Merci d'avoir cliqué, j'espère que vous aimerez cette histoire autant que j'ai aimé l'écrire. Bonne lecture!
Chapitre I
Hasard ou Destinée
La chose bougeait en elle.
La douleur montait de son bassin sur tout le long de son corps, par vagues irrégulières à chaque fois un peu moins supportables. Ruisselante de sueur, le dos courbé, elle traînait son corps meurtri à travers la forêt en quête d'une aide qui ne venait pas. La nuit s'étendait au-dessus d'elle et les étoiles contemplaient son malheur. Elle retenait de toutes ses forces les hurlements de souffrance qui obstruaient sa gorge et enflammaient ses poumons.
Aussi belle et pâle qu'une statue sculptée dans le marbre, la reine Arwen observait du haut des remparts le cavalier solitaire qui quittait l'enceinte de Minas Tirith. Éclairés d'une lueur sélénite, les traits d'albâtre étaient marqués par l'inquiétude. C'était une douce nuit d'été, pourtant la silhouette qu'elle ne quittait des yeux était sombrement vêtu, le visage dissimulé par une épaisse capuche. Nul autre qu'elle ne connaissait l'identité de ce mystérieux voyageur, ainsi que sa destination. Alors qu'il chevauchait droit vers le sud, aucun des quelques badauds qu'il croisait ne faisaient attention à lui. Jamais ils ne se seraient doutés qu'il s'agissait d'Elessar Telcontar, leur souverain et Roi du Gondor, autrefois connu sous le nom d'Aragorn.
Le coeur d'Arwen se serra alors que son époux s'évanouissait dans l'obscurité. Sa vue d'elfe l'accompagna bien loin, avant de l'abandonner dans les ombres de l'Ithilien, là où disparaissaient les vertes contrées du Gondor, et commençaient des territoires autrement plus incertains. Ignorant le départ de son protecteur, la Citée Blanche dormait paisiblement, mais Arwen savait qu'en ce qui la concernait, elle ne trouverait plus le sommeil tant qu'il serait absent.
« -Alámenë… » murmura-t-elle, songeuse. Elle attendrait, patiemment, le retour de son aimé, comme elle l'avait fait tant de fois.
Avant que ses pensées ne puissent l'entraîner vers d'autres souvenirs, son ouïe fine lui apprit qu'elle n'était pas seule. Sachant qui l'attendait, elle s'efforça de dessiner un sourire affable sur ses lèvres avant de se retourner. L'inquiétude qu'elle éprouvait ne devait en aucun cas se transmettre à ceux dont elle était responsable.
Elle salua Faramir, Intendant du Gondor, d'un léger signe de tête. Celui-ci se fendit d'une révérence, malgré la fatigue qui entravait ses mouvements. Son teint défraichi et ses cheveux en bataille indiquaient clairement qu'on l'avait réveillé prématurément.
« - Pardonnez moi d'avoir interrompu votre repos. » dit elle avec un sourire désolé. « Croyez bien que la situation l'exigeait. »
« - Je suis à votre service, ma Reine. » répondit celui-ci, réprimant un bâillement. « Le Roi n'est pas avec vous ? » Cette constatation, plus qu'une question, lui fit hausser un sourcil.
En guise de réponse, Arwen l'enjoignit à la suivre, ce qu'il fit sans l'interroger plus en avant. Silencieuse et gracieuse, la reine elfe le mena à travers le palais, presque vide à cette heure tardive. S'attendant à trouver le conseil de guerre réuni au grand complet pour une situation d'urgence, qu'elle ne fût pas la surprise de Faramir lorsqu'ils se retrouvèrent tous deux dans les appartements royaux, seuls. Fermant la porte du petit salon derrière elle, elle lui indiqua un luxueux fauteuil. Toujours aussi étonné, le blond n'attendit pas pour s'asseoir, son impatience ayant prit le pas sur la fatigue initiale. Arwen prit place face à lui, ramenant ses cheveux d'ébène derrière ses épaules d'un geste fluide.
« -Le Roi a quitté Minas Tirith il y a quelques instants. Il chevauche en direction du Harad. Seul.»
