Ses yeux azur étaient posés sur la cheminée, fixant sans jamais ciller les flammes vacillantes. Rouge, orange. Orange, rouge. Encore et encore, fascinant. Dehors, les flocons tombaient inlassablement, sans qu'elle ne fasse attention.

On la jugeait folle. On disait qu'elle était loufoque. On l'insultait de timbrée.

Luna était peut-être quelqu'un de tête en l'air, quelqu'un qui n'avait pas les pieds sur terre, mais elle était tout sauf stupide. Luna était rêveuse, Luna était étourdie, Luna était originale.

Mais elle aussi pouvait ressentir des émotions comme la tristesse, la peur, le regret.

Son regard est toujours plongé droit dans le feu ardent. Les bûchent craquent, une à une, elle emplissent l'air d'une douce mélodie qui la fait rire. Elle se rappelle, elle se souvient de son sourire, de sa chaleur. Elle sait de nouveau à quoi ressemblaient ses étreintes vivantes, chaleureuses.

Une véritable fée.

La rivière dorée de ses cheveux, la peau cristalline, les yeux d'un bleu renversant, d'un bleu de glace. Tout avait semblé si surréel ! Elle aurait du profiter. Elle ne pouvait pas se douter.

Un doux sourire éclot sur ses lèvres, alors qu'elle tend une main vers le feu. Une étincelle plus forte que les autres lui saute dans la main, ce qui en rajoute à son sourire.

Luna tient le feu dans sa main.

Elle sait que son père est en train de traquer les Enormus à Babille dans la rivière. Elle a eu beau lui dire qu'étant gelée, il ne trouverait rien, il ne l'a pas écoutée. Peut-être est-ce parce qu'il a surtout besoin d'être seul, en cette période de fête. Luna n'a pas besoin de mots pour lui dire qu'elle comprend.

Elle sait. Tout simplement.

Luna est toujours concentrée sur la minuscule flammèche qui court le long de sa paume, et referme le poing dessus, étouffant la flamme à sa naissance.

Une minuscule larme commence à rouler le long de sa joue, allant se perdre dans les mèches rebelles blondes encadrant son visage juvénile. Une seconde ne suivra pas, elle s'en ait fait la promesse.

Elle le lui avait toujours dit.

" Ne pleures pas. Ne pleures jamais, Luna, parce que si quelqu'un un jour te quitte, il ne voudrait pas que sois plongée dans la tristesse. Au contraire, vis, vis de toute tes forces, fais battre ton coeur, pour honorer sa mémoire. "

Non, elle ne pleurera pas. Elle lui a promis.

Ses yeux bleus se détournent enfin du feu, et se ferment progressivement, alors que Luna s'endort. Elle savait pourquoi elle regardait le feu jusqu'à tomber de sommeil, elle savait pourquoi son père allait chasser dans la plaine enneigée, prétextant n'importe quelle excuse.

Peut-être parce qu'inconsciemment ça lui rappelait sa mère.