Bonjour à tous ^^

Pour la petite histoire, j'ai découvert (et terminé d'une traite) cette série il y a quelques mois et je suis totalement fan. Tellement que cette fin de saison 3 m'a poussé à écrire ma propre version de la suite :) Je n'ai pas encore eu l'occasion de lire des fics en français sur ce couple donc toute ressemblance est bien évidemment involontaire. Bonne lecture!

Pairing: Hannigram

Rating: K+ pour l'instant, très certainement M pour la suite

Autres tags éventuels: Slow Burn (oups); Post Wrath of the lamb; Cannibalism (est-ce vraiment nécessaire de préciser?)


Chapitre 1 : La chute

La chute sembla durer une éternité. Il avait toujours vu les enfers représentés comme un lieu chaleureux, bouillonnant d'âmes en perdition. Mais la douleur du choc, suivi par la sensation d'un froid glaçant lui balaya l'idée de la tête. Il n'arrivait pas à se rappeler sa dernière bouffée d'air. Peut-être était-ce avant qu'il ne décide de se laisser tomber de cette foutue falaise. Peut-être était-ce juste avant son atterrissage dans l'eau glaciale. Il n'aurait probablement plus l'occasion de s'en soucier.

Il avait lâché Hannibal. Leur collision avec l'eau les avait séparés. Temporairement ou à jamais, ça non plus il ne savait le dire. Il n'ouvrit pas les yeux, tentant d'oublier la douleur qui se répandait dans chaque centimètre carré de son corps. Les secondes passèrent, durant lesquelles il se laissa couler. Puis l'appel d'oxygène le tira de son état d'abandon. Il pouvait projeter tous les scénarios possibles, son instinct de survie était décidément le plus fort de ceux-ci. Il agita les bras et les jambes, s'extirpant difficilement de l'étreinte accablante de l'océan.

La première bouffée d'oxygène fut libératrice. Pourtant, malgré celle-ci, son corps ne semblait pas enclin à trouver suffisamment de force pour regagner la terre ferme. Puis vint la deuxième. La troisième fut entravée par une vague qui l'emporta vers le pied des rochers, comme un vulgaire déchet flottant. Il avala un peu d'eau lorsque son dos rentra en contact direct avec la roche. Il tenta de s'agripper mais celle-ci était bien trop lisse pour qu'il puisse arriver à quoique ce soit d'efficace. Le mouvement de recul de la vague lui reprit aussitôt l'espoir de retrouver la terre ferme. Il agita ses jambes au maximum, de nouveau à la recherche d'air mais les mouvements l'épuisèrent rapidement. Il songea encore à se laisser couler.

Soudain, alors que ses dernières forces semblaient le quitter, une main ferme attrapa son avant-bras, le ramenant vers la surface. Finalement, peut-être que Dieu ne voulait pas le laisser sombrer en enfer.

Il ouvrit pour la première fois les yeux depuis que ses pieds avaient quitté le sol. Il fut surpris de la luminosité que la lune apportait à sa vision. Lorsque son regard croisa celui d'Hannibal – bien vivant et ensanglanté – il ne sut pas dire s'il était content de le voir ou s'il regrettait qu'il ait survécu. Une chose était sûre, il ne pouvait pas lui en vouloir de le sauver de la noyade. De toute évidence, il avait réussi là où Will avait échoué : il tenait fermement de son autre bras un morceau de rocher érodé par l'eau. Il l'attira vers lui pour ensuite le saisir sous son aisselle et garder sa tête hors de l'eau.

- « Ce n'est visiblement la fin pour aucun d'entre nous, Will », cria-t-il pour couvrir le bruit des vagues écrasantes. « Nous devons trouver un moyen de remonter, si tu n'en vois pas d'inconvénient ».

- « L'inconvenance est actuellement le cadet de mes soucis, Dr Lecter », répondit-il entre deux inspirations, tentant de prendre appui à son tour sur l'un des rocher.

Il glissa, éraflant au passage une partie de son torse, mais Hannibal le rattrapa.

- « J'ai bien peur qu'un peu de concentration et d'agilité soient nécessaires », ajouta-t-il en replaçant sa main sur le rocher. « Si j'ai bon souvenir, il y a une crique à moins d'un kilomètre d'ici. »

Un kilomètre. Hannibal avait-il vraiment espoir qu'ils arrivent jusque-là en vie, dans leur état? Si Will n'avait plus de force, il était persuadé qu'Hannibal n'était pas loin de rendre ses armes. Il pouvait voir le sang couler de la partie émergée de son abdomen, là où la balle l'avait transpercé quelques minutes plus tôt. Il ne tiendrait pas très longtemps avant de se vider de son sang. Même s'il pouvait voir la souffrance sur son visage, il semblait déterminé à les sortir d'ici. Will lui en était indirectement reconnaissant.

