Au-delà des apparences
Les deux premiers chapitres de cette fiction ont été écrits par Au Clair De Ma Plume qui n'a pas pu poursuivre, pour raisons personnelles. Je vais donc continuer à sa place, et j'espère être à la hauteur de ses espérances.
Cela faisait à présent vingt bonnes minutes que Chandler attendait patiemment devant le pas de sa porte. Assis sur une des marches en béton gelé par le froid de l'hiver, il regarda une fois encore sa montre avant de soupirer d'impatience en se recroquevillant un peu plus tant le froid lui glaçait le sang un peu plus chaque seconde. L'hiver était décidément la saison qu'il détestait le plus.
Chandler Kiehl était un jeune adolescent de 17 ans assez petit pour son âge et un peu maigrichon, aux cheveux blonds cendrés avec de beaux yeux bleu. Pratiquement tous les gens qu'il connaissait, y compris son meilleur ami, persistaient à dire qu'il ne connaitrait jamais la définition du mot silence et qu'il avait un débit de parole qui n'était absolument pas humain. D'un naturel naïf et souriant, Chandler pouvait se résumé en deux mots : imbécile heureux.
Un bruit de klaxon particulièrement agressif et bruyant le fit sursauter, et quand il vit la grosse voiture noire de son meilleur ami s'arrêter juste en face de là où il se trouvait, il se leva d'un bond et se précipita pour contourner le véhicule et grimper sur le siège passager en fermant à toute vitesse la porte pour que le froid hivernal n'ait pas le temps d'inonder la voiture et de faire disparaitre la si douce chaleur que générait le chauffage. Il s'empressa d'ailleurs de mettre ses mains rougies par le froid devant la source de chaleur en grelottant.
- Tu es en retard ! s'exclama-t-il à l' intention du jeune garçon qui se tenait sur le siège conducteur.
- Une peau comme la mienne, commença-t-il, ça ne s'entretient pas en seulement quinze minutes, très cher. Il faut du temps.
Chandler leva les yeux au ciel en détournant le regard. Kurt resterait toujours fidèle à lui-même. Il mettrait toujours un point d'honneur à choisir minutieusement les tenues qu'il allait porter en veillent bien sûr à ce qu'elles s'accordent parfaitement avec les chaussures qu'il allait choisir de mettre. Jamais de sa vie il sauterait son traditionnel rituel d'hydratation du matin, et il ferait toujours attention aux crèmes qu'il mettrait sur son visage ou bien à ce que la laque qu'il mettrait dans ses cheveux soit 100% bio. Mais malgré les apparences, Kurt n'était absolument pas quelqu'un de superficiel.
Après que nos deux amis aient échangé un regard complice et un sourire amical, Kurt démarra sa voiture et se dirigea vers le lycée McKinley en n'écoutant à moitié l'éternel et interminable monologue de Chandler comme chaque matin.
Kurt Hummel était un jeune garçon légèrement efféminé qui faisait toujours très attention à tout ce qu'il faisait. Il faisait attention à ce qu'il mangeait, à quel shampoing ou après-shampoing il utilisait, à quel déodorant il mettait... Tout. En revanche, il ne faisait jamais attention à ce qu'il disait. Il laissait trop souvent ses paroles dépasser sa pensée, peu importe qui était son interlocuteur ce qui lui avait valu un nombre incalculable d'envoi direct et violent dans les casiers les plus proches ou bien des slushies à la fraises en pleine figures ce qu'il détestait encore plus que les envois dans le casier. Faire partir le sirop collant de ses vêtements et de ses cheveux était encore plus dur que d'empêcher Chandler de parler.
Lorsqu'ils arrivèrent sur le parking du lycée, Kurt fut désagréablement surpris de constater que quelqu'un avait garé sa voiture sur sa place de parking. A cette horripilante vision, il fronça les sourcils et fit une manœuvre pour prendre la place d'à côté. Chandler et lui descendirent de la voiture, réprimandant une grimace à cause du froid, et se placèrent devant le véhicule inconnu. Avec un regard perplexe, Kurt croisa les bras sur sa poitrine en lisant la plaque d'immatriculation.
- Qui est l'abruti qui a osé me voler ma place de parking ? se demanda-t-il plus à lui-même qu'à Chandler, légèrement irrité.
Chandler le regarda avec un regard amusé avant de considérer de nouveau la voiture. Il ne put que constater que le marque et le design de la voiture portait à croire que son propriétaire ne devait pas avoir de problème d'argent, loin de là. Il se retourna de nouveau vers Kurt et lui donna un léger coup d'épaule pour le tirer de son intense réflexion.
- Allez, viens, on va être en retard, lui dit-il en souriant.
Kurt posa son regard sur Chandler et le considéra quelques secondes avant de lui rendre le sourire amical que lui avait offert ce dernier. Les deux jeunes adolescents pénétrèrent dans le grand bâtiment et essayèrent de se faire le plus discrets possible dans les couloirs pour se rendre jusqu'à leur casier. Kurt se dit que le ciel avait décidé d'être clément avec eux aujourd'hui, puisque par chance ils n'avaient pas croisé Dave Karofsky, la terreur des couloirs de McKinley – après Noah Puckerman. Encore que Puck, lui, était à un rang encore plus au-dessus. Ce n'était pas seulement dans les couloirs qu'il terrorisait les élèves, c'était dans tout le lycée, salle de classe et toilettes comprises. Karofsky, cette masse de muscle dépourvu de toute forme d'intelligence faisait de leur vie un véritable enfer sur terre, et malgré le courage dont les deux jeunes adolescents faisait peuvent en répondant à ses insultes toutes plus homophobes les unes que les autres par des remarques hautement philosophiques, il y avait bien des fois où Karofsky arrivait à les terroriser par ses menaces et où ils ne trouvaient plus de répliques pour tenter de se défendre. Car oui, les paroles étaient leur seul moyen de défense contre des brutes telles que Davide Karofsky. Kurt et Chandler comptaient énormément sur le soutien de l'autre pour gérer ce stress moral permanent que leur faisait vivre cet abominable personnage. Ils se disaient que dans deux ans tout serait enfin terminé, et que lorsqu'ils partiraient pour New York tous les deux, plus jamais ils n'entendraient parler de lui...
