Par avance : La majorité de ce contenu, notamment l'univers, le nom de certains personnages et une partie de l'intrigue appartiennent bien entendu à Blizzard, béni soient-ils. Cette fanfic est une suite à Starcraft Broodwar complètement sortie de mon imagination, basée sur les fantômes, leurs pouvoirs psychiques, mais aussi Kerrigan et l'infestation possible d'êtres humains par les zergs et ce qui en résulte. Sur ce point j'ai fait preuve d'un peu de liberté, on aimera ou pas. La fic aura aussi son lot de bataille, bien entendu. Un chapitre sera marqué "passé" tandis que le suivant sera marqué "présent" et ainsi de suite. C'est un déroulement narratif particulier, j'espère qu'il ne vous déroutera pas. Normalement, ça reste assez clair. C'est parti...


DETTE (PASSE)

Elle n'était qu'à moitié consciente. La jeune fille était nue, conservée en suspension dans une cuve remplie d'un liquide bleu à la composition chimique complexe et qui était responsable de ses troubles. Cette substance la maintenait dans une sorte de léthargie qui lui permettait seulement de penser par bribes, et pas d'agir. Et lorsqu'elle arrivait à s'en rendre compte, elle se disait que c'était préférable d'être ici comme un légume que dans cette salle ou on avait fait tant de choses à son cerveau. Elle avait l'impression de ne plus avoir d'identité et que c'était du à des dégâts dans son esprit causés par ces expériences. Mais il y avait le liquide, qui en réalité était bien plus dangereux.

Elle respirait via un masque de respiration et ne bénéficiait pas d'autre lien avec l'extérieur. Le liquide la nourrissait de l'extérieur. Les seuls moments à l'air libre étaient ceux dédiés aux expériences. Elle ne se rappelait plus qui elle était, donc encore moins pourquoi elle était là et pourquoi elle subissait ce traitement.

Mais même avec un esprit ramolli par le liquide bleu, elle s'était rendue compte que quelque chose avait changé. On ne venait plus la sortir de là. Sa perception du temps altérée, elle avait quand même fini par le comprendre. Mais elle n'avait en revanche pas assez de force d'esprit pour se demander pourquoi. Alors elle restait là, calmement, attendant quelque chose sans pouvoir imaginer quoi.

Finalement, elle entendit des bruits au loin. Elle reconnut des coups de feu et eut même un flash de lucidité lorsqu'un nom lui vint à l'esprit : « C 10 Canister ». C'était le bruit de l'une des armes. Elle connaissait bien ce son. Mais ne savait pas pourquoi. Il y avait d'autres bruits impossible à identifier. Elle attendit que tout ceci se passe. Le silence revint et elle crut que la routine du silence éternel allait revenir.

Mais quelque chose toqua à la vitre. Dans un effort considérable, elle ouvrit les yeux. A travers le liquide, elle distingua une chose. Une silhouette. Une femme. Deux yeux jaunes. Rien de plus apparemment. Si, d'étranges appendices dans son dos. Mais elle ne pouvait pas aller plus loin dans son analyse. La femme disparut de son sillage et elle n'eut pas le courage de tourner la tête pour suivre. Puis elle eut l'impression de sortir peu à peu de cet horrible cauchemar de semi-vie alors que le liquide bleu disparaissait de la cuve par le système d'évacuation. Elle retrouva rapidement sa faculté de perception et de réflexion. Mais sa mémoire restait altérée et elle était faible, fatiguée, meurtrie. La douleur des expériences revint. Elle se laissa atterrir dans le fond de la cuve sur les genoux contre la paroi, incapable de bouger non plus parce que son esprit ne pouvait s'y forcer, mais parce que ses muscles étaient trop endoloris. Puis la paroi de verre descendit et toujours incapable de se mouvoir, la jeune fille tomba à terre sur le dos, lamentablement, un regard désespéré malgré elle sur le visage.

Elle fixait un plafond fait de tuyaux sombres. Puis le visage de la femme aux yeux jaunes. La jeune fille comprit ce qui venait de lui arriver. La femme l'avait libérée. Elle força sa gorge à se déployer et ses cordes vocales à vibrer et parvint à parler d'une voix éteinte :

« Qui… Etes-vous ?

