J'ai décidé de traduire ma fic « At dawn », un projet que j'avais eu dès son écriture mais que je n'avais jamais eu le courage d'entreprendre. Puisque je ne suis pas bilingue, mes fics écrites en anglais pour tenter de m'améliorer sont pleines d'erreurs – et je n'ai jamais pris le temps ou eu le courage de trouver un beta pour les corriger.
Voici la version française, plus agréable à lire, je l'espère.
Quelques informations sur l'histoire :
Univers : Un UA mais à Konoha, avec leur monde et leur société mais en beaucoup plus moderne. Il n'y a plus de ninjas, mais certains personnages (dont les personnalités sont respectées au mieux bien sûr) ont toujours des pouvoirs. Il est inutile de connaître l'univers et/ou l'histoire du manga Naruto pour lire cet UA.
Genre : amitié, drame, mystère, famille en premier lieu. Romance en second lieu.
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A l'aurore
1. Un jour de plus
Sakura Haruno soupira pitoyablement, son regard émeraude tourné vers la fenêtre à sa droite. L'école pouvait parfois être un véritable calvaire ennuyeux, mais elle était enfin en dernière année. Non pas qu'elle n'aimait pas ça, bien au contraire, Sakura adorait étudier et apprendre. Elle n'était pas naturellement un génie, mais elle était brillante, extrêmement curieuse, elle travaillait très dur et elle apprenait vite et bien.
Ses camarades de classe éclatèrent soudain de rire, forçant son attention vers le reste de la salle une nouvelle fois, et elle leva les yeux au ciel. Naruto Uzumaki, le pire étudiant de leur niveau et célèbre clown, avait une nouvelle fois ouvert sa grande bouche.
Sakura ne pouvait pas franchement prétendre qu'il était très difficile d'être la meilleure élève de leur classe avec de tels imbéciles comme compétition.
Quand Mitarashi les autorisa à quitter la salle quelques minutes plus tard, Sakura prit son temps pour rassembler ses affaires et se diriger vers la porte et le couloir bondé. Elle ne tenait vraiment pas à être aspirée par la masse d'adolescents désireuse de quitter les lieux.
« Haruno ? »
Surprise, la jeune fille introvertie leva la tête vers sa droite. Les professeurs lui parlaient très rarement, excepté lorsqu'ils avaient besoin qu'elle donne à la classe les bonnes réponses. Sakura appréciait être la fille muette du fond de la salle que personne ne remarquait et les gens acceptaient généralement de la laisser à sa solitude.
« Madame ? »
Anko Mitarashi, une professeure toute jeune, lui fit signe de s'approcher.
« J'ai remarqué que tu es horriblement distraite ces derniers temps. Un problème ? »
« Hum, non. Non. »
« Vraiment ? »
Sakura fronça les sourcils, passant nerveusement son poids sur son autre pied alors que le regard noir de la jeune femme continuait de la scruter. Elle détestait lorsque les gens la fixaient ainsi, alors elle laissa ses vieux réflexes prendre le dessus et pencha la tête sur le côté pour laisser ses cheveux roses dissimuler en partie son visage.
« Oui. Vraiment. »
« Tu as l'air fatiguée. »
Fermant son poing droit, Sakura secoua la tête. Elle savait qu'elle était pâle et trop maigre, et que les gens l'avaient forcément remarqué durant ces douze années qu'elle avait passées à fréquenter l'Académie. Malgré tout, elle préférerait mourir plutôt qu'ils apprennent sa pitoyable vie familiale.
« J'étudie beaucoup en ce moment. Cette année demande plus de connaissances. »
« Ah. Et personne… n'a essayé de te parler de ton don ou de ton futur ? »
« Mon futur, Madame ? Euh, non. Non. »
Mitarashi plissa les yeux comme pour mieux l'observer, immobile, et puis, soudain, elle hocha la tête brusquement et quitta la salle de classe sans un mot. Sakura resta debout, figée, complètement abasourdie, puis elle secoua la tête et quitta la pièce à son tour.
Voilà. Un merveilleux jour de plus à Konoha. Et par merveilleux elle voulait surtout dire étrange et profondément agaçant.
Elle se rendit à la cafétéria et se dénicha une petite table tout au fond, dans un coin. Assise à cette place tranquille, elle commença à manger son repas, tout en jetant un œil alentour pour s'assurer que personne ne regardait dans sa direction. Manger ne lui prit que quelques minutes, elle n'avait jamais grand-chose à se mettre sous la dent, et une fois qu'elle eut réussi à oublier qu'elle avait toujours faim et cette étrange conversation avec son professeur le plus toqué (et c'était dire quelque chose lorsque le corps enseignant était presque entièrement composé de gens douteux d'après l'humble opinion de Sakura), la jeune fille commença à étudier les adolescents tout autour d'elle, jetant des regards noirs aux plus stupides d'entre eux.
L'Académie n'était pas la seule école de la ville de Konoha, mais elle était la plus grande et la plus prestigieuse. La seule mixte également. L'Ecole aux feuilles n'acceptait que des étudiants normaux, tandis que le Collège du rocher n'accueillait que des enfants doués de pouvoirs spéciaux – comme Sakura.
Une lettre envoyée juste après le cinquième anniversaire de chaque enfant informait les familles de l'école définitive du futur étudiant. La plupart du temps, il s'agissait de l'école que l'un des deux parents avait fréquentée (les dons étant héréditaires). Sakura était une exception, puisque ses deux parents avaient fréquenté l'Ecole aux feuilles. Bien entendu, impossible pour elle de rejoindre cet établissement.