Après avoir pris les affaires dont ils avaient besoin pour leur première heure de cour, ils se séparèrent et Chandler se dirigea vers sa salle d'Anglais pendant que Kurt prenait le chemin qui le mènerait à sa salle de mathématiques en se souhaitant mutuellement bonne chance comme chaque matin.
Lorsque Kurt pénétra dans la salle, il se stoppa d'un seul coup lorsqu'il remarqua que quelqu'un qu'il ne connaissait ni d'Adam ni d'Eve était assis à sa place. Deux fois en même pas une heure qu'on empiétait sur son territoire, c'était deux fois trop ! Il s'avança vers l'inconnu, et s'arrêta devant lui les bras croisés avec un regard sûr et décidé qu'on aurait pu croire à l'épreuve des balles.
- Tu es assis à ma place, dit-il d'un ton tout aussi hautain que l'était son regard.
Le garçon, qui ne semblait pas l'avoir remarqué avant qu'il ne prenne la parole, leva les yeux et les planta dans ceux de Kurt. Ce dernier fut stupéfait par leur couleur peu commune. Ils étaient d'un vert hypnotisant avec des reflets mordorés intenses et profonds. On aurait dit qu'il s'était battu à mort contre un lion sauvage uniquement pour lui voler ses yeux. Il avait un regard de prédateur qui épiait une proie avant de l'attaquer. Ses boucles brunes tombaient juste au-dessus de ses yeux et semblaient douces et soyeuses. Kurt pouvait parfaitement sentir l'odeur de cet inconnu. Une odeur masculine épicée mélangé à l'odeur d'un parfum masculin que Kurt connaissait très bien, pour être son préféré : Egoïste de Chanel. Le cœur de Kurt manqua un battement quand enfin il se rendit compte que cela faisait un moment que le garçon le fixait avec ce regard intense. Il essaya tant bien que mal de faire en sorte que son regard demeure le même et ainsi cache son trouble, mais il doutait fortement que ce soit le cas. Lorsque l'inconnu posa ses mains sur la table pour se lever et faire face à Kurt, ce dernier eut du mal à déglutir en remarquant la faible distance qui séparait leurs deux visages. Il esquissa un demi sourire arrogant que Kurt aurait eu tendance à qualifier d'horriblement séduisant.
- Et alors ? demanda-t-il d'une voix grave et suave que Kurt trouvait incroyablement sexy.
Pour la première fois de sa vie, Kurt ne trouvait rien à répondre à la remarque de son interlocuteur. Non pas parce qu'il était terrifié comme lorsqu'il avait une altercation avec Karofsky, mais parce qu'il était troublé et incroyablement surpris par la personne qui se trouvait en face de lui. Il entrouvrit légèrement la bouche dans l'espoir qu'un son audible en sorte pour ne pas perdre la face, mais rien. Il était comme hypnotisé par les lèvres de cet arrogant et magnifique chieur qui se tenait devant lui. Il se mit alors à le détailler minutieusement comme si c'était la chose la plus naturelle du monde. Son teint était légèrement bronzé et ses traits étaient fins. Ses lèvres étaient pulpeuses et purpurines et Kurt se voyait très bien y poser ses lèvres pour la premières fois. L'incontournable nature de fashion victime de Kurt pris le dessus et il fut forcé de constater qu'il savait très bien s'habiller et qu'il ne manquait pas de goût. Absolument tout ce qu'il portait sur lui et qui était visible aux yeux de Kurt était de marque. La voix grave de ce séduisant inconnu sortit Kurt de ses pensées et le ramena douloureusement sur terre.
- Alors quoi ? Tu as perdu ta langue ? Ou tu t'imagines simplement la mettre dans ma bouche ?
A ces paroles, Kurt ouvrit un peu plus les yeux, laissant apparaitre à quel point il était choqué par ce que venait de lui dire le garçon. Etait-ce aussi facile de lire en lui ? Si c'était le cas, il devait fuir le plus vite possible parce que la personne qui était assis à la place habituelle de Kurt possédait un véritable sex-appeal, même pour quelqu'un d'aussi peu expérimenté que Kurt. Il secoua légèrement la tête pour essayer de chasser toutes les pensées obscènes qu'il avait en tête et se ressaisit, bien décidé à remettre en place ce petit con aussi élégamment que possible, comme il savait si bien le faire. Seulement, quand il s'apprêta à prendre la parole, une voix qui ne lui était pas inconnue se fit entendre.
- Kurt ! Viens t'asseoir à côté de moi !
Quand il se retourna avec la rapidité d'un félin, il aperçut son amie Mercedes qui arborait un sourire énorme qui, Kurt en était sûr, était empli d'arrière-pensées. Il se retourna une dernière fois devant l'abruti à l'alléchante odeur dont il ignorait le nom, et lui offrit son plus beau regard de garce avant de lui dire :
- La seule chose que je mettrai dans ta bouche, ce sont tes mots que je te ferai ravaler !
