Bonjour :) Me voici de retour pour la préquelle de LoveGame. Il est tout à fait possible de commencer à lire Magnet avant LG, vu que les événements racontés ici sont antérieurs à ceux racontés dans LG !
Mon rythme de publication pour cette fiction sera d'un chapitre tous les deux week-end, je ferai la MAJ le samedi ou le dimanche, tout dépend de ma disponibilité.
Un grand merci à ma super bêta Lamichoukette, qui prend le temps de corriger toutes mes âneries, et à ma partenaire de crime et copine de Kurtbastian Higure Tsukiyo !
Sur ce, je vous souhaite une bonne lecture :)
Chanson du chapitre : Beautiful Stranger - Girls' Generation
Rating : M
Genre : Friendship, Romance, Drama, Angst, Hurt/Comfort, Fluff
Warning : Lemon, prise de substance illicite, personnages OOC et OC, langage vulgaire, tabagisme, alcool...
Résumé : "On dit que les contraires s'attirent, n'est-ce pas ? Qui aurait cru, qu'un jour, tu deviennes la personne la plus importante dans ma vie ?"
Disclaimer : Rien ne m'appartient, à part l'univers de LoveGame.
Chapitre 1
Beautiful Stranger
« I have this weird feeling I met you before
You have a mysterious charm that nobody else has »
– Si à la rentrée, je vous retrouve avec ne serait-ce qu'un gramme de trop, vous êtes virés de l'équipe ! Et ça compte pour toi aussi, la Vicomtesse ! Va pas me faire croire que tu as pris du muscle pendant l'été !
Kurt soupira en étirant une dernière fois sa jambe sous les hurlements amplifiés par le porte-voix de la coach Sylvester, avant de se relever et de rejoindre le vestiaire des garçons, adressant un signe de main à Santana et Brittany, les deux jeunes filles ayant leurs petits doigts liés.
En se glissant sous le jet d'eau chaude des douches, Kurt ne put s'empêcher de soupirer. Son année de seconde se terminait enfin. Il devait avouer qu'elle avait été meilleure que la précédente, les douches colorées des slushies s'étant relativement calmées depuis qu'il avait eu la brillante idée de revêtir l'uniforme de polyester rouge et blanc des Cheerios de McKinley, mais il était soulagé d'une certaine façon que l'été soit enfin là. Même si être cheerleader lui offrait une nette protection au niveau de l'intimidation, il restait toujours quelques élèves dans l'école qui aimaient prendre Kurt pour cible lorsqu'ils décidaient de jeter quelqu'un contre les casiers. Etre le seul étudiant ouvertement gay dans la petite ville de Lima avait son lot de désavantages.
Heureusement, Kurt avait la chance de ne pas être seul à affronter les brutes épaisses qui s'amusaient à lui rappeler douloureusement que, malgré son uniforme, il restait un paria dans ce lycée à l'esprit étroit. Et même si Will Schuester était sérieusement terrifiant à être si proche de ses élèves, qu'il avait une obsession à donner chaque solo à Rachel ou que sa relation avec Finn était plus que douteuse, il dirigeait assez bien le Glee club, le seul endroit où Kurt se sentait réellement accepté. Le Glee club. Voilà qui n'arrangeait pas la position de looser que conservait Kurt, malgré son statut de cheerleader. Et leur récente perte aux Régionales n'avait pas vraiment aidé à leur conférer un peu de popularité.
Kurt coupa l'eau et s'enroula dans sa serviette, jetant un rapide coup d'œil dans les vestiaires pour vérifier qu'il était seul, avant d'aller à son casier prendre ses vêtements de ville. Il n'était pas spécialement pudique, mais il n'aimait pas ce que lui faisaient ressentir les autres garçons dans le vestiaire. Comme s'ils avaient peur que Kurt allait leur sauter dessus pour les convertir et les agresser.
Ce n'était plus la peine d'y penser. Cet entraînement des Cheerios concluait l'année, et Kurt allait pouvoir consacrer son été à aider son père au garage et à dédier son temps libre à regarder en boucle les épisodes de Project Runway, à étudier minutieusement chaque édition du Vogue, et à faire des tas de pyjama-parties chez Santana ou chez Brittany.
Kurt revêtit sa salopette de travail, arrangeant ses cheveux à l'aide du miroir qu'il conservait toujours sur lui, avant de rejoindre son père dans le garage. Il lui avait promis de l'aider à s'occuper des clients toute la journée et, pour être honnête, Kurt aimait bien réparer les voitures qui atterrissaient au garage, même s'il finissait la plupart du temps avec de l'huile de moteur sur le corps.
Alors qu'il vérifiait l'état des pneus d'une voiture, il entendit la remorque de son père revenir, et il se tourna pour trouver une Volvo noire, impeccable de l'extérieur, trois personnes accompagnant son père. La petite famille – apparemment aisée vu le tailleur sans doute coupé sur mesure de la femme, et le costume de l'homme – s'entretint quelques instants avec le père de Kurt, sans doute pour voir le problème qu'avait leur voiture, et le regard du châtain se posa sur le jeune homme qui accompagnait ses parents et qui regardait autour de lui d'un air supérieur et désintéressé. Lorsqu'il vit le garçon l'observer, Kurt détourna les yeux et reporta son attention sur les pneus qu'il était censé vérifier.
Des bruits de pas s'approchèrent de lui, et Kurt se retourna à nouveau pour faire face au jeune homme qui l'observait d'un air douteux, comme s'il ne voulait faire qu'une bouchée de lui. Ses yeux perçaient dans le regard de Kurt, qui avait la désagréable impression d'être passé aux rayons X.
– Je peux t'aider ? demanda gentiment Kurt au garçon, qui ne devait pas avoir plus d'un an de plus que lui.
– Je crois que oui, dit-il d'une voix claire et assurée, légèrement traînante, hautaine et moqueuse. Tu peux m'indiquer où je peux trouver des toilettes ?
– Euh, oui, bien sûr. Elles sont là-bas, répondit Kurt en pointant du doigt le bureau du garage.
– Merci… Et tu crois que tu pourrais fausser compagnie à ton père quelques minutes, et m'y rejoindre ? demanda le garçon avec un sourire lubrique.
Les yeux de Kurt s'exorbitèrent. Ce type qu'il ne connaissait pas ne venait tout de même pas de lui proposer ce qu'il n'osait même pas imaginer ?
– Je te demande pardon ? dit Kurt, n'en croyant pas ses oreilles.
– Oh, allez, tu as compris bébé. Il ne s'en rendra même pas compte, j'en suis sûr. On baisera rapidement. Vite fait, bien fait.
Kurt fixa l'inconnu comme s'il avait deux têtes, les yeux écarquillés et les lèvres entrouvertes dans une expression de pur choc.
– Et qu'est-ce qui te fait croire que j'ai envie de faire… ç-ça avec toi ? demanda-t-il d'une voix peu assurée, outré.
– Je suis sexy, ton cul est superbe dans cette salopette. Tu résous l'équation, bébé ? répondit l'inconnu, arborant toujours fièrement son sourire lubrique, manifestement amusé de la réaction de Kurt.
– Ne m'appelle pas « bébé », répondit Kurt d'une voix dure, les sourcils froncés.
– Donne-moi ton nom, alors, joli cœur. Ça peut être pratique.
Kurt ne lâcha pas le garçon du regard, n'osant toujours pas croire ce qu'il entendait. Ce type était arrivé comme une fleur, lui proposant comme si c'était la chose la plus naturelle à faire d'aller s'envoyer en l'air dans des toilettes. Mais d'où est-ce qu'il sortait celui-là ?
– Kurt Hummel, dit-il finalement d'un ton méfiant.
– Sebastian Smythe, répondit l'autre en fourrant ses mains dans les poches de son jean. Alors, tu viens, Kurt ?
– Et puis quoi, encore ?
Kurt avait envie de lui donner un coup dans le visage pour enlever cette saleté de sourire lubrique sur ses lèvres, n'appréciant pas beaucoup la manière dont le garçon, Sebastian, le dévorait des yeux. Il avait l'impression qu'il allait être englouti tout cru par ce type.
– Oh, je comprends. Tu es encore vierge, c'est ça ? C'est vrai que baiser pour la première fois dans des toilettes, c'est pas très romantique, mais, crois-moi bébé, le sexe, ce n'est pas romantique.
– Mais pour qui tu te prends ? s'écria Kurt, rougissant furieusement. Laisse-moi tranquille.
Sans un regard, il tourna le dos à Sebastian, affreusement gêné devant ce type qui n'avait aucuns scrupules, et s'éloigna pour aller chercher le manomètre afin de mesurer la pression des pneus. Il entendit au loin la voix aiguë de la femme appeler Sebastian et, quand il se retourna pour revenir près de la voiture, le garçon n'avait pas bougé, attendant quelque chose.
– Je crois que ta mère vient de t'appeler, répliqua Kurt en s'agenouillant à côté de la voiture, dévissant la valve du pneu et branchant le manomètre.
– Je sais, répondit Sebastian. Appelle-moi, Kurt.
Il glissa un morceau de papier dans la poche arrière de la salopette de Kurt, le faisant bondir et s'écarter brusquement, lançant un regard noir à Sebastian.
– Ne me touche pas, siffla-t-il.
– Appelle-moi, répéta Sebastian en mimant un téléphone avec sa main, lui adressant un clin d'œil.
Kurt le regarda s'éloigner, avant de prendre le papier que le jeune homme avait glissé dans sa poche, le dépliant et regardant la série de dix chiffres griffonnés au crayon. Avec un soupir, il leva les yeux à nouveau vers Sebastian qui se faisait arranger la tenue par sa mère, et son regard un peu ennuyé mais amusé indiqua à Kurt qu'il était sûrement en train de se faire gentiment sermonner pour être légèrement débraillé. Il lança un dernier regard à Kurt, souriant en voyant le morceau de papier dans ses mains, et lui adressa un petit signe de main, avant de se tourner et de partir avec ses parents, traînant des pieds.
– Hey, gamin, ça va ? T'as l'air contrarié, dit son père en s'approchant de lui, le regardant d'un air inquisiteur.
– C'est rien, papa, répondit Kurt avec un sourire, rangeant discrètement le papier dans sa poche.
– Dis-moi quand tu auras fini avec ces pneus.
Il acquiesça, reportant son attention sur le manomètre et appuyant sur la pompe pour regonfler le pneu, tentant d'effacer de son esprit le visage goguenard de Sebastian et ses paroles déplacées.
– Kurt, passe-moi le liquide de refroidissement, s'il-te-plaît.
Le châtain passa la bouteille à son père, le regardant s'occuper du moteur de la Volvo des Smythe.
Il s'ennuyait. Appuyé contre la table où son père avait entassé divers outils et pièces d'automobile, il tentait de faire la conversation avec lui, sans grand succès. Rares étaient les sujets de discussion qu'ils avaient en commun, mais Kurt espérait toujours que son père lui dise soudainement qu'il irait voir une comédie musicale avec lui, voire même l'accompagner pour ses séances de shoppings quasi-hebdomadaire. Heureusement, Santana et Brittany étaient d'excellentes amies pour aller faire les magasins, même si Santana avait la fâcheuse habitude de critiquer tout ce qu'elle trouvait. Mais c'était soit les commentaires acides de Santana et l'innocence ridicule de Brittany, soit être confronté à la vue des horribles vêtements de Rachel Berry, et ça, ce n'était absolument pas possible.