Et en réalité, malgré les dires de certains, l'endroit où l'enfant faisait sa scolarité n'avait guère d'importance. Les matières étaient les mêmes, comme le programme, les règles ou l'organisation. Il était juste de tradition de séparer les générations en trois groupes. L'Académie avait été créée juste après la dernière guerre, en même temps que les Lois. Tout cela pour promouvoir l'unité entre les quelques familles détenant encore des dons et le reste de la population dépourvue de tout pouvoir. Sakura pouvait avouer que ça avait marché, dans les grandes lignes. Plusieurs décennies plus tard, le monde était plus ou moins en paix, et les discriminations ou la peur insensée de la magie n'existaient plus guère.
Enfin, c'était la théorie, mais eh, Sakura aimait assez l'ironie. Après tout, leurs ancêtres auraient sans aucun doute détesté ce qu'ils étaient devenus. Les familles célèbres de leur monde descendaient directement des plus grands ninjas. L'argent, le pouvoir, la reconnaissance, elles avaient souvent tout. Des légendes au sujet de leur passé, de leur mode de vie ou de leurs dons circulaient sans cesse, même à présent que leurs pouvoirs étaient en général bien identifiés.
Ah, en parlant des familles pseudo royales…
L'Académie avait ces dernières années accueilli, aussi stupéfiant que ça paraisse, quasiment tous les héritiers des Anciens Clans, et presque tous se trouvaient être dans la classe de Sakura. Naruto était une fois encore en train de plaisanter bruyamment. Quatre de ses célèbres clones dansaient sur une table, et le sujet original terminait tout juste de former un sceau mystérieux avec ses mains lorsque Monsieur Hatake pénétra dans la cafétéria pour foncer droit sur le blond, sa main droite crépitant d'électricité.
Oh oui, Kakashi Hatake était furieux, il n'y avait aucun doute. Cela faisait bien une semaine que Naruto cherchait à démontrer ses talents. Sakura ignorait pourquoi, mais elle avait dans l'idée que le garçon au regard azur avait souhaité leur montrer à tous qu'il avait enfin réussi à maîtriser certains sceaux sacrés en plus de sa capacité à générer des clones. Ses parents étaient morts dans un accident des années auparavant, l'histoire avait agité les gros titres pendant des semaines, et l'intrépide adolescent s'était retrouvé dernier membre de son clan. Peut-être était-ce en raison de son passé que le jeune homme faisait tout pour se faire remarquer.
Mais comme Naruto l'expliquait couramment à leur professeur, user de ses dons en public n'était pas interdit - tant que ce n'était pas sur d'autres personnes, pour commettre un crime ou avec de mauvaises intentions. Les Lois étaient strictes et bien plus complexes, mais ce résumé se rapprochait assez de la vérité. N'importe qui pouvait se retrouver derrière les barreaux pour le reste de son existence si ces règles se trouvaient enfreintes (et la prison était loin d'être le pire). Le gouvernement, la police et l'Agence ne rigolaient certainement pas lorsqu'il s'agissait des Lois.
Après un rappel à l'ordre on ne peut plus orageux, Naruto se calma, boudeur, et alla s'asseoir près de ses amis de toujours. Et quel étrange et prestigieux groupe ils formaient.
A côté de lui se trouvait Kiba Inuzuka. Grand, jovial, aux cheveux noirs coiffés vers le ciel, il était lui aussi héritier d'une famille célèbre. Le clan Inuzuka n'était pas très grand, ni même riche ou puissant, mais il était avec la famille Nara l'un des plus aimés de la ville. Sympathique et coloré, le clan de Kiba avait le don de pouvoir communiquer avec les animaux. Le garçon n'était d'ailleurs jamais aperçu sans son chien, une bête immense d'un blanc pur nommée Akamaru, que sa mère lui avait offerte juste avant son entrée à l'Académie.
Sakura voyait en Kiba le plus normal de la bande. Plein d'assurance, blaguant sans cesse, aussi loyal que son chien, il était très souvent vu avec Hinata, une amie d'enfance et, avant que celui-ci ne déménage en dehors du pays, avec Shino Aburame.
Hinata Hyuuga était la première héritière du célèbre clan possédant le Byakugan. Les membres de sa famille, nombreux, pouvaient voir tout ce qu'il se passait autour d'eux au-delà des limites de la vision humaine, et ce même à travers la matière solide. De part leur rôle politique et leur richesse, leur dignité et la discipline avec laquelle ils étaient élevés, les Hyuuga possédaient une aura régale que les paparazzi adoraient. Hinata cependant demeurait une exception dans le clan. Timide, introvertie, discrète, elle représentait tout ce qu'un Hyuuga devait normalement dédaigner. On disait même que le père de la jeune fille, Hiashi Hyuuga, un homme d'affaires puissant, l'avait presque déshéritée. Et que Hiashi donnait à Hanabi, sa fille de dix ans, tout ce qu'il n'avait jamais donné à Hinata.
L'argent et le pouvoir ne signifiaient pas le bonheur. Une leçon que Sakura avait apprise en fréquentant l'Académie.
Malgré un début bien difficile, Hinata et son unique cousin germain étaient à présent aussi proches qu'un frère et une sœur. Neji était un vrai Hyuuga, talentueux, noble, toujours composé et fier. Depuis qu'il avait obtenu son diplôme, quelques mois plus tôt, il travaillait avec sa mère dans l'entreprise familiale.
Quelle surprise.
Ces héritiers se montraient très souvent prévisibles.
