Disclaimer : Les personnages appartiennent à la fabuleuse Joanne Rowling. Sinon, l'histoire est à moi.
Quelques infos : Winchelsea est bel et bien une ville d'Angleterre ; certains de ses habitants la revendiquent même comme LA plus petite ville d'Angleterre - quel titre honorifique ! L'université de Queendje, en revanche, n'existe pas. L'Univers Alternatif, c'est reconstruire les relations entre les personnages et les sortir de leur contexte. Là-bas, on peut y trouver une Ombrage adorable, un Rusard canon et toutes sortes de choses encore plus improbables.
Warning : L'amour, c'est pour tout le monde. Pas d'exceptions chez moi ; l'hétérosexualité, papa a dit que c'était has-been.
Cogito Ergo Sum ~ Plop. Ergo Sum pas. J'y vais à l'instinct, comme qui dirait. Quelques étapes cruciales sont dans ma tête mais sinon c'est un foutoir. Chapitres postés à intervalles irréguliers.
Ne pas pouvoir écrire un chapitre sans devenir sentimentale est une CALAMITÉ. Elise, si tu passes par là, je t'envoie plein de câlins et de bisous tout baveux et niais.
~ La liberté, sans les mœurs, n'est qu'une anarchie. ILS VIVENT DANS L'ANARCHIE ET ILS S'EN TAPENT.
« C'est ma racine de bambou. » P
I'm Blue Dabbe di dabba da dabb-e di ba
La route en asphalte brouillée par la pluie intarissable était jonchée de détritus, de mégots, de cannettes de bière vides, de posters de Lady Gaga déchirés en huit, de places de concert pour des groupes méconnus, d'excréments de chiens, de CD rayés.
Deux hommes se tenaient sur cette route déserte, l'air désemparé et écœuré. Ils portaient des gilets rayés blanc et jaune fluo et leur camion s'était arrêté quelques mètres plus loin, le temps qu'ils constatent la négligence que les habitants de Winchelsea apportaient à leurs rues. Ça puait et des tonnes de déchets en tout genre sillonnaient les ravins. C'était à cause de trous du cul pareils que la pollution était un problème majeur dans le monde.
- Regarde-moi ça. Je sais même pas ce que c'est, grogna Carl en désignant un pull-over blanc, sali, trempé, qui gisait à terre.
Son collègue observa le vêtement quelques secondes avant de hausser les épaules et de continuer à ramasser les poubelles. Il aurait tout fait pour ne pas finir éboueur et comptait changer de métier au plus vite. Passer sa vie à ramasser les saloperies des gens, c'était un véritable enfer.
Dix minutes plus tard, ils avaient fini leur travail infâme et ils jetèrent un regard circulaire à la rue qui ne perdrait pas beaucoup de temps pour dépérir à nouveau. Ils montèrent dans leur camion et s'y installèrent pour renouveler leur râtelage quelques mètres plus loin.
Pas loin de là, Harry Potter détacha enfin ses yeux verts de la vitre par laquelle il avait observé les éboueurs faire leur travail. Il tira sur sa cigarette et inspira toute la fumée avant de la laisser s'échapper par ses narines, en silence, les yeux dans le vague. Il tapota au-dessus du cendrier et ne sursauta même pas lorsqu'il entendit un bruit furtif à ses côtés.
- Ils faisaient encore la gueule. Faut croire que ça les emmerde vraiment, de passer dans notre rue, dit-il sans détourner ses prunelles vertes de l'appui de fenêtre où était posé le cendrier en métal.
Sa petite-amie ne dit rien, se contentant de l'observer d'un œil incertain.
- Tu m'étonnes, répondit-elle finalement en s'éloignant de Harry pour s'asseoir dans leur fauteuil violet rapiécé, qui grinçait parce que les ressors étaient usés de leurs longues années d'existence.
Son magazine, le People News, était un ramassis d'informations inutiles mais dont Cho Chang raffolait. C'était le genre de magazine dont les journalistes se procuraient les exclusivités en suivant à la trace toutes les célébrités. De vrais emmerdeurs, en somme. Aujourd'hui, les gros titres indiquaient que la célèbre mannequin Kim Kardashian avait enfin accouché et que ça avait été une étape très difficile. Cho eut une pensée compatissante pour elle. Elle feuilleta ensuite quelques pages en léchant son index et s'arrêta sur le témoignage bouleversant d'une pauvre dame que son mari avait escroquée.
