Me voici de retour pour vous jouer de nouveaux tours ! Il m'a fallu bien du temps avant de trouver une nouvelle histoire à raconter, mais la voici.
Contrairement à ce que vous pourrez peut-être croire en lisant ce premier chapitre, il ne s'agit pas d'une histoire à classer dans la catégorie "horror". C'est l'histoire d'une amitié, puis d'un amour étranges, et, surtout, c'est le récit de la guérison d'un homme blessé dans tous les aspects de sa personne. Certains me diront que cela fait très "Belle et la Bête", et je ne le renierai pas : après tout, Severus est bien un Prince...
Sinon, ceux qui ont lu ma première fiction connaissent ma politique : le moins d'OOC possible, pas de Ron stupide et d'Hermione battue ou violée, ou quoi que ce soit de ce genre, pas de Severus beau et séduisant, et pas de fin triste. (Je m'auto-spoile, mais j'insiste tout de même là-dessus : JK Rowling a fait suffisamment fort dans ce domaine)
Je suis très heureuse lorsque l'on me laisse quelques reviews et j'y réponds autant que possible, alors s'il vous plait, n'hésitez pas à me dire ce que vous pensez de ce premier chapitre.
Bien entendu, aucun des personnages ne m'appartient, cela va sans dire.
Bonne lecture à tous, et à bientôt !
L'atmosphère au Terrier était joyeuse. Les voix de Molly et Arthur Weasley résonnaient à intervalles régulières, comme pour les repas, ou pour quelques sorties dans la campagne, comme si elles marquaient le temps qui passait doucement. Le mois de juillet était étonnamment chaud, et les soirées, passées dehors à regarder le vol des oiseaux devant le soleil couchant étaient délicieusement longues.
Le soir, les étoiles brillaient dans le ciel, et les crapauds chantaient. Chacun se retirait dans sa chambre quand la nuit était tout à fait tombée, et rien ne perturbait plus le silence de la prairie.
L'atmosphère au Terrier était joyeuse. Peut-être trop joyeuse ? Peut-être trop familiale pour Hermione Granger, cet été 1998. Cette gaité cachait, elle le savait trop bien, l'immense tristesse provoquée par l'absence de Fred. George, en particulier, redoublait d'efforts pour faire des farces et des remarques amusantes. Comme des automates, des machines bien huilées, tous riaient quand il faisait ça. Hermione, elle, trouvait cette comédie dérangeante. Et comment s'intégrer chez les Weasley ? Certes, elle s'était toujours très bien entendue avec eux, mais elle n'était pas liée à eux par le sang, et si Harry, orphelin, parvenait sans difficulté à considérer cette tribu comme sa propre famille, Hermione ne pouvait pas ignorer que ses parents étaient quelque part en Australie, loin de se douter qu'ils avaient une fille qui s'inquiétait pour eux en Angleterre. Alors que les autres suivaient naturellement le rythme imposé par Molly, elle se sentait en dehors des heures, en dehors de cette routine qui, au bout d'un mois, semblait déjà fermement installée dans les habitudes de chacun.
Le soir, les étoiles brillaient dans le ciel et les crapauds chantaient. Chacun se retirait dans sa chambre, sauf Hermione, qui en profitait toujours pour se glisser hors de la maison. Elle savait que les champs de protection autour du Terrier étaient restreints, mais elle n'hésitait pas, dans la nuit, à s'aventurer seule dans la campagne. La guerre l'avait rendue plus hardie, et davantage sûre de ses compétences en combat magique. Quand elle se sentait enfin à l'aise, elle s'allongeait dans l'herbe jaunie par le soleil, et regardait le ciel et les astres. Elle aimait le contact du sol encore chaud au travers de ses légers vêtements de nuit : elle avait presque l'impression d'être nue, alors. Seule dans l'obscurité, elle aimait rêver comme elle rêvait avant la guerre, avant-même de découvrir le monde des sorciers et d'apprendre qui était Voldemort, avant qu'elle ne s'abandonne aux livres et à un apprentissage rationnel pour trouver sa place dans un univers nouveau. A cette époque, elle aimait s'échapper dans le jardin de ses parents, dans le noir, et se faire un peu peur à rester là, toute seule. Mais elle savait, alors, qu'elle était à l'abri. A bientôt dix-neuf ans, Hermine retrouvait cette sensation : seule, dans la nuit, à observer les étoiles en vêtements légers, elle se sentait vulnérable, mais également en sécurité. Allongée dans l'herbe, bercée par le chant des batraciens nocturnes, elle avait l'impression d'être tout à fait elle-même, d'être libre. Elle pensait que, si quelqu'un, n'importe qui, la voyait là, il saurait immédiatement tout d'elle. Elle rêvait, souvent, d'une figure, d'un cavalier sombre, sans visage, sans tête, qui la trouverait ici et qui la comprendrait parfaitement, rien qu'en la voyant ainsi observer le ciel.