Puis il tourna les talons et partit rejoindre Mercedes la tête haute et avec toute l'élégance dont il était capable de faire preuve. Il prit place aux côtés de son amie au même moment où Monsieur Lawman, le professeur de mathématiques fit sont entrée dans la pièce. Il referma la porte derrière lui avant de poser ses affaires sur son bureau dans un grand fracas et de saluer ses élèves comme il le faisait chaque matin. Ce qu'il dit par la suite attira l'attention de tous les élèves, tout particulièrement celle de Kurt.
- Nous accueillons aujourd'hui un nouvel élève, si tu veux bien venir te présenter à la classe... demanda-t-il à l'attention de la personne avec qui Kurt avait eu une altercation un peu plus tôt et en lui faisant signe de se lever.
- Blaine Anderson, 17 ans, dit-il en restant assis à sa place et en lançant un regard plus que provocateur à Kurt qui s'était retourné tout comme le reste des élèves de la classe.
Kurt sentit une vive chaleur lui monter aux joues. Il détourna brusquement le regard et se mit face à sa table avant que ce « Blaine » ne remarque qu'il rougissait. Le professeur reprit donc le cours là où il s'était arrêté la veille, ignorant totalement le fait que Blaine ne se soit pas levé pour faire face à toute la classe. Quelques instant plus tard, Mercedes se pencha sur Kurt et lui chuchota :
- A en juger par les rougeurs sur tes joues, commença-t-elle, tu seras du même avis que moi si je te dis que la personne à qui appartient le joli fessier assis a quelques tables derrière nous est absolument magnifique.
- Je me moque éperdument de ce trou du cul, chuchota-t-il à son tour.
Mercedes vit sa mâchoire se décrocher à la déclaration que venait de lui servir son ami. Comment pouvait-il n'accorder aucune importance à une personne aussi physiquement parfaite que Blaine ?
Kurt ne connaissait Blaine que depuis dix minutes à peine, mais il ne pouvait déjà pas le supporter. Il avait tout l'air de n'être qu'un chieur arrogant et insupportablement superficiel. Kurt gesticula sur sa chaise et se retourna de façon à pouvoir appuyer son dos contre le mur qui se trouvait à présent derrière lui, faisant ainsi entièrement face à Mercedes. Il laissa sa tête retomber en arrière pour l'appuyer elle aussi contre le mur et ferma les yeux quelques instants en soupirant, pour les rouvrir lentement ensuite. Toute la frustration et la colère qu'il avait éprouvé en ce court laps de temps l'avait blasé... Il laissa ses yeux se balader dans la classe, et son regard rencontra malencontreusement les yeux du prédateur avide de chair fraiche qu'il avait rencontré il y a peu. Il soutint l'intense regard de Blaine et il sentit une nouvelle chaleur lui remonter le long du cou avant de se loger sur ses joues habituellement aussi blanches qu'un cachet d'aspirine. Blaine n'avait pas l'air de vouloir détourner son regard et Kurt n'arrivait pas à savoir ce que pouvait bien avoir cet imbécile derrière la tête. Son visage ne trahissait aucune expression et était incroyablement neutre. Il sentit son estomac se comprimer douloureusement et un étrange coup dans son épaule le fit redescendre sur terre. Il se tourna alors brusquement vers Mercedes dans un sursaut.
- Kurt, tu m'écoutes ?
Kurt hocha vaguement la tête et se retourna complètement de façon à être parfaitement dos à Blaine. Durant la totalité de l'heure de cours, Kurt sentit le regard oppressant de Blaine peser lourdement sur lui et n'avait cessé de gesticuler, mal à l'aise. Qu'est-ce-que ce voleur de place comme lui pouvait bien lui vouloir ? Intérieurement, Kurt espérait que ce ne soit pas une de ces brutes qui allait faire de sa vie au lycée un enfer un peu plus sinistre qu'elle ne l'était déjà. Il soupira, et enfouit sa tête dans ses bras posés sur la table pour essayer de cacher son regard attristé aux yeux de Mercedes. Kurt avait toujours pensées que ces années de lycée allaient être les plus belles de toute sa jeunesse, mais il s'était lourdement trompé. Être un homosexuel assumé et extraverti n'était pas l'une des choses les plus faciles à gérer dans l'Ohio. Il soupira en tremblant légèrement et retint une larme. Pleurer n'arrangerait aucunement son mal être, même si c'était vrai que ça lui ferait un bien fou. Sans même s'en rendre compte, Kurt avait oublié la désagréable sensation que lui procurait le lourd regard de Blaine. Il avait complètement arrêté de faire attention à ce qui se trouvait autour de lui et l'intégralité de ses pensées étaient tournée vers ses angoisses...
