Titre : « Presque » la Belle au bois dormant
Disclaimer : Les personnages de ToS ne sont pas à moi (eux sont à Namco), pas plus que le conte de La Belle au bois dormant (lui il est à Charles Perrault), dont je me suis librement inspirée pour écrire cette fic. J'ajouterais que cette fic n'a pas pour but de me faire gagner de l'argent ; c'est juste que, prise d'inspiration, je me suis dit : « Tiens ! Si j'essayais ça ! » et voilà ce que ça a donné.
Couple : Vous allez comprendre assez vite, cependant, il n'y aura pas de lemon. C'est assez fleur bleue sur la fin, donc : âmes en quête de lemon, lime, et autre truc citronné, allez voir ailleurs...
Genre : C'est censé être un conte, j'ai aussi tenté d'y mettre un peu d'humour…
De plus : Elle a été écrite pour ma très chère Elea974, qui me manque beaucoup.
Presque la Belle au bois dormant
Il était une fois un Roi et une Reine, qui gouvernaient ensemble un grand et prospère pays, où elfes, humains, et demi-elfes vivaient en paix et en harmonie. Les souverains aimaient leur peuple, et le peuple admirait ses souverains. Une chose, cependant, les attristaient plus qu'on ne saurait le dire : ils n'avaient, en effet, depuis de nombreuses années, put concevoir d'héritiers. Ils allèrent à toutes les eaux du monde, vœux, pèlerinages, menues dévotions : tout fut mis en œuvre, et rien n'y faisait. Le Roi et la Reine en étaient très affectés, et le Royaume de Tesse'halla souffrait aussi de voir leur si jolie Reine rester ainsi sans enfants.
Enfin pourtant la Reine devint grosse (ndla : moi je trouve que ce mot fait un peu « vache », mais c'était comme ça dans la version originale, alors…), et accoucha de jumeaux, deux magnifiques fils. Le jour de leur naissance, de grandes réjouissances furent organisées partout dans le Royaume. Où que l'on se trouva ce jour là, ce n'était que fêtes et banquets en l'honneur des jeunes Princes que l'on attendait depuis si longtemps. Le Roi, ainsi que le voulait la coutume de l'époque, organisa une grande fête, qui eut lieu une semaine après la naissance de ses fils, pour que toutes les Fées du pays puissent venir et afin que chacune d'elle leur fit un don, comme c'était la loi des Fées en ce temps là. Le Royaume de Tesse'halla comptait en tout sept Fées, et toutes furent conviées à la fête.
Après les cérémonies qui précédaient habituellement ce genre de festivités, toute la compagnie revint au Palais du Roi Yggdrasill, où avait lieu un grand banquet pour les Fées. On mit devant chacune d'elle un couvert magnifique, avec un étui d'or massif, où il y avait une cuiller, une fourchette et un couteau d'or fin, garnis de diamants et de rubis.
Il s'y trouvait la Fée Sheena, des lointaines Terres Cachées de l'Ouest ; la Fée Préséa, qui avait en charge la Montagne du Sud et celle de l'Est ; la Fée Raine, qui régnait sur le Royaume souterrain ; la Fée Martel, dont la fonction était de préserver toutes les forêts du Royaume de Tesse'halla ; la Fée Mithos, dont dépendait les lacs et les étendues d'eau pures ; la Fée Tabatha, dont la musique et les récits étaient si appréciés qu'elle était devenue la patronne des bardes et des ménestrels ; et enfin, la Fée Colette, dont le principal travail consistait à aider les nécessiteux.
Cependant, comme chacun prenait sa place à table, on vit entrer une vieille Fée que l'on n'avait point invitée, parce qu'il y avait plus de cinquante ans qu'elle n'était sortie de sa Tour, et que tous croyaient morte, ou victime d'un mauvais sort. Cette vieille Fée, était aussi connue sous le nom de Fée Pronyma.
- Comment se fait-il que je n'ai point été conviée à cette fête, sire ? fit-elle en s'inclinant, moqueuse, devant le Roi et son épouse.
- J'en suis confus, Dame Pronyma, cependant, ne vous voyant plus assurer vos fonctions de Fée protectrice des plaines du Nord, j'ai cru, ainsi que tous mes gens, que vous aviez trépassé… répondit sans amitié le Roi, qui ne l'aimait guère.