La voix des yeux jaunes était étrange, démultipliée en plusieurs tons.

– Ta chance de salut.

A entendre cette étrange sonorité, la libérée eut une pensée soudaine : « zerg ». Sa pensée chemina au travers de ses paroles :

– Vous… Vous êtes un zerg ? Non.. Non… Je me souviens, les zergs sont des créatures bestiales, elles ne parlent pas.

– Disons que je suis une exception à la règle. Et toi qui es-tu ?

Les souvenirs récents revinrent à la surface.

– Je ne… Je ne sais pas. J'ai été conservée là-dedans je ne sais… Je ne sais combien de temps. On m'a fait des expériences… pour… euh… Pour développer quelque chose dans ma tête, je ne me rappelle plus vraiment.

– Tes pouvoirs psychiques ? tentèrent les yeux jaunes.

– Euh… Oui… Oui ! C'est ça ! Je… Sinon, je ne sais plus qui je suis ou qui j'ai été, je ne sais pas. Je… J'ai mal.

– Des expériences, hein… Ils sont allés loin dans ton cas. Bah, plus aucun d'eux ne fera ce genre de chose, si ça peut te rassurer. A part ça, je pense que tu vas mourir, jeune fille.

Alors que la mort ne l'aurait pas dérangée dans la cuve, la libérée se secoua légèrement à la mention de la mort, son instinct de survie lui revenant en tête.

– Non… Non ! Veux pas mourir ! Pas après ça… Mais… En effet, j'ai l'impression que je ne survivrai pas. Si ce n'est pas mon corps, mon esprit va se désagréger, je le sens. Médecine… Médicaments… Il faut me soigner !

La femme aux yeux jaunes se mit à genoux devant elle et souleva légèrement sa tête en glissant sa main derrière son crâne.

– En souvenir de ce que j'ai subi, je te propose cette alternative. Ou tu meurs… Ou je te sauve la vie.

– La vie… La vie !

– Je te préviens cependant… Tu vas renaître.

– Re… Renaître ?

– Oui… Je vais te placer dans une chrysalide qui va te reconstruire. Et lorsque tu te réveilleras, dans une nouvelle peau, tu seras zerg.

– Zerg ? Ce n'est pas possible, je suis humaine… Ce n'est pas possible.

– Pourtant ça l'a été pour moi. Et cela faisait un temps que je voulais réitérer l'expérience moi-même. Et comme tu sembles convenir puisque d'après ce que j'ai lu sur le moniteur tu as un esprit très puissant, je te propose de te sauver la vie. Mais je peux très bien te briser la nuque pour abréger tes souffrances.

La jeune fille avait vraiment mal. Et à ce niveau les deux propositions paraissaient aussi tentantes. Puis d'autres souvenirs lui revinrent en tête, qui lui donnèrent une grande envie de vivre.

– Je… Je dois vivre. Pour le tuer ! Je veux le tuer !

La femme zerg émit un rire déformé par sa voix multiple mais qui laissait paraître son humanité.

– Tiens donc… Qui ça ?

– Je ne me rappelle plus de son nom. Mais c'est lui qui m'a affecté ici. Sous les ordres de son chef. Un roi.

Il y eut un léger silence, puis la femme siffla :

– Un empereur plutôt, non ?

– Euh… Oui…

La voix de la femme avait pris un ton diablement inquiétant.

– Arcturus…

La mourante acquiesça sans répondre. Nouveau rire des yeux jaunes.

– Alors viens avec moi. Je vais te redonner vie ! Tu pourras te venger ! De plus, il se trouve que j'ai aussi une vengeance à accomplir sur la personne d'Arcturus Mengsk.

L'hésitation de la jeune fille ne fut pas longue. Tout concordait, et qu'était son humanité contre sa vie ? Elle souffla :

– D'accord… Faites-moi zerg.

– Bon choix… A présent repose-toi. »

Et la jeune fille sombra dans le coma sans savoir pourquoi. Pendant ce coma, elle perçut des sons et des odeurs étranges, et mêmes des ondes étranges. Elle eut froid un temps, puis bien vite se sentit au chaud et n'eut plus mal.

