Coucou!

Je m'ennuyais un petit peu dans le train, j'avais besoin de prendre du recul par rapport à mon autre fic, alors j'ai imaginé cette courte histoire qui j'espère vous plaira. Je ne sais pas encore combien de chapitres il y aura, mais je pense une demi-douzaine.

Ah oui: Univers Alternatif. & Pas de magie dans cette histoire. j'aurais voulu, mais ça aurait été compliqué et j'avais besoin de technologie moderne et Moldue.

Voilà. Euh, n'hésitez pas à me donner votre avis.


Chapitre 1 :

Le truc, c'est que je ne l'avais pas vu venir. Si je l'avais vu venir, je serai partie en courant.


Je croyais que ça n'arrivait que dans les films, quand une nana assise seule au comptoir d'un bar lounge se fait, à sa grande surprise, offrir un cocktail farfelu et très cher par un mystérieux brun ténébreux désireux de s'attirer ses bonnes grâces. Et pourtant, quand Hannah a posé ce verre devant moi avec un clin d'œil complice, puis m'a informé que non, ce n'était pas un cadeau de la maison, ni une erreur, ni une blague, le tout en regardant par-dessus mon épaule, j'ai bien dû admettre qu'aujourd'hui, ce soir, c'était moi cette fille.

Et pendant quelques secondes, j'ai pas su comment réagir.

Comprenez, je ne pense pas être moche ou quoi que ce soit, mais je suis loin d'être une bombe non plus. En plus, paraît que je suis assez intimidante, quand on me connait pas. Mes sourires ne sont pas gratuits, et j'ai naturellement une expression de bibliothécaire sévère parfaitement assortie au ton froid que je réserve aux inconnus. Et ce soir, j'avais l'air encore plus grognon que d'habitude.

Et malgré ça, quelqu'un tentait une brave approche. C'était courageux. Et surprenant.

(Je n'aimais pas les surprises.)

(Et je ne sais pas si je l'ai déjà dit, mais je n'ai pas l'habitude qu'on m'aborde.)

Du coup, je suis restée calme. Je ne me suis pas retournée immédiatement pour avoir à qui j'avais affaire. Je n'ai pas touché le verre non plus, bien qu'il tombait à point car je n'avais plus un rond, que j'avais toujours envie de boire, et que l'inconnu avait par un heureux hasard choisi mon cocktail préféré.

Non, je souhaitais évaluer la situation d'abord. Nul doute que se faire offrir un verre était flatteur, mais l'accepter signifiait accepter de bavarder avec mon mystérieux admirateur. Or, le problème avec ce généreux admirateur était qu'il était également mystérieux, donc inconnu. Et s'il ne me plaisait pas ? Ou était inintéressant ? Ou avait mauvais caractère ? Ou se révélait être un fétichiste des pieds ? Je serai obligée de lui faire la conversation jusqu'à la dernière goutte d'alcool, puis prétexter une envie pressante avant de m'enfuir par la lucarne des toilettes (déjà fait, je préfère ne pas en parler). Ou pire encore : et si c'était un serial killer ne s'attaquant qu'aux rousses aux yeux verts, les découpant en morceaux de trente centimètres cubes exactement avant de les enterrer dans la forêt ?

Accepter ce verre pourrait fatalement sceller mon destin.

Ouais… J'ai peut-être regardé trop de films. Si ça se trouve, c'est juste un brave type qui mériterait dont j'apprécierai la compagnie. Et je dis pas ça parce que j'ai soif, et que ce cocktail, mon préféré, était gratuit et me suppliait presque de le boire. J'étais face à un dilemme. Si je le refusais, la soirée s'arrêtait là, pour moi. J'étais un peu déprimée, seule, et n'avais pas très envie de rentrer aussi tôt à l'appart, mais il ne me restait qu'une dizaine de livres dans mon sac, somme tout juste suffisante pour attraper un taxi. Or, c'était précisément parce que je n'avais pas envie de rentrer que je m'étais réfugiée dans le bar de Hannah. C'était le meilleur endroit pour se retrouver seul au milieu de gens. Même si c'était légèrement hors de mon budget, j'aimais l'ambiance cosy qui y régnait, la musique jazzy qu'on y mettait, les lumières tamisées, le fait que ce ne soit jamais vide et en même temps assez spacieux pour qu'on y soit tranquille.

J'ai regardé le verre.

Le verre m'a regardé. S'il avait un cul, il l'aurait roulé de manière suggestive, j'en suis sûre.

Hannah m'a regardée, l'air de dire "T'attends quoi? "

Vile tentatrice. J'ai fixé le verre encore quelques secondes, plus tentée que jamais.

Bon, qu'est-ce que je risquais, après tout? C'est surement un brave type. Et si c'était pas le cas, j'avais une bombe au poivre dans mon sac et j'étais réputée pour courir vite.

Quoique, je risque d'être fortement embêtée étant donné la hauteur des talons des sandales que je porte.

Tant pis, je courrais pieds nus. En plus, si j'enlève les chaussures, ça me fera des projectiles en plus en cas de fuite.

Bon, tant pis.

Je n'ai pas pu résister. J'ai pris le verre, et ai dégusté une gorgée de la succulente concoction avant de soupirer de plaisir. Qu'est-ce que c'était bon!

– Enfin, a commenté Hannah en roulant des yeux.

C'est vrai que ça faisait cinq minutes que je tergiversait, mais je détestais prendre les décisions sur un coup de tête.

– Il est comment ? me suis-je enquise.

– Super mignon.

Puis elle est restée pensive quelques secondes.

– Il me dit quelque chose, d'ailleurs… je crois que c'est le copain de Rama.

– Lequel ? ai-je ricané.

Rien que ce trimestre-ci, elle m'avait présenté deux « hommes de sa vie » différents. Marlène et moi on l'appelle le Phoenix, dans son dos.

– Celui qui a toujours les cheveux en bataille, a dit Hannah. Grand. Yeux clairs. Lunettes.

Quoi?

Je me suis retournée si vite que j'ai failli me tordre le cou.

James m'a adressé un clin d'œil, puis m'a fait signe de le rejoindre. Fuck it.