Sakura remarqua soudain l'heure qui avançait et elle sortit rapidement de sa contemplation pour se rendre à la bibliothèque. Elle avait besoin de trouver deux ou trois livres avant le début de son prochain cours, et elle préférait rester le moins de temps possible dans la cafétéria de toutes manières. Éviter les autres étudiants était aisé, malgré leur grand nombre. Elle fréquentait cet établissement depuis qu'elle avait cinq ans, ses camarades étaient habitués à son silence et elle était certaine que plus personne ne la remarquait vraiment. Même si quelques-uns discutaient avec elle quelques fois, la plupart ne l'aimait guère ou l'évitait.
Sakura était une Première, après tout, l'une des seuls que ce siècle avait accueillis, et les Premiers avaient trop souvent été par le passé instables, cinglés, trop puissants pour leur propre bien ou des traitres, parfois tout ça à la fois. Même si sa condition avait été gardée secrète pendant des années, elle était à présent quasiment de notoriété commune. Soit il y avait eu des fuites, soit les gens avaient fini par le déduire, même si personne ne pouvait en être certain puisqu'elle s'était bien gardée d'utiliser son don en public.
Pourtant, la rumeur suffisait à éloigner les gens d'elle.
Sakura ne pensait vraiment pas être dangereuse, mais elle supposait que leur réaction était naturelle. Et ce n'était pas comme si elle désirait des amis, de toutes façons. Qui se souciait de ça ? D'après son opinion, les gens n'étaient que des monstres hypocrites. Tous étaient des menteurs, égoïstes et creux. Elle pouvait facilement le voir en les observant interagir, tous ces faux sourires, tous ces mots murmurés derrière le dos des uns et des autres. Ils se blessaient, ne voulaient rien de plus que d'être au sommet, au-dessus de leurs congénères, et ils se moquaient bien de ceux qu'ils détruisaient sur leur chemin. Les humains n'étaient pas des créatures aimantes, ils étaient nés pour détruire et haïr.
Alors, oui. Sakura était très bien seule, comme elle l'avait toujours été. Elle n'avait pas besoin d'ami, d'amour, de parents, ou de n'importe quoi d'autre. Elle prenait très bien soin d'elle-même. Dans quelques mois elle aurait son diplôme, et avec des résultats comme les siens elle irait à l'université et obtiendrait un travail qui lui permettrait de partir, d'acheter un endroit pour vivre loin de tout et d'exister sans avoir à s'inquiéter pour le reste de sa vie.
C'était son plan depuis qu'elle était entrée à l'Académie, et Sakura adorait les plans, surtout lorsqu'elle était celle à les faire.
Encore quelques mois, et elle pourrait oublier tous ces adolescents sans jugeote et sans décence.
O
Le feu surprit tout le monde.
Sasuke Uchiha n'était pas du genre à perdre le contrôle ainsi, et les Uchiha n'utilisaient jamais leurs pouvoirs devant tout le monde à moins qu'une urgence ne les y force.
Mais Sasuke Uchiha n'était pas dans son état normal depuis la mort de son adoré frère aîné et de leur bien aimée mère quelques mois auparavant. Ce qu'il s'était passé dans la propriété Uchiha cette nuit-là demeurait un secret (ce qui n'était pas difficile lorsque le chef de la police régulière n'était autre que Fugaku Uchiha, chef du clan et père de Sasuke), mais ça avait fait basculer l'héritier direct de la famille dans une spirale de haine.
Si Sakura devait donner son avis, elle dirait que le jeune homme était très clairement devenu cinglé.
« Uchiha ! Arrête ça tout de suite ! »
Kurenai Yuhi, une femme brune magnifique et leur professeur pour ce cours, plissa ses yeux étranges comme pour mieux étudier son élève - lequel n'éteignit pas les flammes rouge vif qui dansaient au creux de ses mains. Au contraire, il tourna la tête vers elle, activant sa seconde capacité génétique, et braqua ses yeux devenus écarlates sur elle. Yuhi ne se laissa en rien impressionner par le tristement célèbre Sharingan.
« Tout de suite, Uchiha. »
« Ne me donnez pas d'ordre, » siffla t-il, sa voix emplie d'une haine posée qui n'aurait jamais habité le charmant jeune homme avant… avant.
Sakura frissonna et, comme tous les autres dans la salle, retint son souffle. Très rares étaient ceux qui avaient déjà vu un Spécial usé de son don contre autrui – les règles à l'encontre d'un tel crime et les sentences leur étant liées étaient amplement persuasives. Il fallait être âgé de dix-huit ans pour être considéré adulte à Konoha et ainsi être soumis aux Lois sans passer par le tribunal, mais même un mineur pouvait être arrêté, interrogé et exilé. Même un jeune enfant le pouvait. C'était ainsi que la paix était maintenue depuis des décennies.
« Vraiment ? » demanda Yuhi tranquillement, mais ferme. « Et sinon quoi ? »
Même le fan club de l'autrefois très populaire Uchiha ne put retenir ses petits cris horrifiés lorsque le garçon leva les mains pour former une sphère de feu capable de dévorer la femme enceinte face à lui. Yuhi se décala rapidement sur le côté tout en formant d'étranges signes avec ses mains.
Sasuke se figea alors étrangement, pâle, et murmura quelque chose à propos de son frère, Itachi, laissant le feu disparaitre entre ses doigts, le Sharingan s'effacer pour laisser ses yeux retrouver leur couleur noire naturelle. Quelques secondes plus tard, il s'écroula inconscient dans les bras de Naruto, debout près de lui.