- Quel temps de merde. Dire que c'est censé être l'été, murmura la voix de son compagnon, toujours accoudé sur le rebord en bois de la fenêtre.
- Tu vas me parler de la météo toute l'après-midi ?
Harry leva enfin les yeux vers Cho qui le toisait avec un air de reproche. Il ouvrit la fenêtre pour y jeter sa cigarette, la referma en forçant sur la poignée résistante puis se redressa.
- Tu me saoules. Je voulais juste faire la conversation.
Ce sur quoi il quitta le petit salon et grimpa les marches afin de se rendre dans leur chambre. Il alluma la télé qu'ils avaient pu s'offrir à un prix raisonnable avec leurs économies et enfourna un jeu vidéo dans sa console - la Xbox 360, que son cousin lui avait offert à l'occasion de ses dix-huit ans. Tout en faisant habilement coopérer sa manette et ses doigts afin d'échapper aux policiers qui le poursuivaient, Harry songea.
Si ses moyens financiers l'avaient permis, il aurait volontiers quitté Cho pour se trouver un appartement et construire sa vie d'étudiant seul, avec son indépendance et ses libertés. Sauf qu'ils avaient déjà du mal à boucler les fins de mois en mettant leur argent en commun, alors la rupture était inenvisageable. La routine et la morosité s'étaient tissé une place dans leur couple, les tuant d'ennui. Souvent, Harry se demandait si Cho l'aimait encore ; ses remarques éreintantes, ironiques et glaciales qu'il subissait à longueur de journée semblaient plutôt indiquer que non. Pourtant, elle faisait souvent des efforts pour qu'ils se réconcilient ou pour mettre un peu de nouveauté dans leur couple usé. Alors, il restait indécis. Il ne voulait pas faire souffrir Cho. C'était quelqu'un de bien. Simplement, il ne l'aimait plus. Elle n'était plus son amante, ne pouvait même pas en être réduite au stade d'amie, et c'était tout juste s'ils pouvaient se considérer comme colocataires.
Il mit son jeu en pause pour aller se ravitailler en bas. Il descendit les marches, jeta un œil torve à sa petite-amie toujours avachie sur leur canapé prêt à craquer et ouvrit le frigo. Il attrapa une cannette de bière et la lança en l'air pour la rattraper avec adresse.
- Harry, boire en pleine journée, c'est un comportement de porc.
- Merci, répondit-il en haussant un sourcil.
Il se dirigea ensuite vers l'armoire qui se tenait au-dessus de leur cuisinière et l'ouvrit pour en sortir un paquet de chips au sel. Cho se retourna pour voir ce qu'il trafiquait et poussa un soupir bruyant.
- Et te gaver de chips, c'est pas mieux. Tu vas finir comme ton oncle. C'est ce que tu veux ?
Le jeune homme aurait sûrement souri à l'allusion de Vernon Dursley s'il n'avait pas su que la coréenne {1} était diablement sérieuse. Il savait qu'elle essayait de toucher un point sensible pour le dissuader de s'alimenter comme bon lui plaisait. Alors, il riposta.
- Toujours en train de lire tes magazines abrutissants ?
- Je t'ai posé une question, fit-elle en posant ledit magazine abrutissant sur la table basse qui faisait face au canapé pour toiser Harry avec une moue réprobatrice.
Il ne répondit rien et retourna dans leur chambre à coucher en claquant la porte. Une conversation de quelques secondes avait suffi à le courroucer. Il ouvrit sa cannette, son paquet de chips puis se replongea dans son jeu et garda les yeux fixés sur l'écran, absorbé.
Cho soupira. Elle était lasse. Elle l'aimait autant qu'elle le détestait. Leur relation, qui avait pourtant débuté mieux qu'elle n'aurait jamais pu l'espérer, s'était tarie pour se pourrir et ne faire d'eux que des moutons de la société qui restaient ensemble parce qu'ils étaient fauchés. Être étudiant, ça rapportait peu. En tout cas, à eux, ça leur rapportait trop peu pour qu'ils puissent se séparer. Alors ils s'enterraient dans leur silence et leurs mensonges, faisaient semblant de s'aimer, pour se prouver que s'ils cohabitaient, c'était parce qu'ils formaient un couple et pas pour une question d'argent.