Je lui ai retourné son sourire pendant une micro-seconde, avant de me retourner et de reprendre une gorgée. Ou plusieurs. Tout à coup, je ne sirotais plus comme une jeune femme distinguée, je me bourrais la gueule. James Potter. J'étais maudite. C'était bien la dernière personne que j'avais envie de croiser. Déjà que d'habitude, sa grosse tête m'exaspère, ce soir, je le détestais presque et le jalousais certainement.

– T'as pas l'air contente de le voir, a fait remarquer la barman.

– C'est lui qui est arrivé premier, ai-je grommelé avec mauvaise humeur.

Qui m'a piqué ma place, mes honneurs, et ma plaque distinctive en or. Enfin, celles qui me seraient revenues si James n'était pas simplement... meilleur en tout.

Et croyez-moi, j'avais essayé de le surpasser.

ça n'a pas été un choc de n'arriver que seconde après lui, mais... je sais pas. J'avais peut-être secrètement entretenu le fol espoir que je le battrai par je ne sais quel miracle.

Mais bon. De toute manière, ça n'a aucune importance, arriver première ou seconde, n'est-ce pas? Non pas que j'ai bossé pour cette place pendant toutes mes années universitaires…

Ouais… non, c'est déprimant. Je n'arrivais pas à me défaire de cette petite pointe de déception, même si arriver deuxième derrière un génie comme James et devant Sirius, un autre génie, était loin d'être un échec. Il fallait que je me concentre sur le verre à moitié plein.

– Oh.

– Je suis certaine qu'il m'a suivi juste pour se vanter de sa réussite.

Hannah a haussé les épaules, puis a esquissé un sourire en coin.

– Je pense qu'il a de meilleurs intentions que tu ne lui prêtes, Lily. Après tout, il t'a offert un verre, et il n'a pas choisi le moins cher sur la carte. Sans compter qu'il a une bouteille d'un super vin à sa table, et que ça m'étonnerait qu'il la finisse seul, surtout qu'il m'a réclamé deux verres. Tu devrais... juste te détendre et profiter de l'occasion. Avec deux trois verres dans le nez de ce cru, tu en oublieras jusque son nom.

J'ai souri. J'aimais bien Hannah, et pas uniquement parce que son prénom était un parfait palindrome.

Je n'ai pas hésité longtemps. Tant pis, on a toutes un côté vénal, je suppose.

James Potter, me voilà.

Je suis descendue de ma chaise de bar, et suis allée vers lui en soulevant la robe que Marlène m'a prêtée pour la remise des diplômes, et dans laquelle j'avais peur de me prendre les pieds. A vrai dire, je la trouvais un peu trop habillée pour l'occasion, mais Marlène avait tenu à ce que je sois resplendissante au cas où. Elle s'est tellement emballée qu'elle m'avait également fait un chignon extrêmement sophistiqué, que j'ai défait dès qu'elle a tourné le dos.

James était également sur son trente-et-un, plutôt pas mal sans les T-shirts et jeans qui constituaient généralement sa garde-robe. Mais chassez le naturel, qu'il revient au galop. Il s'était déjà débarrassé de sa cravate, avait déboutonné son gilet, remonté les manches de sa chemises et bien évidemment ébouriffé ses cheveux. Il restait cependant joli, il fallait avouer.

– James, ai-je lancé d'une voix aimable en arrivant à sa hauteur.

– Evans.

Il avait toujours le tic de m'appeler par mon nom de famille, bien que cela faisait trois ans qu'on se connaissait et que je savais qu'il m'appelait Lily quand je n'étais pas là et qu'il faisait référence à moi.

Je me suis laissée tomber dans le fauteuil en face du sien. James a dû se redresser un peu, car ses jambes étaient si longues que nos genoux sont entrés en collision.

– Je suppose que je dois te remercier ? ai-je dit en désignant le verre.

– Ce serait bien, oui. Surtout que c'est ton préféré.

– Merci, alors. T'as bien choisi, j'adore ça.

Il a nonchalamment haussé les épaules.

– C'est ce que tu prends toujours.

J'ai froncé les sourcils. James, Rama et moi nous étions en effet déjà retrouvés ensemble ici une ou deux fois, quand ils sortaient encore ensemble, mais ils avaient mis fin à leur relation il y avait au moins deux ans. J'étais étonnée qu'il se souvienne d'un tel détail.

– Merci, ai-je répété.

Il a souri.

– Pourquoi t'es pas à la fête ? ai-je demandé avec curiosité.

– J'avais pas envie de rester, alors je suis parti à ta recherche – t'as oublié ton téléphone dans le bureau du Doyen. Je me suis arrêté en chemin pour prendre un verre, et je suis tombé par hasard sur toi.

– Oh ! Merci, je l'ai cherché partout.

Il m'a rendu mon portable, et je l'ai rangé dans mon sac.

– Comment t'as su que je serai là ? ai-je demandé par curiosité.

– Par hasard. Je suis juste venu prendre un verre puis j'ai remarqué ta grosse tête. Mais ça m'arrange, car tu n'habites pas à côté.

J'ai roulé des yeux.

– Et sinon ?

– Quoi?

– C'est quand que tu vas commencer à te vanter de m'avoir battue ?

Il a regardé sa montre.

– Ça ne saurait tarder, a-t-il répondu avec un sourire en coin.

J'ai vidé mon verre. Il m'a servi du vin. En effet, il était délicieux, et faisait efficacement retomber ma frustration.

Puis on s'est dévisagé quelques temps en silence. Lui avait le visage tranquille et indéchiffrable, moi j'étais perdue dans mes pensées.

– Comment tu fais, pour être le meilleur tout le temps sans lever le petit doigt ?

J'étais sincèrement curieuse. James a paru sincèrement étonné.

– C'est ce que tu crois ?

– Je ne t'ai jamais vu réviser quoi que ce soit en trois ans, et je ne suis jamais parvenue à te battre dans aucune matière.

– Je suis intelligent, mais pas au point d'être le meilleur tout le temps dans toutes les matières sans lever le petit doigt.

– T'es toujours en train de faire la fête, personne ne t'a jamais vu étudier.

Croyez-moi, je me suis renseignée. Je tenais à découvrir la méthode de travail qui donnait de tels résultats. C'était avant de me rendre à l'évidence quant au fait qu'il était un pur génie, évidemment. J'étais une bosseuse, il avait un don naturel, et il y avait ce fossé entre nous.