Dans une salle totalement à l'opposé de celle où se trouvait Kurt, Chandler était assis à une table à côté de quelqu'un qu'il ne connaissait pas, mais à qui il ne prêtait aucune attention. Malgré sa nature très bavarde et toujours prête à faire de nouvelles rencontres, Chandler avait appris qu'au lycée, il ne valait mieux pas trop aller vers les nouvelles têtes. Il avait bien trop peur de tomber sur un nouveau Karofsky. Chandler avait les jambes repliées, devant lui et en appui sur sa table, et était légèrement enfoncé dans sa chaise, avec un cahier sur ses cuisses et une feuille dessus, sur laquelle il écrivait. Écrire, c'était sa passion. On pouvait absolument tout lui prendre, même la parole, mais tant qu'il avait un crayon et du papier, il savait qu'il aurait toujours une échappatoire, où qu'il soit. Il soupira en se redressant sur sa chaise et en ramenant ses jambes contre sa poitrine pour poser son cahier sur sa table, pensant que cette nouvelle position serait bien plus confortable pour écrire. C'était à cela que se résumait les cours d'Anglais pour Chandler : écriture, écriture, écriture... Il n'écoutait absolument rien à ce que pouvait bien raconter Monsieur Stewart, sauf quand le sujet était important. Lorsqu'il arriva à la fin de sa feuille, Chandler se pencha pour en saisir une autre dans son sac, mais a sa grande surprise, une main s'aplatit devant lui avec une feuille vierge en dessous. Chandler eut un sursaut, et son regard se reporta presque automatiquement sur son voisin, dont il ignorait déjà le prénom alors qu'il l'avait donné en début d'heure. Les yeux du blond se plongèrent dans l'immense océan azur des yeux du brun. Chandler se mit à l'observer vraiment, et il ne put s'empêcher de constater qu'il avait un certain charme, et qu'il était même plutôt mignon. Il secoua légèrement la tête en réalisant qu'il ne l'avait toujours pas remercié alors que cela faisait un moment déjà qu'il s'observait.
- Euh...Merci, s'empressa-t-il de lui dire.
- De rien.
Le brun tourna ensuite sa tête vers le tableau pour suivre le cours comme il avait l'air de le faire depuis le début de l'heure comme si de rien n'était. A ce geste amical et gentil, Chandler était tenté d'engager la conversation avec lui, mais il se rappela alors bien vite que ce n'était peut-être pas une bonne idée. Certes, il n'avait pas l'air méchant, mais on ne juge pas un livre sur sa couverture. Il fut quand même légèrement déçu de penser qu'il avait sans doute été le seul à avoir apprécié ce bref échange visuel, mais il chassa bien vite ses pensées de son esprit pour replonger dans ce qu'il faisait. Il ne devait pas accorder trop d'importance à une chose aussi insignifiante qu'un regard surtout qu'il y avait de forte chance pour que la personne qui se trouvait à sa droite soit un hétéro pur et dur. Cela le renforçait dans son idée qu'essayer de créer ne serait-ce qu'un lien amical entre eux deux était perdue d'avance. Avec tous les ennuis qu'il avait déjà avec Karofsky et Azimo, que les autres puissent penser qu'il se mette à essayer de convertir les hétéros au lycée était la dernière chose dont il avait besoin. Et puis de toute façon, Chandler était sûr qu'à la minute où le brun allait savoir qu'il était gay, il allait faire comme tous les autres mecs du lycée : il allait le martyriser ou le fuir, au choix. A cette pensée, un air attristé se dessina sur son visage. Il était sûr qu'il allait se souvenir toute sa vie de ses années de lycée, mais il n'était pas vraiment certain de vouloir s'en souvenir de cette manière-là. Il se remit à écrire avec plus d'ardeur dans l'espoir de pouvoir évacuer toute la haine et la douleur qu'il y avait en lui, et fut surpris de constater que les mots qu'il employait étaient affreusement tranchants et douloureux. Il ne savait même pas qu'il connaissait de tels mots. Il ne supportait plus ce mal-être constant, et il ne supportait pas non plus de devoir se faire à l'idée qu'il allait devoir supporter cela durant la fin de sa scolarité. Il soupira en reposant son stylo et contempla les mots qu'il avait couché sur sa feuille avec un regard triste qu'il ne put contenir, ne se souciant absolument pas de ce qu'il y avait autour de lui, et encore moins des regards discrets que lui lançait son voisin. Il sentit son téléphone portable vibrer dans la poche droite de son jean et le sortit discrètement. C'était Kurt qui lui avait envoyé un message.
« J'ai un coup de déprime... – K »
Chandler esquissa un sourire empli de tristesse, et lui répondit la chose qui lui semblait la plus évidente à ses yeux :
« Moi aussi... – C »
Dans la classe de Monsieur Lawman, Kurt observa la réponse que lui avait envoyée Chandler. Bizarrement, cela ne l'étonna pas. Généralement, quand l'un des deux avait un méchant coup de déprime, le deuxième suivait le rythme. Alors pour se remonter mutuellement le moral, les deux adolescents parlèrent de leur avenir et de ce à quoi ressemblerait leur vie une fois qu'ils auraient quitté l'enfer du lycée, et qu'ils auraient tous les deux emménagé à New York. Dans un endroit où personne ne les connaitrait et où ils pourraient tranquillement construire leur avenir et oublier ce qu'ils étaient pour penser à ce qu'ils voudraient être. Kurt disait qu'il serait un styliste mondialement connu et adulé dont les créations se feraient arracher par la foule en délire, il voulait faire partie des plus grands, et Chandler disait qu'il serait l'écrivain le plus talentueux de sa génération, dont chaque œuvre serait un vrai bijou traduite dans toutes les langues et vendue dans des millions d'exemplaires. Ils s'étaient tous les deux fait une promesse : celle de réaliser leur rêve à n'importe quel prix, et de toujours rester les meilleurs amis du monde quoi qu'il advienne. Quand ils en parlaient, ce bel avenir dont ils ne cessaient de rêver paraissait tellement proche, mais ils savaient qu'en réalité, ils étaient encore loin d'y être...
