NDA : Je n'ai pas l'habitude d'écrire à la première personne, et encore moins au présent. C'est un essai.

Disclaimer : L'univers appartient à J..

Premier

Je m'appelle Volodia. C'est un prénom peu commun. C'est un prénom qui m'a valu de nombreuses brimades. L'association Volodia-Voldemort a trop souvent été faite à mon goût. Mais cela a également joué un rôle séducteur tout à fait surprenant. Comme ma mère dit souvent : « c'est un prénom de tombeur, ça ! ».

Mes parents ont sûrement eu raison de me nommer ainsi.

Je fais leur fierté et celle de mes amis. Est-ce que je devrais leur dire à tous que peu m'importent ce qu'ils disent ? Que je me fiche d'eux, qu'ils ne sont que de la figuration dans ma vie ? Qu'il n'y a que ma petite soeur qui compte ? Elle et Vaclac, bien sûr.

Mais Vaclav est dans le coma. Alors, pour le moment, c'est surtout Kenza.

Je regarde par la fenêtre. Volodia Krum, fils de Viktor Krum. Second fils. Mais je n'ai pas de grand frère. Mort alors qu'il avait deux ans à peine, trois mois avant ma naissance prématurée. Viktor Junior était l'aîné. Et il devait hériter de mon père. Perpétuer la lignée des grands joueurs de quiditch.

Malheureusement, il est mort. Mon père a beau être très compréhensif, il voulait m'appeler Victor Krum. En jouant sur une lettre. Et heureusement pour moi, ma mère a refusé catégoriquement.

Merci, Maman.

Je soupire. J'ai quinze ans et je suis un adolescent paumé. Mon père me met la pression pour que je prenne sa suite, et moi, je n'en ai aucune envie. Ne peut-il donc pas comprendre que le Quidditch ne m'intéresse pas ?

J'en rirais presque de désespoir. Mon père est une armoire à glace, brut et pas vraiment ce qu'il y a de plus élégant. Et surtout, il est très grand. Pour ma part, si je dépasse de quelques centimètres quelques-uns de mes condisciples, je ne sors pas vraiment de la masse et suis plutôt fin. Hanches très fines, épaules tout juste plus larges que celles des filles, je n'ai pas la constitution de mon père.

Je ressemble en revanche beaucoup à ma mère, paraît-il. Cela me fait toujours sourire, car mon « grand » frère, même à seulement deux ans, ressemblait comme deux gouttes d'eau à notre père. Quelle ironie qu'il soit mort. Il me paraît aux antipodes de ma personnalité : il était de ces bébés robustes qui crient très fort mais ne pleurent pas.

Moi, j'étais commun, pleurant ou criant parfois. Pas vraiment imposant, plutôt petit. Je me faisais remarquer par ma beauté quand lui était admiré pour ses constructions en bois, ses exploits (« il a grimpé sur le tabouret pour attraper le balai de son père ! »).

Ma mère dit pourtant qu'il avait le même regard pénétrant que moi. Ce regard qui me vaut mon succès auprès des filles, d'ailleurs.

Mon hibou, Alice, toque à la fenêtre. Je me lève, quittant mon lit et mes réflexions « existentielles ». Elle m'apporte une lettre cachetée par un sceau que je ne reconnais pas. Enfin, ça me dit bien quelque chose, mais je n'arrive pas à savoir où j'ai bien pu le voir. La lumière se fait soudain dans mon esprit. Ça ne peut tout de même pas être ça ?

Fébrile, j'ouvre précipitamment la lettre. C'est bien ma cousine qui m'écrit. Nevra Patil, fille de Padma Patil. Père inconnu. J'apprécie beaucoup Nevra. Elle est toujours patiente et elle m'écoute me plaindre de mon père pendant des heures sans m'interrompre. Enfin, je ne suis pas sûr que ce dernier point soit vraiment une qualité, mais ça me fait du bien de déverser tout ce que j'ai envie de dire, et elle est l'interlocutrice rêvée pour cela.

Et après, je l'écoute me raconter sa vie. Elle est assez heureuse, mais sa position de fille unique dans une famille monoparentale lui pèse. À mon avis, elle a deviné depuis longtemps qui est son père.