Parmi le bruit ambiant du garage, Kurt distingua des bruits de pas qui s'approchaient vers eux, et en détournant les yeux du capot de la Volvo, il vit le garçon de la dernière fois – Sebastian, se rappela-t-il – se faufiler entre les voitures, regardant autour de lui comme s'il cherchait quelqu'un et détonnant par son aspect irréprochable dans cet endroit, et Kurt ne put s'empêcher de remarquer comment son polo à manches courtes de couleur beige sculptait son torse à la perfection, avant de chasser les pensées de son esprit, rougissant. Les yeux verts de Sebastian se posèrent sur lui et il sourit, et Kurt fut légèrement surpris lorsqu'il constata que ce n'était pas le même sourire lubrique qui s'étirait sur ses lèvres. Avec un soupir, il quitta son père et s'avança vers Sebastian, lissant sa veste sans manches.
– On n'a pas encore fini de réparer la voiture de tes parents, dit-il d'un ton ennuyé, pas plus que ravi de le voir là.
– Je m'en doute bien, dit Sebastian, les mains fourrées dans les poches de ce jean, l'air désinvolte. Je suis venu pour te voir, en fait.
– C'est toujours non, siffla Kurt, commençant à faire demi-tour, ne voulant pas perdre une seconde avec cet individu indécent.
Une main se resserrant sur son bras l'arrêta dans son geste, et il se retourna vivement, prêt à lui dire de le laisser tranquille, mais Sebastian ne lui laissa pas le temps d'ouvrir la bouche.
– Je suis venu pour m'excuser de ce que je t'ai dit, la dernière fois, l'interrompit-il. C'était déplacé, et j'en suis désolé. Je ne pensais pas que ça te dérangerait à ce point-là.
– Ça marche comme technique de drague, ce que tu m'as dit ? demanda Kurt d'un air sceptique, récupérant son bras, pas vraiment à l'aise avec la façon dont Sebastian rentrait si facilement dans son espace personnel.
– Dans les bars gays et quand le mec est excité, plutôt bien, oui.
Kurt se surprit à pouffer de rire, baissant les yeux et réprimant un petit sourire. Il serra son bras contre lui dans une attitude protectrice, se souvenant comment certains joueurs de football le jetaient contre les casiers dans les couloirs du lycée.
– Hé, ça va ? demanda Sebastian, ayant visiblement remarqué qu'il s'était légèrement refermé sur lui-même.
– Oui, assura Kurt, évitant son regard.
Il sentit le regard sceptique de Sebastian sur lui, et soupira un coup avant de détendre ses épaules, relevant les yeux pour rencontrer ceux du jeune homme, légèrement inquiet.
– C'est rien, vraiment.
– Bon, dans ce cas, reprit Sebastian d'une voix assurée après quelques instants, je te propose de repartir de zéro.
Il lui tendit la main, comme pour sceller leur « nouvelle » rencontre, et Kurt la regarda pendant quelques secondes avant de la serrer timidement.
– Qui me dit que tu as brusquement laissé tomber ton idée de me sauter dessus ? demanda-t-il, peu convaincu par le soudain changement d'attitude de Sebastian.
– Oh, ne te fais pas d'idée, bébé. Je veux toujours me taper ton joli petit cul. Je vais juste faire ça un peu mieux, rétorqua le jeune homme, et son sourire lubrique réapparut sur ses lèvres.
– Je t'ai déjà dit d'arrêter de m'appeler comme ça. Je m'appelle Kurt, pas bébé, siffla Kurt.
Sebastian acquiesça silencieusement, toujours souriant. Un long silence passa entre eux, et Kurt en profita pour détailler discrètement le physique de Sebastian, n'ayant pas vraiment fait attention la dernière fois qu'il l'avait vu. Il était évident que le jeune homme était conscient qu'il possédait un corps bien dessiné et qu'il savait comment le mettre à son avantage. Son polo s'étirait sur la largeur de son torse, sûrement bien musclé, et mettait en valeur sa taille légèrement dessinée, et son jean, même s'il restait plus large que celui de Kurt, était suffisamment serré pour mouler ses longues jambes élancées. Inconsciemment, Kurt se lécha les lèvres, regardant dans les yeux verts et perçants de Sebastian qui passa distraitement sa main dans ses cheveux châtains, les ébouriffant en créant des épis, et il ne put s'empêcher de trouver ça très sexy, la façon dont ses mèches partaient dans tous les sens.
– Serais-tu en train de me mater, Kurt ? demanda Sebastian, amusé, croisant les jambes.
Kurt rougit brusquement et détourna le regard, bafouillant vaguement quelque chose pour sa défense, ce qui fit rire Sebastian.
– Tu connaitrais pas un bon café dans le coin ? demanda-t-il. On est encore dans les cartons avec mes parents, et je n'ai pas encore eu le temps de découvrir cette ville… qui m'a l'air bien pourrie, comparée à Paris.
– Paris ? répéta Kurt, soudainement intéressé.
– Ouais, j'habitais là-bas avant, répondit Sebastian avec un haussement d'épaules. Alors, pour ce café ?
– Euh… Il y a le Lima Bean…, dit Kurt.
– Génial. Conduis-moi, et je t'invite.
Sans que Kurt ne puisse protester, Sebastian l'attrapa par le bras et l'entraîna sur le parking du garage. Et, sans vraiment comprendre pourquoi, Kurt emmena ce garçon qu'il n'arrivait pas à comprendre et à apprécier au Lima Bean. Il n'avait rien d'autre à faire après tout.
Le barista fit glisser leurs cafés fumants devant Kurt, qui rejoignit Sebastian à la table qu'il avait réservé et posa son capuccino devant lui, ses doigts se resserrant autour de son café mocha sans sucre tandis qu'il s'asseyait face à lui. Ils s'observèrent quelques instants sans rien dire, ni l'un ni l'autre n'osant commencer la discussion. Avec un élan de courage, et parce que ce garçon avait éveillé sa curiosité en évoquant Paris, Kurt se lança, faisant tourner sa tasse en papier entre ses doigts en attendant que le liquide refroidisse un peu.
– Alors… Comme ça, tu habitais à Paris avant ? demanda-t-il d'une voix hésitante.
Sebastian hocha la tête, prenant une gorgée de son capuccino.
Il était né dans le Vermont et, à cause du travail de son père, procureur d'Etat, sa famille avait souvent dû déménager d'état en état, avant que ses parents ne décident de s'installer pendant cinq ans en France, sa mère désirant retourner dans son pays natal. Kurt l'écouta raconter la vie parisienne qu'il rêvait d'expérimenter au moins une fois dans sa vie, des étoiles dans les yeux, buvant les paroles de Sebastian. Son sourire s'étendit jusqu'aux oreilles lorsque le jeune homme fit défiler sur son portable les photos du luxueux appartement qu'ils avaient habité, rue Emile Deschanel, avec vue sur la tour Eiffel, et il ne put s'empêcher de lui poser tout un tas de question sur la capitale française, faisant rire le jeune homme.
Il avait vécu dans plus d'états que Kurt n'avait jamais pu espérer visiter en ses seize ans d'existence : le Vermont, le Maine, New York, San Francisco, la Floride… Sebastian semblait avoir fait le tour des Etats-Unis du haut de ses dix-sept ans, passant entre deux mois et un an dans chaque état, si bien qu'il avait été scolarisé à domicile. Il avait intégré le collège Jules Romains à Paris, puis, à l'âge de quinze ans, il était rentré au très sélectif lycée Saint-Thomas d'Aquin. Et maintenant que ses parents avaient choisi Westerville comme ville d'attache, il était censé entrer en année de terminale à l'académie Dalton, même s'il n'était pas vraiment enthousiaste à cette idée, en ayant assez des écoles privées remplis de snobs.
Il avait découvert à treize ans qu'il ressentait pour les garçons ce qu'il était censé ressentir pour les filles, ne comprenant pas l'intérêt soudain de ses camarades de classe pour les décolletés que les jeunes filles commençaient à arborer beaucoup trop tôt. Il en avait parlé avec son père, un soir, et celui-ci lui avait assuré que ce n'était qu'une phase, qu'il finirait par trouver une jolie jeune fille dont il tomberait amoureux et finirait par épouser, comme il se le devait. Sebastian avait vite découvert que cette phase s'était transformée en quelque chose de définitif, et il avait eu sa première aventure avec un garçon à l'âge de quinze ans, au cours d'une soirée un peu trop alcoolisée. Il était sorti quelques semaines avec ce garçon, de deux ans son aîné, avant de décider qu'être en couple n'était vraiment pas fait pour lui, désirant n'être dépendant de personne.
Lorsqu'il avait annoncé solennellement à ses parents qu'il était gay, son père avait mal pris la nouvelle et avait refusé d'adresser la parole à son fils pendant près d'une semaine. Après avoir été convaincu par sa femme, William Smythe avait accepté de reparler à Sebastian, mais leurs rapports restaient extrêmement tendus, et l'homosexualité du jeune homme était toujours un sujet sensible dans la famille. Kurt se sentit désolé pour Sebastian, quand lui avait un père qui le soutenait et l'aimait encore de la même façon après son coming out. Lui pourrait parler de son petit-ami à son père, organiser des dîners en famille ou même faire dormir son petit-ami à la maison. Sebastian ne pouvait sans doute pas faire ça, et Kurt eut soudainement un élan d'animosité pour son père, cet homme qu'il avait entraperçu il y a quelques jours, ne le connaissant même pas.
– Je trouve que j'ai beaucoup parlé de moi, joli cœur, dit Sebastian, un léger sourire aux lèvres.
– Ne m'appelle comme ça, répliqua Kurt, et il semblait que c'était la centième fois dans la journée qu'il demandait à Sebastian d'arrêter d'employer ces surnoms ridicules.
– Comment veux-tu que je t'appelle, alors ? demanda Sebastian, haussant un sourcil.
– Par mon prénom. Kurt.
– Je préfère utiliser des surnoms. Que penses-tu…de Porcelaine ?
Kurt fronça les sourcils, à moitié surpris, et à moitié embêté. Qu'est-ce qu'il y avait de mal avec son prénom ? Et c'était quoi, ce surnom ridicule ? Mais il ne put s'empêcher de sourire car, au fond, il aimait beaucoup ce surnom, et il devait avouer qu'il était assez bien trouvé.
– Pourquoi Porcelaine ? demanda-t-il d'un air curieux, persuadé que Sebastian l'avait choisi uniquement pour sa peau aussi blanche que la matière noble.
– Parce que tu as l'air aussi fragile que de la porcelaine, dit le garçon comme si c'était évident, buvant une gorgée de son café.