Mercedes tendit un paquet de feuille à Kurt qui comprit qu'il devait en prendre une avant de faire passer le reste a son voisin de derrière. Lorsqu'il se retourna pour donner les feuilles à la personne qui se trouvait derrière lui, ses yeux toujours un peu tristes se posèrent immédiatement sur Blaine qui continuait à le fixer avec ce même regard comme s'il était figé dans cette position depuis le début de l'heure. Kurt se retourna brusquement pour se remettre à nouveau face à sa table. Il avait complètement oublié Blaine et ses putains d'yeux de fauve affamé ! C'était quoi son problème à ce grand malade ? Kurt commençait sérieusement à regretter de lui avoir adressé la parole tout à l'heure. Il aurait mieux fait de l'ignorer, mais non ! Il a fallu que sa grande bouche fasse encore des siennes à la seconde où il l'avait vu assis à sa place. Il avait besoin d'évacuer toute la colère et la frustration qu'il avait en lui. Il saisit une nouvelle fois son téléphone portable et se mit à raconter sa mésaventure avec Blaine à son fidèle et très bavard ami de toujours : Chandler. Seulement une minute après, il reçut la réponse de sa pile électrique préférée :
« Si ça se trouve, il est seulement subjugué par ta beauté incomparable et ta pureté sans pareil ! – C »
Le message de Chandler le fit involontairement rougir. Il trouva d'ailleurs sa réaction complètement stupide. Comme si un nouvel élève aussi arrogant osait assumer son homosexualité à McKinley ! Il décida de ne pas répondre à la stupide remarque de son ami et rangea son téléphone dans sa poche.
Durant toute l'heure de cours, Kurt ne cessait de lancer des regards discrets derrière lui en feignant de ne pas remarquer que Blaine ne l'avait pas quitté des yeux. Il n'avait pas cessé de gesticuler sur sa chaise, mal à l'aise de savoir le regard de Blaine constamment posé sur lui. Il détestait cette sensation ! Chandler, lui, avait repris son activité principale durant le court d'anglais : l'écriture. Pour lui, l'heure avait été plutôt banale dans l'ensemble.
Lorsque la cloche retentit, Kurt attrapa ses affaires le plus vite possible et sortit de la classe à toute vitesse pour fuir l'atmosphère oppressant qu'avait créé Blaine. Il se précipita aussi vite qu'il le pouvait vers son casier en prenant soin de regarder autour de lui pour ne pas croiser une brute qui passerait par là. Visiblement, Karofsky devait être absent aujourd'hui, sinon il se serait déjà fait expulsé dans un casier depuis longtemps. Quand il arriva devant son casier, il soupira de contentement et de soulagement a l'idée que cette journée allait se passer assez tranquillement comparée aux autres jours. Il adopta une attitude un peu plus sereine et décontractée en ouvrant son casier pour ranger les cahiers dont il n'avait plus besoin et de sortir ceux dont il allait avoir l'utilité. Lorsqu'il referma son casier, il eut un sursaut en constatant qu'une tête était cachée derrière. Il constata que les même yeux qui l'avait harcelé durant la totalité du cours était à nouveau en train de le scruter. Il reconnut immédiatement Blaine Anderson. Comment avait-il fait pour le rattraper aussi vite ? Kurt cligna plusieurs fois des yeux, surpris, et s'empressa de dire quelque chose avant que le silence qu'il y avait entre eux ne devienne trop pesant.
- Tu me suis parce que tu as aussi l'intention de prendre mon casier ou bien ma place en maths te suffit ? dit-il en lui servant son plus beau regard de garce.
- Je te trouve vachement sarcastique et imprudent pour quelqu'un qui se fait propulser dans les casiers les plus proches à chaque fois qu'il ouvre sa grande bouche, répondit-il d'un air arrogant qui avait le don d'horripiler Kurt.
Le jeune Hummel ouvrit légèrement la bouche et on pouvait lire dans son regard toute l'incompréhension du monde.
- Comment-
- J'ai mes sources.
Kurt fit un pas en arrière. A en juger par ce qu'il venait de dire, Blaine devait à coup sûr être ami avec Azimo ou pire, avec Karofsky. Son regard amer devint petit à petit un peu plus méfiant et à mesure qu'il reculait doucement, Blaine, lui, s'avançait dangereusement.
- Tu la ramènes moins ta grande bouche, gueule d'ange.
Le surnom que venait de lui donnait Blaine le fit frissonner. Jamais encore on ne l'avait appelé comme ça. Il déglutit difficilement avant de se ressaisir et de se faire plus courageux qu'il ne l'était en réalité.
- Sache que si tu crois me faire peur, tu te trompes lourdement.
- Ah oui ? dit-il en se rapprochant un peu plus de Kurt.
Kurt pouvait sentir le souffle chaud de son interlocuteur sur sa bouche. Son estomac se comprima douloureusement à cette sensation. Il sentit l'index de Blaine caresser doucement sa main droite, serrée contre ses livres qui étaient plaqués contre sa poitrine, ce qui lui donna des frissons dans le dos. Une vague de chaleur s'empara à nouveau de lui et remonta de son cou jusqu'à ses joues. Il eut du mal à garder son sang-froid quand Blaine se pencha a son oreille droite et que son souffle vint titiller son lobe. De sa voix rauque et suave il chuchota quelques mots à peine audibles :
- Alors dis-moi pourquoi est-ce-que tu trembles comme un gamin qui viendrait de faire un vilain cauchemar ?
Kurt recula brusquement en repoussa violement Blaine de sa main droite. Ce dernier laissa retomber la main avec laquelle il avait caressé celle de Kurt le long de son corps en esquissant un sourire arrogant et satisfait.
- Quelle impétuosité, dit-il en contournant Kurt avant de s'en aller.
