amie pour ouvrir la porte de son studio.

Contrairement à l'extérieur, l'intérieur était on ne peu plus accueillant. Isolés du froid extérieur, les murs étaient peints en blanc, et une moquette beige recouvrait le sol. D'épais tapis s'étalaient un peu partout dans le salon, aussi blancs que les murs, sous des fauteuils mordorés qui faisaient face à une petite table en prunier et à une cheminée au manteau noir. Une cuisine américaine, dans les tons vert et jaune, se devinait sur la droite quand un escalier en fer serpentait pour rejoindre une sorte de balcon qui faisait office de deuxième étage, et accessoirement, de chambre à coucher. Un renfoncement de mur devait cacher la salle de bain aux yeux des visiteurs, seul espace intime permis dans le studio. Sous l'escalier, une unique porte aussi blanche que les murs restait fermée, espace privilégié de Draco Malfoy, dans lequel Pansy n'avait eu que peu l'occasion d'entrer. La lumière du crépuscule entrait dans tout l'espace par d'immenses vasistas qui recouvraient toute la partie Est du toit. Tout était calculé pour que la moindre parcelle de soleil puisse inonder chaque recoin de la maison. Pansy, à l'instar de Draco, adorait cet endroit qu'elle avait aidé à construire. Pourtant, elle ne pouvait se faire à l'idée que Draco continue à vivre dans un tel quartier. C'était si contraire à l'esprit des Malefoy… même si l'esprit des Malefoy était mort avec les parents du dernier d'entre eux.

Draco attrapa la parka de Pansy et la suspendit à une patère fixée au mur à côté de la porte, à côté de son imperméable beige. Puis, il se retourna vers la jeune femme brune, aux yeux marron qui le fixaient depuis son fauteuil, rangé auprès de la cheminée qui ronflait déjà de bon cœur. Sa place préférée, se souvint Draco.

Pansy s'était embellie avec le temps. Elle avait perdu son air de pékinois, et ses cheveux tombaient en boucles souples autour de son visage fin, lui donnant un air de lutin.

« Un café ? » lui proposa-t-il, tout sourire.

« Volontiers. »

Draco se dirigea de son pas fluide vers la cuisine et sortit deux tasses, qu'il glissa sous la machine à expresso. Moins de cinq minutes plus tard, il rejoignit Pansy avec un plateau sur le bras.

« Qu'est-ce qui t'amène si tardivement ? » demanda-t-il enfin, laissant échapper sa curiosité qu'il retenait furieusement depuis quelques minutes.

Il se doutait bien que ce n'était pas urgent, sinon Pansy ne se serait pas déplacée dans la rue comme une vulgaire moldue. Cependant, elle ne sortait que rarement le soir, par peur ou bien par commodité. Depuis le combat qui lui avait ravi ses jambes et l'avait plongée quelques mois dans le coma, Pansy ne supportait que peu la nuit. C'était à peu près la seule faiblesse que le jeune homme lui connaissait à ce jour. Elle était coulée dans le métal, dotée d'un caractère bien trempé, que les multiples épreuves traversées n'avaient fait qu'endurcir encore plus. Quand ils la voyait, petite chose assise dans un fauteuil roulant, la plupart des gens ignoraient qu'ils avaient devant eux un bloc de béton armé, ce qui constituait l'une de ses armes favorites. Elle aurait pu être une femme d'affaire accomplie, si elle n'avait choisi une autre voie.

« Je suis venue discuter » répondit-elle, innocente.

Elle eut droit, pour toute réponse, au haussement de sourcil caractéristique de Draco Malefoy, puis elle se renfrogna.

« Je ne plaisante pas. Il s'avère que tu ne m'as pas rendu visite depuis plus de deux semaines maintenant. J'ai le droit de m'inquiéter pour mon patient préféré, non ? Comment vas-tu ces jours-ci ? » reprit-elle.

Draco rit. Il aimait lorsque son amie se laissait aller. Entre eux, ils laissaient tomber les masques, et c'était on ne peut plus salvateur.

« Je vais bien Pansy. Pas de fatigue, rien. »

« Et tes cauchemars ? »

« Pas depuis plusieurs mois. »

Pansy prit sa respiration.