Il laissa Hannibal prendre le pas. Ils longèrent prudemment les falaises, tantôt nageant, tantôt escaladant lorsque celle-ci était accessible. Will se demanda comment il lui était encore possible d'endurer tout ça physiquement. Ses blessures au visage et à l'épaule étaient en feu avec le contact du sel, et il était persuadé s'être fracturé le bras vu la douleur qu'il ressentait à chacun de ses mouvements. Devant lui, Hannibal semblait avoir de plus en plus de mal à tenir debout.

Il ne sut dire combien de temps ils avancèrent, avant d'apercevoir enfin ce qui ressemblait à une portion de plage. Elle était étroite de quelques dizaines de mètres, ce qui leur permit de ramper hors de l'eau sans grande difficultés. A quatre pattes, Will se laissa tomber sur le côté en gémissant, exténué mais soulagé d'y être finalement arrivé. A sa droite, il vit Hannibal s'écrouler aussi, en se tenant l'abdomen. Will resta quelques secondes allongé, reprenant son souffle, les yeux fermés. Il aurait pu s'endormir, se laisser porter par le bruit presque gracieux de l'écume se fondant sur les rochers. Mais il ne pouvait pas. Pas maintenant. Il rampa jusqu'à Hannibal et l'aida à s'allonger sur le dos.

- « C'est grave à quel point ? » demanda-t-il en indiquant la blessure.

- « Mon intestin est probablement transpercé et si je ne vois pas un chirurgien dans l'heure qui suit, l'hémorragie aura raison de moi. Je ne peux malheureusement rien faire tout seul, Will.»

Will grimaça, commençant à passer en tête toutes les possibilités d'action qui lui restait. S'il voulait sauver Hannibal, il devait appeler une ambulance. Il n'était cependant plus sûr de vouloir le sauver. Il pouvait le regarder se vider de son sang, avec la conscience tranquille. Et pourtant…

- « Vous avez une voiture dans votre maison ? Hormis celle de police que vous avez volée. Je peux aller la chercher et vous conduire à l'hôpital le plus proche. »

La bouche d'Hannibal s'étira en un sourire.

- « Tu sais parfaitement où je finirais si tu me conduis à l'hôpital. Je préfère finir mes jours avec cette magnifique vue et ces souvenirs plutôt que de retrouver ma cellule sans âme. »

- « Je ne vous pensais pas suicidaire, Docteur. »

- « Ce n'est pas du suicide en considérant que j'ai ai été touché par balle avant de tomber d'une falaise. »

Tomber d'une falaise n'était probablement pas le terme que Will aurait employé. Il était encore incapable de mettre les mots sur ce qu'il c'était passé et n'avait pas vraiment l'occasion d'y méditer maintenant. Il n'afficha cependant aucune once de culpabilité.

- « Ca ne répond pas à ma question. Une voiture ? »

- « Seulement une moto. Cela ne risque pas d'être très pratique vu mon état.»

Will se surprit un instant à imaginer Hannibal avec une veste en cuir et un casque, chevauchant une moto. Cet homme ne manquait décidément pas de ressource.

- « Peut-être mais c'est tout ce qu'on a comme option. Je vous laisse réfléchir sur l'endroit où nous diriger dès que je l'aurais », lança Will en lui tournant le dos pour commencer l'ascension de la route. « Restez dans le coin. »

Hannibal tenta de se redresser mais la douleur sembla le maintenir au sol.

- « Will ! Il y a un coffre dans ma chambre, à l'intérieur de la penderie. Le code est 1906, tu y trouveras les clefs. Prends tout ce qui te semble utile », dit-il avec difficulté.


Will se tourna une dernière fois vers lui, hocha la tête et disparut dans l'obscurité.

Will ne perdit pas de temps dans la maison d'Hannibal. Il se dirigea directement vers la chambre – après avoir ouvert quelques portes au hasard – entra le code et ouvrit le coffre. Il ne s'attarda pas sur la collection de costume à l'aspect luxueux, emballés individuellement dans des bâches en plastique. Ses yeux s'écarquillèrent lorsqu'il mit la main sur deux gros paquets de billets verts, entassés soigneusement sur une série de documents. Il les enfonça maladroitement dans ses poches et saisit les clefs de la moto. Il ramassa quelques babioles qui lui semblaient utiles, avant de sortir de la maison. Son regard se posa vers le salon, dont la baie vitrée attestait des évènements survenus un peu plus tôt dans la soirée. Avec un soupir, il s'autorisa à ramasser l'arme que Dolarhyde avait fait tomber lors de leur affrontement.

