Titre : Nos poussières érotiques
Rating : M
Pairing : Harry Potter / Draco Malfoy (entre autres)
Disclamer : Pour que son monde ait fait germer tant de choses dans la tête de ses lecteurs, Madame J.K Rowling est objectivement fabuleuse. Je déclare bien évidemment que tout ceci est à elle. Mais pas trop. Moins qu'on ne le croit, en fait. Tant que ce qui est reprit hors de ses pages est le fruit de notre propre imagination.
Spoiler : Cette fiction se base sur l'intégralité de la saga Harry Potter, épilogue final inclus.
Partie I : « Comme les hypogriffes »
Les sarcophages
Il y a de ces instants terribles et pittoresques où je les tends devant moi. Cette chair affalée sur mon squelette, ce petit air de cadavre encore là.
Elles sont émouvantes, ou hideuses.
Calleuses, plissées, distendues, gonflées d'arthrites, tâchées de vieillesse, bombées de veines molles ; chaque raideur de tendon grouille sous la peau comme un chat passant sous une bâche.
Nos poignes magiciennes ont peut-être sauvé le monde ; elles ont dilué des mixtures vaporeuses, répandu la nitescence de nos charmes, exhibé des symboliques distinguées comme le mariage ou la mode.
Nos mains se fanent, à l'instar de notre épiderme et de nos organes.
Toutes les vieilles mains se ressemblent : asséchées par le flux râpeux du sablier. Les miennes ont des réflexes fantomatiques, des sursauts recroquevillés, comme si à travers des trombes de temps disparus elles espéraient encore retenir un essentiel échappé depuis des lustres.
Les héros meurent. Leurs ennemis aussi. Nos chairs se flétrissent et des sillons lâches viennent s'incruster dans nos corps d'anciennes gloires.
Je suis, quelque part, perdu au fond de ce Manoir qui est mien, et qui m'appartient si peu à la fois.
Il faut le voir, mon Manoir. Il y a tant de choses enfouies dans ses dédales bien décorés.
Ce toit m'offense, parce qu'il abrite de ces pièces infamantes qui ne me font pas me sentir comme un douillet chez soi. Pourtant, cette demeure est mienne, parce que je connais tout de ses petits tombeaux ; des plus laids, et des plus beaux - dont la superbe et cadavérique proximité fait parfois naître un frisson solennel le long de ma colonne vertébral. C'est un lieu difficile à posséder, parce qu'il est si changeant d'un corridor à l'autre.
Au fond du premier étage, il y a le boudoir où ma fiancée et moi avons fait l'amour pour la première fois, à la sauvette, sur un sofa, en ricanant comme des gosses heureux de faire une grosse bêtise. Abolir la distance charnelle avant la nuit officielle de notre union, c'était notre façon peu révolutionnaire de nous moquer d'un mariage si bien arrangé.
Au deuxième, il y a la chambre laquée de nos grandeurs, où mon fils et celui de mon ennemi intime enterrèrent leur enfance au creux des draps, dans la chaleur sans souffle d'un mois de juillet, et quelque part aux alentours de minuit, une horloge sonnait une comptine grave, une marche funèbre, soulignant d'un refrain plein de crouics et de crouacs l'arrivée d'une mort bénigne et ponctuelle comme une ardente visiteuse.
Il y a d'autres pièces plus secrètes encore et vous ne les trouveriez pas si je n'étais pas votre guide, votre scribe de noblesse bien éduqué, vous ne pourriez saisir la joliesse déliquescente des hiéroglyphes peints dans les tapisseries.
Il y a cette penderie d'une taille impériale, qui renferme pour toujours une odeur de naphtaline, et qui est ce sanctuaire où ma mère, la Narcisse, rangea ses robes les plus somptueuses ; ces tissus poudreux, modelés, d'un temps de révérences et de castes, et qui valent aujourd'hui plus que les bijoux de la reine Moldue.
Il y a ce cabinet de travail, où mon père, Lucius, l'air aussi important qu'un Ministre des six planètes du système solaire, se penchait sur une paperasse méticuleuse, sa plume grinçante apposant de noirs caractères aux contours incisifs et élégants.
Il y a ces salles basses aux murs nus sous les planchers de nos salons, ce claque-murage de pierres glauques où nous fîmes des prisonniers, des torturés, des ombres affamées et aux abois pour hurler de rage ou de supplication dans le froid brumeux de nos caves.
Il y a cette chambre d'ami moelleuse, où la fille de nos invités m'attira quand j'avais quinze ans, et, toute à sa nonchalance gracieuse de jeune dame expérimentée, dénoua les cordons croisés de son corsage, ôta les grandes épingles de son chignon, secoua sur son dos de céruse un ruisseau noir et lustré, avant d'attirer mon visage rosissant entre ses seins chauds et ma verge chaste entre ses cuisses.
J'ai oublié son prénom, mais je sais qu'elle était toute imprégnée d'un parfum de luxe - des mirabelles, de la sauge -, et elle caressait mes cheveux avec un ravissement louche, comme jalouse de leur vernie.
Des cheveux blonds, la marque d'une race épurée, des cheveux blonds qui étaient ma marque et qui ont chuté avec les années. Cinquante ans, arrivée de l'automne : début d'une ruine interne en forme de tourbillons capillaires.
De ce don doré d'aristocratie, il ne me reste autour du crâne qu'une couronne lisse et blanche. Assis dans mon trône rembourré, - ce grand siège sculpté au fin fond de mon Manoir baroque, ma maison magnifique, mon tombeau embaumé - je suis cet Apollon défraichi que le temps a sucé de l'intérieur.
Celui qui a été.
Comme j'ai encore un peu de fierté et de coquetterie, je porte un bonnet en cashmere. Je suis le petit roi au bonnet.
On dit que dans son château isolé, Draco Malfoy attend, paré d'atours vaniteux. Selon la rumeur, il a des mines de pharaon déjà enturbanné.
A suivre...
NdA : Cette fiction se présentait au départ sous la forme d'un One-Shot ; lequel, de par sa taille plus que conséquente, m'a obligé à le découper en trois parties ; lesquelles, de par leur volume, ce sont tout naturellement divisées en chapitres. C'était plus fort que moi les enfants, il fallait que j'inscrive chaque chose dans un contexte :P
Certains d'entre-vous le savent, il s'agit d'une histoire reliée à deux autres : « Grains de sable » et « les jolies choses », abordées respectivement du point de vue de Harry, et de ceux de Albus et Scorpius. Leurs récits abordent certains événements que contiendra cette fic ; pas tous, cette partie-ci étant beaucoup plus creusée.
Cette fiction est tellement développé d'ailleurs, que l'action pourrait vous sembler lente au début... J'ai bien peur qu'il faille vous y faire. =) Mon introduction s'arrête là, j'espère que vous trouverez autant de plaisir à lire cette histoire que j'en ai à l'écrire. Je vous embrasse !