Elle habite à Londres, et avec ses cheveux roux, elle ressemble étrangement aux membres de la famille Weasley, une veille famille de magiciens d'après ce que j'ai compris (à vrai dire, elle ne m'en parle toujours que très peu, et même si au fil des années j'ai réussi à en savoir plus, c'est encore très flou). Je disais donc que si on compte large, sept hommes pourraient être le père de Nevra. Cependant, personne ne semble pressé de savoir de qui il s'agit. Le plus simple serait qu'il s'agisse d'un homme nommé Charles (ou un truc du genre) car à l'époque de la naissance de ma cousine, il n'avait pas de petite copine, contrairement à ses cinq frères et à son père, tous mariés ou fiancés depuis longtemps à ce moment. Mais depuis, il a une femme et des enfants, et qu'on lui découvre une enfant illégitime ne serait pas mieux que si on en découvrait une à ses frères ou à son père.

Enfin, bref, après cette parenthèse de cinq secondes, j'ouvre cette fameuse lettre et la parcours rapidement des yeux, sautant trois paragraphes avant d'arriver à l'information qui m'intéresse. Je crie de joie en voyant que mon départ pour Londres est confirmé.

Je sors de ma chambre et dévale les escaliers à toute allure. Je déboule dans le salon et me dirige sans interlude vers la cuisine où je trouve mon père et ma mère en train de prendre leur petit déjeuner. Je m'immobilise devant eux. Ils me regardent avec des gros yeux. J'explose donc avec une voix aigue tellement je parle vite :

« -Je pars à Londres ! Tante Padma est d'accord pour m'héberger ! »

Mes parents ne semblent pas avoir tout compris. Je répète donc, plus calmement :

« -Tante Padma est d'accord pour m'héberger à Londres ! »

Je vois un éclat de fureur dans les yeux de mon père. Je sais que je vais avoir droit à une engueulade mémorable, mais je tiendrais. Il est absolument hors de question que je reste ici et que j'aille à Durmstang une année de plus. Je veux aller à Poudlard. Et pour cela, je ferais n'importe quoi. Ma mère le lit dans mes yeux et jette un regard implorant vers mon père. Celui-ci l'ignore. Il a beaucoup de respect pour elle, après tout elle est Parvati Patil, la femme qui a démoli le portrait de Rita Skeeter (elle ne s'en vante pas, mais c'est tout de même plus intéressant que de savoir qu'elle est la directrice adjointe de l'Académie de Durmstang), mais dès qu'il s'agit de moi et de ce que je fais, il se fiche de tout.

« -C'est bien dommage, car tu n'iras pas. »

Je suis impressionné. Il se contrôle mieux que d'habitude.

« -Tu as donné ton accord quand je t'en ai parlé au début des vacances, je te rappelle.

-Et alors ? J'ai bien le droit de changer d'avis ! TU N'IRAS PAS ! »

Voilà qui lui ressemble plus. Je vois ma mère qui se rapproche de lui, dans une vaine tentative pour le calmer.

« -J'irais. De toute façon, tu sais très bien que je ne retournerais pas à Durmstang. Où veux-tu que j'aille à part Poudlard ? À Beaux Bâtons peut-être ?

-Tout serait peut-être plus simple si tu me disais pourquoi tu ne veux pas retourner à Durmstang ! »

Je sens les reproches dans sa voix. Mais je ne céderais pas. Je ne retournerais pas à Durmstang, et cela même si je dois fuguer. Et je n'expliquerais pas pourquoi je ne veux pas y retourner.

« -Et toi si tu arrêtais de me dire tout le temps que je dois faire ci et pas ça sous prétexte que je suis le fils du « Grand Viktor Krum », alors peut-être que je ne voudrais pas partir !

-Si tu acceptais ton héritage et tes obligations, cela n'aurait pas lieu d'être !

-Avec des si, on mettrait Paris en bouteille ! »

Il s'arrête un instant. Il ne comprend pas la référence. Il ne connaît pas les poètes français. La seule chose qu'il sait citer, ce sont les critiques de matchs de Quidditch. Bon, je suis peut-être un peu dur avec lui, mais franchement, c'est mon droit le plus strict en tant qu'adolescent !