Kurt le regarda avec des yeux médusés, se demandant comment Sebastian arrivait à voir en lui aussi profondément alors qu'ils se connaissaient à peine. Sebastian lui adressa un sourire suffisant, comme s'il savait qu'il avait touché juste. Kurt baissa les yeux, soudainement gêné, et fit tourner sa tasse entre ses doigts, une nouvelle fois.
– Parle-moi de toi, Kurt, demanda Sebastian d'une voix douce. J'ai l'impression que tu sais tout de moi, et moi je ne sais rien de toi.
Kurt leva des yeux surpris vers Sebastian, arrêtant de triturer sa tasse.
– Pourquoi ? Tu aimes connaître l'histoire des garçons que tu veux avoir dans ton lit ? railla-t-il en portant sa tasse à ses lèvres.
– D'habitude, non. Mais comme je constate que tu essaies de me cacher des choses, ça me donne encore plus envie de savoir. J'ai horreur qu'on me résiste, alors si tu veux transformer ça en jeu, on va bien s'amuser, bébé.
– Ne m'appelle pas…
– … comme ça, oui, je sais, termina pour lui Sebastian avec un sourire moqueur. Mais je déciderai moi-même de quand j'arrêterai de t'appeler ainsi.
Kurt lui lança un regard noir. Il avait horreur de ça. On aurait dit que Sebastian se fichait de ses sentiments, de ce qui lui plaisait ou ne lui plaisait pas, se souciant uniquement de lui et de son plaisir personnel.
– Ne me regarde pas comme ça, bébé. Tu t'y habitueras vite. Dis-moi juste des trucs insignifiants, Kurt, dit Sebastian en haussant les épaules.
– Comme quoi ? fit Kurt en haussant un sourcil, sans se défaire de son regard noir.
– Je ne sais pas. Quel âge tu as ? Tu vas dans quel lycée ? Qu'est-ce que tu aimes faire ?
– 16 ans. McKinley. Chanter.
Sebastian haussa les sourcils à son tour et se mit à pianoter de ses doigts sur la table, soupirant d'exaspération.
– Tu sais que t'es chiant comme mec, quand tu t'y mets ? répliqua-t-il d'une voix agacée.
– Je ne vois juste pas pourquoi tu tiens à savoir des choses sur moi. La seule chose qui t'intéresse chez moi, c'est mon… mon…
Mince. Voilà qu'il se mettait à rougir, incapable de prononcer le mot qu'il souhaitait dire tellement il sonnait vulgaire à ses oreilles. Un sourire suffisant s'étira sur les lèvres de Sebastian, manifestement ravi de la tournure que prenait les événements, et surtout de voir Kurt aussi gêné au simple fait de ne pas arriver à prononcer un mot en rapport avec le sexe.
– Non seulement tu es vierge, mais en plus tu es prude, bébé. C'est encore plus amusant, railla-t-il d'un air moqueur. Dis-le.
Kurt secoua la tête, n'arrivant pas à sortir le mot de sa bouche. Pas dans le Lima Bean bondé. Pas avec sa voix aiguë d'adolescente pré-pubère. Même dans ses pensées, le mot semblait moche, et horrible, et totalement déplacé, et Kurt ne pouvait tout simplement pas prononcer quelque chose d'aussi vulgaire.
– Dis-le, Kurt, répéta Sebastian d'un ton dur. Ce n'est qu'un mot, il ne va pas te manger.
– La seule chose qui t'intéresse chez moi, répéta Kurt d'une voix peu assurée, c'est mon… mon cul, dit-il finalement dans un murmure, et ça faisait tellement bizarre d'entendre ce mot sortir de sa bouche.
Sebastian arbora un sourire satisfait et frappa dans ses mains, clairement content d'avoir réussi à faire dire le mot à Kurt, tandis que celui-ci regardait furtivement autour de lui pour vérifier que personne ne l'avait entendu.
– Relax, bébé. Ce n'était pas si dur que ça, tu vois.
– Je n'ai pas l'habitude de dire ce genre de choses, siffla Kurt, rouge jusqu'aux oreilles.
– J'avais remarqué, railla Sebastian avec un clin d'œil.
Kurt lui adressa un nouveau regard noir. Dieu qu'il n'aimait pas ce type. Une brusque envie de frapper le garçon en face de lui le prit, dans le but d'effacer son stupide sourire goguenard, mais il ne fit que serrer son poing autour de sa tasse, se contentant de le réduire en cendre sous son regard. Sebastian semblait avoir tellement confiance en lui, semblait tellement sûr de lui et de ce qu'il représentait, que Kurt en avait envie de vomir. Ce n'était pas juste que quelqu'un puisse se montrer aussi sûr de soi. Ce n'était pas juste.
– Mais, reprit Sebastian, ce n'est pas la seule chose qui m'intéresse chez toi.
Surpris, Kurt haussa un sourcil et lui lança un regard interrogateur, se demandant bien ce que Sebastian pouvait trouver d'intéressant chez lui.
– Non, ta queue m'intéresse aussi, lâcha d'un air nonchalant le jeune homme, buvant une gorgée de son café comme si de rien n'était.
Kurt manqua de s'étouffer avec sa salive. Il était idiot, comment ce type pouvait penser qu'il valait plus que ça. Plus qu'une énième conquête à mettre dans son lit. Kurt se sentait idiot à avoir espéré un instant que Sebastian puisse lui dire qu'il s'intéressait à lui pour son caractère, ou simplement parce qu'il voulait apprendre à mieux le connaître en tant que potentiel ami. Il était d'une naïveté incroyable.
– Tu n'es qu'un connard, siffla-t-il, ne retenant même pas l'insulte tellement il était brusquement en colère contre Sebastian et contre lui-même.
– Je sais, on me le dit souvent, dit le garçon avec un sourire goguenard.
Kurt poussa un soupir de colère et se leva, attrapant sa tasse vide.
– Tu sais quoi ? Tu m'as assez énervé pour la journée. Laisse-moi tranquille, s'il-te-plaît.
Avec un dernier regard foudroyant vers Sebastian, il lui tourna le dos, jetant sa tasse dans la poubelle en sortant du café, le laissant seul.
Kurt sirotait son mocha en regardant son père réparer la Volvo des Smythe, lui passant de temps en temps une clé ou le chiffon, son pied battant l'air patiemment. Il n'avait rien à faire de la journée : Santana était partie en vacances au Mexique, Brittany avait mystérieusement disparu avec son chat, et Finn passait ses journées à faire des marathons de Call of Duty avec Puck et Artie. Seule Rachel était disponible, mais il était absolument hors de question pour Kurt de ne passer ne serait-ce que trente secondes avec ce monstre chantant et crime de la mode ambulant.
– Si tu t'ennuies, tu peux mettre ton bleu de travail et venir m'aider, Kurt, dit Burt en se tournant vers lui.
– Oh, je ne m'ennuie pas, papa.
Ce n'était pas que Kurt n'aimait pas travailler au garage : mettre ses mains dans le cambouis ne le dérangeait pas plus que cela et il aimait bien bidouiller les voitures. Ce devait être un truc de famille. Seulement, Kurt avait passé plusieurs dizaines de minutes à se préparer devant son miroir pour que sa coiffure soit parfaite, et il ne voulait pas la détruire en un rien de temps.
Son père haussa les épaules et se remit à travailler sur la voiture, laissant Kurt seul avec ses pensées. Au bout de quelques minutes, il se leva pour aller jeter sa tasse en papier et prendre le dernier numéro de Vogue qu'il avait laissé dans le bureau. En se retournant, il tomba nez à nez avec nul autre que Sebastian Smythe, l'air complètement perdu au milieu de toutes ces voitures. Kurt soupira en le voyant et se racla la gorge. Sebastian se tourna vers lui, l'air pris sur le fait, avant de sourire d'un air narquois en le voyant. Kurt fronça les sourcils en remarquant son regard, qui contemplait son corps.
– Tu comptes me stalker tout l'été ? dit-il d'un ton agacé. C'est la cinquième fois en dix jours que tu viens ici.
– Je suis venu hier et avant-hier et tu n'étais visiblement pas là, répondit Sebastian d'un air décontracté, les mains enfoncées dans les poches.
– Je ne passe pas ma vie ici, contrairement à toi. Tu n'as pas un déménagement à finir ? Tes parents ne te veulent pas à la maison pour aider à déballer les cartons ?
– Mon père se porte mieux quand il ne me voit pas, et ma mère me laisse faire pratiquement ce je veux.
Sebastian lui offrit un sourire goguenard et appuya la paume de ses mains sur la table qui les séparait, regardant Kurt d'un air insistant. Celui-ci fixa le jeune homme, le visage impassible, et tira une chaise pour s'asseoir dessus et commencer à lire Vogue. Il entendit vaguement le bruit des pas de Sebastian, supposant qu'il s'en allait car Kurt ne lui prêtait pas attention, avant de voir son magazine se faire arracher des mains. Kurt poussa un cri de protestation et tendit les mains pour le récupérer, échouant en beauté. Sebastian était beaucoup plus grand que lui et Kurt ne pouvait espérer récupérer son magazine qu'en sautillant, et il était hors de question qu'il se ridiculise ainsi devant le garçon.
– Qu'est-ce que tu veux, à la fin ? gronda-t-il, les sourcils froncés, agacé.
– Vu que tu n'as rien à faire, viens avec moi, dit Sebastian en claquant le livre sur la table, l'ouvrant et feuilletant les pages sans vraiment les lire.
– Qui te dit que je n'ai rien à faire ? Et où ça ? siffla Kurt, lui jetant un regard noir.
– Tu lis un magazine de mode au boulot de ton père. Ce n'est même pas comme si tu étais occupé à travailler. Et chez moi, bien sûr.
Kurt haussa les sourcils et ses yeux s'exorbitèrent, croyant qu'il avait mal entendu.
– Et tu crois vraiment que je vais te suivre chez toi, où nous serons potentiellement tous seuls, et où tu pourras me forcer à faire des choses et…, bafouilla Kurt une fois qu'il enregistra l'information.
– Je n'ai pas besoin de « forcer » les gens à faire des choses, bébé, répondit Sebastian avec un clin d'œil qui se voulait séducteur mais que Kurt trouva affreusement horripilant. C'est plutôt l'inverse, en fait. Les mecs me supplient de les laisser se mettre à genoux devant moi.
Kurt regarda un instant Sebastian sans comprendre, se demandant ce qu'il voulait dire par là, avant que le jeune homme ne lève les yeux au ciel d'un air exaspéré et qu'il baisse son visage pour feuilleter à nouveau Vogue, sa main droite faisant un mouvement de va-et-vient dans l'air devant sa bouche. Et c'est à ce moment-là que Kurt comprit ce que voulait dire Sebastian. Il rougit violemment et lui lança à la figure la première chose qui lui passa sous la main. Sebastian regarda d'un air amusé le mouchoir voler devant ses yeux, très peu impressionné par cette violente attaque.
– J'ai très peur, bébé, railla-t-il, se contenant visiblement d'éclater de rire.
– Tu n'es qu'un abominable… petit…, commença Kurt, cherchant une insulte.
