Coucou tout le monde ! Début d'une nouvelle aventure, et d'un nouveau monde pour cette fiction ! Je préfère prévenir, le début est très sombre, peut-être même pas très engageant, mais encore une fois, le fond du message vous surprendrait d'espoir.

Bref, bonne lecture, en ce week-end de Pâques ! :)


《Hey, toi là-bas !》

Sa vie était une chose dont il se serait bien passé.

《Ouais, c'est à toi que je parle !》

Il était persuadé que le monde était une sorte de blague. Que rire était un pouvoir suprême, qui faisait que cette phrase rodée prenait tout son sens : il y a ceux qui rient, et ceux dont on rit. Un monde de types aux sourires blancs et d'autres aux yeux cernés de noir. Un vaste échiquier, et des pièces, qui tombaient, les unes après les autres.

Il attendait son tour, comme tout le monde.

Honneur aux blancs.

《Tu sais sur quelle pelouse tu viens de marcher, là ?》

Il ne répondit pas. Ce sourire carnassier, il le connaissait, et ne l'aimait pas. Il faisait affaire à un simple pion cette fois, mais il se méfiait tout de même : on pouvait mettre un Roi échec et mat avec un de ces simples petits pions. Ces gars sont limités, mais pas incapables.

《C'est la pelouse de mes potes et moi, ok, face de bite ?》

C'était stupide. Il n'y avait pas d'écriteau qui indique que cet endroit appartienne à qui que ce soit. Il ne disait jamais rien. Il préférait se taire, parce que lorsqu'il parlait, c'était encore pire. Ces stupides hyènes n'aimaient pas réfléchir apparemment.

《Oh. Je te parle, espèce de nerd.》poursuivait l'autre.

Un petit pion vicelard.

Son interlocuteur l'aggripa brusquement par le col de sa chemise et le poussa hors de la pelouse en crachant de mépris. Il l'insulta encore une fois ou deux, décida de laisser tomber lorsqu'il remarqua que le concerné ne disait toujours rien. Ses amis, sous l'arbre, l'appelaient.

《Ouais, ouais, j'arrive ! Ce binoclard n'est pas seulement miope, il est aussi sourd-muet !》

Sa plaisanterie fit rire son groupe alors qu'il le rejoignait, et un plissement amer gagna les lèvres de Kido. Rire. Il reprit son chemin, contournant la pelouse cette fois, les poings serrés autour de la lanière de son sac de cours. Il rejoignit les bâtiments.


《Tu devrais arrêter avec ces lunettes. C'est pour ça que tous ces types te brutalise.》

《Ça ne changerait rien.》

Sakuma fit la moue en entendant sa réponse et soupira, accoudé à sa table. Il se redressa, s'étira, se plaignit de son mauvais caractère : Genda sourit un peu, saisit amicalement l'épaule du premier et plaisanta sur le fait que Kido sans lunettes, ce n'était plus vraiment Kido. Et le blanc riait, affectueusement.

Le lycée était un endroit plein de haine, de jalousie, de rage et d'envie. Comme toute bonne simulation de structure sociale qui se respecte, il y avait des règles, des rôles et une hiérarchie stupide. Lorsqu'on était faible, il valait mieux se faire petit.

C'est là qu'était le problème de Kido.

Il n'était pas faible. Il était riche et fier, comme les autres carnivores de cet endroit. Comment s'était-il retrouvé si bas dans la chaìne alimentaire alors qu'il avait tout des grands carnassiers ? Il garda le silence, encore et toujours, Sakuma et Genda discutaient paresseusement, évoquant les dernières rumeurs, les dernières nouvelles, lorsque la porte de la classe s'ouvrit sur un groupe de garçons. Ils riaient fort. L'un d'eux tira en arrière la chaise d'un type qui n'avait rien demandé, le fit tomber en expulsant, toujours, un rire de hyène du fond de sa gorge déployée. Le gars était tombé dans un cri sourd, se plia sur lui-même, mal en point, et respecta la règle numéro un du loser : marche à l'ombre et tais-toi.

Les gens apprenaient bien vite à se faire petit ici. Et ce grand gaillard à appareil dentaire qui gisait au sol parvenait à se rendre aussi minuscule qu'une souris. Une souris d'un mètre quatre-vingt onze.

《Hey, toi, qu'est-ce que tu regardes ?》

Sakuma releva la tête vers celui qui interpellait Kido, et le dévisagea un instant, interdit.

《Désolé, mec, juste de la curiosité.》finit-il par dire.

La brute se contenta de l'excuse plate du blanc et s'assit sur la chaise qu'il venait de voler. Kido ne dit rien lorsque Sakuma lui lança son regard réprobateur : Sakuma et Genda n'étaient pas impopulaires, contrairement à lui. Ils étaient doués en sport, juste assez bons en cours pour n'embêter personne, plaisaient aux filles, même. Kido se doutait bien qu'il faisait un peu mine de tâche dans ce charmant petit tableau. Un garçon silencieux, intello, avec des dreads et ces lunettes toutes droit sorties d'anime, que faisait-il avec Genda et Sakuma ? Il ne voulait pas être le loser faiblard avec des garde du corps qui avaient eu pitié de lui : il aimait bien Sakuma et Genda, mais ils étaient différents de lui, et il ne se sentait que plus minable encore à leurs côtés.