Elle l'imaginait sans visage, parce qu'elle n'avait aucune idée de celui à qui le cavalier pourrait correspondre, à vrai dire. Depuis la fin de la bataille de Poudlard, Ron et elle avaient tenté, maladroitement, de se rapprocher, mais chaque rendez-vous romantique avait été un échec. Leurs caractères ne parvenaient pas à s'accorder, et c'était son ami qui avait décidé de sauver leur complicité en déclarant ne pas vouloir aller plus loin. Hermione en avait été soulagée, mais également très déçue. Quand elle était plus jeune, elle avait imaginé finir par bâtir une vie avec son jeune compagnon, et elle n'avait même jamais envisagé qu'un autre homme puisse la rendre heureuse.
Alors, allongée dans l'herbe, elle rêvait à son sombre cavalier sans tête.
Le réveil, ce premier matin d'août, fut difficile. Ginny, qui se réveillait toujours avant les garçons, lui avait rappelé son rendez-vous de 10h à Poudlard, et elle tenta de se remettre les idées en place avant de partir.
« Rappelle-moi ce que te veut McGonagall ? » demanda, la jeune femme à la chevelure rousse, la bouche pleine de céréales. Hermione ne put s'empêcher de sourire. Cela faisait presque huit ans qu'elle connaissait les Weasley, mais, aussi intelligents qu'il pouvaient être, ils ne semblaient toujours pas comprendre quel attrait elle pouvait trouver aux études.
« Elle veut que l'on discute de mon apprentissage. » Elle regarda à nouveau son amie qui la fixait d'un air inexpressif. « Des études supérieures, que je vais débuter sous la direction de professeurs de Poudlard, pendant que je préparerai mes examens de dernière année. »
« Combien de temps devrait prendre un apprentissage ? »
« Huit ans. Oh, ne fais pas cette tête ! », s'exclama Hermione en pouffant de rire. « Pour enseigner, il faut soi-même savoir plus de choses que ce que l'on apprend à l'école. »
« Je le sais bien », répliqua Ginny, un peu vexée, « mais huit ans, c'est long. Tu auras 27 ans quand ce sera fini ! »
« L'âge d'être mariée et d'avoir déjà cinq enfants ? », taquina Hermione. Elle reçut pour toute réponse un regard noir de la part de son interlocutrice. « Ce n'est pas si long que ça », assura-t-elle, « et je ferai quelque chose qui me plaît. »
Elle omit de signaler qu'elle espérait trouver au château des personnes qui pourraient l'aider à inverser le sort qu'elle avait jeté sur ses parents avant de partir à la chasse aux horcruxes l'année précédente. Elle n'avait prévenu que Harry et Ron de sa situation, car elle ne voulait pas que le reste de la famille ajoute ses soucis aux leurs. Mais ce qu'elle avait fait la hantait.
Et ce n'était que l'une des nombreuses choses qui la hantaient, à vrai dire...
Elle passa dans la chambre des garçons avant de partir pour le château de Poudlard, afin de les informer qu'elle s'en allait et qu'elle ne reviendrait que dans l'après-midi. Elle fut saluée par un concert de grognements plus ou moins mécontents, et elle quitta donc la chambre en riant doucement.
Lorsqu'elle transplana devant le village de Pré-au-lard, cependant, elle ressenti une peur panique et irrationnelle l'envahir. Elle se souvint de la dernière fois où elle était venue ici, avec Ron et Harry, la peur au ventre et traquée par les sorciers les plus maléfiques du royaume. Ici, pourtant, tout respirait la tranquillité. En période de vacances, le village semblait presque désert, mais il n'y avait plus cette ambiance morbide qu'elle avait connue quelques mois auparavant. Alors qu'elle se dirigeait vers l'école, elle vit au loin la cabane hurlante, et sentit un nœud se serrer au niveau de son estomac : si elle se sentait coupable pour ce qu'elle avait fait à ses parents, ce n'était pas grand-chose en comparaison de ce qu'elle ressentait au sujet de l'abandon de Rogue, laissé seul et misérable dans une mare de sang et de poussière.