Ce dernier le regarda disparaitre parmi la foule qui avait inondé les couloirs du lycée McKinley sans pour autant réussi à effacer le trouble dans ses yeux. Il se demandait s'il n'avait pas fait erreur en provoquant Blaine. S'il était vraiment ami avec Karofsky ou Azimo, Kurt pouvait s'attendre à avoir de gros ennuis. Il aurait beau se défendre bec et ongles en répliquant à toutes les insultes et à toutes les menaces de ses brutes, il serait toujours aussi faible contre ces deux là.
Quand Chandler se dirigea vers le casier de Kurt dans l'espoir de le voir avant d'aller à son prochain cour de la matinée, il ne s'attendait pas à trouver un Kurt déboussolé et perdu. Il s'empressa de le rejoindre, et il posa une main sur son épaule ce qui fit sursauter son ami.
- Kurt ? Qu'est-ce qui s'est passé ? Qu'est-ce que tu as ?
- Euh... rien.
- Tu es sûr ?
- Oui... Ne t'en fait pas pour moi, lui dit-il en arborant un sourire qui se voulait rassurant, On se voit après les cours.
Puis il s'enfuit. Chandler le suivit du regard, quelque peu perplexe avant de tourner les talons et de se diriger à son tour vers son casier. Il trouvait le comportement de Kurt tout à fait étrange. Il avait bien vu que quelque chose n'allait pas, et le fait que son ami lui ait menti en lui disant que tout allait bien ne lui disait rien qui vaille. Il essaierait de lui tirer les vers du nez un peu plus tard. Arrivé au bout du couloir, il tourna à gauche et percuta par inadvertance quelque chose, ou plutôt quelqu'un.
- Oh pardon, je suis désolé, je ne regardais pas où j'allais ! s'empressa-t-il de dire en reculant de trois pas.
Il observa la personne qui se trouvait devant lui dans l'espoir que ce ne soit pas quelqu'un qu'il n'ait pas envie de voir de peur de se faire projeter dans un casier, mais il reconnut sans mal le garçon qui avait passé l'heure d'anglais à côté de lui. Il avait beau ne pas se souvenir de son prénom, il n'avait pas oublié ses magnifiques yeux bleus. Il ne put d'ailleurs s'empêcher de les contempler.
- Y'a pas de mal..., se contenta de répondre le garçon avant de le contourner avant de s'en aller.
Chandler le suivit des yeux avec un regard encore plus perplexe que celui qu'il avait posé sur son ami il y a quelques secondes de cela. Décidément, il le trouvait de plus en plus étrange. Un coup, il se montrait généreux en lui donnant une feuille alors qu'il ne lui avait absolument rien demandé, et quelques instants plus tard, il se montrait totalement indifférent et désintéressé. Il secoua légèrement la tête en soupirant et poursuivit sa route vers son casier.
Durant les heures qui suivirent, Kurt avait essayé de ne plus penser à Blaine et à ce qu'il lui avait dit, mais c'était peine perdue. Chandler, lui, n'avait pas réussi à se concentrer ni sur ses cours ni sur ce qu'il écrivait tant le comportement du garçon dont il avait complètement oublié le nom était contradictoire.
Lorsque la sonnerie retentit pour annoncer la fin de cette éprouvante journée de cours, ce fut pour nos deux jeunes adolescents comme une délivrance. Ils n'eurent pas beaucoup de mal à se retrouver. Chandler avait prévenu Kurt qu'il ne rentrerait pas avec lui ce soir et qu'il allait passer un peu de temps à la bibliothèque de la ville, qu'il rentrerait à pieds. Kurt avait acquiescé en coupant son jeune ami dans un de ses longs monologues avant de se diriger vers le parking. Chandler était rassuré de voir que son ami avait l'air d'aller un peu mieux. C'est donc un peu plus serein qu'il sortit du lycée, son sac sur l'épaule, et qu'il se dirigea vers la bibliothèque.
Lorsque Kurt sortit sur le parking, il eut la plus horripilante de toutes les visions de la journée. Blaine, cet immonde trou du cul, était adossé à la voiture qui été garée sur sa place de parking. C'était donc lui qui la lui avait volée. Cette fois, c'était vraiment trop. Même devant Karofsky Kurt ne la fermait pas et ne se laissait pas faire sans répliquer, alors ça n'allait certainement pas devant un mec qui venait à peine de débarquer que Kurt allait commencer, peu importe ce qu'il disait !
Il s'avança d'un pas sûr et décidé en direction de sa voiture et s'arrêta pile en face de Blaine, qui posa un regard fier et puissant sur Kurt dès qu'il le vit arriver.
- On ne t'a jamais appris que la jalousie était un très vilain défaut ?
- Je te demande pardon ? dit-il en s'approchant dangereusement de Kurt dans l'espoir de le faire pâlir, mais celui-ci ne broncha pas, bien décidé à tenir tête à ce sale con.
- D'abord tu prends ma place en cours et ensuite tu prends ma place de parking. Que pourrais-je en conclure sinon que tu envies ce qui m'appartient ? demanda-t-il d'un ton hautain en croisant les bras.
Blaine sourit en baissant légèrement la tête avant de s'approcher un peu plus de Kurt si bien qu'entre eux il n'y avait plus aucune notion d'espace personnel. Il releva ensuite la tête pour mieux faire face à Kurt et dit :
- La seule chose qui t'appartient et que je désire, gueule d'ange, c'est ton joli petit cul et je peux t'assurer qu'un jour il sera à moi.