« -Papa, je ne veux plus que tu me dictes ma conduite. Tu me dis de me comporter comme un Krum et de ne pas me laisser faire par les autres, de me défendre. Et bien je le fais maintenant, et je refuse de t'obéir et de t'écouter ! Laisse-moi grandir, laisse-moi respirer ! LAISSE-MOI VIVRE !

-Volod ! s'écrie ma mère

-Comment oses-tu ? »

Mon père a toujours été si diplomatique… Je disparais de la cuisine en un clin d'œil. Je suis peut-être déterminé à partir, mais pas fou. Après ce que je viens de lui dire, j'aurais de la chance si mon père ne me tuait pas. Enfin, façon de parler.

Je suis au niveau de l'escalier quand je l'entends qui se lève brusquement de sa chaise. Je monte les marches le plus vite possible. Ma chambre ? La salle de bain ?

J'opte pour ma chambre et m'y précipite. Je referme avec empressement la porte derrière moi. Juste à temps.

Le Grand Viktor Krum abat ses bras sur ma porte avec force, en hurlant des mots que je ne comprends pas. Que je ne veux pas comprendre. J'entends la voix de ma mère qui tente de l'apaiser.

Avec horreur, je constate que les gonds de ma porte tremblent. Elle ne va quand même pas céder ? Soudain, je doute. Si elle cède, je vais être mal.

Je n'attends donc pas que cet événement funeste survienne et rassemble mes affaires. Un pull chaud, une cape de quidditch, des guêtres, une écharpe, la lettre de Nevra, ma baguette. Je fourre tout dans un grand sac et attrape mon balai. J'ouvre la fenêtre et sort. Je me contente de glisser le long du mur.

Il fait chaud. Quelques nuages. Assez pour se cacher derrière. Je me plaque contre le mur de la maison. Après deux longues minutes, j'entends la porte de ma chambre qui cède.

Je ferme les yeux. Faites que mon père pense que je suis parti par le ciel, s'il vous plaît. Il hurle de rage, mais semble décolérer peu à peu. Je me dissimule derrière la haie et attends. Il n'est pas long. Il sort de la maison et enfourche son balai, partant vers les montagnes.

Il croit que je m'y suis réfugié. C'est ce que j'ai toujours fait. Mais comme durant l'été il me voit de loin, je suis devenu plus malin. Je sais que je mets dix minutes pour être tout à fait hors de vue. Et mon père en met cinq. Alors je le laisse partir à ma recherche et j'arrive à sa suite pour le surprendre.

Et on se réconcilie. Enfin, disons qu'on discute plus ou moins calmement.

Après une minute, quand je suis sûr qu'il est bien parti, j'enfile mes guêtres et mon pull. Je finis par la cape. Il fait peut-être chaud ici, mais en haute montagne, même en cette période de l'année, il peut faire bien froid.

Je lève les yeux vers le ciel. C'est parti.

« -Volodia… Tu sais, c'est ta mère qui a choisi ton nom. Enfin, tu le sais déjà, mais… Elle a toujours voulu t'appeler comme ça. On pourrait croire que c'est à cause de moi que tu portes ce prénom. Pour faire les initiales VK, comme ton frère et moi. Comme ton grand-père et ton arrière-grand-père.

-Je sais tout cela papa.

-Je sais, mais j'aime te le dire et m'entendre te le dire. Alors sache que j'aime beaucoup ta mère, ta petite sœur et toi. Vous êtes très importants pour moi. Et je dois admettre que je n'aime pas le chemin que tu prends. Je désapprouve même tes choix. Mais que puis-je faire. Après tout, ta mère serait très contente que tu ailles dans la même école qu'elle. »

Je n'ose pas l'interrompre. Mon père a des sentiments, comme tout un chacun, mais vu que je le vois surtout à travers son obsession du fils champion de quidditch, j'ai tendance à l'oublier.

« -Papa, pourquoi tu me dis tout ça ?