Il prit la direction du garage, s'équipa d'un casque et démarra la bécane, reprenant la route qu'il venait de parcourir à pied.


Il ne savait pas s'il allait retrouver Hannibal là où il l'avait laissé. Il lui avait bien fallu une demi-heure pour remonter la route pentue depuis la plage. Malgré la douleur et le froid engourdissant chacun de ses membres, il avait tenté d'être le plus rapide possible.

Il n'avait jamais vraiment conduit de moto auparavant, hormis peut-être une fois pour essayer celle de son beau-frère. Il n'eut cependant aucun mal pour descendre jusqu'à la plage, hormis la douleur atroce qu'il ressentait tout au long de son bras gauche.

- « Hannibal ? » appela-t-il en coupant le moteur de l'engin et en retirant son casque.

Aucune réponse.

Il avança de quelques mètres dans le sable, essayant de se rappeler l'endroit exact où il l'avait laissé avant son départ.

- « Hannibal ! »

C'est là qu'il remarqua sa silhouette, toujours allongée dans le sable. N'importe qui passant dans le coin aurait pu penser qu'il s'agissait d'un cadavre, tant les signes de vie qui s'en dégageaient étaient absents. Malgré lui, il ressentit un sentiment d'inquiétude devant son état et s'empressa de le rejoindre.

Hannibal ne réagit pas lorsqu'il se laissa tomber à genoux à ses côtés. Il ouvrit difficilement les yeux, un léger sourire sur son visage.

- « Tu l'as trouvée. »

Sa voix n'était qu'un murmure. Will acquiesça en silence et entreprit de le relever, passant son bras sous ses épaules. Il frissonna en ressentant la chaleur de son corps, lui qui était en état de tremblement constant depuis qu'il avait rencontré l'océan. Il prit soin de ne pas toucher sa blessure et donna toutes les forces qui lui restaient pour le mettre debout.

Hannibal vacilla un peu mais parvint à rester sur ses deux jambes.

- « Nous devons faire vite. Avez-vous une idée d'où on pourrait vous faire soigner ça ? » Demanda Will en se dirigeant vers la moto, non sans surveiller qu'Hannibal le suivait bien.

- « Je connais un confrère, à quelques kilomètres d'ici. Nous mangions souvent ensemble en été, lorsque nos emplois du temps le permettaient. Il est divorcé et vit seul, il ne devrait pas y avoir de problème à le faire collaborer, » expliqua-t-il en sifflant à chaque pas qu'il faisait, accaparé par la douleur.

- « Et le dit confrère se risquerait-il à vous soigner en sachant qui vous êtes vraiment ? »

- « Bien sûr que non. C'est pour ça que je compte sur toi, Will. Je remarque que tu as bien pris tout ce qui était utile », répondit Hannibal en posant sur regard sur l'arme que le plus jeune portait à sa ceinture.

- « J'ai longuement hésité avec les pyjamas en satin », tenta-t-il de plaisanter en fuyant le regard de l'autre homme.

Arrivés devant la moto, Hannibal prit une grande inspiration en se préparant à l'enjamber, anticipant de toute évidence la douleur.

- « Derrière moi », indiqua Will en montant le premier.

- « J'apprécierais. »

Ben voyons, pensa Will tandis qu'il sentait la moto s'affaisser sous le poids du psychiatre. Même s'il était confiant au départ, il ne put s'empêcher de déglutir en sentant Hannibal si proche de lui. Pour éviter de trop y faire attention, il renfila le casque et démarra le moteur.

- « Guidez-moi vers ce cher sauveur alors, et accrochez-vous bien. »

Il regretta presque ses mots lorsqu'il sentit Hannibal rapprocher son bassin et passer un bras autour de son ventre.

- « Je te prie de m'excuser mais ma blessure ne me permet pas d'atteindre l'arrière de la moto pour un support. »

Will leva les yeux au ciel mais ne releva pas la justification. Il poussa l'accélérateur et la moto démarra doucement. Il mit un certain temps à trouver le bon équilibre pour éviter de les envoyer dans le fossé, le poids sur la moto étant réparti différemment par rapport à son premier trajet. Il écouta attentivement les instructions d'Hannibal, qui s'évertuait à crier pour se faire entendre par-dessus le sifflement du vent et le vrombissement du moteur.