– Oui… ? le taquina Sebastian, visiblement très amusé de le voir perdre ses moyens.
– Tu m'énerves ! vociféra Kurt, excédé par son visage amusé et son satané sourire narquois.
Sebastian referma le magazine et contourna la table qui les séparait, s'approchant de Kurt. Instinctivement, ce dernier fit quelques pas en arrière, essayant de conserver la distance entre eux, ce qui ne fit que faire glousser Sebastian.
– Oh, allez, je ne vais pas te manger, joli cœur. Je me suis dit que ça serait plus sympa pour moi si j'avais quelqu'un pour m'aider à ranger mes affaires.
Kurt haussa à nouveau les sourcils, dubitatif. Il arrêta de reculer lorsqu'il rencontra un obstacle dans son dos, et Sebastian en profita pour raccourcir les quelques mètres qui les séparaient, rentrant dans l'espace personnel de Kurt. Celui-ci soutint son regard, ne souhaitant pas se laisser intimider, et releva le visage fièrement pour fixer les yeux verts de Sebastian. Un mince sourire apparut sur le visage du jeune homme, pour une raison qui échappait à Kurt. Son regard dériva sur ses lèvres et Sebastian se les lécha distraitement, avant de reporter ses yeux sur ceux bleus de Kurt.
– Je suis sûr que tes lèvres seraient comme de la soie autour de ma queue, dit-il finalement, avec cet horrible sourire goguenard sur le visage.
Kurt vit rouge et tendit la main vers la première arme – cette fois-ci utile – qu'il vit. La clé en croix s'enfonça violement dans le ventre de Sebastian qui recula de quelques pas, poussant un cri de douleur.
– Tout va bien, Kurt ? cria la voix de son père au loin, inquiète.
– Oui, oui, impeccable, papa, répondit Kurt d'une voix forte, brandissant la clé en face de lui pour empêcher Sebastian de s'approcher à nouveau.
Sebastian se tenait le ventre, ses deux mains pressées contre son estomac à l'endroit où Kurt l'avait frappé, sifflant de douleur et essayant de reprendre sa respiration. Kurt lui adressa un regard noir et reposa la clé en croix, un sourire satisfait aux lèvres.
– Que ça te serve de leçon, espèce de pervers.
– Tu es violent, bébé, gémit Sebastian.
– Estime-toi heureux que je t'aie frappé dans le ventre et pas entre les jambes. Je ne suis pas sadique à ce point-là.
– Quelle chance, railla le jeune homme.
Kurt fit un geste pour l'écarter et passer devant lui, mais Sebastian attrapa son bras pour l'empêcher d'aller bien loin.
– Quoi, encore ? gronda Kurt.
– Allez, s'il-te-plait, viens chez moi. Je dois finir de déballer mes cartons et c'est vraiment trop ennuyant, tout seul. Et ne t'inquiètes pas, bébé, mes parents seront à la maison.
– Tu proposes à un étranger de venir t'aider à défaire tes cartons ? répéta Kurt, incrédule.
– Tu n'es pas un étranger, répondit Sebastian en fronçant les sourcils d'incompréhension. Et puis, je te parlerai de la France.
Tous les sens de Kurt se mirent en alerte quand il entendit le dernier argument de Sebastian, et il s'en voulut énormément d'être si facile à persuader. Le garçon avait trouvé son point faible, et Kurt était sûr qu'il allait s'en servir dans le futur. Sebastian sembla avoir remarqué qu'il avait touché juste, un sourire satisfait se dessinant sur ses lèvres.
– Allez, tu en as envie. Viens.
Il entraîna Kurt avec lui, le conduisant vers sa voiture. La mâchoire de Kurt se décrocha en voyant la magnifique Aston Martin – dans le même genre que celle de James Bond dans Casino Royale, s'il se souvenait bien –, et il ne put que regarder Sebastian avec de grands yeux exorbités et émerveillés devant la voiture de luxe.
– C'est la tienne ? demanda-t-il d'un ton à la fois choqué et admiratif.
– Non, c'est celle de mon père, répondit-il, mettant ses lunettes de soleil sur son nez. La Volvo est la mienne, et c'est celle qui nous sert pour transporter des trucs dans le coffre. Ma mère préfère les Bentley.
Kurt le regarda avec des yeux médusés déverrouiller le véhicule et ouvrir la portière pour se glisser à l'intérieur, mais il n'osa toucher la voiture de luxe, se contentant d'occuper ses mains en mettant à son tour ses lunettes de soleil. Etrangement, il commençait à se dire que c'était une bonne idée de suivre Sebastian, s'il avait le droit d'avoir un petit voyage à bord d'une Aston Martin. (Une Aston Martin, nom de Dieu !)
– Alors, tu viens ?
Kurt sortit de son état de transe et posa délicatement sa main sur la poignée pour ouvrir la portière, ayant trop peur d'abimer la carrosserie, et grimpa timidement dans l'habitacle. L'odeur du cuir d'excellente qualité chatouilla ses narines et Kurt ne put s'empêcher de caresser l'intérieur de la voiture, la boîte à gants devant lui, son accoudoir et son siège, semblant dans un état second. Sebastian gloussa devant ses manières, et alluma le contact, faisant ronronner le moteur. Kurt possédait lui-même une belle voiture – son Navigator n'était pas rien, merci bien –, mais il avait l'impression de se trouver soudainement au paradis.
Son regard se posa sur les mains de Sebastian, serrées autour du volant, et ses doigts le démangèrent. Si côtoyer Sebastian pouvait lui donner le droit de monter dans cette voiture – peut-être qu'il pourrait essayer de le soudoyer pour la conduire –, alors il était prêt à supporter le garçon jusqu'à la fin de ses jours.
– Ce n'est qu'une voiture, bébé, soupira Sebastian en mettant la première vitesse et en commençant à sortir du parking.
Kurt était persuadé qu'il avait mal entendu, parce qu'il était impossible qu'une personne sensée puisse dire de cette perfection automobile, qu'était une Aston Martin, que ce n'était « qu'une voiture » à la manière d'une vieille et vulgaire Volkswagen.
– Comment peux-tu dire une chose pareille ? s'écria-t-il, toujours émerveillé par le luxe qui s'étalait devant lui. Cette voiture est la huitième merveille du monde ! Est-ce que c'est être riche qui te fait perdre la valeur des belles choses ?
– Je crois que tu exagères un peu, bébé, gloussa Sebastian, s'engageant sur la route pour rejoindre la voie rapide qui reliait Lima à Westerville. Je sais apprécier les belles choses quand j'en vois.
Il lui lança un regard rempli de sous-entendus et Kurt rougit violemment, détournant les yeux d'un air gêné.
– Et puis, tu peux parler. Ta propre voiture n'est pas si mal que ça, non plus.
– C'était un cadeau pour mes seize ans, objecta Kurt. Mon père l'a confisqué quand il a découvert ma collection de tiares, mais il n'a pas pu la laisser loin de moi très longtemps.
– Et moi qui croyais que tu venais enfin de montrer que tu étais vraiment un garçon… Mais tu restes une princesse.
– Si tu trouves que je suis une fille, alors pourquoi t'acharnes-tu à vouloir coucher avec moi ? répliqua Kurt, vexé.
Sebastian ne répondit pas mais lui jeta un coup d'œil, remarquant qu'il avait été blessé par sa remarque.
– Oh, ne te vexe pas, Kurt. C'était une blague.
– Je ne trouve pas ça marrant.
Kurt se tourna vers la fenêtre, croisant les bras sur sa poitrine et boudant. Sebastian soupira et regarda la route, s'engageant sur l'autoroute. Kurt allait peut-être passer de longues minutes dans cette superbe voiture, mais il avait momentanément oublié que son compagnon de voyage était un véritable casse-pieds.
Ils restèrent silencieux pendant une bonne partie du trajet, Kurt s'occupant à regarder à travers la vitre le paysage défiler ou à tripoter la voiture, l'inspectant dans les moindres recoins. Finalement, après environ une demi-heure, Sebastian reprit la parole.
– Ma mère est un peu folle de moi. Alors ne sois pas surpris si tu la vois me prendre soudainement dans ses bras ou se plier en quatre pour des futilités.
Kurt se tourna vers lui, surpris de l'entendre parler de sa mère. Il était rare que les adolescents de leur âge parlent de leur relation avec leurs parents. N'importe qui aurait trouvé cela extrêmement gênant, en particulier si la relation était très forte. Sebastian avait toujours semblé un peu à part pour Kurt, et une fois de plus, il réussissait à le surprendre.
– Tu l'aimes beaucoup ? demanda-t-il, curieux.
Un sourire sincère se dessina sur les lèvres de Sebastian, et Kurt se jura de ne jamais oublier cette vision. C'était la première fois qu'il voyait autre chose qu'un de ces horribles sourires narquois sur son visage, et ses traits étaient tellement plus sereins ainsi, plus détendus. Kurt se surprit à l'observer attentivement, souriant d'un air attendri.
– Je ne sais pas ce que je ferais sans elle, dit-il au bout d'un moment, continuant à sourire de la même manière. C'est la meilleure.
Il sembla se perdre dans ses pensées, son sourire s'agrandissant un peu plus à quelques moments. Kurt continua de le regarder, à moitié attendri et à moitié surpris de voir un garçon comme Sebastian aimer à ce point sa mère. Ce dernier finit par se reconcentrer sur l'instant présent et se tourna un instant vers Kurt.
– Et la tienne, elle est comment ? demanda-t-il.
Le sourire de Kurt s'affaissa. Certes, sa mère était morte depuis maintenant neuf ans, mais le sujet restait source de souvenirs et de peine, même si Kurt avait depuis fait son deuil.
– Elle est morte, dit-il simplement en regardant droit devant lui.
Sebastian faillit faire une embardée, et ralentit brusquement. Il regarda Kurt avec des yeux peinés, toute trace de son précédent sourire disparue.
– Merde, je suis désolé…, souffla-t-il, se mordant la lèvre.
– Ça fait longtemps, maintenant. Tu ne pouvais pas savoir. Et je ne suis plus triste. Plus vraiment, dit Kurt en haussant les épaules.
Sebastian lui jeta un regard confus avant de reporter son attention sur la route, prenant la sortie en direction de Westerville. Il ne dit rien pendant un long moment, l'air profondément perturbé.
– Je ne sais pas ce que je ferais si ma mère venait à mourir, dit-il finalement. Je ne le supporterai pas, je pense.
Kurt ne répondit rien, se sentant plus mal qu'autre chose, brusquement. Il regarda le paysage autour de lui, observant la ville qu'était Westerville, se rendant rapidement compte que Sebastian l'emmenait dans le quartier riche de la ville au vu de la taille des maisons qui ne cessaient de croitre, bien protégées derrière de hauts portails et cachées derrière de la végétation dense. Enfin, Sebastian s'engouffra dans une allée et ouvrit un haut portail en fer forgé à l'aide d'une télécommande, donnant à Kurt une vue parfaite sur la maison lorsque la voiture serpenta le long du chemin pavé qui menait à l'entrée.