Les yeux de Faramir ne cessèrent de s'écarquiller tandis qu'elle parlait. Il se redressa d'un mouvement sur le dossier du fauteuil, aux abois.
« -Seul ? Pourquoi ? Cela est terriblement imprudent ! » s'exclama-t-il avant de se raviser. « -Pardonnez-moi ma Dame, loin de moi l'idée de douter de notre Roi, que je sais être un guerrier émérite...mais le Harad est une contrée dangereuse. »
« -Nous sommes en paix avec eux. » répondit elle d'un ton songeur. « -...De plus, il n'y va pas en tant que Roi. C'est un voyage qui n'a rien à voir avec la politique. »
Cela était faux, mais à cet instant, nul ne pouvait deviner les sombres machinations qui se tramaient parmi les cours du destin, pas même l'étoile du soir.
« -Mais pourquoi être parti en secret? »
« -Cela n'était pas intentionnel. Mais il ne pouvait attendre l'aube...il devait partir à l'instant. C'est un chemin qu'il doit traverser seul.»
Faramir faisait tout pour ne pas montrer son impatience. Malgré l'infinie respect qu'il avait pour la reine, elle avait ce défaut commun à tous les elfes : elle parlait en énigmes.
« -Ce que je vais vous dire ne doit pas quitter cette pièce, Intendant. Il y a de cela trois lunes, le Roi a fait un...rêve. » Sans qu'il ne puisse l'expliquer, l'hésitation dans la voix de la Reine fit frissonner Faramir. « -Dans ce rêve, il marchait dans une forêt aux arbres morts, au bord d'un fleuve asséché...Chaque nuit, le même rêve venait se frayer un chemin dans ses pensées, et chaque nuit, il arpentait cette forêt, sans savoir quoi chercher... »
Elle marqua un temps, enroulant ses mèches brunes entre ses doigts.
« -Et les rêves se sont transformés en cauchemars. Il se réveillait dans la nuit, pâle comme la mort, haletant, presque fiévreux. Il me parlait de hurlements, d'un sentiment de haine et de colère qui le brûlait de l'intérieur. Chaque nuit. Je pense qu'il ne vous a pas échappé que le Roi était...préoccupé ces derniers temps. »
En effet, Faramir avait remarqué les cernes sous les yeux du Roi qui s'étendaient, son humeur qui se faisait plus taciturne qu'elle ne l'était déjà, mais quand il l'avait interrogé à ce sujet, il ne lui avait pas répondu clairement.
« -En effet, mais j'ignorais que la cause était si...mystérieuse. »
« -Cela devenait insupportable... » Poursuivit Arwen. « -Il avait le sentiment que ces cauchemars avaient une signification. Qu'il devait trouver ce lieu qui le hantait. »
« -C'est dans ces moments-là que la sagesse et les connaissances Gandalf nous manquent... » soupira Faramir.
A cela, l'eldar répondit par un sourire nostalgique. Sans doute que Mithrandir ou même Elrond, son père, auraient su quoi faire face à cette situation. Mais ils n'étaient plus là et il fallait continuer d'avancer sans leur magie.
« -Malheureusement, nous étions à cours de solutions...alors Elessar a décidé de retrouver l'endroit de ses rêves. Il n'y avait qu'un seul moyen. Pour observer partout à la fois, fouiller les moindres recoins de la Terre du Milieu... »
Faramir bondit avant même qu'elle n'eût terminé sa phrase.
« -Le palantir ! Il a utilisé le Palantir. »
La peur était palpable dans sa voix. Pour lui qui avait vu son père dépérir sous l'influence de cette maudite sphère, cette idée lui semblait aberrante. Depuis la fin de la guerre, il espérait que cet artefact reste caché loin des regards, jusqu'à-ce-qu'il prenne définitivement la poussière. Lui qui louait la sagesse de son souverain, il ne comprenait pas comment il avait pu prendre des risques aussi inconsidérés. Il était si facile de sombrer dans la démence en présence d'un si grand pouvoir… sans qu'il n'ait besoin de verbaliser ses pensées tumultueuses, Arwen vint poser une main réconfortante sur son bras.
