Titre : Ennemi intime

Auteur : Liam63

E-mail : liam63

Base : Gundam Wing

Disclaimer : L'univers de Gundam Wing n'est malheureusement pas à moi.

Genre : Yaoi, Romance, Fantastique... OOC ? Tout dépend de ce que l'on considère comme OOC.

Chapitre I

La paix, je me suis battu pour elle, et maintenant... J'ai honte de penser cela, mais par moment j'aimerais que nous soyons encore en guerre. Juste pour être près d'eux. Ils me manquent tant ! Un adieu, une promesse non tenue de garder le contact, et chacun est reparti poursuivre sa route. Au début, il y a eu de nombreuses lettres, des e-mails, une multitude de coups de téléphone, quelques rendez-vous, et puis petit à petit, plus rien. Je devrais être plus philosophe, c'est vrai, c'est la vie. Mais quelque part, je ne peux m'empêcher de leur en vouloir, de me sentir trahi. Je pensais que rien jamais ne pourrait entacher notre amitié, qu'elle était éternelle après tout ce que nous avions vécu, mais j'avais tort. C'était sans compter avec le temps. J'aurais pourtant dû savoir qu'il finit toujours par tout vous prendre. Je me sens tellement nul, je devrais être content pour eux, ils refont leur vie avec courage et détermination. Cela n'a pas été facile... Pour aucun de nous. Quatre a fini par reprendre les affaires familiales. Il a dû faire ses preuves, personne ne lui a fait de cadeau, ils ont pensé, les imbéciles, qu'il serait facile de manipuler un aussi jeune PDG. Je ne vous dis pas la surprise, malgré sa gueule d'ange, c'est un sacré battant, et pas commode avec ça si on le contrarie, j'en sais quelque chose ! Heero a eu plus de difficultés pour s'adapter. Il est resté près de Réléna durant quelques mois, le temps de faire le point et de réfléchir à ce que sa vie pourrait être. Subitement, il était libre, et de nombreuses portes s'offraient à lui. Je pense que pour la première fois de sa vie, il a réellement pris peur. Au bout du compte, il a renoncé aux études pour préférer le monde du travail. Il exerce en France dans une grande fabrique de jouets. Il rattrape toutes les années qu'on lui a volé : Il joue et rêve. Il invente des trucs formidables que les gosses adorent. Chaque Noël, il s'arrange pour en faire parvenir quelques-uns à des œuvres caritatives. Mais le plus incroyable, c'est ce qu'il fait de son temps libre... Vous ne me croiriez pas si je vous le disais... Je vous en parlerai peut-être une autre fois, juste pour le fun. Trowa s'est inscrit à l'université, de même que Wufei. Le premier pour étudier la zoologie et le second la médecine, enfin la psychiatrie plus exactement. Wu psy, j'ai cru que j'allais mourir de rire le jour où il nous a parlé de ses projets. Ce n'était pas très diplomate. Je crois qu'il l'a assez mal pris, mais bon, ça nous a permis de nous disputer encore une fois. Pour l'occasion il a même sorti son Katana... C'était vraiment bien. Il me manque encore plus que les autres. J'aime tout chez Fei ! Ses colères, son sens de l'honneur, sa force, sa sensualité, la sérénité qu'il y a sur son visage lorsqu'il médite ou qu'il enchaîne les mouvements avec son katana, et l'homme sage qu'il deviendra un jour. Je vous l'accorde il y a encore du boulot !

Cela fait presque une heure qu'elle m'écoute pleurer sur mon sort tout en sirotant nos bières, et je ne sais même pas comment elle s'appelle. Je ne le lui ai pas demandé, ça ne m'intéresse pas. Elle est jolie... Je devrais peut-être songer à lui dire que je suis homosexuel. En temps normal, je ne l'aurais pas laissé s'installer à ma table, mais cette nuit j'ai un peu le cafard, alors elle ou quelqu'un d'autre... C'est une présence... Vous savez un peu comme on prend un chat, un chien ou des canaris, pour ne pas être seul comme un con lorsque l'on rentre chez soi. Moi, en temps normal, à défaut d'avoir un animal, je ramène des amants. Hé ! pourquoi pas ? Certains d'entre eux sont de vrais animaux vous savez ? Ça ne fait pas tant de différences ! Bon, il faut vraiment que je le lui dise...