Quand elle fut arrivée au niveau de l'ancienne cabane de Hagrid, refaite à neuf, elle put apprécier enfin l'avancée des travaux. Elle avait quitté un Poudlard méconnaissable, et elle retrouvait presque, aujourd'hui, le château de son enfance. Son cœur lui parut soudain moins lourd, et elle avança vers la forteresse d'un pas décidé, enfin véritablement heureuse d'y revenir.
Hermione aurait aimé, avant que de voir Minerva McGonagall, fraîchement promue directrice, errer un peu dans les couloirs revoir les classes, les dortoirs, ou encore la Grande Salle, mais elle n'en eut même pas le temps. Elle dut même se dépêcher pour arriver à l'heure dans le bureau de son ancien professeur, qui l'attendait déjà avec une tasse de thé.
« Ah ! Miss Granger ! », s'écria la vieille femme d'un air ravi, « Je suis si heureuse de vous revoir ! ».
« Je suis ravie de vous retrouver aussi », répondit Hermione, prise dans l'étreinte affectueuse de son mentor.
Elle regarda autour d'elle, et remarqua que le bureau de la directrice ressemblait de manière troublante à ce qu'il était du temps de Dumbledore. La dernière fois qu'elle était venue dans cet endroit, elle était avec Harry et Ron, et avait plongé avec eux pour voir les souvenirs de Rogue. La pièce, tout le comme le reste du château, et le cœur même de ce pauvre homme, était sombre, et en partie démolie. Les tableaux étaient vides, et plus aucun instrument étrange ne pendait au plafond, comme c'était le cas du temps de son enfance.
A présent, des bibelots en porcelaine et en argent avaient remplacé avantageusement les breloques voyantes mais néanmoins sympathiques du défunt plus grand sorcier de tous les temps. L'atmosphère, quant à elle, était calme, et chaleureuse, comme si Poudlard n'avait jamais connu de bataille, ni de guerre, ni de Rogue.
Hermione remarqua, au-dessus du bureau de la directrice, le portrait de Dumbledore, qui était encore endormi – à moins qu'il n'ait fait semblant – et ne put s'empêcher de chercher des yeux celui de son ancien maître des potions.
Elle ne le disait à personne, mais sa mort l'avait profondément marquée. La nuit, quand elle s'éclipsait du Terrier, elle pensait à lui, assise dans l'herbe, tandis qu'elle fixait sans les voir les étoiles dans le ciel. Qu'avait-il pu ressentir, toutes ces années ? Quelle vie affreuse, vécue sans jamais recevoir d'amour, mais perdue parce qu'il aimait malgré tout.
Elle avait toujours voulu défendre les plus faibles, comme Buck, les elfes de maison, ou encore ce dragon maltraité par les gobelins... Mais elle ne s'était jamais préoccupée de la personne qui souffrait le plus parmi ses connaissances. Lui, elle l'avait abandonné à son sort. Elle n'avait même pas tenté de l'aider, elle s'était contentée de le regarder mourir d'une mort abominable, pour le souvenir d'une née-moldue, comme elle.
C'était son fardeau, son échec.
C'était ce qui la faisait pleurer en silence, ce qu'elle cachait à ses amis, elle qui ne parvenait pas à regretter à ce point la mort de Fred, dont elle avait pourtant été proche.
Alors, quand elle vit que son portrait n'était nulle part, son cœur se serra. Et un sentiment d'indignation monta en elle.
« Où est le professeur Rogue ? », demanda-t-elle, en indiquant les autres portraits. Elle vit McGonagall prendre un air un peu gêné, avant de lui répondre, avec un fort accent écossais – ce qu'elle faisait lorsqu'elle était mal à l'aise :
« Nous n'avons pas trouvé son portrait. » Elle ajouta, après avoir remarqué le regard sévère de son élève : « Je fais tout pour le retrouver, et je vous assure qu'il sera accroché ici même dès qu'il sera en ma possession ».
Hermione hocha la tête, pensive. Le monde sorcier mettrait certainement des années avant de comprendre le rôle fondamental du double-agent durant la guerre. Peut-être même qu'il ne serait jamais tout à fait blanchi.