Ce n'est pas une maison, c'est un foutu domaine, fut la première chose qui traversa l'esprit de Kurt.
– Dis-moi que tu t'es trompé d'endroit ! s'écria-t-il en se penchant pour voir à travers le pare-brise, ayant une visibilité parfaite sur la propriété.
– Quoi, ça t'étonnes ? dit Sebastian d'un ton surpris et un tant soit peu moqueur. Les bagnoles ne t'ont pas légèrement fait comprendre qu'on n'était pas vraiment pauvre ?
Kurt fut incapable de formuler une réponse correcte, le fixant avec un regard incrédule.
La maison de Sebastian – domaine – était immense, en tout point, tel un véritable chef d'œuvre d'architecture moderne. Située en haut de la rue, elle surplombait le voisinage, donnant l'impression de voir sans être vue, du haut de ses deux étages. De grandes baies vitrées dans une des chambres et au rez-de-chaussée, faisant entrer la lumière à l'intérieur de la maison et lui donnait un aspect accueillant, comme si voir si aisément dans les pièces poussait les visiteurs à y entrer. Kurt ne voyait que la maison, mais il était absolument convaincu qu'un encore plus grand jardin s'étendait à l'arrière, sûrement avec une piscine et une terrasse et décoré de fleurs multicolores et d'arbres resplendissants.
Sebastian gara la voiture dans ce qui semblait être un garage, aux côtés d'une Mulsanne. Il coupa le contact et jeta un coup d'œil à Kurt, encore plus incrédule après avoir vu la Bentley.
– Non, tu ne rêves pas, dit-il d'un ton moqueur, son sourire suffisant de retour sur ses lèvres.
– Je n'arrive pas à croire que tu vis dans une maison pareille, souffla Kurt, n'y croyant toujours pas. Ta mère a une Bentley Mulsanne ! Vous êtes multimillionnaires ou quoi ?
Il n'avait jamais vu autant de richesse de toute sa vie. Finalement, Kurt ne regrettait absolument pas d'avoir été presque kidnappé par Sebastian. Après l'Aston Martin, il entrait dans une maison prestigieuse, et il se félicita d'avoir porté son ensemble Alexander McQueen ce matin-là. Les parents de Sebastian ne l'auraient sûrement pas laissé entrer s'il portait de vulgaires vêtements achetés au GAP du centre commercial.
– Allez, viens. Ils ont dû voir la voiture rentrer et doivent se demander où j'étais parti.
– Parce qu'ils ne savent pas où tu vas ? demanda Kurt, confus.
– Il y a beaucoup d'endroits où ils ne savent pas que je vais, bébé, fit Sebastian en lui faisant un clin d'œil.
Bien sûr. Il ne devait sûrement pas dire à ses parents qu'il allait dans des bars gays une fois la nuit tombée, c'était logique. S'il était aussi proche de sa mère qu'il semblait l'être, celle-ci ne le laisserait jamais traîner dans des boîtes de nuit si elle était au courant, d'autant plus que Sebastian n'était même pas majeur. Il avait eu ses dix-sept ans au moins de Juin.
Kurt défit sa ceinture et ouvrit la portière, sortant de la voiture en faisant bien attention à ne pas l'abîmer – quand même, il n'était pas le fils de Burt Hummel pour rien. Il jeta un coup d'œil à la Mulsanne, encore plus émerveillé que devant l'Aston Martin – et ça voulait dire quelque chose –, son corps tout entier le démangeant tellement il voulait ouvrir la portière de la Bentley et juste se glisser à l'intérieur et ne plus jamais en sortir.
– Je demanderai les clés à ma mère, si tu veux.
Kurt se tourna vers Sebastian, surpris. Il doutait fortement que Mrs Smythe donne comme ça les clés de sa voiture à son fils, juste pour la montrer à un garçon qu'elle ne connaissait même pas. Kurt ricana et secoua la tête.
– Ne sois pas stupide, pourquoi accepterait-elle ?
– Pourquoi refuserait-elle ? répliqua Sebastian, s'appuyant contre la voiture.
Kurt crut devenir fou en voyant le jeune homme s'affaler nonchalamment contre la carrosserie de la Mulsanne et se retint de se jeter sur lui et de l'écarter pour préserver la voiture des éventuels dégâts qu'il pourrait faire en la traitant comme un vulgaire objet.
– Ne t'appuie pas comme ça dessus ! siffla-t-il à la place, lui jetant un regard scandalisé.
– Oh, c'est bon, je ne vais pas la casser, rétorqua Sebastian d'un air agacé en roulant des yeux.
– Là n'est pas le problème, même si je suis sûr qu'avec ton égo surdimensionné tu serais bien capable de la faire crouler sous ton poids.
Sebastian se mit à rire, et s'écarta de la voiture, écartant les bras, une expression moqueuse sur le visage.
– Le bijou de ma mère est sain et sauf, tu es heureux ? dit-il d'un ton faussement joyeux.
Kurt leva les yeux au ciel et l'ignora, faisant le tour de la voiture et se penchant pour voir l'intérieur. Le luxe de la voiture, dans ses boiseries vernies et ses sièges de cuir beige, lui coupa le souffle. Peut-être qu'il devrait vraiment laisser Sebastian demander les clés à sa mère. Il était hors de question que Kurt ne s'assoit pas au moins une fois dans sa vie dans cette superbe voiture, maintenant qu'il en avait une sous les yeux. La fin justifiait les moyens, n'est-ce pas ?
Le bras de Sebastian l'entraînant hors du garage l'arracha à sa contemplation de la voiture sous ses cris de protestation, et ils sortirent dans le jardin à l'avant de la maison pour gagner la porte d'entrée. Sebastian le poussa devant lui pour le faire entrer dans la maison et referma la porte derrière eux, criant un « Je suis rentré ! » d'une voix forte. Kurt le suivit timidement dans l'entrée, regardant autour de lui et entendant le bruit d'objets qu'on range dans des placards depuis les pièces à vivre. La maison était vraisemblablement déjà redécorée aux goûts de la famille Smythe, la peinture neuve sur les murs et les portes et autres structures en bois vernies. Sur son chemin jusqu'au salon, Kurt vit des tableaux enveloppés soigneusement dans du papier bulle pour les protéger, posés contre les murs et prêts à être accrochés.
Lorsque Kurt entra dans le salon, il fut éblouie par la quantité de lumière qui rentrait par l'immense baie vitrée qui donnait sur le jardin, offrant une vue incroyable sur la terrasse et la piscine. La pièce était incroyablement accueillante, dans des tons de beige, en harmonie avec le canapé et la méridienne d'une belle couleur chocolat, disposée dans le coin de la pièce et suivant son angle, encadrant la télévision. Une cheminée aux décorations sophistiquées renforçait l'impression de chaleur de la pièce, juste à côté de l'écran plasma, et Kurt put immédiatement imaginer des scènes d'hiver, où toute la famille serait assise confortablement sur le canapé, se réchauffant agréablement grâce au feu de l'âtre. La pièce se prolongeait sur la salle à manger, qui communiquait elle-même avec la cuisine, l'îlot central faisait office de séparation entre les deux espaces.
Le regard de Kurt se posa sur une belle femme qui semblait avoir une quarantaine d'année et qui s'affairait à ranger un service d'argenterie dans le buffet trônant derrière la table de la salle à manger. En les entendant entrer, elle se tourna vers eux, et son visage s'illumina d'un sourire en voyant Sebastian, une petite lueur de curiosité brillant dans ses yeux lorsqu'elle remarqua Kurt.
– Oh, je pensais que tu monterais immédiatement dans ta chambre, mon chéri, dit-elle en s'avançant vers Sebastian, tout sourire. Tu t'es fait un ami ?
Kurt ouvrit la bouche pour préciser à Mrs Smythe que Sebastian et lui n'étaient pas du tout amis, mais Sebastian le devança.
– Kurt est le fils du garagiste chez qui on a laissé la voiture, expliqua-t-il. Il m'a gentiment proposé de venir m'aider à finir de défaire mes cartons.
Kurt se tourna vers lui, confus. Pourquoi Sebastian mentait-il à sa mère ? C'était lui qui l'avait sournoisement kidnappé en le soudoyant avec du français et des belles voitures ! Cependant, il mit le meilleur masque sur son visage, et fit semblant de ne pas être surpris, hochant la tête pour confirmer les propos de Sebastian.
– Je suis ravi faire votre connaissance, Madame, dit-il lui tendant la main.
Mrs Smythe ignora la main qu'il lui tendait et s'approcha de lui et l'embrassa deux fois, un baiser sur chaque joue, embrassant plus l'air que sa peau et posa une main sur son bras. Kurt se figea, surpris qu'une inconnue l'embrasse ainsi sans le prévenir, mais il essaya tant bien que mal de ne pas paraître irrespectueux et répondit timidement à l'embrassade, un peu gêné. Lorsque Mrs Smythe s'écarta, elle ne rata pas son regard dérouté, et se tourna vers Sebastian en riant.
– Tu ne lui as jamais parlé de la bise, Sebastian ? demanda-t-elle à Sebastian.
Kurt fronça les sourcils, avant de comprendre que Mrs Smythe venait de parler en français à son fils, et tous les morceaux se collèrent dans sa tête.
– Je n'ai pas vraiment eu l'occasion de lui faire la bise, maman, dit Sebastian en levant les yeux au ciel, comme exaspéré par sa mère. Les hommes ne se font pas la bise entre eux, même si c'est très en vogue ici, à Hollywood.
Kurt les regarda parler, impressionné et choqué d'entendre le français parfait de Sebastian. Il comprenait quelques mots çà et là, mais ils parlaient beaucoup trop vite pour qu'il puisse donner un sens à cette suite de mots. Il se sentit légèrement exclu de la conversation, à ne pas tout comprendre et à se demander de quoi ils pouvaient bien parler. Sebastian sembla s'en apercevoir et vint à son secours, essayant visiblement de se retenir de rire.
– Ça a dû te paraitre déroutant, Kurt, mais la bise est une forme de salutation propre à la France, dit-il en anglais. On se fait la bise entre femmes, ou entre un homme et une femme, expliqua-t-il.
Un léger « oh » sortit de la bouche de Kurt, qui se sentit soudainement très idiot à ne pas connaître cette coutume, lui qui était pourtant très passionné sur le pays.
– Je suis désolée, j'aurais dû te prévenir, Kurt, s'excusa Mrs Smythe. Parfois, j'oublie que ce n'est pas pratique courante, aux Etats Unis.
– Oh, ce n'est pas grave, Madame… C'est une coutume intéressante, dit-il, un peu intimidé.
Des bruits de pas se firent entendre sur le parquet, et Kurt vit le père de Sebastian entrer dans la pièce, portant un carton et le posant sur la table. Il vit Sebastian et Kurt et haussa un sourcil, avant de laisser le carton et de s'approcher d'eux, un faux sourire charmant aux lèvres.
– Sebastian a ramené un ami à la maison, n'est-ce pas génial, William ? dit Mrs Smythe à son mari, passant une main affectueuse dans les cheveux de son fils.