J'ai bu une nouvelle gorgée. James m'a imitée, toujours sans me quitter des yeux.

– Ce n'est pas parce que personne ne m'a jamais vu que je ne travaille pas, a-t-il finalement dit. Et faire la fête n'exclut pas de travailler dur. J'aime simplement faire croire aux gens que mes multiples talents sont innés, entretenir le mythe.

– Pourquoi ?

– J'aime bien être admiré. Et te rendre folle de jalousie. Ta tête d'aujourd'hui, quand tu as appris que tu n'étais que deuxième, était magnifique.

– Je n'étais pas folle de jalousie, ai-je protesté.

– Dans ce cas, pourquoi es-tu partie directement après la remise des diplômes ?

– Je n'ai jamais eu l'intention de rester pour la petite fête.

– Ce n'était pas parce que tu es arrivée deuxième de promo ?

– Non.

– T'es sûre ?

J'ai croisé les bras. Est-ce qu'il avait vraiment besoin de me torturer ?

– Je suis fière d'être arrivée deuxième de promo.

– Mais tu voulais la première place.

– Bien sûr. Je vise toujours le haut du podium, quoi que je fasse. Mais je savais que tu aurais toujours une longueur d'avance sur moi. Je n'ai pas été surprise que tu sois premier. Mais que je sois arrivée première ou deuxième n'aurait pas changé le fait que la dernière personne vivante de ma famille n'ait pas fait le déplacement pour venir me féliciter d'avoir réussi mes études.

Il y a eu un silence.

– Désolé.

– Y'a pas de mal.

Je lui ai adressé un sourire rassurant, car il paraissait extrêmement gêné et que je ne souhaitais ni le mettre mal à l'aise, ni susciter sa pitié.

– Si ça peut te consoler, a-t-il repris, je n'ai jamais bossé aussi dur pour rester premier de toute ma vie, et je ne t'ai battu que de 0,02 points. T'es brillante, Lily Evans.

– Merci.

Ça me consolait, en effet.

Nos genoux se sont frôlés sous la table, et James s'est redressé de nouveau.

– Désolé.

– Y'a pas de mal, ai-je répété.

J'ai bu quelques gorgées pour me donner contenance. Ma petite sortie avait jeté un froid à la table, et il semblait toujours se mordre les doigts.

– Quels sont tes projets pour l'avenir ? ai-je demandé d'une voix plus enjouée.

– Je reprends la boîte à papa, bien sûr.

– Surprenant, ai-je raillé.

– Bah... mon avenir est tout tracé depuis ma naissance.

Son ton fataliste m'a prise de court. Il s'est mis à regarder les personnes qui dansaient au milieu de la pièce.

– Tu dis ça comme si tu aurais aimé faire autre chose, ai-je fait remarquer.

Il a haussé les épaules.

– Ça n'a pas vraiment d'importance. Mais mon père a besoin de moi, et les vies et salaires de centaines de personnes dépendent de moi. C'est une chance de diriger Phoenix, mais dans un sens je n'ai pas vraiment eu le choix alors j'aurais toujours l'impression que l'herbe est plus verte ailleurs.

– Qu'est-ce que tu aurais aimé faire ?

– Plein de choses idiots, chers et dangereux qui ne nécessitent pas de bureau. Et toi ?

De tout évidence, il ne voulait pas en parler, alors je n'ai pas insisté.

– J'ai le luxe de pouvoir me lancer dans ce que j'ai toujours voulu faire.

– Oui, comme tu dis, c'est une chance. T'as commencé à postuler?

– Depuis le mois de février.

– Tu dois avoir l'embarras du choix.

C'était un compliment? J'étais franchement vaniteuse, alors je prenais.

– Oui. J'ai même déjà reçu plusieurs réponses positives à mes candidatures, à vrai dire. Mais je réfléchis encore.

– Cool. Une boîte qui t'intéresse en particulier ?

– La Silver Sax.

James a froncé les sourcils.

– Ils ne sont pas basés en Irlande du Nord ?

– Si. Mais j'y ai été en vacances, c'est très joli. Je m'y plairais.

– Tu serai prête à partir ? A quitter Londres ?

– C'est pas à l'autre bout de la terre, non plus. Rien ne me retient vraiment ici, à part mes amis bien entendu. Mais tu as raison, c'est un grand bouleversement, même si ça ne serait que pour un ou deux ans, le temps de me faire la main. C'est pour ça que je prends le temps de bien réfléchir avant de faire mon choix.

James a bu son verre, l'air soucieux.

– Et les autres boites ? Elles sont à mille kilomètres aussi ?

– Je suis assez intéressée par la Coyote Corps aussi, mais eux ont leurs bureaux en Suède carrément, ça fait encore plus loin.

Son visage s'est assombri, comme s'il était contrarié.

– Tu tiens absolument à partir, en fait ?

– Pas forcément. Mais je n'ai pas encore eu de proposition intéressante à Londres.

Quelque chose semblait le gêner dans mes choix de parcours. Il est resté pensif et silencieux pendant quelques minutes, occultant presque ma présence, mais je m'en suis pas offusquée et en ai au contraire profité pour me resservir généreusement.

– Et si tu avais une proposition décente, tu resterais ? a-t-il soudain demandé.

J'ai haussé les épaules.

– Surement. J'aime beaucoup vivre ici.

C'était toujours mieux que Cokeworth.

– Dans ce cas, tu ne veux pas venir bosser chez moi, plutôt ?

J'ai cligné des yeux. Suis restée bouche bée. Puis ai ri. Franchement.

Il était drôle. L'alcool me rendait un peu pompette, et j'avais presque cru à sa blague.

– Non merci, ai-je répliqué.

– Quoi, la boîte de mon père n'est pas assez bien ? a-t-il demandé sur un ton piqué.

Il avait l'air drôlement sérieux, quand même… Peut-être que ce n'était pas une plaisanterie, au final, mais une offre très sérieuse. J'ai arrêté de rire, un peu prise de court.

– Au contraire. C'est celle où j'aurais postulé, si tu n'y travaillais pas.

Il a eu l'air confus.

– Ma présence n'empêcherait pas la tienne.

– Ton père est charmant, mais sur le point d'aller à la retraite. J'ai pas forcément envie que tu sois mon patron.