Des rumeurs s'élevèrent un peu partout dans la salle. Nombres de sujets n'aimaient pas plus que le roi cette vieille Fée dont on disait qu'elle avait passé un contrat avec le Roi du Royaume maudit de Nibelheim pour y gagner la jeunesse éternelle et une puissance prodigieuse (ndla : pour la jeunesse ça n'a pas fonctionné, apparemment…).
Le Roi Yggdrasill lui fit cependant donner un couvert, surmontant son aversion pour elle, mais il n'y eut pas moyen de lui donner un étui d'or massif, comme aux sept autres, parce que l'on en avait fait faire que sept pour les sept Fées. La vieille crut qu'on la méprisait, et grommela quelques menaces entre ses dents. La jeune Fée Colette, qui se trouvait auprès d'elle, l'entendit. Elle prit alors peur de ce que pourrait bien accomplir la vieille pour se venger, et, grâce à l'aide des Fées Raine et Sheena, monta un plan pour prévenir le mal qui ne manquerait de s'abattre sur les petits Princes. Il fut convenu qu'à la fin du repas, elle irait se dissimuler dans un recoin de la salle afin de faire son don la dernière, pour pouvoir conjurer si cela était possible le mal que la vieille Pronyma aurait fait. Ce ne pouvait être une autre Fée, car Pronyma les connaissait toutes, et se méfierait si l'une d'entre elles venaient à manquer. Colette étant, en revanche, une toute jeune Fée, sa disparition pourrait passer inaperçue.
Ainsi procéda-t-on à la fin du repas, et Colette alla se dissimuler derrière une immense tapisserie, observant sans être vue ses consoeurs qui étaient maintenant toutes autour du berceau où reposaient les bébés.
Les Fées commencèrent donc à faire leurs dons aux Princes. La Fée Préséa, qui était la plus jeune après Colette, s'avança vers le berceau.
- Je vous fait don, énonça-t-elle à voix haute, de la beauté. Vous serez les plus belles personnes que l'on pourra trouver dans le Royaume de Tesse'halla. Nul ne pourra vous surpasser en cela.
Un étrange phénomène se produisit alors. La lumière qui sortit de la baguette que tenait la Fée se sépara en deux parts égales, et la lumière ainsi scindée en deux atteignit les deux Princes en même temps. Préséa expliqua alors à l'assistance quelque peu surprise que les Princes étant jumeaux, il était normal que les dons qu'ils reçoivent soient répartis de manière égale entre eux. La Fée Raine s'avança alors à son tour.
- Je vous fait don, dit-elle comme Préséa un peu plus tôt, d'un esprit sage et avisé, et de la vertu de bonté, ainsi que celle de l'humour, sans lesquelles le monde serait bien triste.
- Mon don, fit alors Martel en succédant à Raine, sera de vous offrir la grâce du cerf, fier roi de la forêt.
- Moi, annonça la Fée Tabatha, je leur fais don d'une parfaite maîtrise de tous les arts, que ce soit en musique, en danse, ou en peinture.
La Fée Mithos, qui était la cinquième, réfléchit un court moment, puis énonça à son tour son don aux Princes.
- Je fais don à chacun d'une voix claire et chantante, plus pure encore que l'eau, et qui ravira tout ceux qui l'entendront.
Vint enfin le tour de la Fée Sheena.
- Je leur fais don, dit-elle, d'une habileté aux armes à nul autre pareil.
Le tour de la vieille Fée était enfin venu. Elle se dirigea donc vers le berceau des bébés endormis, sous le regard inquiet de l'assistance. Une fois devant le berceau, elle les contempla longuement, se demandant quel maléfice serait le plus approprié. Ayant trouvé, un sourire mauvais s'étira sur son visage, et elle regarda le Roi droit dans les yeux.
- Majesté, commença-t-elle d'une voix doucereuse, oui, vos fils, grâce aux dons des autres Fées, auront beauté, grâce, et une habileté hors du commun. Oui, ils seront admirés et aimés par tous. Mais qu'ils en profitent bien ! Car je vous le dit, ils ne passeront pas leur vingtième anniversaire, car je leur jette ce sort : ils se piqueront le doigt à un fuseau, et en mourront !
Elle éclata d'un rire mauvais, et, avant que le Roi n'ait pu faire un geste, elle disparut dans un nuage de fumée noire. Ce terrible don fit frémir toute la compagnie, et il n'y eut personne qui ne pleurât. Le Roi semblait lutter pour maîtriser sa colère, mais tous virent l'inquiétude dont il faisait montre pour ses enfants à peine nés et déjà condamnés. La Reine, quand à elle, semblait déjà chercher une solution pour sauver ses fils, refusant de céder à la panique.