« Ca va faire cinq ans maintenant, tu le sais ça… »

Draco savait où elle voulait en venir. Cinq ans qu'ils avaient quitté l'Angleterre, au lendemain de la chute du Lord Noir, elle dans son fauteuil, et lui complètement traumatisé par ce à quoi il avait assisté. Avec toutes leurs économies, ils avaient acheté leur place dans ce hangar, utilisant la magie pour le rendre salubre. Avec les maigres dons de Draco en russe et ceux de Pansy en ténacité, ils avaient réappris à vivre, tous petits parmi les moldus, découvrant enfin leurs ennemis d'hier. Et l'intégration avait plutôt bien réussi: Pansy était devenue psychologue dans un des centres hospitaliers de Saint-Pétersbourg, et Draco donnait des cours de musique au Centre Educatif pour Jeunes Aveugles et Malvoyants de l'Etat. Mais aucun des deux n'avait repris contact avec le monde de la magie.

« Je vais bien Pansy » répéta Draco. « Je vais bien, et je me sens bien ici. Je m'épanoui auprès des enfants. Certains sont très doués et je pense pouvoir en faire quelque chose, je… je n'ai pas envie de rentrer. Je ne suis pas prêt à rentrer en Angleterre. »

« Je sais. Moi non plus. Mais je ne peux m'empêcher de penser que c'est une fuite. Nous refusons d'affronter notre problème. »

Elle parlait d'une voix douce, comme si elle s'adressait à un petit enfant, pourtant Draco ne put s'empêcher de s'énerver face à son obstination vaine, à ce sujet qui se trouvait toujours entre eux.

« Tu suis trop ta formation au pied de la lettre. Il y a des choses auxquelles on ne peut pas faire face, tu comprends ? » s'écria-t-il soudain, le visage ravagé.

Draco se détourna d'elle, et plongea ses yeux dans la nuit glacée, derrière les vitres embuées.

Il y avait des choses desquelles on ne pouvait pas guérir. Elle aurait du le savoir. Doucement, il plongea ses lèvres dans le café froid, repoussant ses derniers souvenirs de l'Angleterre au fin fond de sa mémoire.

« J'ai un plan » continua son amie en reprenant sa tasse vide, parlant comme si Draco ne s'était jamais emporté.

« Pansy… » commença Draco.

« Ecoute-moi… » le coupa-t-elle.

« Non, toi écoute-moi. Je ne veux pas rentrer, mais si tu le veux, fais-le. Je sais que tu le peux. Tu es plus forte que moi. Et puis il te reste ta mère, là-bas. Si tu le veux, fais-le sans moi, je ne t'en voudrais pas. »

« Je ne veux pas rentrer. Je suis bien ici. J'ai ma vie, je m'en sors. Et puis, j'ai rencontré quelqu'un et… » elle se tu, se tortillant les mains sur les genoux.

Draco sourit, repoussant encore la discussion à plus tard.

« Bravo ! Tu ne m'avais rien dit, cachottière. Tu te souviens de ce pacte qui voulait qu'on ne se cache rien ? »

Il se laissa aller au fond de son fauteuil. Pansy, elle, avait les joues cramoisies.

« Je voulais attendre d'être sûre… Bref, là n'est pas la question. Draco, je ne veux pas rentrer. J'ai déjà repris contact avec ma mère, et elle a été heureuse de me savoir en vie, mais quelque chose s'est brisée entre nous. Elle vit dans le passé, dans le ressentiment. Elle n'a rien pu pardonner, et vit toujours avec Ses idéaux… Elle n'a pas vécu ce que toi, tu as vécu, alors… »

« Je comprends » fit Draco avec un mouvement vague de la main, comme s'il pouvait chasser son passé comme on chassait une mouche.

« Mais je crois néanmoins que toi, tu devrais reprendre contact avec l'Angleterre. »

Elle jeta un coup d'œil autour d'elle.

