Because of you
Capitaine : Comment ça se passe ?
Egard : Ca se propage de plus en plus Capitaine, je ne sais pas si on pourra atteindre l'étage. Il nous faudrait du renfort !
Le Capitaine lâcha le talkie-walkie en soupirant, avant de se gratter la tête, l'air contrit. La situation était tendue, cette histoire était tendue.
Capitaine : Franck, Romuald, l'échelle, tout de suite ! Aspergez de l'extérieur ! Il faut qu'on arrive à rentrer.
Il regarda ses hommes, comme des pantins, exécutant les gestes répétitifs mais pourtant salvateurs ; les voyant se mouvoir au rythme de la course effrénée du diable qu'ils essayaient de dompter, se demandant, si cette fois-ci encore, ils allaient échouer.
Ses pensées furent interrompues par l'un de ses hommes.
Pierre : Les voisins ne les ont pas vus sortir. Ils pensent qu'ils sont encore à l'intérieur.
Le Capitaine se prit la tête entre les mains d'un mouvement saccadé par la rage et l'impuissance, fixant son regard sur le brasier dansant devant lui, ce feu qui consumait cette maison à une allure cathodique et malsaine, suppliant un dieu auquel il ne croyait pas d'épargner la vie des deux personnes qui se trouvaient à l'intérieur ; espérant que par un miracle, cette sordide et funeste progression de chaleur et de fumée s'arrêterait, sachant pertinemment que ses hommes devraient être rappelés, luttant contre des flammes invincibles auxquelles ils ne pourraient se mesurer ; risquant leurs vies pour une cause déjà perdue ; comme toutes les autres depuis 6 mois déjà.
Capitaine : Egard, sortez, ça ne sert à rien. On va le faire de l'extérieur.
Il secoua la tête, dépité, luttant contre la nausée qui s'était éprise de sa culpabilité. Regardant ses hommes sortir, leurs combinaisons ravagées par la suie.
Capitaine : On connaît l'identité des deux victimes ?
Pierre : Oui Capitaine. Yann Berthier et Kévin Laporte.
Le Capitaine redressa la tête vivement, regardant son subordonné, puis tourna une nouvelle fois son regard vers la maison en feu. Il sentit les larmes monter, sa gorge se serrer, son ventre se nouer. Depuis 6 mois, depuis le tout premier feu, il les avait croisés, jour après jour, incendies après incendies ; tous meurtriers, tous dévastateurs. Il les avait vus mener leur enquête, tourner, piétiner, ayant même peur qu'ils ne se laissent submerger par cette folie meurtrière qui faisait rage et dont ils n'arrivaient pas à trouver l'auteur. Il avait appris à les connaître, à les apprécier, à se laisser étonner par leur ferveur et leurs capacités à rebondir, à tenir bon, à ne pas se laisser enliser dans la détresse des familles des victimes ; à toujours aller au bout de leurs convictions. Il avait été grandement surpris de leur amour, si peu expressif dans les gestes aux yeux du monde, mais si débordant dans leurs regards respectifs. Il les avait pensé invincibles, car leur force était d'être deux, d'être heureux, de faire face aux autres sans jamais baisser le regard. Et comme leur amour les avait aidés, c'est aussi à deux, aujourd'hui, qu'ils avaient péri.