A ce moment là, la Fée Sheena s'avança, et déclara d'une voix forte :
- Majestés, ne vous en faites pas. Les autres Fées et moi-même avions envisagé pareille traîtrise. C'est pourquoi l'une d'entre nous est restée en retrait pour tenter de conjurer le sort.
La Fée Colette sortit donc de sa cachette, et s'inclina un peu maladroitement devant les souverains.
- Altesses, commença-t-elle, nerveuse, je suis navrée, mais je n'ai pas le pouvoir de dissiper ce mauvais sort. La magie de la Fée Pronyma est bien plus puissante que la mienne.
- Alors mes fils sont perdus, se lamenta le Roi.
- Néanmoins, je puis peut-être tenter de le modifier quelque peu, ajouta-t-elle.
- Vas-y, l'encouragea Martel en lui souriant gentiment.
La jeune Fée Colette s'avança donc vers le berceau, et contempla les visages des deux Princes sur qui pesaient désormais une si terrible malédiction. Elle ferma les yeux, et se concentra. Lentement, très lentement, son sortilège se tissa par-dessus celui de la Fée Pronyma. Quand elle fut prête, elle annonça, les yeux toujours clos :
- Vos fils ne mourront pas. Comme l'a prédit la Fée Pronyma, ils se piqueront le doigt à un fuseau. Mais au lieu d'en mourir, ils tomberont dans un profond sommeil, et ne s'éveilleront que deux cent ans plus tard, grâce à des fils de Roi.
Un murmure parcourut l'assistance. Deux cent ans ! La jeune Fée rouvrit les yeux, épuisée par l'effort qu'elle venait de fournir. La Fée Mithos et la Fée Tabatha s'empressèrent d'aller la soutenir. Elle murmura encore, avant de s'en aller avec les autres Fées :
- Je ne peux rien faire de plus. Je suis désolée, Sire…
Le Roi Yggdrasill se reprit vite. Il ordonna immédiatement un décret visant à protéger les princes.
- A partir d'aujourd'hui, il est désormais interdit de filer au fuseau, ou d'avoir un fuseau chez soi. Tout ceux qui désobéiront se verront infliger un châtiment exemplaire.
Le soir même, un imposant bûcher fut dressé sur la grand-place de la capitale, et il en fut ainsi dans toutes les villes, villages, hameaux et maisonnées du Royaume. Le Roi ne voulait prendre aucun risque. Tous les rouets du château furent également brûlés dans la grande cour ; et leur fabrication était désormais interdite.
La Fée Pronyma, qui observait tout cela grâce à un miroir d'eau tout en se restaurant, se mit à rire. Tout cela était vain. Rien ne pourrait empêcher l'inéluctable. Et elle rit de son rire mauvais, et elle rit tellement qu'elle avala sans y faire attention une arrête, qui se ficha dans sa gorge. Elle se mit alors à tousser, à suffoquer, et finit par mourir, au bout de longues heures d'agonie. Ainsi disparut Pronyma la Fée, morte terrassée par une arrête de poisson.
Le Roi confia peu de temps après son poste à une autre Fée, la Fée Sélès, qui s'acquitta avec brio de sa tâche.
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Dix-sept ans avaient passé. Le Royaume de Tess'halla était heureux et prospère sous l'autorité du Roi Yggdrasill et de la Reine Genis, qui gouvernaient avec sagesse et justice.
Les deux Princes avaient grandi au cours de ces années, et étaient devenus de très beaux jeunes hommes. Ils avaient pour noms Kratos et Zelos. Même s'ils étaient jumeaux, ils restaient très différents. Les dons des Fées ne s'étaient pas vraiment répartis de façon équitable. Ainsi, si pour la beauté et l'habileté aux armes, ils ne cédaient rien l'un à l'autre, il en allait autrement en ce qui concernait les autres dons. Effectivement, si Zelos excellait dans les arts et se mouvait avec une grâce presque féline, Kratos, lui, n'avait qu'une habileté et une patience limitée pour tout ce qui touchait la peinture ou la danse ; malgré ses mouvements d'une grande fluidité qu'il dévoilait lors de ses combats quotidiens contre son frère. Cependant, il se rattrapait en chant et en esprit. (ndElea: j'imagine bien Kratos chantant tel un rossignol…) Sa voix était basse et chaude, envoûtant tous ceux qui l'écoutait, et son esprit acéré était une arme presque aussi tranchante que sa lame.