- Tu sais... Je ne suis pas intéressé par les filles...

C'est un peu salaud de le lui apprendre seulement maintenant, alors que je lui ai bien gâché sa soirée. Elle sourit gentiment, elle a de beaux yeux sombres. Elle n'est pas belle à proprement parlé, son nez est trop grand et sa bouche trop fine, mais elle possède néanmoins un certain charme. Vous savez, cette séduction assez singulière qu'ont les visages imparfaits. Avec son petit air "très comme il faut" elle n'est pas à sa place dans ce bar un peu glauque. C'est comme une religieuse en boite de nuit si vous voyez ce que je veux dire.

- Je sais, je te connais un peu, je suis la sœur de Luis.

- Amaya ?

- Oui. Mon frère m'a souvent parlé de toi, il dit que t'es un peu loco... (1)

Malgré ma déprime avancée je ne peux m'empêcher de rire, elle dit cela avec une telle franchise, dans sa bouche c'est presque un compliment. Je me demande quel âge elle peut bien avoir, pas plus de vingt ans à mon avis.

- C'est le bruit qui court.

- Luis a disparu. Cela fait deux semaines que nous n'avons plus aucunes nouvelles de lui, même abuela (2). Nous sommes tous très inquiets. Personne ne l'a vu, ni ses amis ni à son travail. Je l'ai cherché partout, à l'hôpital, à la morgue, j'ai même vérifié la liste des embarquements au spacioport au cas ou...

C'est vrai, maintenant que j'y pense, il y a un moment que je ne l'ai pas vu. En général, le samedi on fait une partie de billard, mais il n'est pas venu le week-end dernier. Je me suis dit qu'il s'était dégoté un type. Que sa famille soit sans nouvelles depuis deux semaines est inquiétant. Même s'il est seul à subvenir à leurs besoins et qu'il trouve parfois cela pesant, je sais que jamais il ne les abandonnerait, il ne quitterait pas L2 non plus. C'est une saloperie de colonie mais c'est chez nous. Il n'aurait jamais pris le risque de perdre son emploi. Quand on a la chance d'avoir un boulot sur L2, croyez-moi sur parole, on s'y accroche. C'est ça ou faire les poubelles ! Et je peux vous dire d'expérience que dans des poubelles de pauvres il n'y a pas grand-chose, sans compter qu'il faut se battre avec les rats, les chiens errants et les autres clochards. Pour faire les poubelles, le mieux est de s'expatrier sur L4. Jaloux moi ? Pas du tout. Ici on a.… on a... Laissez-moi une ou deux petites heures, et je vous dirai peut-être pourquoi je suis revenu. J'aurais mieux fait de rester sur Terre. À Paris, par exemple, là où Fei exerce à présent. D'accord, il s'est marié, mais ce n'était quand même pas la fin du monde. J'aurais pu attendre tranquillement que leur mariage se casse la gueule. Cynique ? Pas du tout. Réaliste. Moi je dis que lorsqu'une honteuse se marie pour engrosser la première venue dans le seul but de n'être pas le dernier héritier du clan, c'est voué à l'échec. C'est quoi cette manie de vouloir honorer des gens morts ? On s'en fou, puisque justement ils sont morts. Je suis vivant moi ! Et puis Liu, c'est quoi ce nom, je vous le demande ? Je déteste cette fille ! Le seul avantage qu'elle avait sur moi, c'était un utérus. Et puis, je déteste les gosses aussi ! Pourquoi je perds mon temps à l'orphelinat ? Et pourquoi je bosse à la DASS ? Je vous en pose moi des questions ? Laissez-moi détester le monde entier tranquillement ! Revenons plutôt à ce pauvre Luis. Entre Luis et moi, c'est un peu spécial, je ne suis pas sûr que sa famille soit au courant de ses préférences sexuelles, enfin sauf Amaya apparemment. Je suis un peu étonné qu'il leur ait parlé de moi. Ce n'est pas comme si c'était le grand amour entre nous, non, on est plutôt des potes, qui à l'occasion, s'envoient en l'air. Nous nous voyons une ou deux fois par semaine rarement plus.

- Tu l'as vu quand pour la dernière fois ?