Mr Smythe eut un sourire forcé et tendit la main à Kurt, la serrant fermement pendant une fraction de seconde avant de la lâcher comme s'il avait été brûlé. Kurt se sentit étrangement mal à l'aise en sa présence, comme si les yeux perçants du père de Sebastian voyaient à travers lui comme des rayons X et cherchaient à lire en lui.
– Kurt Hummel, Monsieur, se présenta-t-il. Vous avez une très belle voiture, réussit-il à dire, cherchant la première chose aimable qui lui passerait par la tête.
– Merci, répondit Mr Smythe avec un sourire fin.
– Kurt était sur le point de voler ta voiture, maman, gloussa Sebastian. On aurait dit une mère protégeant son bébé, la façon dont il m'a crié dessus quand j'ai osé la toucher.
– Tu ne l'as pas seulement touché, tu t'es adossé contre ! Tu n'as aucun respect pour les merveilles dans ce monde, répliqua Kurt en fronçant les sourcils.
Sebastian rit à nouveau et croisa les bras sur sa poitrine d'un air décontracté. Kurt remarqua qu'il ne regardait presque jamais son père, se contentant de dévorer des yeux sa mère et de sourire d'un air goguenard chaque fois que son regard se posait sur lui.
– Tu aimes les voitures, Kurt ? demanda Mrs Smythe d'un air intéressé.
– Oui, répondit-t-il, se sentant bien plus à l'aise en parlant à la femme. Je dois sûrement tenir ça de mon père, et je baigne dedans depuis tout petit… J'aime les belles voitures.
– Je suis sûre que Sebastian meurt d'envie de t'emmener faire un tour à bord de ma voiture, maintenant qu'il sait que tu l'aimes beaucoup. Il ne pourra pas te refuser ça, n'est-ce pas, Sebastian ?
– Encore faut-il qu'il me supporte pendant le trajet, railla Sebastian, adressant un sourire suffisant à Kurt.
Mrs Smythe gloussa et passa sa main sur le t-shirt de Sebastian, défaisant les quelques plis qui s'étaient formés sur son torse, avant d'embrasser le haut de son crâne. A ce moment-là, Kurt comprit que Sebastian n'avait pas menti sur sa relation avec sa mère : elle était littéralement folle de lui, passant son temps à le toucher et à le couver avec des yeux tendres, et Sebastian le lui rendait bien. Contrairement à n'importe quel adolescent qui aurait repoussé une mère trop affectueuse, mort de honte devant un ami, Sebastian se laissait dorloter sans rien dire, se laissant aller dans ses gestes tendres.
– Tu peux le ramener avec la Mulsanne, Sebastian, dit-elle. Maintenant, pourquoi ne ferais-tu pas visiter la maison à Kurt ? Tout n'est pas encore rangé, j'espère que tu nous en excuseras, Kurt, ajouta-t-elle à l'intention du châtain.
Kurt s'empressa de la rassurer, légèrement déconcerté par son extrême gentillesse et politesse. Sebastian l'attrapa par le bras et l'entraîna gentiment à l'étage, grimpant l'escalier en bois qui craquait sous leurs pieds. Ses yeux essayant d'imprimer le plus d'éléments sur sa rétine, Kurt le suivit en regardant partout autour de lui. Ici aussi, des tableaux encore enveloppés dans du papier bulle reposaient contre les murs. Sebastian poussa une porte et entra dans la chambre. Kurt ne savait pas vraiment à quoi ils s'attendaient, mais il était absolument sûr que ce n'était pas à ça.
La chambre de Sebastian était une belle et grande pièce, ses murs peints d'une couleur beige virant sur des tons de violet prune et de gris, excepté celui qui faisait face à la grande baie vitrée, où une peinture imitation brique avait été appliquée. Une cloison de séparation isolait un grand lit à deux places du reste de la pièce, d'une manière qui aurait pu rendre quelqu'un claustrophobe mais qui semblait donner une incroyable sensation d'intimité et, en regardant plus attentivement, Kurt vit que la cloison était renfoncée et cachait une lampe de chevet et de la place pour poser des livres ou tout autre objet. Cette disposition originale donnait envie à Kurt de s'allonger sur le lit moelleux et de ne plus jamais le quitter, résumant sa vie à regarder par la fenêtre qui donnait sur le jardin et la piscine.
La pièce faisait encore vide, sans livres dans la bibliothèque, sans cours sur le bureau et la valisette de l'ordinateur portable posée contre, et sans photos sur les étagères et sur les murs, mais ne semblait étrangement pas froide et impersonnelle. Un canapé en méridienne faisait face directement à la fenêtre, de l'autre côté de la cloison qui délimitait le lit et, devant, une petite table basse où seraient prochainement oubliés les tasses de café et quelques livres. Un tapis d'une couleur sombre contrastait avec le parquet clair, cassant l'intense luminosité de la pièce. Les cartons encore fermés étaient repoussés contre le mur près du bureau, n'attendant qu'à être déballés pour donner de la vie à la chambre.
Néanmoins, la pièce était à l'image du reste de la maison, calme et accueillante, baignant dans une douce lumière. Kurt pouvait beaucoup trop bien s'imaginer passer de longs après-midi dans cette chambre, allongé sur le lit ou sur la méridienne, en train de lire un livre dans un silence confortable ou citant une phrase intéressante à voix haute à l'un ou à l'autre, ou de discuter de sujets futiles tout en observant le jardin coloré de beaux rosiers et de magnolias. Cette simple pensée l'inquiéta un peu. Kurt n'avait jamais cherché la compagnie de Sebastian, et c'était comme si un charme magique opérait sur lui à l'intérieur de cette maison et lui donnait envie d'apprendre à connaître un peu plus ce garçon. Sa chambre lui faisait découvrir un côté de Sebastian qu'il semblait vouloir cacher aux autres, ne présentant que le garçon insupportable et cru dont le passe-temps favori semblait être l'embêter.
Sebastian l'observait avec insistance, comme s'il attendait une sorte d'avis de la part de Kurt sur sa chambre. Kurt ne savait pas trop quoi dire. La pièce ressemblait sans vraiment ressembler à son propriétaire. C'était joli et cosy et pourtant, ce n'était pas ce genre de couleurs à la fois sombres et claires que Kurt imaginait dans une chambre. Dans une chambre dans laquelle il aimerait vivre.
– C'est joli, dit-il simplement.
Le plus petit des sourires satisfaits apparut sur le visage de Sebastian, tel un rictus, et Kurt vit sa posture se détendre légèrement, n'ayant même pas remarqué qu'il avait été tendu. Il ferma la porte derrière lui mais, remarquant le regard furtif de Kurt vers la porte comme s'il avait peur d'être enfermé dans une chambre avec Sebastian, il la laissa entrouverte de quelques centimètres. Il s'avança vers la pile de cartons et les poussa au centre de la pièce grâce à son pied, en soulevant un et le posant sur la table basse.
– Laisse-moi deviner, dit-il, la voix légèrement moqueuse. Tu ne t'attendais pas à ça ?
– Ça ne ressemble pas encore à une maison close, répliqua Kurt sur le même ton, un sourire narquois sur les lèvres.
– Oh, comme si je faisais la grossière erreur de ramener un inconnu chez moi, dans mon propre lit. Il y a des endroits extrêmement utiles et intéressants dans les bars qu'on appelle les toilettes ou la backroom, bébé, répondit Sebastian, lui adressant un clin d'œil. Tu trouves l'homme de ta vie sur la piste de danse, et vous allez avoir votre orgasme dans un endroit un peu plus intime.
Kurt fit une grimace de dégoût et détourna les yeux. Avec un sourire suffisant, Sebastian prit un cutter sur le bureau et ouvrit le carton qu'il avait déposé sur la table basse. Kurt l'observa sortir des piles de livres et, curieux, il se pencha pour saisir celui en haut d'une des piles, lisant son titre, et finissant par en regarder plusieurs, se demandant quel genre de livres Sebastian lisait.
Il y avait de la fantaisie, dont Le Seigneur des Anneaux en anglais et Harry Potter avec les deux derniers en français et le reste en anglais, de la science-fiction, de la poésie – Kurt haussa les sourcils en voyant que Sebastian possédait Les Fleurs du Mal –, mais aussi de grands romans et pièces de théâtre classiques français, tous dans leurs langues originales, et même la série Chair de Poule, ce qui le fit rire. Kurt se demanda si Sebastian avait vraiment lu tous ces livres, quand il voyait par exemple Les Misérables ou Roméo et Juliette. Il imaginait vraiment mal le jeune homme lire une histoire romantique aussi dramatique que le chef d'œuvre de Shakespeare. Il fut cependant impressionné de voir que bon nombre des livres de Sebastian étaient en français, sans aucun doute car il avait dû les acheter en France.
Kurt prit un autre livre dans sa main – Les Liaisons dangereuses – et haussa les sourcils en voyant sa couverture, où était représentée une femme dans des habits du dix-huitième siècle, son décolleté plongeant laissant apercevoir son sein. Kurt eut soudainement peur de tenir un livre pornographique dans les mains, et jeta un regard méfiant à Sebastian.
– Qu'est-ce que c'est ? demanda-t-il avec précaution, attirant l'attention du jeune homme qui classait ses livres à côté de lui.
– Les Liaisons dangereuses, répondit Sebastian en lui jetant un coup d'œil.
– Merci, je sais lire le français, répliqua Kurt d'un ton sec. C'est quoi comme genre de bouquin ?
Sebastian daigna enfin lever correctement les yeux de ce qu'il faisait et sourit d'un air qui ne plut pas vraiment à Kurt.
– C'est un roman libertin, dit-il. Tu devrais le lire. Mais n'essaie pas en français, tu ne comprendras rien.
– Je ne lis pas de la pornographie, moi ! s'écria Kurt, offensé.
A sa surprise, Sebastian se mit à éclater de rire et posa sur le haut d'une pile de livres Le Portrait de Dorian Gray.
– Ce n'est pas un roman pornographique, Kurt, dit-il en continuant de rire. Ça parle de deux aristocrates qui utilisent le sexe pour se moquer de la société dans laquelle ils vivent. Mais il n'y a pas de scènes de sexe. J'ai dû le lire pour le lycée, et il ne ferait jamais lire du porno à des élèves de première, ajouta-t-il, gloussant toujours. Estime-toi heureux que ce ne soit pas Fanny Hill ou Teleny.
Kurt lui lança un regard interrogateur, ne connaissant pas ces deux livres, mais il soupçonnait légèrement leur thème vu leur conversation, et ses joues s'empourprèrent, faisant glousser gentiment Sebastian. Il reposa le livre sur la table basse pour en prendre quelques-uns, que Sebastian avait classé, et les rangea dans l'étagère que lui indiqua le garçon. Au bout de quelques minutes, le carton était vide et les livres rangés soigneusement dans la bibliothèque. Sebastian prit un autre carton et en sortit des petits objets rectangulaires enveloppés dans du papier bulle, et ce n'est que lorsqu'il enleva la protection que Kurt réalisa qu'il tenait dans ses mains une photo.