Zelos avait été, et était toujours, un garçon turbulent, s'amusant à jouer des tours à son entourage, riant d'un rien, s'émerveillant de tout, et portant toute phrase prononcée devant lui en dérision.
Kratos était plus sérieux, soucieux de ses études, mais il n'était pas non plus dépourvu d'humour. Les plaisanteries de son frère l'amusaient et le distrayaient du peu de divertissements que leur offrait le château.
En effet, leur père leur avait interdit de quitter les limites du domaine tant qu'ils n'auraient pas atteint leurs vingt ans. Bien sûr, ils avaient le droit d'aller à la chasse, mais jamais seuls, alors qu'ils auraient parfaitement été capables de se débrouiller en forêt. Mais cela leur était interdit. Kratos ne comprenait pas. Leur père ne leur faisait-il pas assez confiance ? Même lorsqu'ils allaient en ville, ils étaient toujours accompagnés d'au moins deux gardes, qui les suivaient comme leurs ombres.
Zelos s'en était plaint à maintes reprises, argumentant que ce n'était pas ainsi qu'il pourrait un jour avoir une vie amoureuse digne de ce nom. Argument qui n'avait d'ailleurs pas fait mouche.
Kratos soupira. Leur père et leur mère s'étaient rendus comme tous les ans chez leurs vassaux, à la fois pour prendre des nouvelles, mais aussi pour les surveiller. Il avait entendu dire qu'une rébellion grondait à cause de l'injustice qu'un des seigneurs faisait régner sur les terres que le Roi lui avaient assignées. Leur père avait donc décidé de se rendre sur place pour vérifier ces informations. Le seigneur incriminé était un certain Lord Rodyle…
Il se replongea dans son livre – une histoire d'ogre accompagné d'un âne parlant qui devait sauver une princesse pour la ramener à un roi minuscule (ndElea : hum ça me dit quelque chose…) – quand la porte s'ouvrit soudain et se referma avec un grand fracas. Il sursauta et s'apprêtait à réprimander vertement celui ou celle qui l'avait dérangé quand il reconnut le rire de son frère. Celui-ci était adossé à la porte, et avait les joues d'un rouge presque aussi soutenu que ses cheveux, mais Kratos ne put déterminer si c'était à cause du fait qu'il riait à gorge déployée ou bien à cause de la course qui venait sûrement de s'achever dans sa chambre.
- Zelos, commença alors Kratos.
- Oh, Kratos ! Qu'est-ce que tu fais là ?
- …C'est ma chambre, je te rappelle. Et toi, qu'as-tu encore fait ?
- Oh, presque rien, lâcha nonchalamment Zelos en se dirigeant vers lui.
Kratos le regarda s'installer dans le fauteuil qui lui faisait face. Un grand sourire étirait les lèvres de son jumeau.
- Et quel est ce presque rien ? reprit Kratos en le fixant dans les yeux.
Zelos soupira. Son très cher frère pouvait être têtu quand il s'y mettait vraiment. Autant lui avouer maintenant. Il plongea ses prunelles d'un bleu azur dans celle ambrées de son frère avant de répondre.
- Si tu veux tout savoir, j'ai remplacé les truffes dont Kvar est si friand par quelques crottins généreusement offerts par les étalons royaux…
- …J'en viens parfois à me demander si tu réfléchis aux conséquences de tes actes, sourit ironiquement Kratos.
- Pas cette fois-ci, en effet, répondit Zelos. Mais si ça peut te rassurer, j'ai donné les truffes aux enfants… Nul besoin de te dire combien ils étaient heureux…
- Nul besoin, en effet…Et quand est-ce que Kvar s'est rendu compte de…
Un hurlement plus qu'effrayant retentit alors dans tout le château. Le sourire de Zelos s'agrandit.
- Ça y est.
- Ta punition sera à la hauteur de ton forfait, le prévint Kratos. Et je suppose que tu sais que Père ne fermera pas les yeux sur cela ?
- Il l'avait mérité, assura Zelos en riant.
- En tout cas, ne m'entraîne pas dans cette histoire…
Des coups se firent entendre. On frappait à la porte.