« Tu pourrais faire hôte. C'est très courant ces temps-ci. Tu accueillerais chez toi un sorcier en vacances pour quelques temps. Tu pourrais te créer de nouveaux liens. Et peut-être qu'un jour, ton a priori sur l'Angleterre changerait. Et puis… Oh, et puis j'en ai marre de te voir seul ici tout le temps. Depuis le temps que j'ai quitté le studio, tu n'as trouvé personne pour me remplacer ! Je pensais pourtant que tu trouverais un petit ami. Certains éducateurs du centre ne sont pas mal ! Mais tu vis seul, comme un ermite, prisonnier de ton masque ! »

« Si c'est parce que tu n'es plus seule que tu te permet de te mêler de ma vie privée, je te saurais gré de me laisser en paix. » fit Draco, d'un ton tranchant qu'il n'avait pas utilisé avec elle depuis bien longtemps.

« Ne monte pas sur tes grands chevaux, je ne cherche pas à te caser, mais à te réconcilier avec toi-même. En dehors de ton travail, tu n'as rien. Tu me dis que ça va, et je veux bien le croire, tu vas mieux. Depuis cinq ans, je nous vois remonter la pente, côte à côte, mais il y a une portion que je ne peux traverser à tes côtés, et nous y sommes. Je ne peux que t'offrir le moyen d'y aller doucement. Ton absence de vie sociale est un signe qui ne trompe pas Draco. Ce chemin que j'ai parcouru avec ma mère, il est temps que pour toi de le prendre à ton tour. Je te propose juste un moyen de te préparer. Accueille un sorcier chez toi. Peu de temps, juste une semaine, et ensuite, on verra, d'accord ? Je serais près de toi en cas de problème ! Mais tu dois essayer Draco ! Tu dois essayer ! »

L'interpellé sentait les accents de vérité qui se mêlaient à la détresse dans la voix de son amie, mais il ne pouvait se laisser aller aussi facilement. Il ne pouvait pas baisser les armes maintenant. C'aurait été trop bête. Draco savait que son caractère obtus ne posait de problèmes qu'à lui-même, mais c'était plus fort que lui, il ne voulait pas faire face.

Pourtant, à l'instant où il plongea ses yeux gris dans ceux bruns de Pansy, il su qu'il avait déjà pris sa décision, depuis le début. Et qu'elle était, pour lui, irrévocable.

« D'accord » acheva-t-il. « J'accepte. Mais c'est toi qui régleras les conditions administratives. Et je ne changerais rien à mes habitudes ! »

Un sourire vainqueur sur les lèvres, Pansy répondit :

« Pas de problèmes. Tout est déjà organisé. Tu as juste à signer là.»

Elle sortit un parchemin de sa poche. Draco se leva de son siège et partit à la recherche d'un crayon oublié, en se demandant tout de même comment ils allaient faire pour vivre à deux dans un espace à la fois trop et pas assez intime pour deux inconnus. S'il installait un rideau pour séparer sa chambre en deux, peut-être que… Et si l'autre s'attendait à ce qu'il lui serve de guide, eh bien, tant pis, il déchanterait vite. Draco ne comptait pas laisser ses petits protégés pour courir Saint-Pétersbourg, et l'autre s'y ferait. Ayant finalement trouvé l'objet de ses désirs, Draco se saisit de la feuille et la signa sans en lire un mot, faisant entièrement confiance à son amie de longue date.

Lorsqu'il trouva le sommeil cette nuit là, bien longtemps après le départ de Pansy, Draco rêva pour la toute première fois depuis longtemps des premières années Poudlard, et des sorciers qu'il avait côtoyés à cette époque. Nombre d'entre eux détestaient Draco, et il le leur rendait bien rendu, mais cette nuit là, il n'y avait dans leurs yeux que nostalgie et amitié, le reflet de ce qu'il aurait aimé voir, parfois, juste un peu.

Aucun cadavre ni champ de bataille ne vint le hanter, et au réveil, il ne se souvint même pas avoir rêvé.

o0o

Une semaine s'était écoulée depuis le premier coup de téléphone. Lorsque celui-ci sonna de nouveau, la jeune femme était beaucoup plus sereine. Déposant son attaché-case sur le fauteuil à côté du téléphone, elle s'empressa de décrocher le combiné.

« Allô ? » demanda-t-elle.

Mais elle déchanta vite lorsqu'elle reconnu la voix à l'autre bout du fil.