– Je serai sympa, a-t-il promis. Et juste. Je ne te ferai jamais faire mon café. Au contraire, je sais mieux que quiconque de quoi tu es capable. On a besoin de talents comme toi à Phoenix.

OK. Visiblement, il ne plaisantait pas.

Je suis restée silencieuse un moment. Je ne savais pas vraiment quoi dire. Je n'avais pas l'habitude que quelqu'un d'autre qu'un prof reconnaisse que j'avais du talent.

– Mais on passerait notre temps à se chamailler, ai-je fini par bredouiller.

– J'aime bien, quand on se chamaille.

J'ai secoué la tête.

– C'est vrai. T'aime beaucoup m'embêter.

James est devenu familièrement taquin avec moi quand il est sorti avec Rama, et ses boutades n'ont pas cessé après leur rupture.

– C'est marrant, de t'embêter, a-t-il admis avec un petit sourire entendu. T'es facile à titiller.

J'ai levé un sourcil.

– Contente de te faire rire, ai-je grogné avec un air faussement agacé.

Son sourire s'est élargi. Le mien est réapparu. C'était la première fois que je souriais autant en sa présence, car d'habitude on était comme chiens et chat. C'était comme si, maintenant qu'on avait terminé nos études, qu'on n'était plus rivaux, on se cherchait une nouvelle identité. Je ne savais pas trop quoi en penser, mais j'étais contente que ses taquineries restent un point de repère dans nos relations.

– Sérieusement, tu ne veux pas venir travailler avec moi ? a-t-il repris. J'aurais bien besoin d'un bras droit comme toi.

Pourquoi insistait-il tant ?

– T'es vraiment sérieux ?

– Pourquoi t'es aussi surprise ?

Je suis restée silencieuse un moment.

– On a été forcés à bosser ensemble pratiquement tout le temps ces dernières années, je n'aurais jamais cru que tu voudrais t'infliger ma présence volontairement.

Nos profs sadiques adoraient nous mettre en binômes, bien qu'il était de notoriété public qu'on se chamaillait sans relâche.

– Ouais, mais sur le plan du travail, on a une entente parfaite. T'es brillante. Réactive. Rigoureuse. Et même si tu peux être vachement chiante, tous les projets sur lesquels on a travaillé ensemble ont été un succès. Admets-le ou non, il y a quelque chose chez nous qui colle.

Je l'ai sondé du regard avant de répondre.

– C'est vrai, je suppose. Mais cette discussion pourrait être notre dernière, tu pourrais choisir n'importe qui d'autre de notre année qui ferait l'affaire. Tu pourrais être débarrassé de moi ce soir. Tu dis tout le temps que je t'ennuies.

– Je pense qu'on serait les meilleurs partenaires. On a de l'expérience à bosser ensemble, on se fait confiance, on se stimule plutôt bien intellectuellement. Je… ne vas pas le crier sur tous les toits, mais Phoenix traverse une crise, et j'ai besoin d'une équipe motivée pour la redresser. Je pense que tu pourrais être un atout essentiel. Et puis…

Il s'est tu. J'ai patiemment attendu, mais il semblait soudain super gêné.

– Et puis ? l'ai-je doucement encouragé.

– J'ai pas envie que cette discussion soit notre dernière.

J'ai froncé les sourcils.

– Pourquoi ?

– Ça me manquerait. Débattre avec toi, et… et tout. Tu me manquerais.

Je n'ai pas pu m'en empêcher. J'ai éclaté de rire.

– Qu'est-ce qu'il y a de si drôle ? a-t-il demandé en croisant les bras.

– Tu passes ton temps à dire que je suis reloue, et maintenant tu fais genre je te manquerais ? Décides-toi, espèce de schizo.

– Tu es reloue. Tu es toujours en compétition, tu as souvent raison, tu parles beaucoup, t'es bordélique, et t'es chiante de bien d'autre manières. Mais… ce n'est pas quelque chose que je déteste chez toi. Au contraire. Et il y a plein de choses à admirer chez toi aussi.

J'ai rougi.

Je sais pas pourquoi, car j'adore qu'on me complimente, mais j'ai rougi.

J'ai fini mon verre d'un traite. Je ne savais pas quoi répondre, alors il a continuellement continué.

– Ce n'était pas si terrible, quand on était forcés de travailler ensemble. On a plein de points communs. Y'a peu de choses que je n'aime pas chez toi, mis à part ton mauvais goût dans le choix de tes copains.

– T'as jamais rencontré aucun de mes copains, ai-je contredit. Je ne suis jamais sortie avec personne.

Il a froncé les sourcils.

– Et ce mec-là, qui te tourne tout le temps autour ? Avec les cheveux gras ?

– Sev ? C'est juste… c'était un ami. Rien d'autre.

Surtout depuis qu'il avait intégré la campagne de Zeff Nosegobe, dont la chasse aux sorcières était écœurante. Je n'ai pas lu en entier ses promesses de campagne car ça m'agace très vite, mais je ne serai pas étonnée qu'il se soit engager à brûler les roux comme au moyen-âge.

– Et McLaggen ? Diggory ? Chang ? a insisté James. Je vous ai vu vous peloter plusieurs fois.

Sa voix était neutre, mais ses yeux trahissaient bien plus d'intérêt pour le sujet qu'il ne le prétendait.

– J'ai des hormones à soulager de temps en temps, ai-je répondu. De là à les considérer comme des petits-amis, il y a un monde. Je me suis contentée de prendre ce qui m'intéressait chez eux. On n'est jamais allés ne serait-ce que boire un café.

– Pourquoi ?

J'ai plissé les paupières, amusée.

– T'es vachement curieux, ce soir.

Il a haussé les épaules.

– Un peu, c'est vrai. C'est marrant, que ce soit la première fois qu'on discute vraiment.

C'était vrai. J'étais étonnée de la fluidité de notre conversation, et définitivement contente d'avoir accepté son verre.

– Alors ? Pourquoi ?

J'ai haussé les épaules.

– Je ne suis pas une romantique. J'aime bien le célibat. J'ai pas le temps pour un mec. Je veux me concentrer sur mes études et ma carrière.

– Ah?