- Prince Kratos ?
- Qu'y a-t-il, Forcystus ? demanda Kratos, reconnaissant la voix du capitaine de la garde.
- Lord Kvar est furieux à cause de votre frère, et tient absolument à vous punir comme il se doit… tous les deux. Pour le moment, il cherche le Prince Zelos dans les cuisines. Je pense que vous devriez en profiter pour vous éclipser discrètement…
Kratos jeta un regard noir à Zelos, qui ne fit qu'en sourire.
- Tu vois où te mènent tes bêtises ?
- On aura tout le temps de parler de ça plus tard… En attendant, qu'est-ce qu'on fait ?
- Quand l'ennemi est plus puissant que nous – et en l'occurrence, il l'est, tout du moins tant que durera l'absence de Père – il ne nous reste qu'une seule solution…
- La fuite ? tenta Zelos.
- Je préfère le terme de repli stratégique, fit Kratos en souriant.
Il se dirigea donc vers la porte, suivit de Zelos ; et l'entrouvrit. Forcystus lui fit signe que la voie était libre et qu'ils pouvaient s'enfuir.
- C'était une excellente idée, Prince Zelos, sourit le capitaine de la garde.
- Merci, répondit celui-ci, rayonnant.
- Ne le complimentez pas trop, intervint alors Kratos. Vous pourriez être la prochaine victime…
Il s'éloigna en courant vers la tour ouest, la plus éloignée des cuisines ; suivit de son frère ; sous le regard bienveillant de Forcystus. Et quand Kvar vint lui demander s'il avait vu les Princes, celui-ci lui indiqua les écuries, riant sous cape du tour joué à l'intendant. Cependant, il garda en mémoire le conseil du prince Kratos : il vérifierait désormais soigneusement ce qu'il mangerait…
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- Ouf…pouf…tu…tu crois qu'on est assez loin, maintenant ?
- Ouf…j'espère, en tout cas, fit Kratos en se laissant tomber au sol, essoufflé.
Zelos se laissa tomber près de lui, tentant lui aussi de reprendre son souffle. Ils avaient grimpé les marches quatre à quatre, ne s'arrêtant qu'une fois arrivé au dernier étage de la tour. Le premier, Kratos se releva, et se dirigea vers une des meurtrières qui s'ouvrait là. Il jeta un coup d'œil en bas, et siffla d'admiration.
- Qu'est-ce qu'il y a ? demanda Zelos, intrigué.
- Regarde, lui répondit Kratos en lui laissant la place.
Et Zelos regarda. La vue, quoique de beaucoup réduite par l'étroitesse de l'ouverture (ndla : c'est une meurtrière, ne l'oublions pas), était tout simplement éblouissante. De là, il apercevait les collines qui entouraient le château, et aussi la lisière de la forêt où ils allaient parfois chasser. Un coin de ciel bleu parsemé de nuages blancs surmontait le tout.
- Wouah…fit le prince. Tu sais quoi, frérot ?
- Non, quoi ?
- La vue serait encore plus belle depuis le sommet de la tour, sourit malicieusement Zelos.
- …Tu connais les règles…
- Aussi bien que toi, sinon plus, à force d'entendre tout le monde me les rappeler, répondit son frère avec un geste de dédain. Mais je ne vois pas ce qu'il y a de mal à aller admirer la vue depuis le sommet d'une des tours de son propre château…
- …D'accord, céda Kratos.
- Le dernier en haut a un gage ! lança immédiatement Zelos.
- Lequel ?
- Hum…Il sera l'esclave de l'autre pendant deux jours entiers !
- Trois, répliqua Kratos.
- Tenu.
- Bien. On y va à cinq ?
- Un…
- Deux…
- Trois…
- Quatre…
- Cinq !
Les deux princes s'élancèrent donc dans les escaliers, impatients à l'idée de ce qui les attendait là-haut, excités à l'idée de briser ces règles si chères à leur intendant et à leurs précepteurs… et surtout aiguillonnés par la volonté de gagner.
Ils ne savaient pas que la Roue du Destin s'était mise en marche.
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Ils arrivèrent au sommet de la tour en même temps. Plaisantant sur leur incapacité à se départager, ils se dirigèrent vers les créneaux. Le vent était fort à cet endroit, et Kratos comprit vite pourquoi on le leur avait interdit depuis si longtemps.