« Avez-vous pris votre décision mademoiselle ? »

« Oui » soupira-t-elle dans le combiné. « Oui, j'accepte votre proposition. Mais je veux que vous me promettiez qu'il ne leur arrivera rien… Je veux dire, si rien ne semble aller mieux, vous les laisserez partir… »

« Ils sont libres mademoiselle, entièrement libres. Si ce que j'attends d'eux ne se produit pas, eh bien ils se sépareront de nouveau et ne se reverront jamais. Mais cela ne se fera pas, je suis sûre de ce que j'avance. »

« Très bien » fit la jeune femme en avalant sa salive.

« J'étais sûre que vous vous rangeriez de mon côté. Sachez que j'ai déjà honoré ma part du contrat. A vous à présent d'honorer la votre. Vous recevrez sous peu ce dont vous avez besoin. Bonne chance. »

L'autre raccrocha, laissant la jeune femme seule devant son guéridon. Cependant, la lueur d'espoir qui brillait au fond de ses pupilles brunes n'avait rien à voir avec celle qui les animait une semaine auparavant. Sa décision était prise. S'il fallait aller jusque là pour aider son ami, elle irait, foi de Gryffondor.

o0o

Le ciel était lourd, de cette couleur uniforme et oppressante que seule Londres connaissait à cette époque de l'année. Un genre de grosse meringue s'apprêtait à écraser le monde de sa masse grisâtre, pendant que le crachin mouillait les pelouses et souillait les passants.

Le long de la vitre, les gouttes frappaient et frappaient encore en un rythme presque assoupissant. Des yeux, Hermione Granger s'amusait à suivre le cheminement des gouttelettes. A droite, puis à gauche, et encore à droite, puis… La jeune femme secoua la tête pour chasser la langueur qui s'emparait peu à peu d'elle. Et dire qu'elle aurait pu être dans son bureau à l'heure qu'il était, à préparer ses cours pour le lendemain. Mais non, elle attendait là, dans un des couloirs sordides du bloc de Sainte Mangouste, seule et un peu perdue, à regarder la pluie tomber en se demandant, par tous les dieux, combien de temps durait une opération d'habitude. Parce que depuis plusieurs heures maintenant, Harry s'était enfermé à l'intérieur du bloc, et qu'elle, elle devait lui parler.

Hermione n'avait jamais eu la réputation d'être quelqu'un de patient. Elle était douée, géniale, intelligente, et beaucoup d'autres choses encore, mais patiente, ça jamais. Et Harry le savait, enfin !

Lorsque enfin un uniforme vert clair arborant l'os et la baguette croisée s'échappa du bloc, Hermione lui bondit dessus comme une furie. La jeune femme aux yeux noisette et à la coupe au carré dû prendre peur, car son petit minois se troubla en une grimace cocasse.

« Vous êtes une parente du patient ? » demanda-t-elle.

« Non, pas exactement, je veux juste savoir si Harry sort bientôt ? » fit-elle en un geste véhément vers la porte close.

« Harry… Vous voulez dire le docteur Potter ? Oui, probablement d'ici quelques minutes. »

Hermione soupira d'exaspération et, sans même remercier la jeune infirmière, retourna s'adosser au mur, à côté de la vitre.

Comme l'avait annoncé l'infirmière, un autre pan d'uniforme vert apparut après quelques minutes derrière la porte, suivit par tout le corps de Harry Potter.

Il avait peu changé depuis Poudlard, si ce n'était une carrure un peu plus imposante, et une assurance toute nouvelle qui brillait derrière ses iris verts. Le genre d'assurance qui habitait les gens investis d'une mission. Et Harry lui, avait enfin choisi la sienne. Après s'être vu condamné à assassiner son ennemi, il n'avait trouvé d'autre but que de sauver des vies. C'était tout à son honneur. Et puis surtout, cela lui avait permis de se noyer dans les études, puis dans le travail, en ayant pour cela une excuse toute justifiée. Il y avait des choses qu'on ne pouvait oublier, selon lui.

Hermione se décolla du mur et se dirigea vers lui.

« Tu m'accordes deux secondes ? » lui demanda-t-elle à brûle pourpoint.

« Tiens, Hermione ! » répondit l'autre, avec le sourire. « Bien sûr ! »

De son pas souple, il l'entraîna vers un couloir latéral, puis vers une salle qui devait faire office de salle de repos. Là, il lui indiqua une chaise, le long d'une table qui faisait bien la moitié de la pièce.