« C'est… c'est pas sa faute ! » défendit Uzumaki, paniqué à l'idée des conséquences auxquelles devrait faire face son meilleur ami. « Il est crevé, et il est anéanti ! Il… »
« T'es dingue ? » demanda sèchement l'un de leurs camarades. « Putain, il a essayé de la tuer ! »
« C'est pas ce qu'il a fait ! »
« Ah ouais ? Il aurait pu cramer cet endroit, et nous tous avec ! »
« Tais-toi, c'est pas ce qui est arrivé ! Tu sais rien ! »
« Pourquoi ? Parce que je suis un Commun ? »
« Non ! »
Ce fut à ce moment-là que le conflit commença. Avec curiosité, Sakura les observa tous se hurler dessus. Les Spéciaux contre les Communs, avec quelques-uns perdus et las au milieu. Les Lois pouvaient forcer les gens à se plier aux règles, à vivre ensemble, mais elles ne pouvaient pas effacer la peur, la méfiance, le dédain.
Après tout, comment un Commun pouvait-il se défendre contre quelqu'un comme un Uchiha qui possédait deux capacités, ou un Nara ayant le pouvoir de contrôler les ombres ? Comment un Commun pouvait-il savoir si quelqu'un comme Kurenai Yuhi qui pouvait créer des illusions assez puissantes pour tromper même un Uchiha n'était pas couramment en train de le manipuler ?
Il ne pouvait tout simplement être sûr de rien. Et c'était exactement à cause de cela que les Lois avaient été créées et étaient si strictes. Pour s'assurer que les Spéciaux continueraient à marcher dans les clous, et pour empêcher les Communs de vouloir anéantir les Spéciaux jusqu'à ce qu'il n'en reste plus aucun.
« Fermez-la ! »
Ah, voilà qui était stupéfiant. Aussi, ça suffit à tous les faire taire et à stopper là les pensées de Sakura.
Ino Yamanaka n'usait jamais de ce ton, elle était bien trop parfaite pour élever la voix.
« Qu'est-ce que ça signifie ? » demanda t-elle, tout en les fixant tous de ses yeux bizarres. « Se battre ainsi alors que nous nous connaissons tous depuis des années. Suhei, Naruto était l'un de ceux qui t'ont aidé lorsque tu ne pouvais plus marcher après l'accident de bus. Il a utilisé ses clones pour pousser ton fauteuil, pour porter tes affaires pour te rendre la vie plus facile. Et Naruto, je sais que Sasuke est comme ton frère, mais il n'est plus l'ami que nous avons connu, celui qui jouait avec nous quand nous étions petits ou même celui qui blaguait avec nous tous et faisait son malin l'année dernière. Je suis désolée, mais tu dois faire face à la réalité. Maintenant, je veux que vous regagnez tous vos places et que vous attendiez que nous revenions. »
Elle suivit Yuhi, qu'elle avait soutenue jusque-là pour l'empêcher de tomber, en dehors de la classe, et Kiba et un autre garçon portèrent Uchiha dans l'intention de rejoindre le bureau du directeur.
Sakura s'adossa à sa chaise, contemplant ce qu'il venait de se produire. Ino Yamanaka était la fille la plus populaire de l'Académie (possiblement de la ville entière). Elle était belle, n'avait pas froid aux yeux, toujours parfaite, et elle était dans le top cinq du classement de leur année. Et pour couronner le tout, Ino semblait gentille envers tout le monde. Elle avait toujours un moment pour discuter avec leurs camarades même lorsqu'elle passait du temps avec ses amis, elle aidait les plus jeunes dans les couloirs, elle était polie, athlétique et faisait partie du troisième clan le plus puissant de Konoha.
Même si les Yamanaka n'était à présent plus que sept, ils avaient gardé leur place dans la société grâce à leur héritage incalculable et à leur aura. Ils n'inspiraient pas la crainte comme les Uchiha ni le respect comme les Hyuuga, mais personne n'oserait s'opposer au clan Yamanaka.
Inoichi Yamanaka était à la tête de l'Agence, autrement dit la police secrète. Les agents étaient peu mais entraînés, et ils étaient chargés de garder un œil sur la population et si nécessaire de contrôler les criminels Spéciaux. Personne ne savait clairement ce qu'ils faisaient ou comment ils agissaient, et personne ne demandait. Tout simplement parce que lorsqu'il arrivait quelque chose impliquant des pouvoirs, comme des Communs attaqués par des Spéciaux ou un évènement suspect, les agents réglaient toujours la situation. Leur spécialité était de tous les protéger contre d'éventuels agissements néfastes de Spéciaux à l'encontre de Konoha et de ses habitants, ou de Communs à l'encontre de Spéciaux. Rien n'arrivait dans la ville sans qu'ils le sachent, et ils avaient sans aucun doute stoppé bien des conflits.
Mais la principale raison derrière l'aura si particulière de la famille Yamanaka demeurait en un fait tout simple : chacun savait que les Yamanaka étaient télépathes. Ce que cela impliquait exactement, ça, ça restait un mystère, mais il se murmurait qu'ils pouvaient pénétrer l'esprit d'une personne et la forcer à faire tout ce qu'ils voulaient, voire même qu'ils pouvaient tuer par une simple pensée.
Bien entendu, d'autres comme les Uchiha semblaient bien plus puissants avec des pouvoirs sur le feu et ce mystérieux Sharingan qu'aucun héritier n'avait su vraiment maîtriser depuis bien des générations – mais ces dons étaient destructeurs. La télépathie était subtile, discrète, invisible. Seul un autre télépathe pouvait la déceler. Aussi, tout le monde, sans exception, se méfiait et respectait tout à la fois le clan Yamanaka.
Sakura ignorait si toutes ces rumeurs sur leur compte étaient vraies. Tout ce qu'elle savait, c'était que chaque légende avait un fond de réalité, et c'était bien assez pour la convaincre de rester très loin de cette famille et des autres Anciens Clans, et plus particulièrement de ce fameux groupe composé de leurs héritiers directs.
