-Tra-o! Tra-o!
Sa voix résonnait comme une mélodie ; elle m'appelait, me réconfortait, m'apaisait. Pour mon plus grand plaisir, je pouvais l'écouter tous les jours, sans craindre une seule fois qu'il découvre mon secret. À chaque fois qu'il me voyait, il me serrait dans ses bras et affichait toujours ce même sourire. Un sourire tendre, enfantin, voire même mignon, exactement comme lui. Ses iris si pétillantes et pleines de vie me font rêver, et j'aimerais être le seul qu'il regarde avec des étoiles dans les yeux. Quant à ses lèvres, elles m'hypnotisaient ; à la simple vue de celles-ci, un désir charnel venait m'empoigner le cœur et je souhaitait à tout prix m'emparer d'elles. Je pourrais faire chaque jour des milliers de descriptions de lui tant il compte pour moi. En peu de temps, il avait remplacé toutes mes convictions, m'embrouillant l'esprit ; il était devenu mon seul rêve. Voilà les sentiments que je m'efforçais de cacher depuis quelques temps, sous peine qu'il découvre tout et qu'il me rejette. Bien sûr, je ne voulais rien de tout cela, alors je restais dans mon coin, à l'observer depuis le pont supérieur de son navire, le Sunny. Il parlait de ce dernier comme un compagnon, un ami. Une façon de voir les choses, certes, plutôt absurde, mais qui collait bien avec son caractère.
En ce moment même, il faisait l'imbécile en jouant à un jeu avec deux autres de ses amis, que je trouvais bien trop proches de lui à mon goût. Je n'avais jamais été spécialement jaloux, jusqu'à aujourd'hui. D'un air agacé, je regardais ces deux énergumènes taper amicalement le dos de celui que j'aimais. Le cœur gros, je fis mine de me désintéresser d'eux et alla dans la cuisine, où Sanji se trouvait sûrement. J'entretenais une assez bonne relation avec ce dernier, mais sans trop d'ambiguïté. Nous restions polis entre nous, mais nous n'étions pas ce que nous pourrions appeler des "amis", mais plutôt des bonnes connaissances. Je rentrai donc dans la cuisine, et le blond s'y trouvait effectivement. Il préparait à manger, tout en fredonnant un air qui m'était méconnu. Quand il entendit la porte qui vente de s'ouvrir, il tourna la tête vers ma direction, et d'un grand sourire, il m'interpella.
-Ah, salut! dit-il d'un air enjoué. Tu veux quelque chose à boire?
Je lui souris légèrement et fis oui de la tête. Il me proposa de nombreux cocktails d'alcool ; tous semblaient plus incroyables les uns que les autres, mais je lui demandai seulement un simple verre de rhum, histoire d'oublier un peu ma peine dû à cet amour qui me paraissait impossible. Je portai le verre à mes lèvres, et bus une légère gorgée. Je reposai rapidement le contenant sur la table, et tira une mine affreuse, tandis que le cuisinier m'observait avec étonnement.
-Hm? Ça ne va pas? Le rhum était sans doute trop fort pour toi, déclara le blond. Tu aurais dû prendre quelque chose comme un mojito, tu te serais senti mieux.
-Pas sûr, dis-je en hochant la tête.
Sanji me regarda, interloqué, comme si ce que je venais de dire le dérangeait. Il haussa un sourcil et vint s'installer juste en face de moi, prenant un air plutôt grave.
-Eh, y'a un truc qui va pas avec toi. Je le sais, déclara-t-il en me pointant du doigt. Est-ce que c'est à propos de Luffy?
Rouge de honte, je mis ma tête entre mes bras et ignorai sa question. Je ne souhaitais pas que le cuisinier et moi ayons ce genre de discussions, surtout dans une situation délicate comme la mienne. J'entendis soudain Sanji glousser, et dire quelque chose comme "J'en étais sûr!". Refusant toujours d'entamer une conversation cardiaque avec lui, je restais toujours dans ma position, replié sur moi-même.
-Tu sais, commença le blond, il faudrait que tu fasses abstraction sur tes préjugés en matière d'amour.
Je relevai la tête, tout de même intéressé par ses paroles. Je me noyai alors dans son regard ma foi, apaisant et même rassurant. Il marqua un temps de pose, puis continua de parler.
-Luffy ressent peut-être la même chose que toi, finit-il par dire. Il est peut-être juste un peu trop idiot pour s'en rendre compte.
J'acquiesçai ses paroles, mais possédais toujours ce doute en moi. Si jamais me sentiments envers Luffy sont réciproques, tout ira pour le mieux. Dans le cas contraire, je devrai me résigner à ne plus le revoir pour ne plus souffrir dès que je le verrai. Je ne savais pas, je ne savais plus. Mes pensées s'entremêlaient une à une pour finalement former des idées incompréhensibles et sans aboutissements. Quand un homme ne pouvait plus rien faire, il devait se résoudre à abandonner. Peut-être que Sanji avait raison, mais il y avait toujours ce "peut-être" qui restait. Luffy était un des piliers de mon cœur, et si mon bien-aimé venait à refuser mon amour, tout s'effondrera. Tout ce que j'avais essayé de reconstruire ces treize dernières années sera détruit à cause de mes stupides sentiments. Je n'aurais jamais pensé être capable d'aimer quelqu'un à ce point un jour. Aimer quelqu'un jusqu'à ce que cela en devienne maladif, était-ce que c'est inquiétant? À cause de lui, je ne dormais plus la nuit et refusais parfois de manger, parce que je pensais trop à lui.
