Je suis occupée à faire un grand ménage dans mes fictions depuis que j'ai décidé de m'inscrire sur AO3 (et oui, ça permet tellement plus de choses comme télécharger les histoires ect.). Du coup, je n'ai pas beaucoup avancé dans mes histoires mais voici un petit quelque chose que j'ai retrouvé au fond d'un dossier.

Si vous n'êtes pas du forum Who Run The World, cette histoire sera une inédite pour vous (à ma connaissance). Je l'ai écrite à la suite d'une nuit d'écriture où je me suis retrouvée Challengée par plusieurs auteurs et en voici le résultat. Elle est en deux parties et la deuxième partie arrive tout de suite.

Originellement appelée Juste une question de Silence mais je trouve que ça n'est vrai que pour le premier chapitre.

Allongée sur l'herbe, je pense, regardant le ciel bleu afficher des nuages de plus en plus nombreux. C'est étrange de les voir prendre une forme particulière que l'on croit reconnaitre mais dès que l'on tourne la tête, celle-ci s'efface et notre regard en crée une nouvelle pour la remplacer. Le soleil perce encore avec facilité et caresse ma peau de ses rayons brûlants. Quelques heures que je suis ici mais rien n'a bougé, rien n'a été dérangé. La plaine reste vide, les enfants sont encore à l'école, leurs mamans au travail.

Il y a juste moi. Moi qui ne sais pas ce que je fais là. On dit toujours qu'il ne faut pas quitter une dispute mais en parler. Aujourd'hui, elle m'a dit de me taire, qu'elle ne supportait plus d'entendre ma voix. Ma voix, ce qui fait que je suis moi. Dès lors, comment ne pouvais-je pas accéder à sa requête ? Je m'étais tue, j'avais enfilé un pull et j'étais sortie dans la fraicheur du petit matin. Elle ne voulait pas ma voix, elle ne m'aurait pas non plus. Maintenant, il est presque 11h et elle n'est toujours pas là.

Je sais que son métier lui prend beaucoup de temps et que parfois, elle se bat avec ses mots qui ne veulent pas sortir. Je sais que mes sessions d'entrainement sont longues et rigoureuses. Je sais que c'est une dormeuse et que je suis une lève-tôt. Mais c'est tout ce que je sais maintenant de notre couple. Je ne sais plus où nous en sommes, si même nous sommes encore quelque part. Alors je reste ici. Ici où elle me trouvera.

Ici où nous nous sommes rencontrées à nouveau il y a un an. Un rendez-vous qu'on avait pris quand on s'était séparées, chacune de notre côté, à la fin de nos études, une promesse que l'on s'était faites de se retrouver dix ans après. Et nous l'avions fait. Il n'y avait pas eu de mots, pas de paroles. Nous qui aimions nous exprimer, nous en avions profité pour nous taire. Le parc vivait, respirait autour de nous et éclatait en cris forts ou murmurés mais nous n'avions rien dit. Un peu de silence dans cet océan de paroles qui nous avait rapprochées puis éloignées l'une de l'autre. Ses yeux s'étaient accrochés aux miens. Nous avions juste échangé des regards et ceux-ci parlaient pour nous. Ils ont fait passer la tendresse, la joie, le bonheur, la chaleur, l'envie. Rien ne s'était passé cette nuit-là. Nous nous étions simplement tenues l'une l'autre et j'avais souri quand son ronflement avait pris possession de la chambre.

C'était facile. Les mots n'avaient pas encore fait leur chemin entre nous. Mais ils n'ont pas tardé à nous rattraper et ce silence qui nous avait réunies était parti en fumée. Je regarde ma montre : 11h15. J'ai peur de relever ma tête, d'écarter mes yeux de ce ciel bleu et tranquille pour m'apercevoir qu'elle n'est pas là. Et pourtant, je le fais. Je me redresse et laisse mon espoir parcourir le parc autour de moi. Presque vide. Une simple silhouette se tient, les mains dans les poches, à côté de la fontaine. Je n'en aperçois que l'ombre mais mon cœur m'apprend tout ce que j'ai besoin de savoir.

Je me relève, incapable de garder cette distance entre nous. Si le silence a marché une première fois, peut-être recommencera-t-il sa magie ? Qui sait ? Les mains dans mes poches arrières, je m'approche, regard baissé, honte inscrite sur le visage. Je suis prête à faire un effort, à ne plus chanter à quatre heures du matin sous la douche, à respecter ce silence dont elle a besoin mais comprend-t-elle ce qu'elle me demande de sacrifier ?