L'eau glacée lui était parue un peu désagréable lors de leur chute mais cette sensation avait été estompée par la poussée d'adrénaline. Maintenant que celle-ci s'était atténuée, il mourrait littéralement de froid. Sa chemise humide en contact direct avec l'air l'avait transformé en glaçon géant. La seule source de chaleur qui lui était bienfaisante était le bras d'Hannibal, posé autour de son ventre. Il pouvait également sentir sa chaleur corporelle au niveau de son dos, mais elle était beaucoup moins marquée suite aux quelques centimètres d'air les séparant.

Durant le trajet, il sentit l'étreinte d'Hannibal se resserrer, en particulier lorsqu'il prenait ses virages un peu brusquement. Il se surprit même à les provoquer volontairement, pour voir s'il aurait une autre réaction de sa part. Mais l'autre homme se tut, le laissant conduire sans intervenir.

- « La maison est un peu plus en hauteur sur la route, tu devrais t'arrêter ici pour ne pas attirer l'attention », conseilla Hannibal tandis que Will commençait déjà à décélérer.

Par précaution, il laissa la moto dans un endroit à l'abri de tout éclairage artificiel. Il aida Hannibal à descendre et le suivit quand il prit le pas en boitant vers la maison de son confrère. Il n'était visiblement pas le seul à être gelé : il pouvait voir les épaules et les bras d'Hannibal se contracter, luttant contre le froid.

Lorsqu'ils arrivèrent devant la maison, Will fut rassuré de voir qu'une lumière était allumée à l'intérieur, lui indiquant que le médecin était bel et bien présent.

- « J'espère qu'il n'a pas déménagé », murmura Hannibal en se dirigeant vers l'arrière de la maison.

- « Attendez, quel est le plan ? On rentre par effraction au risque qu'il appelle les flics ? »

- « S'il me voit, il y a de grandes chances que ce soit le cas, oui. En revanche, il y a moins de probabilité qu'il te reconnaisse toi. »

- « Hannibal, je suis recouvert de sang et j'ai la joue à moitié ouverte. Je ne pense pas que sonner et me présenter comme ça nous permette d'arriver à un scénario où on s'en sort tous les deux gagnants. »

Hannibal sembla réfléchir un moment, recourbé sur lui-même et pressant fermement son abdomen.

- « Fais-lui croire que tu es tombé en moto et que tu as besoin d'aide. Je sais que tes talents d'acteur sont particulièrement bons. »

Will crut discerner une pointe de reproche dans sa voix. Il ne répondit pas et sonna tandis que l'autre homme se tapissait dans l'obscurité. Comme Hannibal l'avait suggéré, il joua son meilleur jeu à travers le vidéophone de l'entrée. Il gémit, prit une voix larmoyante, lui expliqua que sa femme et ses enfants devaient s'inquiéter. Son empathie exceptionnelle lui permit de se mettre à la place du médecin et de sortir les arguments corrects pour le sensibiliser à sa situation. C'est avec satisfaction qu'il regarda la porte d'entrée finalement s'ouvrir et un vieux monsieur y apparaitre à son porche. Il était trapu, chauve et de toute évidence touché par l'histoire de Will.

- « Mon garçon, vous êtes bien arrangé ! » dit-il en l'invitant à rentrer. « Vous avez de la chance, je suis médecin, j'appelle de suite les secours. »

- « Ce ne sera pas nécessaire Docteur… »

Will profita de son premier pas dans la maison pour sortir son arme et le pointer droit vers le vieil homme, qui prit aussitôt un air effrayé.

- « Je vous souhaite le bonsoir Dr Cameron, » annonça Hannibal en pénétrant à son tour dans la demeure.

- « Hannibal Lecter, c'est impossible ! » s'exclama-t-il, l'air incrédule. « Vous êtes en prison ! »

- « Visiblement, non, » répondit-il d'un ton presque blasé.

- « Ok, alors écoutez-moi », commença Will. « Si vous restez calme et que vous faites exactement tout ce que je vous dirais, il n'y aucune raison que tout ceci se termine dramatiquement. Je n'ai aucune intention de vous faire du mal mais vous m'y obligerez si vous affichez la moindre résistance, c'est compris ? »

Il remarqua du coin de l'œil Hannibal pincer les lèvres devant son discours : de toute évidence, cela ne semblait pas lui convenir.