Kurt eut un peu de mal à assimiler ce que venait de dire le brun. Il avait eu affaire à une bonne partie de toutes les formes de persécution qui existait, mais c'était la première fois qu'il était confronté à du harcèlement sexuel. Mais il n'allait pas se laisser intimider et encore moins céder à la demande de Blaine. Il soutint courageusement le regard de fauve affamé qu'arborait de nouveau le jeune brun avant de rétorquer :
- Tu peux l'ajouter à la liste des choses que tu n'auras jamais, Anderson.
Sur ses mots prononcés d'un ton qui se voulait narquois, Kurt contourna Blaine pour se diriger vers sa voiture. En démarrant une fois à l'intérieur, il l'entendit dire :
- C'est ce qu'on verra, Hummel !
Il fit une manœuvre pour sortir sa voiture, et s'arrêta devant Blaine en ouvrant la fenêtre de son côté.
- C'est mon cul, Anderson, c'est déjà tout vu !
Et dans un coup d'accélération qui fit vrombir le moteur de sa voiture, Kurt sortit du parking pour prendre la route en direction de sa maison, fier de la façon dont il avait remis Blaine à sa place. Mais indépendamment du fait qu'il appréciait le fait de pouvoir rentrer chez lui le cœur léger, Kurt restait tout de même incertain quant aux intentions du brun. Il se devait de rester méfiant...
Cela faisait déjà un peu plus d'une heure que Chandler était à la bibliothèque, l'un des rares endroits où il restait incroyablement silencieux. Seulement à présent, comparé à son arrivée, il ne lisait plus mais il écrivait. Une nouvelle vague d'inspiration s'était emparée de lui, et il n'avait pu faire autrement que de s'y noyer. Il venait enfin, après de longues heures de travail acharnées, terminer le premier chapitre de ce qu'allait être le premier vrai chef d'œuvre de Chandler Kiehl. Certes, il avait déjà écrit un nombre incalculable de toutes petites histoires et de texte en tout genre, mais là c'était la première fois qu'il se lançait dans un aussi gros projet. Après y avoir réfléchi très longuement et en prenant son courage à deux mains, il décida d'écrire son tout premier livre. Même si cette œuvre allait rester inconnue pour toujours et que ses seuls lecteurs allaient être Kurt et sa mère, ce n'était pas vraiment bien grave. Il voulait juste réussir à terminer quelque chose d'aussi important avant d'avoir intégré une brillante école de lettre à New York et pouvoir avoir la satisfaction de se dire : « Je l'ai fait ». Chandler avait toujours pensé que l'autosatisfaction était quelque chose de tellement plus important que le regard des autres ou bien leur opinons. C'est pour ça qu'il deviendrait un grand écrivain. Parce que tout ce qu'il écrirait serait des histoires qui lui plaisent à lui avant tout. La gloire n'aurait jamais aucune place dans la liste de ses prioritées... Il soupira de contentement en reliant les quelques feuilles de son premier chapitres avec un trombone rouge, et attrapa une nouvelle feuille pour commencer le second chapitre de son histoire, tant que l'inspiration était de son côté.
Alors qu'il était dans sa bulle et qu'il avait complètement oublié jusqu'à l'endroit où il se trouvait, un bruit un peu trop puissant pour être généré alors qu'il se trouvait actuellement dans une bibliothèque le fit sursauter. Il releva alors les yeux sur la place en face de lui et vit qu'on venait d'y jeter un livre dont le titre était Le portrait de Dorian Gray et un sac de cours noir qui semblait être neuf. Le propriétaire de toutes ces choses prit ensuite place sur la place en face de Chandler. Ce dernier reconnut immédiatement les magnifiques yeux bleus de ce matin mais ne réussit toujours pas à mettre un nom sur ce visage ridiculement séduisant. Chandler l'observa avec un regard quelque peu perplexe.
- Je peux m'assoir là ? demanda le nouvel arrivant d'une voix rauque et assez froide sans pour autant être amer.
- Euh... Vas-y, lui répondit simplement Chandler.
« J'ai envie de te dire que c'est déjà fait... », ne put s'empêcher de penser le blond dont la nature bavarde et la capacité à répondre du tac au tac était revenue au galop mais qu'il avait réussi à contenir assez suffisamment pour que ces mots ne franchissent pas la barrière de sa bouche. Il trouvait que le garçon qu'il avait imaginé plutôt un peu froid, distant et très contradictoire, était un peu stupide... A cette pensée, Chandler ne put s'empêcher d'esquisser un sourire amuser en baissant la tête pour replonger dans ce qu'il faisait et dans l'espoir que son nouveau voisin d'en face n'ait pas remarquer son sourire plus qu'évident. Ce qui bien sûr ne s'avéra pas être le cas.
- Qu'y-a-t-il de si drôle ? demanda-t-il en croisant les bras.
Chandler se redressa toujours avec son sourie dessiner sur le visage. Sourire qui, malgré ses incroyables efforts, ne parvint pas à disparaître. Il était comme ça. Chandler était un grand gamin un peu naïf qui riait des choses les plus simples de la vie... C'était aussi facile de le faire rire que de le faire pleurer.
- Hein ? Non... Ce n'est pas..., balbutia-t-il, gêné à un tel point que ses joues commencèrent à rosir légèrement.
Il sentit le regard perplexe de son interlocuteur s'attarder sur lui tandis qu'il replongeait le nez dans ses feuilles. Il vit le livre qui été posé sur la table glisser vers le garçon en face de lui. Le jeune blond gesticula un peu sur sa chaise pour se détendre légèrement. Il s'affaissa sur son siège et appuya ses genoux sur le bord de la table. Il fit glisser ses feuilles sur ses cuisses et se remit à écrire.