– Je ne suis pas vraiment du genre à accorder du temps a quelqu'un d'autre, et je préfère concentrer mon temps et mon énergie sur des choses plus utiles. J'ai pas spécialement envie de sortir avec des garçons, encore moins de tomber amoureuse, et encore moins de bâtir une relation. Je n'ai pas forcément envie d'être en couple.

– Dis plutôt que personne ne t'a encore donné l'envie d'être en couple.

– Peut-être, ai-je concédé après une pause, parce que c'était probablement vrai.

– T'attends le prince charmant ?

J'ai ri.

– Je ne crois pas aux princes charmants, ni aux princes pas charmants d'ailleurs – bien que je ne cracherais pas sur un prince Saoudien –, et je n'attends personne, ai-je répliqué avec hauteur. Je ne suis pas romantique pour un sou. Quand on n'attends personne, qu'on ne cherche rien, on a pas le cœur brisé et on est tranquille.

– Tellement tranquille qu'on s'ennuie parfois, non ?

– Parfois.

Une fois de plus, il avait visé juste. C'est qu'il ferait un bon psy, ce mec.

– Je trouve ça dommage, a-t-il commenté. T'es un peu comme les collectionneurs de comics qui gardent leurs BD sous vide pour ne pas les abimer. C'est pas ça l'amour. C'est pas ça, la vie. Un cœur, c'est comme un diamant brut : ça se travaille, ça se taille, ça se polit.

J'ai levé un sourcil.

– Potter, romantique, je ne l'aurais jamais cru, ai-je dit sur un ton amusé

– Tellement de choses que tu ne sais pas sur moi, chérie. Les fleurs, les chocolats et les câlins, j'adore ça, mais ne va pas le répéter. J'ai une réputation de bonhomme à tenir.

Il s'est frappé virilement la poitrine avec le poing, et j'ai souri.

– Mais oui. Je suppose que c'est pour ça que tu as autant d'aventures, et que personne ne te voit jamais avec la même fille ? ai-je ironisé.

– C'est parce que je suis difficile, s'est-il défendu.

– T'as pourtant l'air de prendre tout ce qui se met à portée de main.

– Je prends, mais je ne garde pas forcément.

– Exigeant ?

– Non, juste… difficile. Je sais ce que je veux, j'ai juste eu besoin de plus de temps à comprendre ce qui ne me convenait pas.

Je me suis recalée confortablement dans le fauteuil, et l'ai observé avec curiosité.

– Hmm. J'aurais jamais pensé que sous cette drague nymphomatique se cachait une quête de l'amour, ai-je finalement déclaré sur un ton philosophique.

– « Nymphomatique » n'est pas un mot qui existe dans le dictionnaire.

– Ça devrait.

Il a souri.

– Donc, maintenant que t'as bien réfléchi, tu as réussi à déterminer le type de nana qu'il te faut ? ai-je demandé.

– Oui. Tellement, en fait, que j'ai carrément déterminé la nana qu'il me faut.

Je me suis redressée, et l'ai regardé avec étonnement.

– Tu sors avec quelqu'un ?

Je ne le savais pas, et j'étais amie avec des filles qui savaient tout sur tout le monde.

– Non. Mais… il y a quelqu'un qui m'intéresse. Beaucoup.

Je me suis redressée, excitée à l'idée d'avoir un scoop, pour une fois. Et celui-ci promettait d'être croustillant.

– C'est qui ? C'est qui ? C'est qui ?

– C'est un secret.

Je me suis caressé une barbe imaginaire, perdue dans mes réflexions.

– Je suis certaine que c'est Marlène.

– Non.

– Emmeline ?

– Non.

– Hmm.

J'ai penché la tête d'un côté. Il m'a imité. Je l'ai penchée de l'autre, il m'a imité encore.

– Je la connais ? ai-je repris.

– Très bien.

– Elle est comment ?

– Très jolie.

– Ça ne m'aide pas beaucoup.

– Si je te la décris, tu trouveras en moins de deux secondes.

– Hmm.

J'ai pris un moment pour réfléchir encore. Une jolie fille que je connaîtrais et qui pourrait être du gout de Potter… hmm. Non, vraiment, je ne voyais pas...

– Elle est de la fac ? ai-je demandé.

– Oui.

– Elle a notre âge ? C'est quelqu'un de notre promo ?

– Oui.

– De notre département ?

– Je ne peux pas te le dire, ce serait trop facile.

J'ai rapidement passé en revue les filles de notre promo. C'était triste, mais il n'y en avait pas beaucoup.

– Mary ? Lucinda ? Emma ?

– Non, non, et non ! Laisse tomber, tu ne trouveras pas. Même si tu trouvais, je ne te le dirai pas.

J'ai fait une moue boudeuse, et ai croisé les bras, mais il n'a pas changé d'avis et j'ai fini par me résigner. J'avais la moitié d'un scoop, c'était déjà bien.

– Hmm. Bon. Et comment ça se fait que tu ne sortes pas avec elle, si elle te plait tant ?

– Je ne sais pas encore si la réciproque est vraie. Je ne suis pas certain de lui plaire.

Devant mon air sincèrement ahuri (parce que oui, en toute objectivité, faut bien avouer qu'il est séduisant, le pépère), il a ajouté :

– Elle a beaucoup d'aprioris sur moi, et il faudra du temps pour qu'elle apprenne à me connaitre vraiment et tombe sous mon charme irrésistible. Moi-même, c'est en passant plus de temps avec elle que je suis tombé sous le sien.

C'était tellement adorable que je me suis sentie fondre. Je suis pas romantique, mais paradoxalement j'adore les histoires d'amour.

– Elle doit être vraiment spéciale, ai-je commenté.

– Très. Je n'arrive toujours pas à croire que j'ai mis autant de temps à la remarquer.

– Surement parce que t'es un idiot.

– Ouais, ça doit être ça.

Mon Dieu, mon Dieu, c'était croustillant, tout ça.

– J'ai hâte de connaître l'identité de cette tigresse qui est parvenue à dompter le briseur de cœur du campus.

Il a eu un sourire triste.

– Dis-toi qu'elle a réussi sans même essayer.

Je ne l'avais jamais vu comme ça, aussi mélancolique, et je trouvais ça vraiment touchant et adorable. On est tombés dans un silence confortable.

– Tu veux danser ? a-t-il soudain demandé.