Le Dr Cameron hocha frénétiquement la tête de haut en bas, ses yeux passant de Will à Hannibal en quelques fractions de secondes.

- « Une balle m'a transpercé la partie droite de l'abdomen. Je n'ai aucune idée de l'impact sur mes organes mais j'ai de bonnes chances de croire que l'hémorragie interne et la péritonite me tueront si vous n'agissez pas rapidement, » expliqua Hannibal.

Will remarqua que son teint avait soudainement pali et qu'il lui était de plus en plus difficile de s'exprimer sans serrer les dents de douleur. Son état devait être plus grave qu'il ne l'avait cru au début.

- « J'aimerais beaucoup vous aider mais vous semblez oublier que je ne suis pas chirurgien. Cela dépasse entièrement mes compétences ! » Répondit le Dr Cameron, les mains soudain emprises à des tremblements de frayeur.

- « Je ne vous demande pas de faire un miracle Dr Cameron, mais de faire en sorte d'éviter ma mort durant les prochaines heures. Vous pouvez faire ça, n'est-ce pas ? »

Will commençait à sentir l'impatience dans la voix d'Hannibal. Cela n'avait toutefois pas l'air de convaincre le vieux médecin.

- « Si vous ne le faites pas, mon ami se chargera de retrouver votre fille et lui fera subir les mêmes atrocités que vous me faites subir en n'intervenant pas. Et je vous assure docteur, il vaut mieux éviter à une jeune fille de souffrir aussi abominablement », menaça Hannibal en se rapprochant de lui.

Will tiqua à l'entente du mot ami mais ne prit pas la peine d'intervenir. Une chose était sûre, si jamais le Dr Cameron refusait, il ne se mettrait certainement pas à la recherche d'une quelconque vengeance sur sa fille mais si ce type de menace leur permettait d'obtenir satisfaction...

- « Bien… Je… Vous pouvez venir dans mon cabinet… Je vais essayer de faire au mieux… » Répondit finalement le Dr Cameron, la voix tremblante. « Je préfère vous prévenir tout de suite, je n'ai pas d'anesthésiant suffisamment puissant pour vous endormir totalement. Je pourrais soulager localement la douleur mais vous risquez tout de même de passer un sale quart d'heure… »

Il les conduisit dans son cabinet, sortit une série d'instruments du tiroir ainsi que plusieurs bouteilles de désinfectant.

- « Allongez-vous et retirez votre haut. Nous allons devoir trouver un moyen de vous immobiliser, j'ai quelques draps dans ma chambre qui pourraient servir de lien et vous maintenir… »

Pendant que le vieil homme disparut à la recherche des dits draps, Will aida Hannibal à retirer son pull, dévoilant sa blessure au grand jour. Il frissonna en voyant l'état de celle-ci : les contours de l'impact formaient des espèces de cratères d'aspect noirâtre. Malgré le temps écoulé, la blessure suintait toujours abondamment et Will se demanda comment il pouvait encore tenir debout dans cette condition.

- « Ça a l'air mauvais… » Commenta Will en ne détachant pas les yeux de son abdomen.

- « Ça l'est. Il va devoir s'occuper de toi aussi. Ce serait stupide de survivre à une chute dans le vide et de mourir d'une bête infection », répondit Hannibal en indiquant son visage et son épaule.

- « J'ai déjà survécu à bien pire. »

Son regard croisa le sien. C'était la première fois depuis leur face à face sur la falaise. Sauf que cette fois-ci, Will tenta de n'afficher aucune envie, aucune admiration. Il ne voulait pas qu'Hannibal croie qu'il l'avait enfin à ses côtés. Il ne voulait pas le laisser gagner, en tout cas pas avant d'avoir eu l'occasion de faire le point sur la situation.

- « Ça devrait faire l'affaire », les interrompit le Dr Cameron en arrivant les bras pleins de draps blancs fins.

Hannibal s'allongea prudemment sur la table d'examen et le Dr Cameron en profita pour passer l'un des draps au-dessus de ses pectoraux, pour ensuite le nouer solidement sous la table. Il en fit de même pour ses jambes.