Uzumaki était fatigant et bruyant, les Hyuuga inquiétants (même si Neji n'était plus à l'école et qu'Hinata semblait presque être quelqu'un avec qui Sakura pourrait être à l'aise), Nara avait été un gâchis de paresse et son ami Akimichi n'avait eu aucun intérêt (tous les deux avaient été dans la même classe que Neji), Yamanaka était un mystère et une compétition agaçante pour la première place dans certaines matières, Inuzuka demeurait un crétin, et enfin Uchiha avait pété un câble au cours des trois derniers mois pour une raison ou une autre. Il n'avait été que rarement vu avec ses amis ces derniers temps lorsqu'il daignait se montrer à l'Académie, et il avait passé son temps à effrayer tout le monde.
Ça ressemblait à une combinaison gagnante pour une loterie cosmique.
Hinata Hyuuga, Neji Hyuuga, Naruto Uzumaki, Shikamaru Nara, Choji Akimichi, Ino Yamanaka, Kiba Inuzuka, Sasuke Uchiha et Shino Aburame.
Et les numéros complémentaires, deux Communs pour plus de diversité : un garçon étrange nommé Rock Lee, et une fille intrépide appelée Tenten, tous les deux de l'âge de Sakura.
Quelles avaient été les statistiques qu'un tel groupe se forme, qu'ils naissent tous au cours de deux courtes années et deviennent amis ?
Ce dernier détail n'était pas allé de soi au départ. Mais les voilà un seul groupe apparemment soudé, rendant certains de leurs parents fiers et heureux à l'idée de nouvelles ententes entre clans, et d'autres adultes fous de rage ou agacés de voir leurs rejetons se lier d'amitié avec les héritiers de leurs ennemis ou concurrents en affaires.
Qu'importe ce que l'Univers avait de prévu pour eux, ça ne pouvait être bon. Sakura doutait fort que leur amitié tienne la route, pas avec autant d'enjeux.
Alors qu'elle quittait l'école, distraite par toutes ces réflexions, Sakura secoua la tête, en colère contre elle-même pour avoir passé autant de temps à y songer. Ils ne reverraient pas Uchiha avant un bon moment, si jamais ils le revoyaient un jour.
Les choses à l'Académie étaient étranges ces derniers temps. Plus que d'ordinaire. Sakura avait remarqué la tension qui était montée ces derniers mois. Ce n'était pas clair, mais le changement était là, dans l'air. Pourquoi sinon la dispute aurait-elle si vite éclatée dans la classe un peu plus tôt ? Ils se connaissaient tous depuis qu'ils avaient cinq ans, et rien n'avait jamais dégénéré ainsi. Oui, Uchiha avait été froid et cruel dernièrement, mais son changement radical d'attitude ne pouvait être la seule raison d'une telle explosion. Quelque chose ne tournait pas rond.
Et ce n'était pas seulement à l'Académie, songea Sakura alors qu'elle traversait la rue pour se rendre à son arrêt de bus. Il y avait définitivement plus de patrouille de police ces derniers temps. Et elle était plutôt certaine que si elle avait été capable de les remarquer, elle aurait détecté des agents surveillant les rues également.
Était-ce lié aux meurtres mystérieux des neuf Uchiha ? La mère et le frère aîné de Sasuke, ainsi que ses oncles et tantes et ses cousins, avaient tous été tués chez eux quelques mois auparavant.
Qu'est-ce que tout cela pouvait bien signifier ?
« Aïe ! »
Sakura sursauta et regarda autour d'elle. Dans sa concentration, elle avait passé son arrêt de bus et continué trop loin, et se retrouvait près d'une ruelle s'engouffrant entre deux immeubles.
« Hey ! Aidez-moi ! Y a quelqu'un ? Aidez-moi ! »
C'était la voix d'un jeune garçon en pleurs. Sakura jeta un coup d'œil autour d'elle mais ne vit personne, alors elle se dirigea vers lui. Apparemment, il avait été en train de faire du skate sur un pont construit à l'aide d'une vieille planche posée dangereusement en équilibre sur deux bennes à ordures. Bien sûr, il était tombé, et bien sûr, il s'était retrouvé par une malchance extraordinaire sous l'une des bennes en acier. Comment il était parvenu à renverser l'un de ces trucs qui pesaient une tonne, ça, c'était un mystère. Elle espérait juste que sa jambe n'était pas cassée.
Quand il la remarqua debout près de lui, ses grands yeux s'illuminèrent de soulagement malgré la douleur.
« Ne t'inquiète pas, je vais t'aider, » informa Sakura d'une voix qui ne transpirait pas son bon gré. Elle était d'ailleurs rauque par manque d'utilisation dans la journée. « Tu t'es blessé ? »
« Oui, » répondit le gamin en reniflant. « Ma jambe, et mon bras. Et j'arrive pas à lever la benne, ça bouge pas du tout ! »
Il essaya une nouvelle fois de se dégager, mais en effet, le truc ne trembla même pas. Sakura savait bien à quel point les nouvelles bennes installées pour justement éviter qu'elles ne soient renversées étaient lourdes. Elles ne pouvaient être soulevées que par les camions poubelles.
« J'ai mal ! »
La ruelle les cachait à la vue de tous, et Sakura avait conscience que même si elle avait eu un téléphone pour appeler les secours, ils n'arriveraient pas avant de longues minutes.
« Maman ! »
« Calme-toi, je vais aller chercher de l'aide. »
« Non, me laisse pas ! J'ai mal ! »
Et merde. Vu l'angle, la jambe était définitivement cassée. Mais la jeune fille n'arrivait pas à voir clairement l'état du gamin, pas avec ce truc sur lui.