J'ai affiché un air grave.

– OK. J'avoue.

– Quoi ? a-t-il demandé avec inquiétude.

J'ai soupiré, puis je lui ai dit avec tout le sérieux du monde :

– La vraie raison pour laquelle je ne suis pas restée pour la cérémonie est que je suis nulle en danse.

James a éclaté de rire.

– T'es bête.

– C'est vrai, je suis ridicule.

– Viens, je vais t'apprendre les pas de base.

Il a rejeté toutes mes protestations, et j'ai dû accepter sa main tendue car il n'allait de toute évidence pas changer d'avis. Il a mis sa main sur ma taille, tout sagement, et m'a fait danser avec grâce. Je n'avais qu'à le suivre, car il me guidait à la perfection. Une fois certaine de maîtriser assez les pas de base pour ne pas risquer de lui écraser les pieds par inadvertance, j'ai arrêté de surveiller mes chaussures et j'ai levé la tête vers lui.

C'est seulement à ce moment-là que je me suis rendue compte qu'on était vachement proches l'un de l'autre.

Genre... vachement proches. Pas collés l'un contre l'autre, mais assez proches pour sentir la chaleur du corps de l'autre. Tout à coup, j'était très consciente de sa main posée sur ma taille, de l'autre entrelacée avec l'une des miennes, de la présence super masculine qu'il dégageait. Il n'a pas arrêté de me regarder. Son regard était super chaud, mais l'ombre du sourire narquois qui flottait sur ses lèvres me rassurait quant au fait que tout ceci, bien que légèrement sensuel, était strictement platonique.

Finalement, il m'a fait tournoyer une dernière fois avant de me guider jusqu'à ma place.

– T'es loin d'être aussi terrible que tu le prétends, a-t-il commenté en se rasseyant.

– C'est parce que j'ai un bon prof, ai-je rétorqué.

Ma voix était étrangement rauque. Il a fait un mystérieux signe à Hannah, qui nous a apportés de nouveaux cocktails. J'ai arrêté d'être trouvé par le soudain sex-appeal de James, et lui ai intérieurement pardonné de m'avoir troublée.

– Merci. Tu dois avoir raison, quand tu dis qu'on s'entends mieux que je ne veux l'admettre.

– Pars du principe que j'ai toujours raison, tu gagneras beaucoup de temps.

J'ai levé les yeux au ciel.

– Je suppose qu'on pourrait tolérer la présence de l'autre le temps d'une soirée de temps en temps, ai-je repris. Tu paies les conso, t'as le permis, je ne vais pas faire la difficile.

– Non pas que t'es vénale, hein?

J'ai affiché un air faussement offusqué.

– Bien sûr que non! Je suis sincèrement intéressée par ton amitié.

Mais James s'est tout à coup refermé, et s'est réinstallé dans son siège.

– Je rigolais, tu sais ai-je précisé. Je pense qu'on pourrait être bons amis.

– Hmm, a-t-il répondu avec peu d'enthousiasme.

– Comment ça, « hmm » ? me suis-je indignée. C'est toi qui a avancé l'idée qu'on pourrait à la base !

Il a presque timidement levé les yeux vers moi.

J'aime bien les yeux noisettes en général, et j'ai toujours trouvé ceux de James particulièrement beaux. Un jour, alors qu'on était co-hôtes d'une œuvre de charité pour la fac, il a eu une poussière dans l'œil et a pleurniché si longtemps que j'ai dû souffler dedans pour chasser le pauvre cil qui était y était tombé. C'est là que j'ai remarqué qu'ils étaient super beaux, ses yeux. J'en ai rarement vu d'aussi expressifs. Ils virent parfois légèrement au gris, au vert ou au bleu, selon le temps, l'éclairage, l'humeur.

– J'espérais un peu plus qu'être de simples amis, a-t-il admis après une pause.

– Quoi ? Qu'on devienne de super bons amis ? ai-je dit, perplexe. Attention, ce n'est pas un grade qui s'obtient comme ça. En ce qui me concerne, faut passer des tests et des concours. Si tu as le permis, c'est un plus parce que je l'ai raté pour la quatrième fois, là, et j'en ai marre de rentrer à pied. Et bien tenir l'alcool, c'est définitivement un plus aussi.

Il a soupiré, l'air soudain mélancolique.

– Qu'est-ce qu'il y a ? me suis-je inquiétée, décontenancée par ce brusque changement d'humeur.

– Tu te souviens cette soirée chez Sirius, où je t'ai demandé si tu voulais sortir avec moi ?

– Ouais, t'étais vachement torché. On l'était un peu tous, d'ailleurs.

Et vu toutes les choses gentilles qu'il m'a dites ce soir-là, je ne serai pas étonnée d'apprendre qu'il avait également fumé, et pas la bonne vieille pipe à pépé.

– Je ne l'étais pas, a-t-il confessé en me regardant droit dans les yeux. J'ai fait semblant d'être bourré parce que j'étais gêné que tu ne me prennes pas au sérieux.

Gros. Silence.

Je suis restée muette de stupeur pendant quelques secondes. Avais-je mal entendu... ? Non, il plaisantait, c'était pas possible autrement. Mais il paraissait très sérieux… Woaw. J'avais l'impression d'être entrée dans la quatrième dimension.

– Qu'est-ce que t'essaie de me dire ? ai-je murmuré, bien que pas certaine de vouloir connaître la réponse.

– Que j'aimerai bien qu'on sorte ensemble un de ces soirs. Boire un verre.

– Comme des amis?

La note d'espoir dans ma voix ne lui a pas échappé, et il s'est retenu de lever les yeux au ciel.

– C'est toi, la fille qui m'intéresse.

OK, je n'avais pas envie d'entendre la réponse. J'en étais certaine, à présent.

J'étais tellement choquée que ça m'a immédiatement déssoulée.

– Oh.

J'ai dégluti. Puis vidé mon verre d'un trait avant de me resservir de le vider à nouveau. C'était absurde, que je sois la fille qui lui plaise. James... bah c'était James, et moi j'étais... moi. Nous deux, c'était n'importe quoi. ça n'avait aucun sens.

– Je ne m'attendais pas à ça.

Sinon je me serai barrée en courant dès le départ.