« -N'ayez crainte, Faramir. L'esprit d'Elessar est fort. »
Il eut soudain honte de son emportement. La Reine devait être rongée par l'inquiétude, il en était sûr, pourtant elle gardait un calme olympien malgré la situation. Il était de son devoir d'Intendant de faire de même.
« -Je ne voulais pas insinuer quelque chose, votre majesté. »
« -Je sais. » Elle lui adressa un sourire doux et retourna s'asseoir.
«-Alors...qu'a montré le Palantir ? »
Il s'écoula quelques secondes avant qu'elle ne réponde.
« - La forêt se trouve par-delà l'Ithilien, aux frontières du Harad. »
« -Et qu'a-t-elle de particulier ? »
« -C'est ce qu'il est parti découvrir. » Le regard d'Arwen s'assombrit. « -Je n'en sais guère plus que vous à partir de là. Cette nuit, il s'est réveillé en sursaut et semblait déterminé à y aller. Je ne voulais aller contre sa volonté. Les rêves sont des messages et il faut les écouter. »
A cela, Faramir ne pouvait que lui donner raison. Des années auparavant, c'est un songe qui avait conduit son frère à rejoindre la Compagnie de l'Anneaux.
« -Mais ils ne sont pas toujours de bons présages... » murmura-t-il. Boromir était mort en héros, mais la douleur du deuil était encore bien vivace dans son coeur.
Perdue dans ses pensées, la souveraine se déplaça jusqu'à une fenêtre et contempla tristement la ville qui s'étendait au pied de la tour. Dans quelques heures, elle grouillerait d'activité, de bruits, de voix, de rires, pourtant pour Arwen, tout lui paraitra vide, tant qu'elle ne saura son aimé en sécurité.
« -Nous devons assurer la sécurité de Minas Tirith en son absence. En tant qu'Intendant, vous deviez être au courant de la situation. »
Ils débattirent à ce sujet, avant de se mettre d'accord. Il n'était pas indispensable que le peuple sache son suzerain en vadrouille pour suivre des messages oniriques, aussi il serait dit que le Roi était alité. En attendant son retour, Faramir serait responsable de la Citée, un rôle qu'il prenait très au sérieux. Lorsqu'ils eurent fini de régler les détails, le ciel se tachait de rouge à l'approche de l'aurore.
« -Je vais prendre congé, et vous laissez vous reposer. » dit finalement la Reine. « -Et je vais retourner auprès de mon fils. »
« -Et moi auprès de mon épouse. » répondit l'Intendant, qui malgré les responsabilités qui lui incombaient, n'avait qu'une seule envie : dormir. « -Tâchez de trouver le sommeil, vous aussi. »
A cela, elle répondit par un hochement de tête et ferma la porte derrière lui.
La chose détruisait ses entrailles.
Elle y traçait un chemin brûlant, dévorant tout sur son passage. Son ventre était en feu, ses jambes dégoulinantes de sang. Elle gémit, agrippant les plis de sa robe souillée de rouge et se laissa tomber sur l'herbe mouillée. Son corps était agité de spasmes. Elle rassembla toutes ses forces pour s'allonger sur le dos, les genoux pliés, les yeux rivés sur la cimes nues des arbres.
Sors de moi, suppliait elle en silence, le visage trempé de larmes. Sors de moi, espèce de monstre.
Mais la chose était insensible à ses prières. La chose se nourrissait d'elle. La jeune femme du se mordre la main pour ne pas hurler, alors que les effluves de douleur s'intensifiaient toujours plus. De l'autre main, elle chercha à tâtons quelque chose à serrer, à tenir, pour ne pas sombrer. Elle ne trouva rien et ses doigts s'enfoncèrent vainement dans la terre humide. Elle était seule face à son martyr. Le goût du sang emplissait sa bouche.