Il oublia cependant bien vite ses pensées pour ne plus se consacrer qu'à la contemplation du paysage qui s'étendait loin en dessous d'eux. Ils voyaient tout d'ici : des grandes étendues herbeuses, où paissaient quelques moutons, ainsi que le grand pont qui permettait de traverser la mer afin de rejoindre Syback, une ville côtière, qui était aussi la ville la plus proche de Meltokio. La capitale était reliée à Syback par une grande route bien entretenue, d'où arrivaient et partaient chaque jour de nombreux convois allant ravitailler en nourriture, bijoux ou autres marchandises l'une ou l'autre des villes.
- Zelos, appela Kratos, les yeux fixés sur la route.
- Hum ? fit son frère, perdu dans la contemplation des nuages qui dérivaient lentement dans le ciel.
- Je crois que Père et Mère seront bientôt là.
- Qu'est-ce qui te fais dire ça ? demanda Zelos en le regardant.
Pour toute réponse, Kratos pointa un doigt vers la route. Zelos y porta alors son regard, et distingua ce que son jumeau lui indiquait : un important convoi qui se dirigeait vers Meltokio, et il reconnut l'étendart de leur Père.
- On ferait peut-être mieux de redescendre en vitesse, suggéra-t-il.
Kratos approuva vigoureusement de la tête et ils se dirigèrent à toute vitesse vers les escaliers. Que leur Père apprenne qu'ils se soient moqués de Kvar, passe encore – ils le faisaient tellement souvent que c'était presque devenu une habitude – mais qu'il sache qu'ils avaient désobéi à l'une des plus anciennes règles établies, et les deux Princes passeraient un sale quart d'heure.
Ils dévalèrent les escaliers, Zelos en tête, lorsque tout d'un coup celui-ci stoppa net, manquant de tomber lorsque Kratos le percuta de plein fouet.
- Qu'est-ce que tu fais ? grogna Kratos.
- Qu'est-ce que c'est que ça ? demanda en réponse son frère.
Ils étaient revenus à l'endroit où ils s'étaient arrêtés pour reprendre leurs souffles. Sauf que là où auparavant il n'y avait qu'une simple salle vide, se trouvait maintenant un étrange appareil. Etonnés, mais surtout curieux, ils s'approchèrent de la machine qui leur faisait face. N'ayant jamais vu ni l'un ni l'autre de rouet durant leurs dix-sept années de vie, ils se demandaient tout haut de quoi il pouvait bien s'agir.
- A quoi cela peut-il bien servir ? dit Zelos en approchant sa main de l'objet. Aïe ! fit-il presque aussitôt après.
- Qu'y a-t-il ? s'alarma son frère.
- C'est ce truc, répondit Zelos en montrant le fuseau. Je me suis piqué…
- Çà ? Mais comment as-tu fait pour te…Aïe ! (ndElea : mais quels boulets… )
- Comme ça, se moqua Zelos en voyant son frère porter son doigt à sa bouche.
Kratos allait répliquer lorsqu'il sentit la tête lui tourner. Sa vision se faisait plus trouble, et ses jambes se dérobèrent brutalement, lui faisant perdre l'équilibre et tomber au sol. Avant de perdre connaissance, il entendit un bruit de chute et sut qu'il était arrivé la même chose à Zelos. Il chercha à tâtons la main de son frère, et, l'ayant trouvé, la serra dans la sienne. Puis tout devint noir.
Ainsi s'accomplit la malédiction lancée il y a dix-sept ans par la Fée Pronyma.
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- Je suis heureux de vous savoir de nouveau parmi nous, Altesses, dit Forcystus en accueillant les monarques aux portes mêmes du château.
- Moi aussi, Forcystus, sourit le Roi en descendant de cheval. Tout s'est bien passé durant notre absence ?
- Quelques habitants des bas quartiers sont venus demander audience, et…
- Yggdrasill, tu ne penses pas que tu as d'abord plus important à faire avant de t'occuper des affaires du Royaume ? intervint la Reine en souriant.
Elle descendit de sa jument avec l'aide de son époux, qui ne semblait pas comprendre ce qui pouvait passer avant le Royaume.
- Même si toi tu as oublié, fit-elle malicieuse, moi je m'en souviens fort bien : dites moi, Forcystus, où sont donc mes fils, que je les embrasse. Ils m'ont tellement manqués durant ces derniers jours !
- Ma Reine, répondit le capitaine en souriant, je ne sais s'ils oseront se montrer pour le moment.