C'était bien sa chance. Sakura haïssait cette ville, et haïssait sa vie.
« Calme-toi ! » répéta t-elle un peu plus sèchement en voyant l'enfant paniquer. « Ça va, je reste ! »
C'était peut-être la douleur, peut-être la peur, mais le gamin se mit à gesticuler pour se libérer de la benne. Il essayait clairement de se dégager mais ne faisait que se blesser davantage, et il semblait sourd aux conseils de Sakura.
Celle-ci se mordit la lèvre inférieure, indécise. Personne dans les immeubles n'entendait les cris du petit, et si elle le laissait pour chercher de l'aide, il finirait clairement par s'esquinter davantage. D'une façon ou d'une autre, il fallait qu'elle se décide tout de suite.
C'était maintenant ou jamais.
« Et merde, » souffla t-elle, avant de s'accroupir près de l'enfant et de passer ses mains sous la benne. « Je vais la soulever, d'accord ? A trois – »
« Tu peux pas, c'est beaucoup trop lourd. »
« Un, deux, trois ! »
Elle se leva, entraînant sans effort la benne avec elle. Le garçon poussa un petit cri de souffrance et elle lui ordonna de ne surtout pas bouger, avant de déposer sa charge à côté des pieds du gamin. La remettre debout soulèverait encore plus de questions.
Ses joues se colorèrent lorsqu'elle remarqua le regard écarquillé que le petit posait sur elle.
« Comment t'as fait ça ? »
Sakura haussa les épaules. Elle n'utilisait presque jamais ce don qu'elle ne comprenait pas et qu'elle ne voulait pas. Qui avait besoin de ce genre de force tous les jours, de toutes façons ?
« Ne bouge pas, » répéta t-elle, avant de jeter un œil par-dessus son épaule pour voir si un voisin avait enfin entendu le garçon hurler.
Mais ce qu'elle découvrit à la place serra son cœur douloureusement.
« C'était impressionnant, » commenta calmement Ino Yamanaka en avançant vers eux.
Silencieusement, Sakura se maudit. Elle savait bien pourtant qu'elle ne devait jamais utiliser cet horrible pouvoir, d'autant plus lorsqu'on pouvait la voir. Mais bien sûr sa logique avait voulu qu'elle aide ce gamin stupide !
Quand sa mère avait compris que Sakura était différente, elle avait paniqué. Non pas que sa mère n'avait pas l'habitude de gens extraordinaires, les rues en comportaient assez, mais rien ne l'avait préparée à avoir un bébé spécial. Sakura avait été reconnue comme une Première et enregistrée comme telle très tôt, et les autorités lui avaient expliqué qu'il était primordial qu'elle cache son don et le garde secret – comme c'était son droit, parce que certaines personnes pourraient être effrayées par elle. Les Anciens Clans n'aimaient guère voir apparaître de nouvelles lignées spéciales, et quelques gens peu scrupuleux pourraient essayer de la manipuler ou pire pour obtenir son aide, ce qui n'était pas si rare lorsqu'un Spécial ne disposait pas d'une famille pour l'aider et le protéger.
Alors Sakura avait dissimulé son pouvoir, et d'autant plus depuis que les gens la reconnaissaient comme étant une Première.
Et pour la première fois, ce fait était pleinement confirmé devant deux témoins.
Devant Yamanaka, pas moins.
« Tu aurais pu aider, » reprocha froidement Sakura, tout en essayant de ne surtout pas faire un pas en arrière.
Elle n'avait jamais été à l'aise avec les gens, et encore moins avec cette fille, même si elles avaient toujours été dans la même classe.
« Désolée, tu as été plus rapide. »
Ino était le type de femmes que toute la gent féminine abhorrait. Une peau parfaite, sans défaut, pas trop pâle. De longs cheveux blonds. Un joli sourire et une voix douce et chaude. Grande, mais pas trop grande. Un corps aux formes parfaites. Toujours habillée impeccablement avec des vêtements couteux à la pointe de la mode. Des yeux bleus.
Des yeux bleus foncés sans pupille apparente, les yeux du clan Yamanaka. Ils avaient l'air étrangement sans vie, distant, et pourtant ils semblaient percer tous les secrets de l'âme de Sakura et la laisser nue face au monde entier.
Sakura haïssait ces yeux.
Son inconfort ne passa pas inaperçu, et le regard bleu sans pupille durcit.
« Alors ? Qu'attends-tu ? » demanda Yamanaka plus froidement. « Va t-en. »
N'appréciant pas du tout son ton, Sakura fronça les sourcils en la défiant du regard.
« Pardon ? »
« Un homme arrive. Je vais rester et répondre à ses questions, à moins que tu ne veuilles que les gens demandent comment tu as aidé ce garçon ? »
Sakura ne put cependant rien rétorquer, car elle entendit des pas s'approcher d'eux rapidement. Elle lança un regard noir à l'autre fille et quitta rapidement la ruelle.
Elle eut l'étrange impression que les yeux d'Ino fixèrent son dos jusqu'à ce qu'elle disparaisse, mais elle n'osa pas vérifier. Ce ne fut qu'une fois très loin du centre-ville, face à un immeuble décrépit qu'elle réussit à respirer normalement de nouveau.
Et d'ailleurs, comment Yamanaka s'était-elle retrouvée dans cette ruelle à ce moment-là ? Et c'était quoi, ce ton impérieux ?
Sakura soupira, ouvrit la porte de l'appartement dans lequel elle vivait et fut immédiatement agressée par une odeur qu'elle ne connaissait que trop bien.
Bon. Peut-être pouvait-elle se l'avouer à elle-même.