Elle devait avoir été prise récemment, le visage de Sebastian étant identique à son double de papier. On le voyait en compagnie d'un groupe d'adolescents de son âge, dans ce qui semblait être une discothèque, au vu de leurs tenues de soirée et des boissons que certains tenaient à la main. Une jeune fille blonde, très mince et joliment maquillée, était serrée contre Sebastian, une main posée sur son torse et sa tête reposant contre son bras, tandis que lui la tenait par la taille. Ils avaient l'air très proche et, si Kurt ne connaissait pas mieux Sebastian, il aurait aisément pu les prendre pour un couple. Autour d'eux, d'autres garçons et filles se tenaient serrés l'un contre l'autre, riant. Sebastian avait l'air d'avoir beaucoup d'amis, dans son ancien lycée, et Kurt avait même l'impression qu'il faisait partie des élèves populaires.
– Ce sont tes amis ? demanda-t-il en montrant la photo à Sebastian.
Ce dernier leva les yeux vers lui et un sourire apparut sur ses lèvres en voyant l'image. Il la prit des mains de Kurt et la regarda longuement, se remémorant sûrement des souvenirs, avant de la retourner face à Kurt.
– Ouais. On avait fait une soirée à la fin de l'année, juste avant que je déménage. Elle, c'est Charlène, dit-il en montrant la fille blonde qui avait la main posée sur son torse. C'était ma meilleure amie. Enfin, je suppose qu'elle l'est toujours, se corrigea-t-il. On se connait depuis la cinquième, quand je suis arrivé en France, et on a toujours été ensemble. Même collège, même lycée, même quartier. Mon père espérait que je sorte avec elle. Dommage pour lui, elle n'a jamais été intéressée par moi, et moi non plus.
– De l'amitié purement platonique ? taquina Kurt, attendri par le sourire sincère qu'affichait Sebastian en parlant de la dénommée Charlène.
– On peut dire ça. Lui, c'est Mathieu, continua-t-il en montrant un beau garçon un peu plus grand que Sebastian, qui se tenait juste à côté de lui, son bras appuyé sur son épaule. Il a toujours clamé qu'il était hétéro, mais ça ne l'a pas empêché de coucher avec moi un jour où la vodka l'a trahi. Mais il a toujours pris cet… incident, si on peut dire ça, d'un bon côté. On va dire qu'il est hétéroflexible, ou peut-être gay pour moi, railla-t-il d'un air amusé. C'est un mec cool, puis il venait souvent avec moi en boîte pour m'aider à « pécho », comme il disait. Et je lui rendais bien.
– « Pécho » ? répéta Kurt, ne comprenant pas le mot en français.
– Ça veut dire choper, en verlan. Dans le sens, séduire.
Sebastian rit en voyant son expression incrédule, et lui expliqua rapidement ce qu'était le verlan. Kurt hocha la tête, trouvant cet argot un peu bizarre, mais ne dit rien, se contentant de sourire d'un air amusé. Sebastian reprit sa présentation, montrant le reste de ses amis à Kurt.
– Là, tu as Julien, Louis, Alex et sa copine Marion. C'est la petite. Celle d'à côté, c'est Chloé, la meilleure amie de Marion. Et là, c'est Bastien – oui, ça a créé des confusions, surtout quand Charlène m'appelait Bastian –, avec Raphaël et Sarah.
Kurt hocha la tête, regardant tout ce petit monde, avant de reporter son regard sur Sebastian qui continuait de fixer la photo d'un air mélancolique.
– Ils te manquent, hein ? demanda-t-il d'une voix douce.
– Ouais. Surtout Charlène et Mathieu, c'étaient mes meilleurs amis. On se parle des fois sur Skype, mais c'est pas évident à cause du décalage horaire. Et les SMS reviendraient beaucoup trop chers.
– Je croyais que tu étais riche, railla Kurt.
– On met l'argent dans des belles choses, pas dans des SMS, bébé, répliqua Sebastian d'un ton amusé.
Kurt sourit et continua de sortir les cadres photos du carton et de les déballer, observant les diverses photos. Sebastian n'apparaissait pas sur toutes. C'était parfois seulement Charlène ou Charlène et Mathieu, étroitement enlacés, menant Kurt à la conclusion que les deux adolescents avaient dû être en couple à un moment ou à un autre, mais il y avait aussi une photo de classe avec l'intitulé « Lycée Saint Thomas d'Aquin, classe de première S 2009-2010 », où Kurt retrouva bon nombre des têtes qu'il avait aperçu sur la première photo, une photo de Sebastian et Charlène devant la Tour Eiffel, en train de faire semblant de porter l'immense structure de fer, ainsi qu'une photo où l'on voyait Sebastian avec des lunettes de protection et des gants de vaisselle, une blouse blanche sur le dos, en train de faire l'idiot avec des fioles et des pipettes.
– Tu gardes une photo de toi en plein cours de chimie ? demanda-t-il en éclatant de rire devant son air ridicule.
– Quoi, elle est pas géniale, cette photo ? J'ai trop la classe, dessus, dit Sebastian en riant à son tour.
– Tu as surtout l'air idiot et ridicule.
Kurt lui donna le cadre et en prit un autre, tombant cette fois sur une photo de Sebastian et de sa mère, il y a quelques années de cela. Sebastian ne devait pas avoir plus de six ans sur la photo, et il s'accrochait aux jambes fines de sa mère, un sourire incroyablement heureux sur le visage, comme celui des bébés quand on les faisait rire. Mrs Smythe avait la main dans les cheveux de son fils, les caressant. Kurt se sentit fondre devant la vision qui s'offrait à lui et ne put empêcher le petit « ooh » qui lui échappa. Cette photo était trop mignonne. Sebastian se pencha pour voir la photo entre ses mains, et il sourit.
– J'étais mignon, hein ? dit-il d'un ton fier.
– C'est adorable, admit Kurt.
– Je suis beau à tomber, maintenant.
Kurt arqua un sourcil et le toisa du regard, avant de lui jeter le papier bulle à la tête avec un sourire amusé.
– Ça va les chevilles ? railla-t-il, un sourire en coin aux lèvres.
– Parfaitement bien, merci, répondit Sebastian en lui tirant la langue tel un enfant.
Il attrapa le papier bulle et commença à le percer. Kurt le regarda faire pendant quelques secondes, avant de jeter un œil dans le carton et de voir qu'ils avaient sorti toutes les photos. Il le plia et le posa à côté de lui, avant de sortir son portable et de regarder l'heure. Mince, il n'avait pas prévenu son père d'où il allait, et cela faisait déjà deux heures et demi que Kurt était parti avec Sebastian. Il tapa rapidement un sms et l'envoya, avant de le poser sur la table basse et de regarder Sebastian déambuler à travers la pièce en disposant les cadres sur son bureau, les étagères et le renfoncement dans le mur du côté de son lit.
– Que fait-on, maintenant ? demanda-t-il lorsqu'il revint vers lui.
– Il reste des cartons, bébé, mais si tu veux qu'on fasse autre chose, dis-le. Je suggère qu'on se mette à poil et qu'on quitte le canapé pour le lit, mais on peut très bien baiser ici, ça ne me gêne pas.
– Absolument pas, rétorqua Kurt d'une voix calme, ne prenant même pas la peine de se fâcher – Sebastian n'en valait vraiment pas la peine.
– Tant pis, j'aurais essayé.
Un sourire amusé et plus amical que moqueur apparut sur ses lèvres, et Kurt ne put s'empêcher de lui rendre. Le petit jeu de Sebastian commençait à plus le lasser qu'autre chose, et il était convaincu que le jeune homme prenait un énorme plaisir à le voir rougir d'embrassement et à être complètement gêné devant chacune de ses remarques lubriques. Si Kurt commençait à ne plus réagir, voire à rentrer dans son jeu, peut-être que Sebastian se lasserait lui-même au bout d'un moment.
Sebastian attrapa un autre carton et le traîna jusqu'à eux. Kurt le regarda en sortir des sacs plastiques contenant des pots à crayon et des stylos qu'il rangea à la va vite sur le bureau, avant de repousser le carton contre le mur et de venir s'asseoir à côté de Kurt sur le canapé.
– Le reste peut attendre, dit-il en époussetant ses vêtements. Tu veux faire quoi ? On peut aller dans la piscine, proposa-t-il.
Kurt secoua la tête. Il n'oserait jamais se mettre torse nu devant Sebastian, qui le reluquerait sûrement, et il n'avait de toute façon pas son maillot de bain. Même s'il était plutôt certain que Sebastian lui dirait de se baigner tout nu ou une idiotie de ce genre.
– Je peux te faire visiter la maison, sinon, même si je doute que la salle de bain ou les autres chambres soient très intéressantes, dit-il en levant les yeux au ciel, comme exaspéré par ses propres idées.
– Parle-moi de la France, dit Kurt d'une voix douce, ramenant ses genoux contre sa poitrine et serrant ses jambes contre lui.
Sebastian sourit d'un air goguenard et attrapa son bras en se levant, l'entraînant avec lui.
– Où est-ce que tu m'emmènes, encore ? demanda Kurt d'une voix méfiante.
– Dans le jardin. Pourquoi rester enfermé ?
Sans rien dire, Kurt laissa Sebastian refermer ses doigts sur son poignet et le suivit dans le jardin, mettant ses lunettes sur son nez quand le soleil l'éblouit. Sebastian le conduisit près de la piscine et, un instant, Kurt crut qu'il allait le jeter dedans, mais Sebastian ne fit que se baisser pour remonter le bas de son bermuda et enlever ses chaussures et il s'assit sur le rebord de la piscine, trempant ses mollets dans l'eau. Timidement, Kurt l'imita – dieu merci il n'avait pas mis de skinny jean aujourd'hui – et s'assit à côté de lui, poussant un petit soupir de bien-être lorsque l'eau entra en contact avec sa peau et rafraichit son corps.
Ils restèrent ainsi, sans rien dire, pendant quelques minutes, jusqu'à ce que Mrs Smythe ne les interpelle pour venir déposer deux verres et une carafe de limonade. Kurt la remercia chaleureusement, médusé devant tant de générosité. Lorsqu'elle s'éloigna, Sebastian se mit à battre des jambes dans l'eau, créant des remous et Kurt se retrouva légèrement éclaboussé. Il se mit à crier de protestation, s'écartant de Sebastian, menaçant de le jeter à l'eau, mais il savait que s'il prenait le risque de faire ça, c'était lui qui allait finir dans la piscine. Ses cris se transformèrent en éclats de rire lorsque Sebastian faillit réussir à le jeter, mais Kurt lui donna un coup de pied qui manqua de près sa cible mais qui suffit à calmer Sebastian.
– Alors, raconte-moi des choses, dit-il lorsqu'ils arrêtèrent leurs enfantillages et qu'il reprit son souffle, son ventre lui faisant mal à force d'avoir trop ri. Je veux tout savoir.
– Ah, il faut garder un peu de mystère, bébé, sinon ce n'est pas marrant, rétorqua Sebastian.