Je n'ai pas pu m'en empêcher. J'ai évalué d'un coup d'œil la distance entre notre table et la sortie, ce qui n'a pas échappé à James.

– Cache ton enthousiasme, c'est gênant, a-t-il raillé.

Je me suis nerveusement passé une main dans les cheveux.

– C'est juste que… je sais pas, je ne t'ai jamais vu autrement que comme le mec de Rama, ou un rival à dépasser. Jamais comme… un mec.

– Ce qui m'a d'ailleurs fait penser pendant très longtemps que tu étais lesbienne.

J'ai froncé les sourcils.

– Ce n'est pas parce qu'une fille n'est pas intéressée par toi qu'elle est lesbienne.

– Si, a-t-il simplement rétorqué.

J'ai attendu, mais il n'a rien ajouté.

– C'est ça, ton meilleur argument ?

Il a haussé les épaules.

– Je suis beau, riche, intelligent, populaire, drôle, généreux et plutôt cool. Ce sont des critères appréciés universellement par les femmes depuis la nuit des temps.

Oh, il était de retour le James Potter que j'avais toujours connu. Prétentieux, vantard, orgueilleux, convaincu d'être doté des meilleures qualités du monde. Bon, c'était vrai, mais il n'avait pas besoin de s'en vanter non plus. Sa tête était déjà assez grosse.

Je me suis instinctivement braquée.

– Ça va, les chevilles ?

– C'est la vérité. Je suis sûr de moi car je connais mes faiblesses et mes qualités. Et ces qualités-là séduisent toutes les femmes. Elles se jettent à mes pieds sans que je fasse quoi que ce soit.

– Sauf moi.

– Sauf toi, a-t-il concédé. Je me suis toujours demandé pourquoi.

– Je ne suis pas comme toutes les femmes, et je ne voudrais pas abîmer mes genoux en me jetant à tes pieds.

J'essayais de cacher mon malaise derrière un trait d'humour. Il a souri.

– Ce serait dommage, en effet.

Sa réplique était toute innocente, dite sur le même ton taquin que j'avais employé, mais la voix suave qu'il a prise m'a donné chaud d'un coup. Il n'était plus uniquement James Potter. Il était un mec qui me faisait des avances dont je ne savais que faire.

Je devenais de plus en plus paniquée par la situation. J'avais rien demandé, moi ! Je me sentais comme coincée dans un bâtiment en feu dépourvu de sorties de secours.

– Et c'est pour ça que tu veux qu'on sorte ensemble ? ai-je demandé d'une voix moins assurée que voulue. Pour compléter ton tableau de chasse ?

Je me sentirais limite tellement soulagée par cette solution que j'en oublierais de me sentir insultée. Les connards, je savais gérer. Les mecs qui me draguent, surtout ceux comme James... pas tellement.

J'ai cette fois jeté un coup d'œil vers les toilettes des dames, bien plus proches que la sortie. Peut-être qu'en passant pas la lucarne...

– Non, a répondu James, c'est parce que j'aimerai bien apprendre à te connaitre en dehors du cadre académique ou professionnel.

Ne sachant que répondre, j'ai opté pour finir mon verre. Puis j'ai nerveusement pianoté mon accoudoir. Mes yeux se posaient partout sauf sur lui. Il a patiemment attendu que je reprenne la parole. Mais j'étais incapable de dire quoi que ce soit. Fuck it. James voulait sortir avec moi. C'était complètement insensé.

– Je suppose que ton silence est éloquent, a-t-il finalement lâché.

Son ton était léger, mais son visage soucieux.

– C'est-à-dire ?

– T'es absolument pas attirée par moi.

– Donc lesbienne ?

– Donc lesbienne, a-t-il confirmé.

Il plaisantait, de toute évidence. Je l'ai regardé de haut en bas, même si ce n'était pas vraiment nécessaire pour rendre mon verdict. J'ai croisé son regard chaud. J'ai détourné les yeux.

– Je te l'ai dit, je ne t'ai jamais vu autrement que le crétin qui me bat à tout ce que j'entreprends. Je ne sais pas quoi penser de tout ce que tu me dis depuis tout à l'heure.

– OK. Dans ce cas, prends cinq minutes et évalue ma candidature.

J'ai fait ce qu'il m'a dit. Ce qui était vraiment, vraiment bizarre, et m'a donné l'impression de faire un truc interdit, voire tabou. Je ne l'avais jamais, jamais considéré comme autre chose qu'un rival académique.

En le voyant à quelques centimètres de moi, super beau dans son costard, je me suis franchement demandé pourquoi pour la première fois de ma vie.

Même si je ne voulais pas de petit-ami, il aurait fait un bon flirt, certainement meilleur même qu'Amos, Tib ou encore Ryan à en croire les rumeurs… Parait qu'il embrassait exceptionnellement bien. Et puis il était grand et pas trop moche.

Hmm. C'est vrai qu'elles avaient l'air appétissantes, ses lèvres….

OK. Non, reprends-toi, ma pauvre fille.

C'est seulement à ce moment-là que je me suis rendue compte qu'on se touchait à nouveau sous la table. Nos jambes s'étaient imbriquées sans qu'on y fasse attention. Je me suis subtilement reculée pour ne plus avoir à toucher ses genoux, mes ses jambes interminables étaient trop longues pour qu'on ne se touche pas s'il ne faisait pas un effort. Et il ne semblait pas disposé à en faire.

Je me suis éclairci la gorge.

– James… t'es mignon, et si je voulais un coup juste comme ça, oui, tu pourrais faire l'affaire.

– Et tu veux un coup juste comme ça ?

– Non.

Voilà. Il allait me laisser tranquille, maintenant, avec cette histoire absurde.

– Tant mieux, a-t-il lâché avec soulagement à ma grande surprise. Et sinon, pour quelque chose d'un peu plus sérieux ?

Ah ben non, il n'allait pas me laisser tranquille. Je lui ai lancé un regard méfiant.

– Comment ça ?

Il fallait vraiment que j'arrête de poser des questions dont je ne souhaitais pas savoir la réponse.

– Je suis attiré par toi, mais ce n'est pas qu'une attirance physique, a dit James presque solennellement. C'est ta personnalité, qui me donne envie d'essayer avec toi. Je veux une relation.