Peut-être qu'elle était un peu jalouse de ces autres gamins à l'école. Ils avaient de l'argent, un vrai foyer, des parents qui les aimaient. Ils ne savaient sûrement rien de la vraie faim, d'un hiver sans chauffage parce que le peu d'argent qu'une mère sans emploi obtenait des services sociaux de Konoha passait dans d'alcool.
Mais Sakura ne se plaignait pas. Pas vraiment. Elle était plutôt fière de ne plus avoir besoin de prier sa mère pour qu'elle lui achète quelque chose à manger ou de nouvelles chaussures. Elle avait travaillé dur, et elle était à présent la meilleure étudiante de l'Académie, et ça voulait dire qu'elle gagnait chaque année cette bourse que l'établissement accordait aux meilleurs. Théoriquement, l'argent devait servir à payer les études supérieures du gagnant, puisque les deux universités de Konoha étaient onéreuses.
Sakura essayait d'épargner autant qu'elle le pouvait dans ce but. Elle divisait rigoureusement la somme qu'elle recevait chaque année en douze parties, une pour chaque mois de l'année, mais après avoir payé la part du loyer qui restait à la charge de sa mère et qu'elle négligeait très souvent, les quelques factures qui subissaient le même sort, le matériel pour l'école ou les vêtements lorsqu'il y avait vraiment besoin et après avoir mis de côté ce qu'elle pouvait pour son avenir, il ne restait plus grand-chose pour acheter des tickets de bus et de quoi manger un peu chaque jour.
Alors oui, Sakura Haruno était plutôt fière de la manière dont elle s'en sortait.
Elle était introvertie, asociale, brillante, pauvre, extraordinairement forte, seule, mais fière.
Et plutôt douée pour se convaincre que c'était tout ce dont elle avait besoin.
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Ce n'était pas comme si elle avait songé que Sakura se souviendrait comme ça, soudainement.
Ino Yamanaka n'était pas stupide, et elle savait bien qu'il était très peu probable que brusquement, dix ans après, Sakura Haruno se souvienne de ce qu'Ino avait surnommé l'Evènement.
Elle avait été très jeune, inexpérimentée et intriguée, et ça avait mal fini. Si quiconque apprenait ce qu'il s'était passé, elle aurait de très graves ennuis avec les autorités, spécialement avec son père (ce qui était presque la même chose, à vrai dire).
Ce n'était pas parce qu'elle avait été âgée de sept ans qu'elle avait ignoré les Lois et les conséquences de ses actes. Et rien n'était oublié ou pardonné - comme le dictaient leurs règles.
Et les Lois étaient aussi strictes en raison de personnes exactement comme elle.
Beaucoup de gens n'attendaient qu'une erreur de la part du clan Yamanaka, les observant, les surveillant, les scrutant, toujours, sans cesse. Un seul faux pas, et tout se terminerait. Ino le comprenait, bien plus que quiconque le saurait jamais. Elle comprenait la méfiance, la peur qu'ils avaient d'elle et des siens, et elle savait bien à quel point leurs sentiments étaient justifiés.
Elle connaissait ses responsabilités dans ce monde.
Les Yamanaka devaient être irréprochables, parce qu'un mot de trop, un acte impulsif, et tout ce pour quoi ses aïeuls avaient tant travaillé serait perdu. Les gens diraient qu'ils n'étaient que des traitres, des manipulateurs, dangereux, trop imprévisibles, et ils les haïraient, les chasseraient, les exileraient peut-être. Ou bien pire.
Aussi, Ino avait été élevée pour être parfaite. Sous tous les aspects.
Ça ne voulait pas dire qu'elle l'était, à l'intérieur. Ça ne voulait pas dire que ces magnifiques sourires, son calme et son bonheur étaient réels. Ça ne voulait pas dire qu'elle n'avait jamais fait d'erreur.
Ça voulait seulement dire qu'elle était une bonne menteuse.
« Tu es bien silencieuse, » remarqua Choji Akimichi depuis sa place près d'elle, dans la voiture.
Elle haussa les épaules.
« Désolée, je suis fatiguée. »
« Maux de tête ? »
Shikamaru Nara, toujours protecteur derrière son laconisme.
« Ça va, » rassura Ino en levant les yeux au ciel face à ses deux aînés d'un an, et ses meilleurs amis.
« Tu ne pourrais pas rouler un peu plus vite ? »
« Je viens juste d'avoir mon permis, Choji, alors non. »
« Si tu l'avais passé juste après ton dix-huitième anniversaire, on n'aurait pas cette conversation. »
« J'ai hâte que mon anniversaire arrive, » soupira Ino.
« Tu tiens tellement à conduire ? » demanda Choji, son sourire faisant apparaître ses fossettes sur son visage rond. Il n'avait jamais perdu tous ces kilos qu'il avait en trop. « Tu sais que ça ne nous dérange pas de te conduire partout, princesse. »
« Vous me manquez, les gars. C'est bizarre de ne plus vous voir à l'école. »
« Rien ne peut remplacer le trio Ino-Shika-Cho, hein ? »
« Rien, c'est certain. »
« Nous sommes arrivés, » leur indiqua Shikamaru.
Ils descendirent de voiture et marchèrent en silence au milieu du cimetière. La pierre tombale devant laquelle ils s'arrêtèrent était simple. Ino se pencha et déposa quelques graines sur l'herbe, juste devant la stèle. Elle garda sa main au-dessus de ses offrandes, paume vers elles, et très vite les graines s'enfoncèrent dans le sol alors qu'elles poussaient pour devenir de magnifiques petites fleurs aux couleurs pales.
« Excellent choix, » approuva Shikamaru en restant en arrière.
Choji posa sa large main sur l'épaule d'Ino, et la jeune fille apprécia la douceur habituelle de son ami d'enfance.