- Qu'ont-ils encore fait comme bêtise ? soupira le Roi.
- Je pense que vous feriez mieux de le demander à Kvar, répondit le capitaine, contenant difficilement son fou rire.
- Je dois avouer que toute cette agitation m'avait manqué, fit la Reine en entraînant son époux dans le château. Ne soyez pas trop sévère pour votre punition, mon seigneur, ils devaient s'ennuyer, à toujours rester enfermés dans ce château…
- Ce n'est pas une raison, ma mie, de s'en prendre toujours à ce pauvre Kvar.
- Je leur en toucherais un mot à ce sujet, lui assura la Reine. Mais pour cela, il faut les retrouver. Voulez-vous vous en chargez, Forcystus ?
- Bien, ma Reine.
Le capitaine de la garde s'inclina légèrement avant de faire volte-face et de partir à la recherche des Princes. Ils ne devaient pas être très loin…
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Le soleil se couchait lorsqu'il se décida à fouiller la tour nord. C'était le seul endroit qu'il n'ait pas encore visité. Cependant, il doutait quand même d'y trouver les Princes. Après tout, le Roi leur avait formellement interdit de s'y rendre…
Pourtant, c'est bien là qu'il les trouva, allongés sur le sol, se tenant la main, comme s'ils n'étaient encore que deux jeunes enfants qui venaient de s'endormir. Ce qu'il étaient, après tout, se dit Forcystus en s'agenouillant pour secouer le prince Kratos.
Celui-ci ne se réveilla pas. Forcystus fronça les sourcils. D'ordinaire, le prince Kratos avait le sommeil très léger, et un rien le réveillait. Il retenta sa chance, le secouant plus fort, sans plus de résultat. Il n'y eut pas plus de réaction de la part du prince Zelos. Alors Forcystus comprit. Et il courut prévenir ses souverains que le pire était survenu. Le sommeil de deux siècles avait débuté. Et personne n'avait pu l'empêcher.
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Les Princes reposaient à présent tous deux dans un grand lit, préparé à leur intention. La Reine était près d'eux et les contemplait, les yeux rougis par les larmes qu'elle avait versées un peu plus tôt.
Forcystus était revenu, seul, et leur avait expliqué la situation. Le Roi lui-même avait tenté de les réveiller, mais rien n'y avait fait. Finalement, Yggdrasill s'était résigné, et avait fait le nécessaire pour que ses fils soient installés dans la plus belle chambre du château. Il avait ensuite cédé la place à la Reine pour aller donner ses ordres. Et maintenant, Genis était là, et attendait le retour de son époux, contemplant avec une tendresse infinie les visages endormis de ses fils.
Ils reposaient sur un lit aux draps couleur de lune, l'un près de l'autre, la main de Kratos enserrant celle de son frère. On aurait dit deux anges qui s'étaient égarés sur Terre (ndla : pour les anges, on peut pas dire que ce soient totalement faux…). Ils ne bougeaient pas, leurs visages exprimant simplement une telle immobilité qu'un instant la Reine les avait crû morts, malgré le sort que la fée Colette avait jeté. Mais elle les avait vu respirer doucement, et en avait été grandement soulagée.
Elle sentit une main se poser sur son épaule, et se retourna, se retrouvant face au Roi. Sans rien dire, elle se pressa contre lui, et il l'entoura de ses bras, caressant doucement ses cheveux dans un geste d'apaisement et de réconfort.
- J'ai fait mander la Fée Colette, murmura-t-il au bout d'un moment. Elle sera bientôt là.
- Elle ne pourra rien faire de plus, lui répondit la Reine.
- Peut-être, dit son époux. Mais je ne peux supporter de ne pouvoir rien faire…
Il resserra son étreinte, et la Reine sentit quelque chose lui frôler la joue. Elle releva les yeux, et ce qu'elle vit l'étonna.
- Yggdrasill…fit-elle en levant une main vers son visage. Tu pleures ?
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La Fée Colette prenait le thé avec les Fées Martel et Raine à Flanoir lorsque le message du Roi lui parvint. Aussitôt, elles se mirent toutes trois en route, et arrivèrent au château seulement quelques heures après le drame, grâce à leurs pouvoirs magiques. (ndla : faut bien qu'ils servent à quelque chose leurs pouvoirs…)
Elles écoutèrent attentivement les explications que leur fournirent les monarques, et se rendirent auprès des Princes. Puis elles se concertèrent un moment, et la Fée Colette s'avança vers les souverains afin de leur apprendre leur décision.