Elle savait que Harry cherchait une colocation. Elle s'en était aperçue après avoir fouillé dans l'historique de son ordinateur. Elle détestait faire ce genre de choses, ça faisait nana possessive et intrusive, mais la curiosité avait été trop tentante et voilà à quoi ça l'avait réduite ; comprendre que son petit-ami cherchait à se débarrasser d'elle, quitte à vivre dans un appartement avec un inconnu. Elle ne lui avait pourtant pas touché un mot. À quoi bon ? Il voulait se casser, elle serait dans la merde, il s'en foutait, elle la fermait.
En réalité, Cho avait beau essayer de se convaincre avec ses introspections idiotes, elle savait que tout son amour pour Harry ne s'était pas complètement envolé. C'était d'ailleurs pour ça qu'elle n'essayait pas de le retenir ; plus elle allait l'oppresser, plus il se dépêcherait de trouver une colocation. Elle avait été tellement heureuse avec Harry, autrefois...
C'était arrivé en cinquième année. Ça faisait des années qu'elle en bavait pour Harry, garçon discret mais inéluctablement apprécié par la gent féminine. Il n'avait jamais été très branché filles, avant qu'elle ne lui déclare sa flamme. Elle se souvenait encore de ses balbutiements et de ses joues rouges de honte lorsqu'elle lui avait demandé de sortir avec lui. Il avait paru désemparé puis s'était tourné vers ses deux meilleurs amis - qui lui collaient à la basque depuis la primaire - comme pour leur demander un conseil silencieux. Hermione Granger avait eu un sourire bienveillant et Ronald Weasley avait éclaté de rire. Puis, sûrement plus sous le coup de la confusion que pour autre chose, il avait répondu qu'il était d'accord.
À cet instant là, Cho aurait disparu de la surface planétaire si elle en avait eu la possibilité. Elle n'avait su comment réagir. Alors, comme une enfant docile, elle avait souri et s'était éloignée d'un pas qu'elle voulait calme avec sa bande d'amies. Le lendemain, elle s'était arrangée pour avoir une discussion privée avec Harry et leur couple s'était concrétisé au fil du temps. Ils s'entendaient étonnamment bien, avaient les mêmes gouts musicaux, cinématographiques et littéraires. On aurait dit des âme-sœurs, à cette époque.
C'était l'année dernière, en sixième, que tout s'était écroulé. Cho avait arrêté depuis bien longtemps de chercher à croire que ça n'était pas de sa faute ; c'était un fait qu'il était inutile de chercher à nier. Elle avait regretté la plus grosse erreur de sa vie le lendemain même de sa tromperie. Ça s'était passé un samedi soir. Harry avait préféré étudier les examens qui approchaient dans un endroit calme tandis que Cho s'était rendue à la fête titanesque qu'avait organisé Cédric Diggory. C'était un jeune homme mature, beau, bien foutu, désirable. La soirée avait été arrosée, géniale, tous les invités avaient fini éméchés, beaucoup avaient passé leur fin de soirée à vomir leurs tripes. Cho Chang, elle, s'était naïvement laissé entraîner par l'organisateur de la soirée et ils avaient couché ensemble, avant de s'endormir dans la chambre de Cédric, enlacés, empestant le sexe et l'alcool à cent mètres.
Cho s'était réveillée horrifiée. Sa nudité et celle de l'homme qui partageait son lit avaient suffi à lui faire remonter tous les souvenirs de la veille en tête. L'alcool, la drogue, les danses effrénées... son adultère. Elle avait trompé Harry Potter, celui qu'elle aimait depuis un an, qui s'était toujours montré tendre et prévenant. La coréenne avait enfilé sa culotte, un jean de Cédric - elle n'arrivait plus à trouver le sien - et sa chemise grise. Puis, sans un mot, elle avait descendu les escaliers, avait observé les cannettes, les gobelets en plastique, les paquets de chips, la drogue, les objets brisés qui s'étalaient à terre, dans chacune des pièces de la villa des parents de Cédric Diggory. Elle crut vomir lorsqu'elle vit l'état de la piscine. Quelques effluves de sang émergeaient, signe d'elle ne savait quelle folie. Sans penser une seule seconde à aider Cédric pour le rangement qui l'attendait à son réveil, Cho était partie.
