Dis-moi (OS).

Avant-propos : Je ne fais aucun bénéfice avec ces fictions. Les personnages ne m'appartiennent pas (sauf Jérémy)

Chapitre 1 :

Il flotte. Sur un petit nuage. Depuis qu'il l'a rencontré. Depuis qu'il s'est avancé dans ce bureau. Précédé de Nicole Mercier. Ses yeux. L'ont tout de suite hypnotisé. Sa carrure. Athlétique. A en faire baver tous les chippendales du monde. Son visage joueur. Enfantin. Un peu intimidé. Cette gentillesse. Qui s'en est dégagé. Dès que son regard s'est posé sur lui. Son côté protecteur. S'est éveillé. Comme jamais. Il n'avait été sollicité.

8 ans. Qu'il travaille dans ce commissariat. Et jamais. Au grand jamais. Il n'avait été emporté dans les tourbillons de la passion. Ce pincement au cœur. Sévère. Intense. Qui l'a cloué sur place. Il a déjà été amoureux. Quelques fois. Mais jamais comme ça. 1 mois. Qu'ils se côtoient tous les jours. 1 mois. Qu'il s'éternise dans le bleu. Qu'il sent parfois ailleurs. Comme perdu. Dans ce voile de tristesse. Qu'il aimerait lui enlever. Qu'il aimerait partager. Pour le soutenir.

Mais il ne lui parle pas. Du moins, pas de ça. De tout. De la pluie. Des affaires en cours. De son enfance. De son exil forcé sur Paris. De son pays Basque natal. Mais non. Pas de ça. De ce truc. Qu'il n'arrive pas à identifier. Et qui le bouffe. Ne pas savoir… Il est flic. Les enquêtes, c'est son métier. Déchiffrer les gens. Déceler les mensonges. Mais lui. Pour ce truc-là. Il n'y arrive pas.

Alors il continue de déjeuner avec lui. Tous les midis. De se faire attentionné. Lorsque son sourire apparaît. Mais tellement faux. Parfois. Il se méfie. De ses « ça va ». Alors qu'il sent. Qu'il sait. Que ça ne va pas. Mais il tient... Cette comédie. Juste pour lui. Il se fait l'oreille. De ses rares plaintes. Le corps. Pour le porter. Le cœur. Pour l'aimer. Comme il devrait être aimé.

Il sait. Qu'il est en couple. Maqué. Il ne connait rien. De l'homme qui partage sa vie. Depuis 2 ans déjà. Kévin ne lui en parle pas. Jamais. Sujet tabou. Il l'a senti. Quelques fois. Hésitant. A l'entrainer. Dans une confidence. Une confession. Qu'il n'a jamais réussi à faire.

Et ça lui fait mal. De le voir souffrir. En silence. Toujours le sourire aux lèvres. Comme s'il était heureux. Alors que lui sait. Que ce n'est pas le cas. Que quelque chose ne va pas. Témoin muet. D'un paraître déguisé. D'une vie dissimulée. Combien de fois l'a-t-il incité à parler. Ses « Dis-moi », qu'il lui a adressé des centaines de fois. Et auxquels, la seule et même réponse a raisonné : « Y'a rien à dire ». Il a tant de fois. Voulu lui dire. Ce qu'il ressent. Qu'il l'aime. Qu'il n'en peut plus. De ce voile. Sur ses yeux. Qu'il ferait tout. Pour récolter son vrai sourire. A chaque fois. Qu'ils se voient.

Ca le martèle. A l'intérieur. De le voir. S'éloigner chaque jour un peu plus. De ne pas savoir. Comment le rattraper. Comment le ramener. Dans la sérénité. Dans la vie. La vraie. Qui pourrait s'ouvrir à lui. Alors qu'il ne la connaît pas. Son sang bouillonne. Lorsqu'au détour de regards. De paroles. Il le sent. Perdu. Comme si. Il n'y croyait plus.

Alors il lui prend la main. La serre. En silence. Lorsque ses yeux se perlent. Sans annonce. Et se sèchent. Tout aussi rapidement. Leurs doigts se sont noués. Plus d'une fois. Yann sait. Qu'il lui plait. Mais ne comprend pas. Pourquoi. Il refuse. De tenter. Il le sait avec quelqu'un. Mais l'amour. Ne devrait pas être comme ça. Triste et muet. Ecorché à vif.

Il le voit se lever. Sa main encore dans la sienne. Lui sourit. Pour réchauffer ce froid qui l'habite. Et Kévin. Lui décroche son plus beau sourire. Le vrai. Qui éclaire son visage. Se reflète dans ses yeux. Laisse transparaître. Ses deux magnifiques fossettes. Que Yann caresse. Dès qu'elles apparaissent. Cette peau douce. Que ses doigts ont gravé. Cette chaleur. Qu'il laisse danser. Dans son corps. Au contact du sien. De sa paume contre la sienne.

Yann : T'as fini ?

Kévin : Pour aujourd'hui.

Yann : Tu commences à quelle heure demain ?

Kévin : 9h

Yann : Je passe te chercher ?

Kévin : Dans l'autre rue…

Toujours cette proposition. Qu'il lui fait. Lorsqu'ils embauchent à la même heure. Toujours cette réponse. Invariable. Et ce voile. Qui revient. A chaque fois. Il le voit s'éloigner. Puis se retourner. Revenir vers lui. A grands pas. Il retient son souffle. C'est la première fois. Qu'il fait ça. Se nourrit. De cette main. Qui reprend la sienne. Le contact de ses lèvres. Sur ses doigts. Ce regard azur. Qu'il voit enfin pétiller.

Kévin : Merci. Merci Yann. De tout ce que tu fais pour moi.

Yann : Je fais pas grand-chose.

Kévin : Tu…

Yann : Dis-moi.

Kévin : T'es là. Et c'est tout ce qu'il n'est pas.

Un dernier regard. Et cette fois. Son dos disparait dans la foule.