- « Je vous demanderais juste d'intervenir s'il s'agite trop. Mettez un masque et des gants par précaution », demanda le médecin à Will. « Je vais devoir ouvrir un peu la blessure pour constater les dégâts, vous m'en voyez désolé… »

Sans surprise, il n'y avait aucun regret dans sa voix. Will l'observa mettre ses gants et son masque, désinfecter les alentours de la blessure et injecter un liquide – ce qu'il supposa être le semblant d'anesthésiant – via une seringue sous sa peau. Il se plaça juste derrière la tête d'Hannibal, il avait ainsi une bonne vue sur tous les faits et gestes du médecin. Ils attendirent quelques minutes que le produit agisse, puis l'opération de fortune commença. Hannibal réagit à peine lorsque le scalpel entama le découpage de la peau noircie. Peut-être l'anesthésiant fonctionnait-il mieux que ce qu'avait laissé supposer le Dr Cameron.

Will avait beau avoir assisté aux scènes de crimes les plus atroces, il ne pouvait s'empêcher d'avoir des haut-le-cœur devant la découpe directe de la chair. Peut-être le fait de savoir la victime vivante modifiait sa façon de ressentir les choses. Hannibal ne broncha toujours pas (ou en tout cas rien d'excessif) lorsque le Dr Cameron pénétra l'écarteur dans la plaie.

- « Préparez-vous à intervenir », indiqua-t-il à Will. « Il y a normalement des bâtonnets en bois dans le premier tiroir à votre droite, je vous conseille d'en placer un dans sa bouche. »

Il s'exécuta et Hannibal ne se fit pas prier pour ouvrir les lèvres. Il lança un dernier regard à Will puis ferma les yeux, serrant le morceau de bois entre ses dents.

La presque sérénité sur son visage s'envola en quelques secondes lorsque le Dr Cameron commença à écarter les chairs en deux parties distinctes, affichant progressivement l'intérieur de son abdomen. Will détourna le regard tandis que cette fois-ci, Hannibal céda à l'expression de la douleur. Il entendit ses cris augmenter en intensité avec l'ouverture de l'écarteur.

- « Le plus dur reste à venir », commenta le chirurgien, ce qui en soit n'était pas très rassurant. « Voyons voir ce que je peux faire… »

Will remarqua que ses mains tremblaient en farfouillant l'intérieur de la plaie, il ne devait certainement pas avoir l'habitude de ce genre d'intervention.

- « Vous devez être chanceux, on dirait que seule l'extrémité a été touchée. Je vais nettoyer les lésions de la balle et retirer le morceau endommagé avec votre appendice. Je vais nettoyer au mieux les écoulements pour éviter tout foyer infectieux. Pas besoin de préciser que ce sera extrêmement douloureux. »

Will fut tout de même soulagé par le pronostic, même s'il ignorait les éventuelles conséquences à long terme.

- « C'est presque fini », murmura-t-il à Hannibal en plaçant ses mains sur ses épaules pour l'empêcher de bouger.

Au début, il devait avouer avoir pris un malin plaisir en le voyant souffrir, lui qui avait toujours affiché une figure passive face à la douleur. Mais ce plaisir coupable s'était volatilisé à l'instant même où les cris d'agonie avaient franchis ses tympans.

Le plus jeune détourna son regard de l'opération et se concentra uniquement sur la pression qu'il appliquait sur les épaules du psychiatre. Des cris reprirent de plus belles tandis qu'il entendait le bruit de chair qu'on découpe, de sang qui coule et de boyau qui glisse. Il aperçut des larmes de douleur couler le long de ses joues alors que son buste était pris de convulsions involontaires. Will appliqua plus de force à le maintenir contre la table.

Quelques secondes plus tard, le visage d'Hannibal se figea et sa tête tomba mollement sur le côté, comme s'il s'était brusquement endormi.

- « Passé un certain seuil de douleur, le cerveau se déconnecte, provoquant l'évanouissement », expliqua le Dr Cameron, toujours occupé à sortir des lambeaux de chair du trou formé par la balle. « J'ai eu la chance d'assister et de participer en partie à quelques appendicectomies durant mes stages de médecine. Mon travail ne sera jamais aussi propre qu'un vrai chirurgien, c'est pourquoi je vous suggère un séjour à l'hôpital si vous voulez sauver votre… » Il chercha ses mots mais ne termina pas sa phrase. « J'ai presque fini… »

Will le laissa terminer en silence, jetant de temps à autre un œil vers l'homme inconscient. Ses cheveux étaient encore humides de leur séjour dans l'eau et le sel leur donnait un aspect terne, quoique sauvage, qui lui changeait de son apparence propre sur lui. Sa mâchoire s'était décontractée et Will en profita pour retirer le bâton de bois de sa bouche entrouverte. Il dénoua les draps et retourna Hannibal lorsque le docteur lui demanda.