Ma voix, c'est moi. C'est ma voix qui lui a promis que ce serait pour toujours, c'est ma voix qui la demandera en mariage. Peut-on conjuguer le silence avec la parole ? On devrait le savoir après une année aux côtés de l'autre et pourtant … Pourtant, elle préfèrera toujours la solitude d'un livre de papier, là où je ne vivrais que pour les applaudissements et les cris d'une foule déchainée. Cela fait-il de nous des personnes impropres à vivre ensemble ? Devrions-nous nous séparer pour mieux nous retrouver ?

Je ne suis plus qu'à quelques pas et déjà sa présence m'intoxique. Qui sait ? Moi, je sens qu'elle est la personne de ma vie. Sans un mot, je me glisse à ses côtés sur ce banc de pierre usée et polie. Je prends sa main dans la mienne et joue avec ses doigts. Une seconde passe et je sens son regard vert-ambre se poser sur moi. Il n'y a plus d'orage, plus que la chaleur d'un soleil d'été dans un parc tranquille. La fontaine qui jaillit à côté de moi, le cadre parfait. Délicatement, je sors une petite boite de ma poche et la glisse entre ses doigts.

Elle est surprise. Ses yeux s'agrandissent quand elle comprend. Sa réponse murmurée me parvient à peine dans ce silence qui nous enveloppe :

—Ah.

Mes yeux se ferment et j'attends la sentence. Celle qui condamne. Elle presse ma main et je relève la tête comprenant sa demande silencieuse. Elle lit le sérieux dans mes yeux et pour la première fois, c'est Quinn qui parle haut et fort :

— Bien sûr que oui.

— C'est tout ce que je voulais entendre, lui répondis-je gentiment.

— Dommage, je pouvais te complimenter sur ta taille lilliputienne, sur ta fascination pour Xena et les cris que tu essayes de reproduire parfois, je pouvais …

J'interromps sa diatribe par ce que je fais de mieux. Je l'embrasse. Sa bouche au goût différent m'apprend qu'elle a dû céder à la tentation et fumer une Lucky strike avant de venir. L'arrière-goût de menthe me fait dire qu'elle a voulu me le cacher en mâchant un chewing-gum. Je m'écarte et la fusille du regard.

— Et ne me regarde pas comme ça ! se défend-t-elle promptement quand elle comprend.

—Fais pas l'innocente, la coupé-je avant qu'elle ne trouve un argument pour se défendre, tu as fumé.

—Grrr, s'énerve-t-elle devant mon reproche avant de jurer à voix basse, je te préférais silencieuse.

—Hé, m'exclamé-je en la frappant sur le haut du bras.

Son rire cristallin m'apprend que ce n'était qu'une blague. Si elle pense que j'en oublie la raison principale, elle se trompe … et elle va vite s'en rendre compte. J'ouvre la bouche prête à lui demander des comptes quand nous sommes brutalement interrompues.

— Iiiiiiiiiiiiii, c'est Quinn Fabray. Maman, je veux une photo, je veux une photo avec elle.

Je laisse ma tête retomber contre sa poitrine, soufflant ma frustration. Ma future femme est plus connue que moi. Il faudra bien que je m'y fasse un jour. Elle rit discrètement avant de se détacher pour prendre cette foutue photo. Je m'éloigne de quelques pas vers la fontaine, attendant patiemment de pouvoir reprendre là où on en était. Le marbre est usé, vieilli, couvert de graffitis. Ici, un je t'aime Scraboubou. Là un dessin ressemblant curieusement à un arbre, à moins que ça ne soit un balai à chiotte. Tout dépend de comment on le regarde.

Ses bras retrouvent ma taille et m'enlacent tandis que je me demande encore ce que l'auteur a voulu représenter. Son corps se presse contre le mien et je me laisse bercer. Sa tête repose sur mon épaule, mes mains se posent sur les siennes, je sens la fraicheur de l'anneau contre ma paume et je souris. Quelques mois, quelques mois et cette magnifique jeune femme sera mienne. Elle semble comprendre mes pensées car elle se tourne pour déposer un baiser sur ma joue.

Je croise son regard et n'y lit que l'amour. Les mots sortent de ma bouche avant que je puisse les retenir :

— Je t'aime, Scraboubou.

Un éclat de rire salue ce nouveau surnom trouvé sur le rebord d'une fontaine mais qui lui convient à merveille. Quelques mois, quelques mois et je serai madame Scraboubou.

La suite arrive :)