Je me maudissais, de la tête jusqu'aux pieds. Toutes les secondes, mon opinion sur moi-même changeait ; je me trouvais trop lâche, puis inutile, et parfois même je me comparais à une sorte de fardeau, ce qui au fond, paraissait plutôt vrai. À vrai dire, prononcer les mots "Je t'aime" n'était pas un problème en soi, c'était plutôt la réponse de l'autre qui me bloquait et m'inquiètait.
-Tu devrais lui dire, fit la voix du cuisinier, je t'assure que tout va bien se passer.
Sanji me fit sortir de mes pensées, puis je tiquai à l'entente de cette phrase.
-Comment peux-tu être certain d'une chose que tu ignores? demandai-je alors.
Il esquissa un sourire, et d'un ton malicieux, il me répondit :
-C'est très simple, dit-il d'un ton solennel. Hier, l'abruti que tu aimes m'a confié qu'il se sentait "malade" lorsqu'il était à côté de toi. Dans son langage à lui, ça veut clairement dire qu'il est amoureux.
Presque sonné par les révélations de Sanji, je restai figé quelques instants, croyant vivre un rêve éveillé. La bouche entrouverte, je voulus dire quelque chose mais aucun son ne sortit. Je me répèta alors dans ma tête chaque mot que le compagnon de Luffy venait de prononcer, et réalisai entièrement ce qu'il venait de dire. Empli d'espoir et de pensées positives, je me levai de ma chaise, le sourire aux lèvres. Je remerciai rapidement le cuisinier avant de me diriger vers la porte qui menait au pont supérieur. Arrivé sur celui-ci, je me pencha sur la rambarde pour mieux voir celui que j'aimais s'amuser sur le pont principal. De là haut, je l'interpellai.
-Mugiwara-ya! Viens vite me rejoindre!
Il me sourit sincèrement avant de ramasser son chapeau, qui se trouvait par terre. Il monta les escaliers et arriva finalement à ma hauteur. Je remarquai que ses joues étaient légèrement teintées et qu'il semblait plus anxieux à l'idée de venir me parler ; les certitudes de Sanji étaient peut-être vraies, après tout. Il cachait ses mais derrière son dos, lui donnant un air plus timide que d'habitude. Il regardait sur le côté, fuyant mon regard.
-Je voulais te parler, dis-je.
Cette fois-ci, il observa les yeux avec attention, et je pus voir dans les siens des lueurs et des scintillements, un peu comme des étoiles. Intimidé par un tel spectacle, je faillis perdre mon assurance mais, redoublant d'efforts, je continuai ma déclaration.
-Voilà, je pense que je suis...comment dire...
J'eus du mal à finir mes mots, comme si quelque chose dans mes cordes vocales m'en empêchait. Luffy me regardait toujours, intrigué. Cherchant mes paroles, je fronçai les sourcils et l'espace d'un instant, fermai mes yeux, me répétant toujours la même chose pour me rassurer :"Tout va bien se passer...Tout va bien se passer". Je n'osais plus rouvrir mes paupières, le sentiment de mes yeux clos me donnant l'impression de fuir un monde rempli de dangers où je pourrais m'échapper. Je ne voulais plus affronter celui que j'aimais en face.
-Eh, Tra-o, ouvre tes yeux, j'aime voir tout ton visage, en entier.
Interloqué par ses paroles, je suivis ses odres. M'attendant à ce qu'il me sourit, comme à son habitude, je vis sa tête dangereusement se rapprocher de la mienne, puis voir nos lèvres presque de frôler. Je ne rispostai pas, mais restai paralysé, comme dans une incompréhension totale. Quand nos deux visages se touchèrent, tout comme nos lèvres, j'eus l'impression que mon cœur se remplisse de bonheur et de passion et qu'il en déborde. J'intensifiai le baiser et me rapprochant encore plus de lui. Je ne prêtais aucune attention à ce qu'il se passait autour de nous à ce moment-là, j'étais comme submergé dans un monde où il n'existerait que nous deux ; seulement moi et Luffy.
Nous finissâmes par nous séparer, chaque bonne chose a une fin. Il se colla contre mon torse et me serra dans ses bras, comme il le faisait si souvent. Je passai mes mains autour de sa taille, comme pour répondre à sa marque d'affection. Il se détacha finalement de moi, pour ma plus grande tristesse, mais resta tout de même près de moi en me tenant la main.
-Tra-o...j'ai mal au ventre quand je suis à côté de toi...mais ça fait du bien...
Amusé, je lui fis un énième sourire avant de lui répondre.
-Tu peux tout simplement me dire "Je t'aime", tu sais.
Il ria et posa ma tête sur une de mes épaules, avant de murmurer tendrement quelques mots dans une de mes oreilles.
-D'accord. Alors, je t'aime, Law.
Fin
Oh my god c'est la fin de ce one-shot que je trouve tout simplement épouvantable XD Je trouve que je fais mieux, d'habitude, mais c'est pas grave ;)
Bonne journée à tout le monde!