Le visage d'Eldarion était si paisible qu'Arwen en oublia presque ses tourments. Rien dans toute sa vie, pas même sa rencontre avec Aragorn, ne l'avait rendu plus heureuse que sa naissance. Il n'était aucun être en Arda qu'elle n'aimait plus que son fils. Des heures entières elle pouvait rester à ses côtés à l'observer sans jamais se lasser. Chaque jour qui passait, elle voyait un peu plus se dessiner l'homme exceptionnel qu'il deviendrait. A sa grande fierté, il avait hérité de la plupart de ses traits. La même peau diaphane, les mêmes oreilles pointues, les mêmes yeux clairs. Tout ce qu'elle espérait, c'est qu'il ait les qualités morales de son père… Ses pensées se tournant vers Aragorn, l'allégresse fût de courte durée. Si devant Faramir, elle s'était montrée impassible et apaisée, l'angoisse la dévorait. Son époux était parti si vite, la laissant seule avec des questions sans réponses et elle se sentait terriblement impuissante. Une larme unique vint tracer un sillon argenté sur sa joue. Comme s'il l'avait senti, Eldarion se mit soudain à pleurer. Essuyant ses yeux humides, elle s'empressa de le prendre contre sa poitrine et de le bercer. Elle lui murmura un poème que sa propre mère, avant qu'elle ne quitte ce monde, lui contait pour l'endormir. Elle resta longtemps avec son enfant lové dans ses bras, bien après qu'il se soit endormi, écoutant sa respiration les yeux fermés. La journée vint, puis une autre. Aragorn ne revenait pas. Sans jamais rien montrer de sa solitude et de son inquiétude, elle observait l'horizon.
Alors que le troisième soir tombait, les dames de compagnie virent avec horreur leur souveraine défaillir. Comme prise d'un mal soudain, la reine s'effondra, blanche comme un linceul. On fit quérir un guérisseur, mais elle l'éconduit. Tremblante, elle ordonna qu'on la laisse seule et n'ouvrit plus sa porte à personne, si ce n'est à Faramir. Celui-ci vint la voir lorsqu'il appris la nouvelle. Il se murmurait parmi les serviteurs que le couple royal était souffrant, la situation était de plus en plus problématique. Lorsqu'il la vit, Faramir fût frappé par son regard. D'habitude, ses yeux brillaient comme des étoiles, mais alors qu'elle les plongait dans les siens, ils étaient aussi sombres qu'une nuit d'orage.
« -Quelque chose de terrible est en train de se produire, Faramir...Je le sens. Le vent me l'a murmuré. »
Ayant toujours considéré la Reine comme bien plus sage que lui, Faramir n'envisagea même pas de la contredire. De plus, il savait que les Elfes étaient souvent magiciens, sensibles aux messages divins, bien plus que ne l'étaient les Humains.
« -Pensez vous que le Roi soit en danger ? » demanda-t-il, prêt à envoyer une patrouille retrouver Aragorn.
« -Nous sommes tous en danger. » Sa voix était terriblement lugubre. « -Il n'y a rien que nous puissions faire. »
Faramir lui jeta un regard interdit. L'ignorant, elle retourna à la fenêtre, comme elle le faisait depuis des jours.
« -Que les Valars te ramène à moi, mon amour... »
Enfin, après ce qu'il lui semblait être d'interminables heures de calvaire, la chose entama son chemin pour sortir. Cette, fois, la femme hurla, autant de soulagement que de douleur. Son corps était brûlant et ravagé. Elle avait si mal. Et ça continuait. La chose prenait son temps. La femme soufflait bruyamment et profondément, poussait de toutes ses forces pour l'expulser d'entre ses cuisses, ne supportant pas de garder cette abomination en elle une seconde de plus.
Quand ce fût fini, quand les contractions eut enfin cessé, elle était épuisée, physiquement et mentalement. D'un geste tremblant, elle écarta les mèches de cheveux collées à son front et jeta un coup d'oeil à la chose qui remuait sur le sol. Qu'elle était laide, poisseuse, répugnante, avec sa peau rougeâtre marbrée de veines et ses petits yeux noirs globuleux enfoncés dans son visage froissé.
Dans le regard fiévreux de sa génitrice, on pouvait y lire la plus pure et la plus effroyable haine.
Trés difficilement, celle ci déplia ses membres crispé, sans quitter la chose des yeux, et se releva. Doucement, elle s'empara d'une pierre qui trainait là, et tituba jusqu'à l'abomination. Lentement, mais avec une froide détermination, elle leva la pierre le plus haut possible que lui permettait son corps harassé.
Et la chose se mit à rugir.