- Nous pensons que les princes pourraient se sentir quelque peu…désemparés, s'ils venaient à se réveiller seuls dans le château… (ndla : c'est le cas de le dire…). Nous avons donc décidé de prendre quelques mesures, mais nous aimerions votre approbation avant de les mettre en œuvre…
- Quels sont ces mesures ? demanda le Roi.
- Pour commencer, nous allons plonger le château, ainsi que la ville entière dans un profond sommeil, et les habitants ne se réveilleront qu'une fois les Princes délivrés du sort, soit deux cent ans plus tard, commença la Fée Colette.
- …Je ne peux prendre cette décision au nom de mon peuple, dit le Roi au bout de quelques minutes de silence. Il faut qu'ils décident par eux même s'ils voudront rester ou partir…
- Quelles sont les autres mesures ? intervint alors la Reine.
La Fée Martel s'avança alors.
- Pour protéger votre château d'éventuels intrus, je ferais pousser une forêt épaisse, et aux troncs suffisamment resserrés pour que personne ne puisse y pénétrer. Un chemin ne s'ouvrira que pour ceux qui viendront briser le sortilège.
- Enfin, je m'engage à surveiller personnellement votre Royaume durant votre absence, majesté, acheva la Fée Raine.
Le Roi garda le silence quelques instants, puis se tourna vers son épouse, qui hocha la tête.
- Avant d'accepter, vous comprendrez que je doive mettre mon peuple au courant…
- Bien entendu, fit la Fée Raine.
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Le lendemain, de bon matin, le Roi fit appeler les Fées dans la salle du trône.
- Tous ceux qui ont préféré quitter la ville l'ont fait. Il ne reste ici que ceux qui l'ont accepté. Vous pouvez donc lancer le sortilège, à présent.
Les Fées acquiescèrent, et la Fée Colette s'avança vers les souverains, qu'elle effleura de sa baguette. Presque aussitôt, le Roi et son épouse sombrèrent dans un profond sommeil. Elle et les deux autres Fées renouvelèrent l'opération sur toutes les personnes encore présentes dans le château, puis sur les habitants de la capitale. Ce fut une tâche longue et difficile.
Lorsque tous furent endormis, elles quittèrent le château. Colette s'en alla dans les villes proches et lointaines du château, informer les habitants du Royaume de ce qui était arrivé, et leur demandant de raconter l'histoires des deux Princes endormis partout autour d'eux, afin que deux cent ans plus tard, on en eut encore connaissance. Pendant ce temps là, les fées Raine et Martel travaillèrent ensemble à protéger le château contre d'éventuels intrus.
En quelques heures, une immense forêt entourait toute la ville endormie ; une forêt faite de grands arbres et de petits, de ronces et d'épines entrelacées les unes dans les autres, de sortes que ni bêtes ni homme n'aurait pu y entrer : on n'apercevait désormais plus que le haut des tours du château. Ayant achevé leur œuvre, les Fées se retirèrent, et se promirent de se retrouver deux siècles après, afin d'observer ce qui allait advenir.
Ymia : Voilà, voilà, fin du premier chapitre !
Elea974 : (soupire) Après un an d'attente...
Ymia : Oui, bon, l'essentiel c'est que ce soit fini... (s'adresse aux persos) Des remarques ?
Kratos : C'est un peu long pour un premier chapitre, non ?
Ymia : Ben en fait, j'avais envie de le fractionner en plusieurs petites parties, mais ça aurait fait un peu trop long à mon goût...
Zelos : Dis plutôt que t'avais la flemme de le faire, ce sera déjà plus honnête...
Ymia : ...et j'avais AUSSI la flemme de re-couper cette histoire en plus petits chapitres...(déjà qu'à la base j'étais censée la poster en bloc...)
Kratos : C'est d'ailleurs étonnant que tu aies réussi à la finir, cette fic...
Elea974 : (insiste) Avec un an de retard.
Ymia : Humph. C'est bon de se sentir soutenue... (se tourne vers les lecteurs) Et vous, vous me soutenez ? Ou pas ?
Tous ensemble : Reviews ?
Prochain chapitre dans une ou deux semaines maximum. Tout est écrit, il ne me manque que vos reviews pour en poster plus...