Son esprit commença à se régénérer, et ce n'était rien à côté de son corps. Au sein d'un cocon qui vivait littéralement, elle sentit une nouvelle force grandir en elle. Cette force affectait son esprit. Elle se rendit compte, au milieu d'un maelström de sensations, qu'elle perdait son humanité. Qu'un instinct prenait le dessus, qu'au plus profond de son corps, dans son ADN même, elle mutait vers une sorte de demi-bête.

C'est à ce moment précis que toute l'expérience de la reine de pique, la dirigeante des nuées zergs, échoua. La jeune fille fut prise d'un mal de tête atroce alors que luttaient son humanité et une nouvelle personnalité qui était séduisante mais que la jeune fille savait être la fin de son libre-arbitre. Prenant conscience de la force nouvelle de son corps modifié, elle creva la chrysalide avant que celle-ci ne s'ouvre d'elle-même, brisant le processus de transformation. Ce qui en émergea était une créature plus humaine que zerg mais qui garderai à jamais les séquelles de l'infestation par des germes zergs.

Alors qu'elle rampait hors de la chrysalide sur la terre vivante qu'elle savait être le sol sur lequel évoluaient les zergs, elle se rendait compte qu'elle s'était damnée elle-même. Elle pleura en conséquence.

Elle était faible, comme lorsqu'elle était sortie du liquide. Mais elle n'avait plus mal. Son cœur battait différemment. Elle respirait des odeurs jamais imaginées avant. Elle entendait des sons avec une précision qui lui faisait tourner la tête. Et elle voyait dans des couleurs qu'elle ne savait pas exister. Elle regarda sa main : elle était écailleuse et munie de griffe à la place des ongles. Elle constata bien vite que toute sa peau était recouverte d'écailles grisâtres. Ses pieds étaient également munis de griffes.

Elle s'intéressa à son sexe et vit qu'il était recouvert par des plaques écailleuses. Elle eut sur l'instant l'envie de s'en débarrasser, et aussitôt pensé, les plaques s'écartèrent pour laisser apparaître l'appareil génital d'une humaine. Elle n'avait donc pas tout perdu. Dès qu'elle relâcha sa concentration, les plaques reprirent leur place.

Elle se força à se mettre sur ses jambes. Celles-ci tremblèrent mais elle parvint à se redresser. Elle commença alors à errer parmi les bâtiments-êtres qui peuplaient la cité zerg. Elle se crispait en s'en rendant compte, mais elle se sentait parfaitement à l'aise nue parmi cette forme de vie. Elle ressentait le sol, ressentait les édifices, et cela la faisait trembler. Ou frissonnait-elle de plaisir ? Elle ne savait pas.

Elle marcha sans rencontrer qui que ce soit un long moment. Elle regarda le ciel, il était couvert de nuages aux lueurs rouges. Elle ne savait pas où elle se trouvait et de toute façon elle ne se souvenait pas du moindre nom de planète. Elle commençait à se dire qu'elle allait peut-être rester ici en fin de compte lorsqu'un zergling, petite créature à deux pattes avec des ailes qui ne lui permettaient pas de voler et une vélocité dévastatrice, passa devant elle et s'arrêta d'un coup en la voyant. Après un temps de battement, il s'approcha avec un air menaçant. La jeune fille cligna plusieurs fois des yeux alors que quelque chose se déroulait dans son esprit. Surprise par elle-même, elle murmura :

« Je ne comprend pas… Tu… Je suis… Ta mère ? C'est… C'est ridicule. Ou alors…Non, ce n'est pas ça… C'est juste une façon de dire que…

Elle tendit la main vers le zergling. Celui-ci s'arrêta et commença à se dandiner. La jeune fille prit un peu plus d'assurance et commença à sourire. Le premier sourire depuis très longtemps.

– Je te contrôle. Tu ne peux pas m'attaquer, je suis ta maîtresse. Je n'en reviens pas… Un tel prodige… Viens là, toi.