Il se leva silencieusement, sa chaise raclant au sol tandis que ses doigts fins s'appuyaient sur la table devant lui. Genda écoutait sa musique tranquillement, Sakuma croquait dans une pomme, observant distraitement l'entraînement des majorette en contre-bas. Celui-ci releva la tête alors qu'il esquissait un pas par dessus son sac de cours pour s'engager vers la sortie.

《Tu vas où ?》demanda-t-il, surpris.《Les cours vont pas tarder à reprendre.》

《Aux toilettes.》

Son ami comprit qu'il ne servait à rien de l'accompagner et retourna à son observation, poussant Genda du coude en pointant du doigt une des jolies filles qui jouaient de leurs bâtons sur un des terrains de sports du lycée. Kido n'eut que le temps d'attraper le sourire de Genda avant de quitter la salle de cours et de se retrouver dans le corridor. Deux première-années passèrent devant lui en pouffant, et il se demanda vaguement si elles se moquaient de lui ou discutaient d'un de ces mâles de l'autre bout du couloir. Le jeune homme évalua s'il pouvait se rendre aux toilettes de l'autre bâtiment sans risquer d'être en retard, pas spécialement emballé par l'idée de passer devant toutes ces brutes qui squattaient plus loin. Sa montre semblait contre lui, apparemment : pas le temps d'aller ailleurs.

Il prit son courage -sa témérité- à deux mains, et inspira profondément en s'engageant vers les toilettes. Il tentait de se persuader que ça irait, qu'il n'y avait aucune raison de s'inquièter, mais son coeur accélerait à mesure qu'il s'approchait de la bande de squatteurs. Il sous estimait parfois trop son instinct.

Il entra dans les toilettes, faisant profil bas auprès des gars qui semblaient scotchés à l'entrée. Il n'aimait pas cet endroit au lycée. Ça sentait la pisse comme si l'odeur avait imprégné les murs, et des petits mots des plus accueillants ornaient les portes des cabines. Pute au numéro 080-6XXX-2XXX -sans doute un malheureux type qui avait dû être harcelé nuit et jour après ça-, Minato Fusakabe de la 1eD est une salope, BJ gratos demandez Kuse, tu pues la merde, Hijibe a une petite bite, FUCK YOU ALL.

Des générations de ces deux catégories de personnes : ceux qui rient et ceux dont on rit. Ceux qui mangent et ceux qui se font bouffer.

Kido préférait quand il n'y avait personne. Pas de chance pour lui, un type utilisait l'urinoire du milieu, et les deux seuls restants étaient adjacents à lui. Il soupira discrètement, s'approcha, défit sa braguette, alerte. Ce silence était lourd, assourdissant. Kido essayait de se concentrer sur ce qu'il faisait mais il avait des pierres dans l'estomac et des serpents froids dans le dos ; il détestait cet endroit, cette odeur, cette atmosphère. L'autre était un de ces carnassiers du haut de la chaîne alimentaire, et il semblait avoir envie de se mettre quelqu'un sous la dent... Kido essaya de se persuader que ce n'était qu'une façon de parler, mais il ne parvenait plus à y croire. L'autre était un deuxième-année, de l'équipe de basket. Bien battis, grand, bien plus grand que lui. Un tigre, et lui, une antilope.

《Hey, toi.》grogna-t-il.

On aurait dit un grognement de bête pris entre la soif et la paresse : ordonant à la proie de se jeter dans sa gueule.

《Je t'ai vu mater ma bite.》

Et voilà. Kido rangea ses affaires à la hâte et remit son pantalon. Il fit quelques pas en arrière, peinant à refermer sa ceinture, et allait détaler lorsque l'autre se tourna vers lui et le plaqua contre le mur couvert de graffitis. Kido le trouvait menaçant, mais c'était peut-être son expression naturelle. Ça n'avait aucun sens, avec ses lunettes, qu'aurait-il pu voir ?

Des carnivores pervers et menteurs et cruels et...

《Ça te fait bander ? P'tit PD va.》

... répugnants.

《J'vais t'apprendre à baver sur ma bite.》

L'autre lui saisit la mâchoire, férocement, le toisa de toute sa hauteur. Kido se dit que ça aurait bien fini par arriver ; dans un monde aussi pourris, géré par des types tout aussi pourris, un mec comme lui ne pouvait pas aller loin. Un mec qui n'avait pas su utiliser son potentiel.

Un déchet, une canette dans laquelle on shoot pour le fun. Qu'on explose pour rire.


Bon, pas très drôle comme début. J'espère que ça ne vous aura pas trop choqué. Je l'ai écrit dans une période où j'avais besoin d'extérioriser un peu, où je n'allais pas très bien.

En tout cas, portez vous bien d'ici la prochaine fois et n'hésitez pas à partaget vos premières impressions dans les reviews ! :D