« Parlons de l'année prochaine, voulez-vous ? », engagea doucement McGonagall, pour la tirer de ses pensées. « L'idée que vous m'avez soumise me semble très possible, mais je dois vous prévenir que cela représentera tout de même beaucoup de travail, et beaucoup de sacrifices. »
« J'en suis consciente, mais je suis tout à fait disposée à travailler autant qu'il le faudra. », l'assura-t-elle calmement.
« Je ne parle pas seulement de travail, Miss Granger », répondit la directrice, d'un air peiné, « Vous n'aurez certainement pas le temps de voir vos amis aussi souvent que vous le voudrez... Et Monsieur Wealsey... »
« Il comprendra, comme tous les autres. », lâcha Hermione, d'un air neutre. Bien sûr, cela allait difficile, mais cela en valait la peine, n'est-ce pas ? Elle aurait été capable d'abandonner ses rêves de carrière pour Ron, mais maintenant qu'elle n'avait plus cet espoir, elle n'avait plus qu'à tenter de mener sa barque, tant bien que mal.
La vieille sorcière assise face à elle sembla comprendre qu'elle avait abordé quelque chose qu'il valait mieux taire, pour l'instant, et enchaîna sur les modalités de son apprentissage.
Au cours de l'heure suivante, il fut donc convenu qu'Hermione passerait ses Aspics à la fin du mois de novembre, ce qui lui laissait le reste de l'année pour consacrer son temps aux cours que lui dispenseraient en plus les professeurs McGonagall et Slughorn. La première lui permettrait de valider un apprentissage en métamorphose et en droit des créatures magiques, tandis que le savoir du second lui assurerait la validation de ses recherches personnelles : trop d'estropiés, d'amnésiques, d'aliénés et d'autres blessés ne disposaient pas de traitement pour les soulager. Elle espérait, en plus de son apprentissage, pouvoir faire suffisamment de recherche pour les aider... Et aider ses parents, peut-être.
Elle quitta son professeur après lui avoir assurer de revenir s'installer à Poudlard deux semaines plus tard. Bien que la directrice ne lui en ait pas parlé, elle avait deviné qu'elle espérait trouver une remplaçante en sa jeune apprentie, et peut-être comptait-elle la surprendre en lui faisant préparer quelques cours pour la rentrée ?
Alors qu'elle se baladait lentement dans le château, elle ne résista pas à l'envie de faire un petit pèlerinage sur les coins emblématiques de sa scolarité ici. Malgré tous les malheurs qui lui étaient arrivés depuis ses 12 ans, ses souvenirs étaient pour la plupart très heureux.
Elle commença par passer devant la salle sur demande, mais elle ne rentra pas dans la pièce, craignant de manière irrationnelle que le feu ne s'était toujours pas calmé depuis la bataille. Elle préféra poursuivre son chemin, jusqu'aux toilettes de Mimi Geignarde, où elle caressa, attendrie, le robinet où apparaissait le petit serpent qui indiquait l'entrée de la chambre des secrets. Ron l'avait tellement surprise, la dernière fois qu'elle était venue dans cet endroit... puis elle descendit les étages, jusqu'à se retrouver au rez-de-chaussée. Une part d'elle-même voulait partir, maintenant, avant qu'elle ne soit vraiment trop émue par les souvenirs qui commençaient à l'assaillir, mais d'un autre côté, elle était poussée par une curiosité qu'elle trouva un peu malsaine vers les cachots.
Avant même qu'elle ait fini de débattre sur le fait d'y aller ou pas, elle se trouvait devant la salle de classe de potions. Elle n'y trouva cependant pas grand-chose de familier, puisque Slughorn, qu'elle n'avait connu qu'un an, avait déplacé toutes les affaires relatives à son cours vers une salle au premier étage, non loin de la classe de défense contre les forces du mal.
Maintenant, tous les sous-sols semblaient vides. Il n'y avaient que quelques tables abîmées et quelques bancs qui étaient restés en place, tandis qu'aucun bocal de couleur étrange n'ornait les murs vides et humides.
La curiosité est un vilain défaut auquel Hermione était sujette depuis toujours, et lorsqu'elle vit, plus loin, dans le couloir, un peu de lumière, elle décida d'aller voir de quoi il s'agissait, espérant à moitié trouver un visage connu.