J'ai eu un rire nerveux. Trop d'informations d'un coup. J'avais envie de partir en courant. J'avais envie de me débarrasser de mes sandales et fuir sans demander mon reste. C'était ça, le problème, justement. Je n'avais rien demandé, et il s'était permis de s'intéresser à moi.

– Je t'ai déjà dit, je ne suis pas intéressée pour sortir avec qui que ce soit, ai-je rappelé d'une voix tremblante.

– Je ne suis pas n'importe quel mec.

J'ai roulé des yeux.

– Oui, on sait, tu es beau, et riche, et populaire…. Et je ne sais plus quoi d'autre de fantastique…

– Ce n'est pas ce que je voulais dire, m'a-t-il interrompue. Je veux dire par là que nos personnalités pourraient concorder. On a pleins d'atomes crochus. Et quand on parle d'autre chose que les cours ou le travail, on s'entend plutôt bien, non ? La preuve, ce soir.

J'ai nerveusement passé la main dans les cheveux.

– Qu'est-ce qui te prend, tout à coup ? ai-je soupiré.

Il chamboulait ma vie bien rangée, avec ses avances. Il n'y avait eu aucun signe avant-coureur qu'il s'intéressait à moi de cette manière, et on avait pourtant passé les six derniers mois en étroite collaboration lors du stage qu'on a effectué dans la même entreprise. OK, on était beaucoup plus civils l'un envers l'autre, maintenant, mais de là à sortir ensemble... euh, non.

C'était… trop brusque. Trop soudain. Je ne savais pas quoi penser. Je ne contrôlais plus la situation. L'intérêt de James était une inconnue qui venait perturber mon équation.

Il n'était pas censé être intéressé par moi.

Je n'aimais pas, ne pas savoir quoi penser. Ne pas contrôler la situation.

– Comment ça ? s'est-il étonné.

– A quoi tu joues ?

A ce stade, j'espérais de tout mon cœur que tout cela ne soit qu'une stupide, cruelle blague. James Potter intéressé par moi, ça n'avait aucun sens et ça me mettait mal à l'aise. J'aimais les choses logiques.

– A rien, s'est-il défendu. T'es jolie, intelligente, forte et drôle. Je ne vois pas ce qu'il y a d'étonnant à ce que je veuille sortir avec toi.

Je l'ai défié du regard. Il n'avait toujours pas l'air de plaisanter.

Pourquoi, est-ce qu'il n'avait pas l'air de plaisanter ?

Je l'aurais payé, pour qu'il plaisante. Je lui aurais donné mes dix derniers livres et je serai rentrée à pieds, pour qu'il plaisante.

– C'est pas drôle, James.

– Tant mieux. Je suis on ne peut plus sérieux. Je pensais avoir l'occasion d'apprendre à te connaitre petit à petit maintenant qu'on n'est plus rivaux, mais si tu envisages vraiment de partir à l'étranger, j'ai pas d'autre choix que de jouer cartes sur table dès maintenant.

– Si… si tu fais tout ça juste pour te venger de Rama…

– Ça n'a rien à voir avec Rama, m'a-t-il coupé. Absolument rien.

Confuse, je me suis levée.

– Je crois que je vais y aller, ai-je bredouillé en saisissant mon sac.

– Lily.

J'ai cligné des yeux, et me suis tournée vers lui. Mon nom sonnait tellement bizarre dans sa bouche… Il m'a prise par le bras. J'ai senti ma gorge s'assécher.

– Restes, a-t-il murmuré. Je ne voulais pas te faire fuir.

Il n'aurait pas pu y arriver d'une meilleure manière, pourtant.

– Il se fait tard, de toute manière, ai-je prétexté. Je devrais rentrer… J'ai encore des cartons à faire…

Il a soupiré, puis m'a relâché le bras.

– Tu veux que je te raccompagne ?

– Non. Je vais prendre un taxi.

– OK…

Il avait l'air déçu, a ouvert la bouche pour dire quelque chose, mais s'est ravisé et n'a finalement pas insisté.

– Bonne nuit, alors. Rentre bien.

– Bonne nuit.

C'est hébétée que je me suis dirigé vers la sortie, en saluant Hannah au passage. Je ne savais plus quoi penser de tout, et j'avais besoin de me retrouver seule pour réarranger mes pensées.

Et trouver une solution à ce problème.

J'ai marché jusqu'au coin de la rue, mais j'étais tellement ailleurs que je réagissais trop tard à chaque fois qu'un taxi libre apparaissait. Au bout de cinq minutes, j'ai fini par en trouver un et je me suis réfugiée à l'intérieur.

J'ai commencé à me détendre trois rues plus tard, quand mon portable a vibré.

Evidemment, c'était James.


Promets-moi que tu vas réfléchir à ma proposition.


J'ai hésité. Je pourrais l'ignorer, et espérer qu'il ait été bourré tout ce temps, que je n'ai rien remarqué parce qu'il avait pris des tic tacs, et que demain tout redeviendrait normal? Au pire, je pourrais changer de numéro, s'il ne revenait pas à la raison ? Et l'éviter jusqu'à mon déménagement, la semaine prochaine?

Moui... Tentant.

Ou alors, je pourrais agir comme une adulte et lui répondre.


Tu m'en a fait plusieurs.


Je détestais être une adulte.


Toutes. Travailler à Phoenix, mais surtout sortir avec moi.


J'ai secoué la tête. Sortir avec moi… Wow, c'était encore plus bizarre à voir qu'à entendre.


Je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée.


J'étais même carrément certaine, que ce n'était pas une bonne idée.

Mon téléphone a de nouveau vibré très vite trois fois de suite.


Juste un soir. C'est tout ce que je demande.

Aucune attente d'un côté ou de l'autre.

Juste passer du temps ensemble, quelques heures. T'as rien à perdre.


J'ai hésité encore. C'est vrai que je n'avais rien à perdre… J'étais célibataire, sans attache, et ça faisait bien trop longtemps que je n'avais pas eu un peu d'action avec quelqu'un du sexe opposé. Mais James… j'avais besoin de temps pour m'ajuster rien qu'à l'idée d'une quelconque relation avec lui.

J'ai été parcourue d'un frisson.

Mon Dieu, il m'avait complètement perturbée...


Je vais y réfléchir.


Au meilleur moyen de me sortir de cette situation.