- « J'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir », dit finalement le Dr Cameron en passant du désinfectant sur la blessure enfin refermée.

- « Et je vous en suis reconnaissant", répondit Will en s'écartant de la table médicale. "Comme promis, nous vous laisserons tranquille."

Le médecin pinça les lèvres.

- « Vous savez ce que cet homme a fait. Je ne vous connais pas mais je suis sûr que vous n'êtes pas comme lui, vous pouvez faire quelque chose de bien. Ici, maintenant, vous avez juste à appeler la police. Je dirais ce que vous voulez mais par pitié, ne laissez pas ce monstre reprendre sa liberté… »

- « Comme vous venez de le dire docteur, vous ne me connaissez pas. »

La vérité était qu'il ne savait plus où il en était. Il ne cautionnait pas ce qu'Hannibal avait fait mais il se sentait incapable de le punir pour l'instant. Il soupira et remarqua que le médecin avait recommencé à agiter ses mains.

- « Bien, j'aurais le mérite d'avoir essayé… »

Sans que Will n'ait le temps de voir venir quoique ce soit, le vieil homme se jeta soudainement vers lui, tentant d'attraper d'un geste habile l'arme qu'il avait rangée dans la ceinture de son pantalon. Il agrippa le poignet du docteur en voulant l'en empêcher mais cela ne suffit pas : le médecin le repoussa avec une force déconcertante pour son âge et recula de quelques pas en pointant l'arme vers lui, les mains toujours tremblantes.

- « Non, attendez ! » tenta de raisonner Will en s'avançant.

- « Reculez ! »

- « Vous n'avez pas à faire ça ! »

- « J'ai dit reculez ! »

L'homme n'était pas sûr de lui avec son arme, Will le voyait. Il profita de cette faiblesse pour plonger droit sur lui. Le Dr Cameron appuya sur la gâchette du revolver, qui fut heureusement déviée par le coup d'épaule de Will sur l'extérieur de son poignet. Le revolver tomba sur sol avec un gros bruit métallique et le médecin chuta suite à l'assaut.

- « Vous n'auriez pas du ! », menaça-t-il en se redressant.

Avant qu'il n'ait eu le temps d'ajouter quoique ce soit, il remarqua que le Dr Cameron avait saisi le scalpel utilisé quelques minutes sur Hannibal. Sans réfléchir, il se relança sur lui pour lui extirper et dans sa manœuvre, les fit tomber tous les deux. Le médecin lutta pour garder l'objet en mains, se débattant de toutes les façons possibles. Bien que blessé, Will arriva facilement à éviter ses coups, trop prévisibles. Pour éviter la lame tranchante de l'outil, il poussa brutalement le bras du docteur : au lieu de l'atteindre lui, le scalpel s'enfonça dans la gorge du vieil homme avec un bruit sanglant.

Will recula juste à temps avant de recevoir le premier jet de sang lorsqu'il retira l'instrument du cou de la victime. Il regarda presque de façon curieuse l'homme se tenir la gorge tandis qu'un flot de sang traversait ses doigts par à-coup. Il ne fallut que quelques secondes avant que celui-ci ne s'écroule à ses pieds.

- « Non, non, non, non… » Répéta Will pour lui-même, en s'éloignant du corps. « Merde, c'est pas vrai ! »

De la légitime défense, c'est juste de la légitime défense. Il tenta de se rassurer alors que ses pensées étaient incapables de s'aligner correctement. Son regard passa d'Hannibal, encore inconscient sur la table, au Dr Cameron, vraisemblablement déjà mort à ses pieds. Il venait de tuer un homme le deuxième en quelques heures.

Réfléchis. Il inspira profondément et ferma les yeux. Il ne pouvait pas transporter Hannibal dans cet état. Non seulement il était plus lourd que lui mais il risquait d'ouvrir ses blessures fraichement recousues. Il ne pouvait pas non plus rester ici et prendre le risque que quelqu'un remarque la mort du Dr Cameron. Il pouvait partir seul mais quel intérêt avait-il ? Il lui restait l'option d'appeler le FBI et leur indiquer où se trouvait Hannibal.

- « Hannibal, » tenta-t-il d'appeler.

Il devait se réveiller. Il n'y arriverait clairement pas tout seul.

- « Hannibal ! »

Il l'avait souvent aiguillé dans ses décisions à prendre - malheureusement pour le manipuler - et pourtant, il avait besoin de sa lanterne, au moins pour cette fois.