Quelle ne fut pas sa déception lorsqu'elle se rendit compte qu'il s'agissait, là aussi, d'une pièce abandonnée. La lumière qui filtrait sous la porte venait d'un fenêtre étroite, tout en haut du mur, qui donnait sur du gazon. Cependant, elle fut étonnée de voir que quelques petits morceaux de bois achevaient de brûler dans la cheminée, même si le feu était maintenant sur le point de mourir. Qui donc l'avait allumé, et pourquoi ?
Personne ne pouvait vivre ici : tout était sale et poussiéreux. Le tapis dans lequel ses pieds s'enfonçaient mollement paraissait moisi, et une odeur délétère flottait dans l'air. En poussant davantage ses explorations, elle pénétra dans une autre pièce, attenante à celle qu'elle venait de voir, dans laquelle elle trouva un vieux, mais grand et majestueux lit en bois sombre, agrémenté de draperies en velours vert sombre très sales, et surtout, une très grande bibliothèque qui couvrait un mur entier. Soudain très enthousiaste, elle s'empressa de parcourir les titres inscrits sur leur couvertures en marocain de bonne qualité. Beaucoup traitaient de magie noire, et de potions, et elle fut alors prise d'un doute.
Elle regarda autour d'elle, et se rendit compte que tout, dans cette chambre, rappelait Serpentard. Elle commença à s'éloigner des meubles, craignant même de les toucher, avant de repérer enfin un bureau et une chaise, sur laquelle des vêtements étaient déposés plus ou moins soigneusement.
Des vêtements noirs. Un long manteau à col haut.
Et derrière elle, elle vit une cape suspendue à la porte.
Elle porta ses mains à la bouche et laissa échapper un hoquet de surprise. Elle savait dans quels appartements elle se trouvait, et pourquoi tout semblait mort autour d'elle.
D'abord honteuse à l'idée d'avoir pénétré son intimité, elle fut ensuite intriguée par le feu qui avait été allumé dans le salon, et crut entendre un bruit.
Elle sentait maintenant mal à l'aise, et dans un accès de paranoïa, elle se sentit observée. Du vivant de Rogue, elle n'aurait jamais été la bienvenue ici, elle avait mauvaise conscience en sachant qu'elle avait violé sa volonté par sa présence.
Elle traversait rapidement la première pièce pour sortir lorsqu'elle entendit à nouveau un craquement. Et elle s'arrêta, inquiète, pour regarder autour d'elle. Il ne semblait rien avoir, mais tout était si sombre. Et elle se sentait observée. Observée...
Parce qu'elle avait laissé la lourde porte ouverte derrière elle, le vent s'engouffra soudainement dans les cachots, et souffla sur les braises qui achevaient de se consumer dans la cheminée...
Et à la lueur fugace de ces morceaux de charbon rougeoyant, elle les vit.
Ces yeux. Ses yeux, qui la fixaient froidement. Ses yeux plus noirs que la nuit, qui semblaient appartenir à un prédateur.
Et sa bouche, tordue en un rictus horrible qui découvrait des dents jaunes pareilles à celles d'un animal sauvage.
Hermione ne put retenir un cri aigu, et se jeta autant qu'elle put contre la porte. Ses jambes ne paraissaient plus lui répondre, et son être tout entier était tétanisé par la terreur.
Un autre souffle d'air vint attiser le feu mourant, et éclaira une fois de plus le visage de l'homme qui était dans l'ombre.
C'était bien lui. C'était bien ses longs cheveux noirs, son long nez crochu, et ses yeux qui continuaient de fixer la jeune femme. Mais elle eut le temps de voir qu'il avait terriblement changé : son visage était tellement amaigri qu'il en était squelettique, ses yeux étaient enfoncés dans des orbites noires et cadavériques, et sur son côté gauche, là où Nagini avait lacéré son cou... sa chair était devenue aussi noire que ses yeux, comme si elle avait pourri, rongée par la magie de Voldemort...
Hermione voulait s'enfuir. Elle ne savait pas s'il s'agissait là d'une apparition, où s'il s'agissait peut-être, d'un épouvantard. L'odeur de mort qu'elle avait senti en entrant dans la pièce, elle le savait maintenant, venait de lui. Quand elle vit qu'il faisait un mouvement pour se lever, elle réussit enfin à commander à son corps, et couru le plus vite qu'elle put hors de la salle, hors des cachots, à la surface.