Puis, quand elle fût assise, Harry s'en fût prendre deux cafés dans la vieille machine fatiguée appuyée contre le mur. Il déposa l'un des gobelets devant sa visiteuse et s'assit en face d'elle. Hermione avait posé ses mains autour du verre chaud, comme pour les réchauffer. Ou pour en masquer les tremblements.

« Que me vaut l'honneur de cette visite ? » demanda Harry, tout sourire.

« Arrête ton char Dom Juan ! » répondit Hermione. « Je suis insensible à ton charme, aurais-tu oublié ? »

« J'ai vaguement dû espérer ! » fit l'autre en haussant les épaules.

« Pourquoi tu ne réponds pas à mes coups de téléphone, Harry ? »

Un rire sans joie s'échappa de la gorge du Survivant.

« Parce que je sais très bien ce que tu me veux ! » répondit-il. « Sérieusement, Hermione, tu me refais le coup chaque année. Non, je ne veux pas prendre de vacances, non, ce n'était pas une erreur d'être de service le jour de l'an, oui, je dors bien la nuit, oui, j'aime ce que je fais, et non, je ne fuis rien en travaillant d'arrache pied. Je suis juste interne et je travaille aux urgences ! OK ? Ce n'est pas parce que toi, tu es heureuse de ta vie que je ne peux pas être heureux dans la mienne, même si elle est différente. »

« Mais tu vis seul ! » fit remarquer Hermione.

« Et toi, tu vis avec Ron ! » répondit-t-il, en feignant le dégoût.

Hermione tiqua.

« Sérieusement, Harry, tu devrais penser à te sociabiliser un peu… »

« Sors, prends des vacances ! Il y a de superbes plages à Majorque et… » finit Harry en imitant sa voix.

Hermione soupira.

« Je suis sérieux » reprit Harry, avec sa voix normale. « Je sais que je vis seul, mais je ne trouve pas encore chaussure à mon pied, c'est tout. Il n'y a rien d'étrange là dedans. Beaucoup de gens sont encore célibataires à 23 ans, ce n'est pas une tare ! Si encore j'en avais trente, ou même quarante… »

« Harry… »

« Je te coupe » fit-il en attrapant son biper dans sa poche, on a besoin de moi. « A plus tard ». Il se pencha, avala son café d'une traite et embrassa la joue de sa vieille amie. Puis, il sortit sans demander son reste.

Restée seule, Hermione soupira. De son sac, elle sorti une enveloppe brune qu'elle ouvrit. Un billet d'avion ainsi qu'un feuillet tombèrent dans sa main tendue. Un billet aller-retour d'une compagnie britannique en direction de Saint-Pétersbourg, et un reçu d'une compagnie d'échanges touristiques internationale au nom imprononçable, basée à Moscou, qui stipulait qu'une adresse avait été retenue, et qu'un hôte russe était prêt a accueillir un touriste chez lui durant une semaine. Hermione pinça les lèvres.

A ce moment, quelqu'un entra dans la salle. Hermione reconnu Neville Londubat, en blouse verte, la même que Harry, si ce n'est le badge qui ornait sa poitrine. Neville était un prodige. Rentré à l'école des guérisseurs la même année que Harry, il en était ressortit deux ans plus tôt, et était maintenant chef de section. Un prodige encore jamais vu, et le nouveau petit protégé du directeur de Sainte Mangouste, qui faisait souvent la une des revues du milieu. Mais en cet instant, Neville semblait surtout épuisé, les yeux cernés. Il s'assit à la place laissée vacante par Harry.

« Salut Hermione » fit-il d'un air qui se voulait enjoué.

« Salut Neville » répondit-t-elle. « Quelque chose ne va pas ? Tu as l'air fatigué ! »

« Et ce n'est pas qu'un air. C'est la course ici en ce moment. Avec les fêtes qui viennent de passer, et l'année qui commence, les gens abusent des bonnes choses, et ça finit mal… Et puis le directeur veut que j'assiste à un séminaire sur la médicomagie, en temps que représentant de Sainte Mangouste. Sur un sujet qui ne me concerne même pas, c'est le service de Perkins, les brûlures internes dues à un trop plein de magie. Tout cela pour faire de la pub à Sainte Mangouste, avec la tête du prodige en prime. Avec mon article pour le journal des sciences que je n'arrive pas à écrire… On peut dire que j'oublie un peu de dormir ces temps-ci. Et toi ? »