« Je pense qu'Asuma les aurait beaucoup aimées. »
Ensemble, ils se souvinrent pendant quelques minutes en silence de leur professeur, mentor et ami. Asuma Sarutobi avait été enseignant à l'Académie, et un ami de leurs familles. Il les avait pris tous les trois sous son aile lors de leurs apprentissages, et tous les trois l'avaient adoré.
Ils quittèrent le cimetière quelques minutes plus tard pour rejoindre la voiture, et ne parlèrent que lorsqu'ils reprirent la route.
« Est-ce que tu sais ce qu'il va arriver à Uchiha ? »
« Non, Shika. Je suis restée près de Kurenai. Je voulais être sûre qu'elle et le bébé allaient bien. »
« Et tu es sûre que c'est le cas ? »
« Oui, arrête de t'inquiéter, ou tu vas avoir des rides. »
« Ce serait ennuyeux. »
« Asuma aurait été un super père, » se lamenta Choji, et ses deux amis ne le contredirent aucunement. « Je doute que ce soit une coïncidence, tout ça. Le meurtre des Uchiha, le prétendu accident d'Asuma, la famille Aburame qui s'en va comme ça, soudainement, sans réelle explication il y a deux ans,… »
« Nous ne devrions pas parler de ça. »
« Pourquoi ? » demanda Choji en s'ouvrant un paquet de chips. « Ino, qu'est-ce que t'en penses, toi ? »
« Shikamaru a raison. Tu sais comment c'est. »
« Mais est-ce que tu as appris des choses ? »
« Tu sais comment ça se passe. »
« Je sais, tu ne veux pas parler de toutes ces pensées que tu entends chaque jour, mais c'est différent. »
« J'en sais autant que toi. Quelque chose ne tourne pas rond, et en parler va nous attirer des ennuis. »
« Tu suis beaucoup trop les règles, Ino. »
Ne fais pas attention à lui, projeta Shikamaru, sachant qu'elle ne pouvait faire autrement que d'entendre ce genre de pensées trop fortes.
Les garçons avaient très tôt appris à protéger leurs autres pensées grâce à leur amitié avec Ino et au fait que leurs pères eux aussi se connaissaient depuis leur enfance. Ils n'avaient pas seulement appris pour protéger leur pensées, mais aussi pour protéger Ino d'elles.
C'est juste Choji qui fait son Choji.
Ino ne put s'empêcher de sourire, ce qui ne passa pas inaperçu.
« Hey ! Arrêtez ça ! Les conversations silencieuses ne sont autorisées que lorsque nous sommes tous invités ! »
« Désolée, Cho, » s'amusa Ino.
« Tu as raison à propos d'une chose, Choji. J'ai toujours su que Uchiha était cinglé, mais quelque chose l'a vraiment fait dérailler cette nuit-là. »
« Il n'était pas cinglé, » objecta son ami entre deux chips. « Il a toujours été obsédé par ses dons, ça c'est sûr, mais c'est seulement parce que leur père était toujours sur leur dos et qu'il crevait d'envie de prouver à Itachi qu'il pouvait faire aussi bien que lui, pour qu'il soit fier. »
« Mon père et les agents sont ceux qui doivent comprendre ce qui est arrivés, pas nous. »
« Quand même, on devrait rester prudents et surveiller tout ça. C'est pas clair, tout est bizarre en ce moment. »
« J'espère juste que Sasuke redeviendra celui qu'il était. »
« Tu te rappelles, quand tu avais le béguin pour lui ? » s'amusa Shikamaru platement, essayant de détendre l'atmosphère.
« J'avais douze ans ! Toutes les filles avaient le béguin pour lui ! »
« Merci aux esprits, tu as retrouvé ton bon sens bien avant de succomber toi aussi à ses charmes. »
« Charmant, Cho. Vraiment charmant. »
« Ah, au fait, Cho te cache des choses, Ino. »
« Quoi ? »
« Shikamaru ! »
« Il a une petite-amie. Elle est dans notre cours d'histoire, à la fac. »
« Quoi ? Pourquoi est-ce que tu ne me l'as pas dit dès que je suis entrée dans la voiture ? Pourquoi est-ce que tu ne m'as pas appelée ? Cho, allez, je veux tout savoir ! »
« Shikamaru, merci ! »
« Allez, Cho, je suis ta sœur ou pas ? »
Pitié, qu'elle se trouve un petit-ami, comme ça elle me laissera tranquille.
« J'ai entendu ça ! »
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« Êtes-vous sûr que ça marchera ? »
« Tout se déroule comme prévu depuis des années. Mon plan était parfait dès le départ. Ça marche. »
Le jeune homme eut un rictus à l'attention de son aîné.
« Vous êtes plein d'assurance, n'est-ce pas, Shimura ? »
Shimura Danzo sourit, une expression glacée sur son visage trahit pourtant ses réels sentiments.
« Oh, je suis confiant. Le vieux Sarutobi ne verra rien venir. »
« La perte de son fils pourrait pousser le maire à essayer de trouver un lien entre tous ces évènements. »
« Non, il est trop inquiet pour sa population, comme toujours. Où est le jeune Uchiha ? »
« Entre les mains de l'Agence. Avez-vous trouvé des hôtes potentiels ? »
« Non, pas encore. Les héritiers sont un choix trop risqué, les familles comprendraient beaucoup trop vite. Ton don n'est pas sans effet secondaire, Ekari. Mais sois patient. Je trouverai. »
« Et maintenant ? »
« Maintenant, nous attendons et nous gardons les yeux ouverts. Leur fierté sera leur perte, et cette ville sera mienne. »
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