Un hurlement d'enfant déchira la nuit. Une vague d'adrénaline traversa Aragorn, qui jusque-là, était entouré par le silence. Sans attendre plus, il lança son cheval au galop. Les arbres décharnés l'encerclaient de leurs silhouettes fantomatiques qui se découpaient dans la pleine lune. La région avait subi de plein fouet l'influence de Sauron et ne serait sans doute plus jamais fertile. Au loin, on pouvait apercevoir ces montagnes dont, quelques années auparavant, se déversaient des hordes de créatures monstrueuses. Les quelques animaux qu'il avait croisé étaient malingres, viciés. Tout en ces lieux exhalait la mort. Sur son chemin, l'ancien rôdeur aperçu le chemin d'une rivière autrefois abondante, aujourd'hui asséchée. Il reconnaissait ce serpent de terre comme l'endroit de ses rêves. Il était sur la bonne voie. Les cris continuaient, se rapprochaient. A mesure qu'il convergeait vers eux, il lui semblait entendre des sanglots de femme. Après une course folle, il finit par déboucher sur une clairière. La scène devant ses yeux le frappa d'horreur. Une femme, Haradrim d'après sa couleur de peau, était penchée sur un enfant à peine né, posé à même le sol. Elle tenait une pierre levée au-dessus de sa tête, prête à l'abattre sur la chair de sa chair. Lorsqu'il compri ce qu'elle s'apprêtait à faire, le sang d'Aragorn se glaça dans ses veines.
« -NON ! »
Quelques secondes d'hésitation. C'est tout ce qu'il fallut pour changer à jamais l'Histoire. Comme elle levait les yeux vers la voix qui l'avait interrompu dans son œuvre macabre, Aragorn eut juste le temps de descendre de selle pour intervenir. Il lui saisit le bras et la fit lâcher la pierre. Elle hurla, se débattit avec les dernières forces qui lui restait. Ses mots étaient hystériques, désespérés, mais Aragorn ne pouvait en saisir le sens. Elle essayait d'échapper à son emprise, pour se diriger vers l'enfant, une lueur de haine dans les yeux. Cette haine. Elle faisait écho à celle qu'Aragorn subissait chaque nuit, dans ses rêves incessants.
« -Ne faites pas ça ! »
Quel que soit la raison qui poussait cette Haradrim à souhaiter la mort du nourrisson, il ne pouvait la laisser faire. Ses ongles s'enfonçaient dans la chair du roi, essayant de le faire lâcher prise. Puis, à bouts de forces, elle se laissa choir au sol. Aragorn l'accompagna dans sa chute et l'allongea au sol. Il aurait voulu l'aider, mais un rapide coup d'oeil à son état ne laissa pas de place à l'espoir. Sa robe était couverte de sang, son front de sueur et ses yeux fous se révulsaient. Dans un dernier soubresaut, elle gémit et soupira trois mots. Trois mots qui restèrent à jamais gravés dans la mémoire du sans couronne devenu roi.
« -Tuez...cet...enfant... »
Tous ses muscles se relâchèrent et elle laissa échapper son dernier souffle. Encore sidéré par ce qui venait de se produire, Aragorn reporta son regard sur l'enfant. Il devait le ramener à Minas Tirith sur-le-champs. Prenant juste le temps de fermer à jamais les paupières de la malheureuse inconnue, il enroula l'enfant dans sa cape et remonta en selle. Sans prendre le moindre instant de repas, il cavala jusqu'à la Citée Blanche. Le bébé ne pleurait plus. Au-dessus d'eux, les étoiles traçaient un chemin d'argent.
Les éclaireurs l'avaient retrouvé. Morte. Pas de traces de la chose. La femme vêtue de bleu laissa échapper un grognement avant de les congédier. Elle fouilla dans une de ses innombrables poches et en sorti une longue pipe en bois, dans laquelle elle y glissa du tabac. D'un regard soucieux, elle observait les volutes de fumées qui disparaissaient dans le ciel du désert. Les immenses dunes de sable étaient calmes, apaisantes. Mais pour combien de temps ? Avec de la chance, un renard avait embarqué le bébé et en avait fait sa pitance. Mais si ce n'était pas le cas ? Et si l'enfant avait survécu ?
« -Alors qu'Eru nous protège tous... »