« Moi, ça va » répondit Hermione. « A Poudlard, on a tout de suite moins de pression. Tu sais, tu devrais déléguer un peu. Au pire recommande un autre gars à ton directeur. Peut-être qu'il acceptera de te donner un peu de répit… Et où se déroule ta conférence ? »

« Saint-Pétersbourg ! Si encore c'était à La Barbade… »

Les doigts d'Hermione se serrèrent sur l'enveloppe. Un plan venait de naître dans son esprit. Elle se lança :

« Ecoute Neville, j'ai une idée pour toi ! Fais-toi remplacer par un autre prodige, une personne aussi célèbre que toi. Propose Harry ! Ton directeur ne pourra pas refuser, c'est un bon coup de pub. Et puis Harry n'a pas encore de spécialisation, personne ne s'étonnera de le voir là-bas, le directeur ne peut pas l'ignorer. Et puis, ça fait un moment qu'il n'a pas pris de vacances, ça lui fera du bien de s'éloigner un peu d'ici. »

« Heu… Hermione… Ce genre de séminaire, c'est tout sauf des vacances… Ils vont lui demander d'assister à un tas de réunions, c'est super chiant. Tu ne peux pas demander ça à Harry… »

« Oh que si je peux ! Crois-moi, ce sera très bien. » répondit la jeune femme, sûre d'elle.

« En tout cas, tu m'ôtes une épine du pied ! Que puis-je faire pour te remercier ? » demanda Neville.

« Eh bien, il y a bien quelque chose mais… »

Doucement, elle glissa l'enveloppe vers lui.

« Débrouille-toi pour que ces documents soient ceux que Harry utilisera pendant son séjour. »

Neville jeta un coup d'œil dans l'enveloppe ouverte.

« Un séjour en famille d'accueil ? Harry n'est pas un peu vieux pour ça? Il n'est plus à l'école tout de même, et… Attends ! Ne me dis pas que tu cherches à lui faire rencontrer cette personne ? »fit-il, soudain suspicieux, en montrant le nom de l'hôte en cyrillique.

« Tout juste » acquiesça Hermione, un peu mal à l'aise.

Neville sourit.

« Tu peux compter sur moi ! » répondit-il. « J'espère au moins qu'elle est jolie. »

Hermione tenta de noyer son embarras dans sa tasse de café froid. Dégoûtée, elle plissa le nez. Elle n'avait jamais aimé le jus de chaussette.

« Pas terrible, hein ? » souffla Neville en riant.

Hermione sourit. Puis elle se leva pour prendre congé et quitta la pièce. Lorsqu'elle sortit dans la rue quelques minutes plus tard, il ne pleuvait plus. Son cœur était beaucoup plus léger qu'à son arrivée, et c'est d'un pas beaucoup plus allègre qu'elle prit la direction de son appartement, quelque part dans le Londres moldu.

o0o

Lorsque la jeune femme brune saisit le combiné et tapa les dix numéros inscris au dos d'une grande enveloppe blanche, il n'y avait plus aucune trace de peur dans ses yeux. Elle avait fait le bon choix, elle en était certaine. Tout se passerait bien. L'autre le lui avait assuré, et lui avait donné des preuves. Ainsi qu'un serment inviolable. Tout se passerait bien.

« Allô » fit la voix à l'autre bout du fil.

« C'est moi » dit la jeune femme. « Tout est prêt. Il devrait être à vous d'ici quelques jours. Tenez votre part du marché. »

L'autre laissa passer quelques instants, mais la jeune femme savait qu'elle souriait, à l'autre bout de fil. Une autre voix, grave cette fois, masculine, se fit entendre. Une voix qu'elle crû un instant reconnaître. Sauf qu'elle ne s'exprimait pas en anglais.

L'autre lança un « au revoir » puis raccrocha, mais la jeune femme ne s'en formalisa pas. Elle venait enfin de mettre un nom sur cette voix grave qui lui rappelait quelque'un, une personne qu'elle n'avait que trop connue. Elle avait identifié cette langue, qu'elle ne comprenait pas. Du russe.

En effet, tout se passerait bien.


A vous de choisir, qu'en faisons nous? Review