Son petit-ami, par miracle, n'en avait jamais rien su. Mais depuis cette malheureuse fête, rien n'avait plus jamais été pareil entre eux. Cho s'était montrée plus froide, distante, moins entreprenante. Son comportement réservé avait déteint sur Harry, qui s'était montré de moins en moins aimant. Jusqu'à ce que tous deux prennent conscience que c'était fini mais qu'ils étaient pourtant coincés dans ce putain d'appartement qu'ils avaient voulu partager à la fin de leur sixième année.
Cette sixième année n'était pas juste constituée de mauvais souvenirs, cependant. Elle avait rencontré des personnes exceptionnelles. Ron et Hermione, le couple perpétuel, toujours aussi fidèles, qu'elle avait fini par apprécier malgré ses a prioris. Luna Lovegood, cinglée mais sacrément attachante. La petite-amie de Luna, Juliet Demson, qui se montrait parfois méchante mais qui ne l'était pas réellement. Pansy Parkinson, avait qui elle avait toujours accroché. Ses sentiments à l'égard de Ginny Weasley étaient toujours un peu flous, pas vraiment déterminés, mais elles se marraient bien quand elles étaient bourrées alors elle avait fini par la considérer comme une amie. Drago Malefoy, lui, restait un cas à part. Il était bizarre. Elle ne le sentait pas. Mais les autres l'appréciaient, alors elle supportait sa présence, ses fausses allures d'aristocrate indifférent et son homosexualité refoulée sans se plaindre.
Cho, se balançant doucement sur le canapé de son petit salon, ferma les yeux, en proie à tous les souvenirs qui l'assaillaient. Le jour où Luna et Juliet étaient arrivées en cours main dans la main, sidérant tout le monde. Tous, dans leur petit cercle d'amis refermé, détestaient Juliet. Une vraie pétasse. Pas du genre à mettre trois tonnes de maquillage, à parler avec des manières grandiloquentes, à draguer tous les mecs. Plutôt le style rock, gueularde, hipster, dont le plus grand rêve était de partir en caravane avec une bande d'amis sans se soucier d'où ils allaient. Des rêves plein la tête et une indifférence à propos de tout qui était exaspérante. Ils aimaient la critiquer, jusqu'à ce que Luna les foute sur le cul en leur annonçant qu'elles étaient ensemble.
Elle se souvenait aussi du jour où Ron avait fait une surprise à Hermione pour son anniversaire. Il lui avait annoncé qu'il avait réussi à se procurer deux places pour aller voir The Pretty Reckless en concert. Elle avait été folle de joie. Hystérique, même.
Le jour où elle avait volé une paire de chaussures qui coûtait la peau du cul, dans un magasin pompeux. Elle était en compagnie de Pansy, ce jour-là. Elle eut un rire discret en se souvenant du marathon qu'elles avaient couru pour échapper aux propriétaires du magasin, fous de rage. Le fait qu'elles n'aient pas fini au commissariat relevait du miracle.
Demain, ils se retrouveraient pour leur septième année à Queendje. L'école n'avait pas une réputation spectaculaire mais ils s'y étaient attachés. Winchelsea aussi, c'était une ville qui comptait beaucoup pour eux tous. L'année prochaine, cependant, leurs chemins allaient inévitablement se séparer. Hermione avait de grandes ambitions, elle visait Oxford. Juliet, elle, n'avait pas d'idée précise mais elle voulait absolument voyager dans des endroits canons - Londres, par exemple. Les autres ne savaient pas. Mais ils ne resteraient pas terrés à Winchelsea, pas alors qu'il n'y avait qu'une fac mal réputée.
Plongée dans ses pensées, Cho n'entendit pas le bruit que produisit son petit-ami en descendant les marches.
- Il est bientôt vingt-trois heures. Tu comptes dormir sur le canapé ou faire nuit blanche ?
Elle ouvrit les yeux et, lointaine, répondit.
- Je dors ici.
Harry ne s'en offensa même pas et retourna se coucher. Il avait d'autres choses en tête. Demain, sa dernière année scolaire à Queendje débutait. Il n'en savait rien, mais cette année-là, celle de ses dix-huit ans, serait la plus belle de sa vie.
{1} La nationalité de Cho n'est pas directement mentionnée dans les livres. Son prénom est soit chinois, japonais, coréen ou philippin. J'ai choisi au hasard.