Je réfléchis un peu, pour la forme, mais je m'en souviens parfaitement, c'était dans ce club "le gay luron" ouais, je sais, le nom est craignos, et croyez-moi c'est rien à côté du "site". L'endroit est tellement dégueulasse que t'as à peine mis le pied dedans, t'as déjà l'impression d'avoir choppé une dizaine de maladies. Mais bon, Luis voulait à tout prix y aller. Il a de ces idées parfois !

- C'était le samedi le vingt-huit vers cinq heures du mat. Et toi ?

- Pour la fête d'Halloween. Il a emmené Felipe et Juan faire la tournée des maisons. Ce sont nos frères.

Je hoche la tête pour lui faire comprendre que je les connais. Luis me parle souvent de sa famille.

- Les gamins étaient surexcités. Vers minuit, il les a ramenés, puis il est ressorti. Depuis plus rien. Je pensais que tu l'avais peut-être vu cette nuit-là... Ou que tu saurais où il a été ?

- Non, désolé. Tes frères et toi n'avaient rien noté de particulier dans son comportement ?

- Juan dit que Luis a discuté avec Roger pendant que lui et Felipe sonnaient à une maison. Mais ils n'ont pas vraiment fait attention, et puis, bien que la rue à cet endroit soit bien éclairée, ils sont restés dans l'ombre.

- Ce Roger, c'est un ami ?

- Non, pas vraiment. Il habite le quartier. En fait, depuis quelques temps Luis s'intéressait à des choses qu'il aurait dues continué d'ignorer...

- Comme quoi ?

- La magie noire. Roger est un sorcier. Il a donné quelque chose à Luis ce soir-là, et ce n'est sûrement pas catholique.

Duo se mord les joues pour ne pas rire mais sans succès. Il n'a jamais cru à toutes ces foutaises. Il est vrai que malgré l'avancée technologique personne n'était parvenu à démontrer quoique ce soit, ni dans un sens ni dans l'autre, mais il faut admettre que les hommes ont investi plus d'énergie dans la guerre et l'appât du gain que dans des études minutieuses concernant le paranormal. Néanmoins Amaya semble prendre tout cela très au sérieux. Dans certains quartiers, et dans certaines ethnies, la croyance est restée vive en ce qui concerne ces trucs un peu zarbi. Quoi ? Vous ne lisez pas "La vérité est ailleurs" ? Bande d'inculte ! Je n'y crois pas mais j'aime bien ce magazine, ça me détend. Et puis on y apprend tout de même quelques trucs. Ma belle-sœur intérimaire n'a pas du tout l'air contente, je pense que pour le moment, mon côté espiègle ne lui plaît pas beaucoup.

- Je croyais que tu me prendrais plus au sérieux puisque toi et Luis partageaient la même passion pour ce qui a trait à ces choses-là. Votre site web et tout ça...

- J'adore "Freddy krugger" mais je ne m'attends pas à ce qu'un type défiguré me persécute avec ses grandes griffes durant mon sommeil.

Vous ne connaissez pas non plus "Freddy " ? Ce n'est plus très jeune, c'est même franchement vieux, mais quand même, dans le genre c'est un classique avec un grand C ! Laissez tomber, c'est pas grave, de toute manière, si vous ne connaissez pas ce film vous ne méritez pas que je vous parle. Amaya se lève, toujours contrariée, et me jette un regard qui n'a plus rien de doux. Raide comme la justice, les lèvres pincées, elle me tourne le dos et se dirige d'un pas énergique vers la sortie. Croyez le si vous voulez, mais elle me rappelle vaguement quelqu'un ! Un petit brun coincé et rigide, mais avec un cul... Je ne peux tout de même pas la laisser partir fâchée, c'est la sœur d'un ami après tout, un ami qui a disparu qui plus est. Il n'a peut-être pas été marabouté, mais cela ne signifie pas pour autant qu'il ne lui soit rien arrivé de fâcheux. Sur L2, il peut t'arriver des tas de choses désagréables. Je me lève précipitamment pour la rattraper, elle est déjà dehors et avance d'un pas encore plus vif.

- Attends ne le prends pas mal... Je sais, je suis un peu con parfois, je suis désolé, d'accord ?