Après un moment, quand elle fut sûre qu'elle n'avait pas été suivie, elle s'arrêta pour reprendre son souffle, et s'interrogea. Était-ce vraiment lui ? Qu'était-il ? Un fantôme ? Non, il paraissait trop consistant pour cela. Une hallucination ? Pourquoi l'aurait-elle imaginé ainsi, elle qui avait plutôt tendance à mettre ce héros sur un piédestal ? Un mort-vivant ? Elle n'en avait jamais entendu parler auparavant, mais c'était presque l'explication qui lui semblait la plus logique, après avoir vu cette peau noire, décomposée, luisante, qui avait envahi une partie de son visage.
Elle l'avait vu mourir. Cela la hantait. Elle voyait régulièrement dans ses cauchemars ces yeux fixes, cette poitrine immobile, le corps de son ancien professeur baignant dans une mare de sang, abandonné, misérable dans la non moins misérable cabane hurlante.
Etait-il possible que ce soit lui ? En dépit de sa faute, de son refus de l'aider au moment où il avait eu besoin d'elle ? Est-ce qu'il avait trouvé un moyen de revenir à lui, de se sauver ?
Hermione était une jeune femme parfois trop franche, entière au point d'être parfois un peu brutale, mais elle avait un cœur généreux, doublé d'un certain sens de l'honneur et du devoir. Et elle s'en voulu immédiatement en songeant à sa conduite.
Le pauvre homme... Et si c'était bien lui ?
Elle lui devait tout, et pourtant elle l'avait fui comme s'il avait s'agit d'un monstre, et pas d'un homme qu'elle avait connu.
A quoi pensait-il maintenant, seul, dans l'obscurité de ses appartements froids et humides, ignoré de tous, alors qu'elle venait de fuir à sa vue ?
Tremblante, rongée par le remord, mais à moitié paralysée par la peur, elle parvint, à force de petits pas lents, hésitants, à revenir aux cachots.
Pas un bruit ne trahissait la présence d'un être vivant dans la pièce qui était restée ouverte suite à son départ précipité. Arrivée sur le pas de la porte, la sorcière s'arrêta, et regarda en direction du coin sombre dans lequel elle parvenait désormais à discerner l'homme qui l'observait du fond de son fauteuil.
« Professeur Rogue ? », réussit-elle à couiner, sans oser faire un pas de plus.
Cette fois-ci, elle entendit un long râle, ainsi que les craquements du fauteuil. Avant-même qu'elle n'ait compris quelle était la cause de ces sons, Severus Rogue s'était mis debout, et s'avançait, en boitant fortement, vers Hermione.
Ses lèvres pâles et desséchées remuaient comme s'il parlait, mais aucun son ne sortait de sa bouche, si ce n'est ce râle affreux. Sa peau luisante et noire paraissait encore suinter du sang au travers du bandage qui recouvrait son cou blessé, et le cœur d'Hermione, en dépit de sa peur, se serra à la vue de cette marque laissée par le serpent de Voldemort.
Enfin, quand Rogue fut arrivé à seulement quelques dizaines de centimètres de son ancienne élève, en la toisant d'un air dangereux comme il le faisait autrefois, il effectua un mouvement de baguette qui eut d'abord pour effet de faire reculer brusquement la jeune femme, craintive, et des lettres de feu apparurent :
« Allez-vous en. »
Hermione trouva la force de secouer la tête avec autant de vigueur qu'il lui était possible d'avoir.
« Non, je veux vous aider... Je veux vous soigner... »
Cette fois-ci l'apparition de nouveaux mots écrits en lettres enflammées s'accompagna d'une violente bourrasque qui poussa Hermione dans le couloir et manqua de la brûler. Les cendres dans l'âtre commencèrent à former une silhouette qui rappelait affreusement celle de Voldemort et soudain, fut projetée sur la jeune femme qui cria de peur en reculant davantage. Le râle de Rogue se faisait de plus en plus audible, et rapide, et son visage était déformé par une haine et une colère féroce. Elle ne savait s'il cherchait à l'effrayer, ou s'il voulait réellement lui faire du mal, et elle recula, attaquée une fois de plus par des nuages de cendres encore chaudes auxquelles Rogue donnait l'apparence des mangemorts qui lui avaient fait le plus de mal. Finalement, elle ouvrit les yeux pour lire le message qui lui était destiné, avant de partir une fois de plus en courant, honteuse, par endroits brûlée, terrorisée, et extrêmement triste :
« Allez-vous en, et ne revenez plus : les sous-sols de Poudlard abritent de nouveau un monstre. »