Il tapota légèrement les joues du psychiatre qui resta totalement amorphe, toujours à plat ventre sur la table médicale où le Dr Cameron avait terminé de recoudre son dos. Lors de l'opération, il n'avait pas remarqué la marque qu'avait laissée Mason Verger. La cicatrice était propre et nette, elle aurait pu être décorative si Will n'en avait pas connu l'origine. Il oublia l'idée de passer ses doigts dessus et entreprit d'enfin retirer ses vêtements humides qui lui collaient à la peau depuis la chute.

Il s'essuya avec les draps blancs, passant délicatement le tissu sur ses blessures encore ouvertes. La sensation d'être enfin sec était agréable. Ses plaies avaient arrêté de saigner, ce qui était déjà bon signe : au moins il ne risquait plus de se vider de son sang.

Il attrapa la bouteille de désinfectant et commença à se soigner seul. La plaie à sa joue était pour l'instant la plus douloureuse : le couteau avait probablement du toucher l'os et une partie de ses dents, si bien qu'il avait horriblement mal en gardant la mâchoire complètement fermée. Son bras était également bien arrangé : il pouvait voir, en se tournant, son côté gauche teinté d'une couleur bleutée, presque noire. Il espérait juste que la douleur était due à l'hématome et pas à un os brisé, ce qui prendrait beaucoup plus de temps à guérir.

Il fouilla la maison à la recherche de vêtements secs. Bien que le Dr Cameron n'avait pas du tout le même gabarit que lui ou Hannibal, il trouva des sweatshirts qui, bien que larges, ne clochaient pas trop lorsqu'il les enfilait. Il eut par contre du mal à trouver un pantalon correct, ceux-ci étant trop grand de plusieurs tailles. Il récupéra sa ceinture et essaya de son mieux d'avoir l'air présentable, même si son reflet dans le miroir lui donnait l'air de venir tout droit des années 90. Il prit également le temps de choisir ceux d'Hannibal, bien qu'il doutait que celui-ci veuille les enfiler compte tenu de ses goûts raffinés.

Il trouva la salle de bain et s'arrêta quelques minutes pour se rincer le visage : la sensation de sel sur sa peau était déplaisante mais il n'avait clairement pas le temps pour une douche même s'il en mourrait d'envie. Il grimaça en observant son visage de plus près, déformé par le poignard de Dolarhyde. Il imagina la réaction de Molly en le voyant comme ça, oubliant quelques secondes la probabilité qu'il ne la revoie plus jamais.

Lors de son tour dans la maison, il croisa différents portraits du Dr Cameron, accompagné d'une jeune femme, vraisemblablement sa fille. Une boule se forma dans son ventre en se remémorant l'image du docteur se vidant de son sang. Il venait de détruire une famille.

- « Hannibal », retenta-t-il d'un ton presque désespéré. « Il faut qu'on parte… »

Il n'eut toujours aucune réaction de sa part. Il avait trouvé les clefs de voiture du docteur ainsi que quelques dollars dans ses tiroirs.

Il se sentait incapable de s'asseoir pour réfléchir et continua donc les cents pas dans la maison pendant de longues minutes. En ouvrant l'un des placards, il tomba sur ce qui ressemblait à une collection d'alcools de luxe. Des bouteilles de whiskey, rhum et autres liqueurs étaient parfaitement alignées et presque tentantes. Trop tentantes, en réalité.

Will hésita puis ouvrit celle de whisky et en avala de longues gorgées directement au goulot, sans prendre la peine de le déguster. Il laissa échapper un gémissement à la sensation de l'alcool coulant le long de son œsophage : il lui apportait une chaleur douce et rassurante. Il ferma les yeux tandis qu'il commençait à sentir son corps trembler. Il reprit de grandes inspirations et ingurgita de nouveau le précieux liquide.

Lorsqu'il fut satisfait des effets de la boisson, à savoir la perte de pied avec la réalité, il se dirigea vers le canapé et s'y laissa tomber. Ses paupières se fermèrent presque contre son grès et il s'endormit, tentant ainsi d'échapper aux évènements.

A suivre...


Et voilà pour ce premier chapitre :-) j'espère qu'il vous a plu (s'il existe encore des lecteurs francophones de ce fandom hihi) et n'hésitez pas à laisser une petite review. La fic est presque terminée, je posterais donc les chapitres assez rapidement après relecture

PS: Si jamais (comme moi) vous avez envie de discuter de cette merveilleuse série (et d'Hannigram :D), n'hésitez pas à me contacter, je ne sais pas trop où trouver d'autres fans francophones ;-)