Elle se retourne, et je vois qu'elle pleure. Là, je suis véritablement désolé. Je déteste faire de la peine à qui que ce soit. Suivant le cliché du parfait gentleman, je lui tends mon mouchoir. Ce n'est qu'un kleenex et il un peu froissé, mais c'est le geste qui compte non ? Celui qui lui dit que je regrette. Elle s'essuie les yeux puis me regarde.

- J'ai eu du mal à te trouver. J'ai appelé à ton bureau il y a une semaine, mais ils n'ont pas voulu me renseigner, ils m'ont juste dit que tu serais absent un certain temps.

- J'étais sur L3, pour un dossier. Un type prétendais être l'oncle d'un gamin et je voulais vérifier cela par moi-même.

- Et il l'était ?

- Malheureusement. Il ne me plaît pas du tout mais je n'ai rien trouvé qui justifie qu'on ne lui confie pas la garde de son neveu. Les orphelins sont tellement nombreux que dès qu'on leur trouve de la famille on nous demande de ne pas être trop regardant... Parfois, je me demande pourquoi je fais ce job !

Nous avançons côte à côte le long du trottoir. Malgré l'heure avancée, il y a encore beaucoup de monde, la colonie ne dort jamais. Une masse mouvante hétéroclite se presse vers des plaisirs incertains. Amaya a pris un risque en venant seule ici. Le quartier n'est pas un coupe gorge à proprement parlé, il y a pire à l'est de la ville, mais la nuit, il ne convient pas à une jeune fille. Malgré le soutien financier, L2 reste pauvre et ne peut pas payer un nombre suffisant de policiers. La colonie demeure par conséquent une aubaine pour la racaille malgré une nette évolution. Les touristes que nous accueillons ne viennent pas pour la plage et les palmiers si vous voyez ce que je veux dire, d'ailleurs il n'y a pas grand-chose qui pousse chez nous, le peu d'eau est réservé aux habitants. Notre principale source de revenue vient de l'industrie, du trafic en tout genre et bien sûr du sexe. Officiellement, nous le combattons les mauvais penchants, mais officieusement c'est un peu plus abscons. Le tourisme sexuel comme on l'appel fait vivre de nombreuses personnes, hôtels, restaurants, magasins, prostitués, maquereaux et j'en passe. C'est tout un commerce. Ho ! C'est facile de critiquer et de parler des droits de l'homme, mais la réalité est plus complexe, il faut vivre ici pour comprendre cela. Enfants comme adultes n'ont parfois que leur corps à vendre pour pouvoir manger un bout de pain. Le social s'est développé mais c'est encore insuffisant.

Lorsque j'ai choisi ce métier je pensais pouvoir être utile, changer les choses petit à petit, j'étais porté par un optimisme et un idéalisme sans faille. La paix était revenue et nous allions reconstruire ! Aujourd'hui, je suis rongé par le doute et je n'ai plus l'énergie nécessaire pour lutter contre l'appât du gain de certains et la misère des autres. Comment lutter contre les pulsions humaines ? Comment lutter contre la noirceur de certaines âmes ? Dans une guerre vous avez un ennemi défini qu'il faut abattre par tous les moyens, mais là ?

- Tu as été voir ce fameux Roger dont tu parles ?

- Oui, mais il s'est contenté de sourire et de me raccompagner jusqu'à la porte. Jamais personne ne m'a mise aussi mal à l'aise que ce type. Dans le quartier les gens le craignent mais le consultent beaucoup. Ils sont prêts à lui donner toutes leurs économies.

- Donne-moi son adresse, j'irai le voir.

Je ne sais pas vraiment pourquoi je fais ça. Peut-être parce que Luis est un ami, peut-être parce qu'Amaya à des yeux sombres qui m'interpellent, peut-être parce que sans Luis, Amaya, sa grand-mère et ses deux petits frères seront sans ressources, peut-être pour me trouver un adversaire que je pourrai détruire. Ou peut-être pour oublier qu'il y a sur terre le seul homme que je n'aimerais jamais et qu'il vient de m'envoyer un faire-part pour m'annoncer la naissance de son fils. Amaya fouille dans son sac, en ressort un calepin fleuris sur lequel elle griffonne quelques lignes, puis arrache la page presque avec violence et me la tend. Je glisse l'adresse dans mon portefeuille, puis sans un mot je la raccompagne chez elle.

À suivre...

1) fou

2) grand-mère