Et le zergling approcha docilement. Elle finit par lui caresser la tête comme s'il s'était agi d'un chien. Ce qui l'effraya. Elle ressentait une sorte d'affection pour la bête.

– Comment ? Comment est-ce que je peux te trouver… sympathique ? Comme une sorte d'animal de compagnie. Tu es… Horrible, normalement. Mais là… »

Elle resta un instant immobile, se demandant si elle-même n'était pas devenue une monstre et que pour cette raison elle trouvait le zergling attendrissant, puis elle se dirigea en avant, le zergling sur ses talons. Elle croisa deux hydralisks, grandes créatures faisant deux fois la taille de la jeune fille, dotées de deux larges griffes et d'une queue lançant des piques empoisonnées. Elle dit doucement en les regardant :

– Escortez-moi.

Ce qu'ils firent. Elle était à la fois émerveillée et terrifiée par son pouvoir. Emerveillée car elle avait du pouvoir, se sentait forte et imbattable. Terrifiée car toutes ces sensations positives venaient du fait qu'elle était en partie zerg.

Alors qu'elle avançait au hasard parmi les bâtiments, elle perçut une présence qui mit tous ses sens en alerte. Sans savoir pourquoi, elle reconnaissait un esprit fort. Elle s'arrêta et regarda tout autour. Finalement apparut devant elle celle qui lui avait sauvé la vie. La première réaction de la semi-zerg fut de lui adresser un regard farouche. La reine de pique était l'ennemi de chaque humain, cela elle s'en souvenait. Puis elle prit un air alarmé lorsqu'elle se rappela que la reine zerg lui avait sauvé la vie… Et qu'elle était sûrement plus puissante qu'elle. Elle put la voir distinctement cette fois.

La reine des nuées était belle quelque part. Sa peau était écailleuse, ses yeux jaunes luisant et ses cheveux étaient une sorte d'entremêlement de tentacules, mais elle avait une silhouette de rêve et une poitrine généreuse. Elle sourit doucement à la jeune fille.

– Te voilà donc sortie, ma fille.

La « fille » en question s'indigna.

– Votre fille ?

Ce qui fit froncer les sourcils de la reine.

– Comment ?! Ce n'est pas évident ? Mais alors… Tu es sortie trop tôt !

Elle parut dès lors sur la défensive. La jeune fille décida de lui répondre du tac au tac. Vu sa situation, elle n'avait plus rien à perdre.

– Je suis sortie de moi-même. Je ne voulais pas devenir une de ces créatures qui tue sans regrets. Je ne voulais pas que mon esprit change.

– Nous avions pourtant un arrangement, ma fille.

Elle ne sut que répondre. C'était vrai quelque part.

– Je… Je vous dois la vie… J'oubliais…

– Et c'est ainsi que tu me remercies ?

La jeune fille eut alors un plan. Et ça ne coûtait rien de le tenter.

– Attendez, c'était un réflexe de sortir, je n'y peux rien. Mon esprit luttait. Cela dit, ce n'est pas parce que je suis sortie prématurément que je… Je…

Elle hésitait à le dire. C'était quand même difficilement concevable, mais elle devait faire illusion.

– Que tu… ?

– Que je ne vous suivrai pas… M… Mère.

Le regard de la reine s'illumina alors.

– Je préfère largement cela ! Mais… J'espère que tu ne me mens pas. »

La jeune fille eut soudain le réflexe de se convaincre elle-même qu'elle la suivrai. Elle voulut s'en persuader car elle était sûre que sa nouvellement mère avait un lien psychique avec elle qui permettait de la sonder. Cela parut marcher puisque la reine se rapprocha rapidement de sa progéniture et la serra contre elle.

La fille en fut presque écœurée, mais elle se sentait extrêmement bien dans ses bras et finit par s'abandonner à cette sensation de bien-être, oubliant presque qu'elle voulait échapper au joug de la reine de pique. Malgré l'humanité, la reine des zergs était devenue sa mère. C'était dans ses gênes désormais.


Et donc la prochaine fois un chapitre qui se déroule bien après. Je précise que ce chapitre se déroule peu après la fin de Broodwar.