- Ne me dis pas que tu trouves ce genre de position assez confortable pour faire ce que tu es en train de faire...
Chandler releva brusquement la tête et constata que la personne à qui était en train de s'adresser super-beaux-yeux n'était autre que lui.
- Pardon ? se contenta-t-il de demander.
- Je t'ai observé en cours d'Anglais et il n'y a pas une seule fois où tu étais assis normalement, Chandler.
Ledit Chandler resta perplexe. Non seulement il avait engagé la conversation alors qu'il n'avait pas du tout l'air amical et encore moins sociable, mais en plus il se souvenait de son prénom alors que lui absolument pas... Il se demandait si ce que venait de lui dire le garçon était une façon un peu maladroite d'engager la conversation, ou bien si il avait juste envie de l'embêter. Que pouvait-il bien répondre à cela ?
- Euh... Bah..., bredouilla-t-il.
- En réalité cela n'a rien d'étonnant, reprit-il d'un ton un peu moins amical et beaucoup plus impérieux que ce à quoi Chandler se serait attendu. Tu fais la taille d'un gosse de quatorze ans alors que tu en as dix-sept ou dix-huit et en plus de ça, tu es encore plus maigrichon qu'Oliver Twist. Adopter ce genre de position doit être la chose la plus naturelle du monde pour un nabot comme toi.
La mâchoire de Chandler se décrocha automatiquement. Comment avait-il osé l'appeler ? Nabot ? Si jusque-là, il avait fait très attention à ne pas trop parler pour ne pas se mettre à dos une brute potentielle, là il sentait sa langue se délier et sa nature bavarde revenir au galop et il n'allait rien faire pour la retenir.
- Je te trouve vraiment très irrespectueux pour un débris libidineux qui ne sait que poser des questions aussi connes qu'il en a l'air, dit-il le plus calmement du monde.
- Ah oui ? Et on peut savoir sur quoi tu bases tes reproches ?
- Généralement, quand on demande à quelqu'un si on peut s'asseoir à la même table que lui, en supposant que cette personne soit seule et la place soit libre, on le fait avant de s'asseoir et on attend une réponse pour ensuite s'asseoir ou non et de cette façon, ça évitera a la personne qui se trouve en face de toi de se foutre de ta gueule de rongeur.
- Finalement, derrière tes airs d'enfant sage très peu loquace, il s'avère que tu as une grande bouche.
- Ne pas parler en cours ou bien dans une bibliothèque ne veux pas dire être peu bavard, mais respectueux. Mais apparemment tu ignores totalement ne serait-ce que la définition du mot respect.
Sur ses mots, Chandler saisit ses affaires et sortit de la bibliothèque sans remarquer que super-beaux-yeux-à-grande-gueule le suivait de près. Ce ne fut que lorsqu'ils furent dehors que le garçon se précipita pour se poster de toute sa hauteur devant le blond afin que ce dernier ne puisse plus avancer. C'est là que Chandler se rendit compte à quel point il était petit comparé à lui qui était incroyablement grand.
- Je te trouve mal placé pour parler de respect, dit-il.
- Quand est-ce-que je t'ai manqué de respect ? s'indigna Chandler.
- Si je te demande de me dire comment je m'appelle, tu sauras tout naturellement me répondre ?
Chandler avait entrouvert sa bouche avec l'intention de sortir quelque chose de suffisamment tranchant qui pourrait fermer définitivement, du moins pour aujourd'hui, la gueule de ce conard arrogant et mal poli, mais rien. Chandler eut du mal à le reconnaitre, mais il marquait un point. Ne pas se souvenir du prénom de la personne avec laquelle on était en train de parler était le summum de l'impolitesse. Même le garçon se souvenait de son prénom ! Voyant que Chandler ne répondait rien, le garçon sans nom croisa ses bras sur sa poitrine, ne cachant pas un air de supériorité sur son visage incroyablement mignon et détestable à la fois, fier d'avoir réussi à clouer le bec de Chandler.
- J'attends..., dit-il
Chandler soupira et entoura le haut de son corps pour se protéger soit du froid soit de l'humiliation qu'il était en train de subir, il ne savait pas encore. Il détourna ensuite le regard, faisant mine de regarder les voitures sur la route en arborant une mine boudeuse ce qui transforma l'air de supériorité qu'arborait le garçon en visage de vainqueur. Ses lèvres s'étirèrent en un sourire satisfait.
- Alors ? Qu'as-tu à dire pour ta défense ?
- J'ai une mémoire sélective. Je ne me souviens uniquement des prénoms appartenant aux personnes qui présentent un quelconque intérêt.
- Alors tu ferais mieux de retenir mon prénom, le nain, parce que je suis assurément la personne qui va réussir à te faire fermer ton bec de pucelle et peut-être même à te faire perdre ta carte V. Je suis Sebastian Smythe, et je ne te donne pas deux semaine avant de craquer et de finir dans mon lit.
Il observa ledit Sebastian tourner les talons et se perdre parmi la foule sur le trottoir. Il n'en revenait tout simplement pas. Comment pouvait-on être aussi abjecte que cela ? Comment était-il censé réagir à ce que venait de lui dire Sebastian ? C'était la première fois qu'on lui disait une telle chose. Il ne savait absolument pas comment il devait se comporter dans ce genre de situation, mais il n'aimait pas ça. Une chose était sûre dans l'esprit de Chandler, il devait se tenir éloigné le plus possible de Sebastian...