Kurt fit la moue mais ne dit rien, écoutant Sebastian lui raconter quelques anecdotes. Comment il était parti avec ses amis dans le sud de la France l'été dernier et comment ils avaient fini à l'hôpital parce que Mathieu avait été suffisamment idiot pour prendre une méduse dans sa main. Comment Charlène s'était fait passé le savon de sa vie lorsque le professeur de chimie l'avait surprise à pipeter directement dans la fiole. Comment elle l'avait sauvé un jour où il était bourré et qu'il s'était mis en tête d'emmener une fille avec lui. Kurt rit à chacune de ses anecdotes, commentant aux bons moments, et une vague d'envie le traversant. Sebastian semblait avoir eu ce que Kurt avait toujours voulu : des amis qui l'acceptaient pour qui il était sans le juger, des vacances au bord de la mer à faire les idiots, l'accès aux fêtes des gens populaires.
Kurt avait déjà été invité à ce genre de fête, il faisait toujours parti des cheerleaders, mais il n'y allait pas, par peur de se retrouver seul. Les filles étaient gentilles mais elles restaient souvent en bandes et avaient leurs petits secrets échangés dans les vestiaires et sous les douches et, parfois, Kurt se sentait exclu. Santana et Brittany n'aidaient pas vraiment, finissant toujours pas disparaitre ensemble au bout d'un moment. Sans compter que, parfois, ces fêtes incluaient les sportifs du lycée, et les joueurs de football et de hockey avaient toujours une dent contre lui. Et Kurt ne voulait pas absolument pas se retrouver face à Azimio et Karofsky à une fête.
Lorsque Sebastian commença à être à court d'anecdotes, il proposa à Kurt de le raccompagner chez lui. Kurt sauta sur ses pieds et le suivit, tout excité à l'idée de repartir dans la belle Mulsanne de Mrs Smythe. Le trajet se passa dans un silence confortable, seulement brisé par les quelques indications que donna Kurt pour guider Sebastian jusque chez lui. Il ne savait pas trop quoi penser de cette journée. Certaines manières de Sebastian l'énervaient toujours autant, mais Kurt devait admettre qu'il avait passé un bon moment avec le jeune homme, à découvrir un côté de lui qu'il semblait vouloir dissimuler sous ses piques et ses remarques lubriques. Mais le voir s'ouvrir un peu plus à lui, en lui permettant d'avoir une vision de qui pouvait-il être vraiment, avait attendri Kurt. Il aimait ce Sebastian-là et pouvait aisément s'imaginer passer du temps avec lui, à lire de la poésie ou à écouter de la musique.
Lorsque la voiture se gara devant la maison de Kurt, ce dernier se tordit les mains, ne sachant pas quoi faire ou quoi dire pour remercier Sebastian de l'avoir ramené et pour lui dire au revoir.
– Tu devrais venir avec moi à Columbus, un soir. Il y a des bars gay pas trop mal. Ça ne vaut pas ceux où j'allais à Paris, mais…, dit Sebastian en haussant les épaules.
– Non, merci. Ce n'est pas vraiment mon truc, refusa Kurt.
– Je réussirai à te convaincre, un jour, taquina Sebastian avec un sourire narquois.
– Si tu le dis.
Kurt sourit légèrement et, pendant quelques secondes, ils ne dirent rien tous les deux. Kurt finit par ouvrir la portière, prêt à sortir de la voiture.
– Au revoir, Sebastian, dit-il simplement.
Avec un certain regret, Kurt descendit de la voiture et claqua gentiment la portière derrière lui, se dirigeant vers le porche et sortant ses clés. Lorsqu'il se retourna avant d'ouvrir la portée d'entrée, Sebastian faisait marche arrière avec la voiture, et repartit dans l'autre sens. Kurt regarda la Muslanne s'éloigner et disparaitre au coin de la rue, avant de soupirer et de refermer la porte de sa maison derrière lui.
Kurt chercha dans toute sa chambre le papier sur lequel Sebastian avait inscrit son numéro de portable lorsqu'ils s'étaient rencontrés, et entra les dix chiffres dans son portable.
– Je ne sais pas c'est quoi le mieux, entre te voir avec tes jeans affreusement serrés ou avec ce bleu de travail pas si beau que ça mais qui moule parfaitement tes fesses.
Kurt leva les yeux au ciel et se tourna vers Sebastian, plus amusé qu'offensé. Après tout, il s'était habitué à la présence quasi-quotidienne du jeune homme, et ce n'était pas du tout la première fois qu'il lui faisait ce genre de commentaires. Au final, Kurt se sentait plus flatté qu'autre chose.
– Premièrement, tu adores mes jeans. Deuxièmement, ne parles pas trop ou tu pourras dire adieu au bleu de travail.
– Je ne fais juste que dire la vérité, Kurt, rétorqua Sebastian, tout sourire.
– Huhu. Rends-toi utile et passe-moi le carburateur.
– Le quoi ?
Kurt leva à nouveau les yeux au ciel et prit lui-même le carburateur, le montrant à Sebastian pour qu'il se souvienne de ce que c'était, avant de le remettre à sa place et de le brancher. Le geste lui fit repenser au jour où il avait fait l'erreur de demander à Sebastian de lui passer le lubrifiant. Le jeune homme lui avait fourré dans les mains une bouteille que Kurt lui avait jetée à la figure lorsqu'il avait remarqué que ce lubrifiant n'était visiblement pas fait pour les voitures. Kurt gloussa discrètement en repensant à la scène, avant de secouer la tête et de se reconcentrer sur ce qu'il faisait. Il se pencha sur la voiture, arrangeant quelques câbles, et vit dans le coin de l'œil Sebastian le fixer attentivement, et Kurt ne mit pas longtemps à comprendre ce qu'il fixait.
– La vision te plait ? dit-il d'un ton taquin, se prenant au jeu de Sebastian.
– Tu n'imagines même pas, répondit le jeune homme, du même ton.
Kurt surprit son sourire narquois du coin de l'œil et ne put s'empêcher de se sentir flatté. Cela faisait un mois et demi qu'il connaissait Sebastian, et il avait finalement appris à réagir correctement aux remarques du jeune homme. Certes, il continuait à rougir chaque fois que Sebastian faisait quelques sous-entendus, mais il s'autorisait à se sentir flatté lorsqu'il complimentait son apparence – ses fesses, uniquement ses fesses, se corrigea Kurt. Il ne jetait plus d'objets plus ou moins dangereux à son visage quand Sebastian lui disait quelque chose de particulièrement lubrique, mais se contentait de répondre une remarque pleine d'esprit avec subtilité.
Il restait un peu intimidé et embarrassé à l'idée que Sebastian le matait, mais ses coups d'œil pas si subtil le flattaient. Tout le monde aimait savoir que son physique plaisait à quelqu'un, n'est-ce pas ?
Kurt s'était habitué à ses manières et à ses commentaires déplacés. Il s'était habitué à voir Sebastian assis sur un tabouret à côté de lui, le regardant travailler avec attention, comme presque fasciné par ce qu'il faisait. Kurt n'avait pas pu s'empêcher de rire lorsque Sebastian lui avait avoué qu'il n'aurait jamais cru qu'il y connaissait quoi que ce soit aux voitures, extrêmement fier d'avoir pu rabattre le caquet du jeune homme. Depuis, Kurt s'amusait à étaler ses connaissances, s'amusant à accuser Sebastian d'avoir son permis sans même savoir ce qu'il y avait dans le ventre d'une voiture. Voir le visage légèrement embarrassé, vexé et énervé du garçon était une récompense exquise. Après tout, la vengeance est un plat qui se mange froid.
– J'ai découvert un bar gay à Lima. Ça s'appelle le Scandals. Mais je m'ennuie terriblement à sortir tout seul, Kurt, gémit Sebastian en faisant la moue.
Kurt eut un sourire narquois en comprenant ce que sous-entendait Sebastian et se tourna vers lui, pointant sa clé à molette dans sa direction.
– Je serai plus un boulet qui t'empêcherait de « pécho », répondit-il, amusé.
– Oh non, ça ne risque pas. Parce que le seul mec qui aurait eu l'honneur de baiser avec moi, c'est toi.
– Oh, dans ce cas, c'est encore moins oui, rétorqua Kurt, retournant s'occuper de la voiture. Je ne veux pas risquer d'attraper une MST ou le VIH, ça doit grouiller de ça là-dedans, non ?
– Et c'est là qu'existe un objet magique : la capote.
Kurt éclata de rire devant son visage très sérieux, en totale contradiction avec ce qu'il venait de dire.
– Tu es quelque chose, Sebastian Smythe. Je me demande parfois si tu es réel.
Sebastian sourit d'un air narquois et lui tendit un chiffon pour qu'il puisse s'essuyer les mains et boire quelques gorgées d'eau. Kurt le fixa longuement, avant de retourner s'occuper de la voiture. Sebastian se leva du tabouret et s'approcha de lui, regardant ce qu'il faisait. Kurt s'amusa à lui montrer les diverses composantes cachées sous le capot de la voiture, entre deux manipulations sur le moteur.
Il avait récemment remarqué que Sebastian avait cessé de l'appeler « bébé », « joli cœur » ou encore « princesse » depuis quelques temps. Ce n'était pas plus mal, Kurt n'aimait pas vraiment que Sebastian l'appelle ainsi, mais il se demandait ce que signifiait ce changement. Avait-il enfin réalisé que tous ses efforts étaient inutiles et que Kurt ne tomberait jamais dans ses bras ? Sebastian restait une énigme, pour lui.
Au final, l'arrivée de cet étranger à Lima avait égayé l'été de Kurt. Il s'était habitué à subir la compagnie de Sebastian, jusqu'à l'apprécier parfois. Certes, il ne considérait pas le jeune homme comme son ami – un ami n'essayait pas de vous mettre dans son lit, n'est-ce pas ? –, mais il devait avouer qu'il aimait les petits moments simples qu'ils passaient au garage ou chez lui, de temps en temps. Il aimait entendre Sebastian lui raconter des anecdotes sur sa vie parisienne. Il aimait s'asseoir au Lima Bean avec lui et lui demander comment se passait la situation avec son père, parce qu'il avait fini par se soucier de ce garçon qui l'avait tant énervé, au tout début. Il sentait même une pointe de déception emplir son cœur quand il se rappelait que Sebastian intègrerait Dalton, à la rentrée, et que la fin de l'été signerait la fin de ses visites quasi-quotidiennes.
Peut-être que si, finalement. Peut-être que Sebastian était devenu un ami, sans le vouloir.
Note personnelle : J'espère que ce premier chapitre vous a plu, un peu long mais ils ne le seront pas tous. Je voulais le séparer en deux, mais je n'ai pas trouvé de bon endroit où couper. Je vous retrouve donc dans deux semaines, probablement le dimanche.
Pour les reviews (si vous m'en laissez *regard suppliant*, la review est la nourriture préférée de l'auteur !), je n'aurai malheureusement pas le temps de vous répondre mais sachez que je les lis toutes et qu'elles me motivent énormément, non seulement pour cette fic mais aussi pour ce que je fais en parallèle. Vous pouvez toujours me retrouver sur Twitter.
Mizu.