-Attends, je n'ai pas fini. Tu sais, j'ai toujours hésité à te laisser m'appeler « papa ». Parce que selon mon éducation, c'est plutôt « père ». Mais je me suis souvenu que quand j'étais petit, je rêvais d'appeler mon père comme ça, car je serais plus proche de lui, car ça montrait que je l'aimais. Pour ton frère, j'avais dit « père ». Mais j'avais vu que ta mère en était comme blessée. Et quand tu étais petit, je l'entendais qui m'appelait papa dès que j'avais le dos tourné. Je ne savais pas quoi faire. Et finalement, la solution s'est imposée d'elle-même. Je me souviens parfaitement du jour où tu as parlé pour la première fois. Tu étais déjà bien grand et l'on commençait à s'inquiéter. C'était à une réunion de famille. Tu étais assis sur les genoux de ta grand-mère. Alors qu'on s'asseyait pour le café, tu as pris un regard pénétrant et tu as fixé ta mère. Comme tu continuais, tout le monde a arrêté de parler et on t'a regardé. Et alors, tu as pointé de la main ta mère et tu as dit « Maman ». Et pendant cette seconde, juste avant que tout le monde se mette à te féliciter, tu as tourné la tête vers moi et tu as dit « Papa ». Tu ne peux pas savoir comme j'étais fier, soudain. Je ne me suis plus jamais posé la question de si tu devais m'appeler « papa » ou « père ». Et après ta sœur m'a appelé Papa, elle aussi. »

Je ne dis rien. Je lui demanderais bien ce qu'il veut dire par là, mais je pense qu'il va me le dire maintenant, vu l'air avec lequel il me regarde.

« -Ta mère est enceinte. »

Je reste un instant interdit. Maman ? Enceinte ?

« -Elle me l'a dit tout à l'heure. C'est tout récent et elle risque de faire une fausse-couche, alors ne le crie pas sur les toits, mais… Enfin, j'aimerais bien que tu sois là le jour de sa naissance, si ça se confirme. Tu étais là quand Kenza est née, donc… Et puis, il va falloir réfléchir à un prénom. Tu as toujours été très inventif…

-…

-…soupira-t-il

-…

-Pourquoi tu ne veux plus retourner à Durmstang ?

-J'ai mes raisons, papa.

-Ça a un rapport avec l'accident de Vaclav ?

-Disons qu'il était une des raisons pour lesquelles je restais à Durmstang. Maintenant qu'il est dans le coma… Je n'ai plus envie de faire des efforts.

-Ta mère dit que tu as étais très affecté par...

-C'est mon meilleur ami. Et mon cousin. Enfin, j'aime aussi beaucoup Nevra, mais on se voit moins souvent… Je n'ai pas envie qu'il meurt.

-Moi non plus !

-Oui, oui, mais… Enfin, tu vois ce que je veux dire. Je… »

Je sentis les larmes me monter aux yeux. Vaclav est compréhensif et je peux lui parler de tout ou presque. Et je peux aussi ne pas lui parler du tout. Je ne saurais pas comment dire. Quand il devine que j'ai quelque chose qui me travaille, il me donne la possibilité de ne pas parler de ça, de penser à autre chose. Je ne veux pas le perdre.

« -Eh, c'est bon, ne pleure pas. Il va s'en remettre. »

Je hoche doucement la tête, retenant difficilement mes larmes. Je ne tiens pas à me mettre à pleurer ici. Si je dois pleurer, autant le faire dans un endroit chaud, comme mon lit, plutôt qu'en plein ciel, au-dessus des montagnes. Je détourne donc la conversation vers un sujet plus réjouissant.

« -Kenza rentre bientôt ?

-Oui, elle sera là demain. On a reçu une lettre d'elle ce matin. Elle s'amuse beaucoup chez Julia, apparemment. »

Je souris. Mettez Kenza et Julia ensembles, ne serait-ce que quelques instants, et vous êtes sûrs de les entendre rire.

« -Bon, je vois bien que tu n'es pas en forme aujourd'hui… On rentre ?

-Oui. »

Mon père peut se montrer très gentil. Mais il est tellement partagé entre ses responsabilités de membre de la famille Krum et son bonheur qu'il a souvent des comportements très contradictoires.