Un One-Shot très court qui traînait dans mes dossiers depuis pas mal de temps maintenant. Je me suis dit : "Pourquoi ne pas le partager" ?
Il porte encore sur G!Sans et Frisk d'Echotale, quoiqu'ils me semblent un peu différent du AU dans ce que j'ai écrit. Il ne s'y passe rien de particulier, l'on suit juste l'une des soirées de G.
Une nouvelle fois, je remercie yoralim pour Echotale et pour l'inspiration qu'elle m'offre à travers ses dessins ! Allez jeter un petit coup d'œil à son blog tumblr, elle est adorable.
L'averse s'était abattue sur la ville. Le ciel était couvert de nuages gris et menaçants, le vent soufflait et guidait les gouttes de pluie dans sa direction. Les gens se pressaient sous l'abri-bus, serrés les uns contre les autres, ne cherchant qu'à se maintenir au sec. G venait de sortir du supermarché, le bras chargé d'une poche pleine à craquer. Il bougonna et s'empressa de déployer son parapluie. Il était sorti il y a moins d'une trentaine de minutes pour remplir son frigidaire et voilà que la pluie lui était tombée dessus sans crier gare. Il n'avait pas envie de s'attarder davantage à l'extérieur. Il haïssait la pluie.
Avant de repartir, il sortit une cigarette et un briquet. Le squelette appuya le parapluie contre son épaule pour le maintenir en place, entoura de sa main avec précaution la flamme frémissante et fragile qui jaillissait de son briquet afin que celle-ci ne soit éteinte par les gouttes. Il la porta à l'extrémité de sa cigarette qui s'alluma. Il en tira une bouffée qu'il expulsa ensuite vers le ciel. Le monstre s'empressa de reprendre son chemin en direction de son appartement. G marcha au bord de la route. Quelques fois, une voiture surgissait, ses phares aveuglants qui perçaient le fin brouillard causé par cette pluie torrentielle. Les véhicules roulaient prudemment par un temps tel que celui-ci. Il expulsa un autre nuage grisâtre, croisa le bus tant attendu par les personnes agglutinées à l'arrêt près du supermarché.
G s'était habitué à la Surface. C'était un endroit plaisant et vaste. Très vaste. Il avait tant de choses à y découvrir, tant de choses à y apprendre. Malheureusement, il n'aurait pas l'occasion de voyager aussi souvent qu'il le désirait. Il n'avait qu'un travail à mi-temps dans une petite entreprise qui commençait à s'imposer, mais était plutôt bien payé. Il avait le salaire nécessaire pour payer son loyer, ses factures et subvenir à ses besoins. Il n'allait pas s'en plaindre. Il était le seul monstre à s'en être sorti bien vivant. Qui devait-il remercier ? Peut-être devait-il remercier Frisk, cette jeune humaine si singulière dont le sourire envoûtant ne quittait pas son esprit.
G se souvenait encore de ses yeux en amande, de son regard doux et de sa fine silhouette. Il lui arrivait parfois de l'imaginer, lorsqu'il ne parvenait pas à trouver le sommeil, couchée à ses côtés, la tête sur son épaule, les yeux clos et son souffle qui se démarquait du silence pesant de son appartement une fois la nuit tombée. Il imaginait sa silhouette sous les draps, ses cheveux qui glissaient sur l'oreiller, ses mains qui effleuraient les siennes. La vie aurait sûrement été différente si elle avait été présente. Peut-être que tout aurait été plus simple.
Il écrasa son mégot sur le goudron trempé lorsqu'il fut arrivé au niveau de petit pont qui surplombait une mince partie de la banlieue. Il était bordé de belvédères semblables à des tâches blanches. G passait souvent par ce chemin-ci. Une voiture surgit du brouillard, les phares l'éclairèrent vivement. Il alluma une autre cigarette dans un soupir. Les paquets coûtaient chers et le sien serait bientôt vide. Il aurait du prendre le bus au lieu de rentrer à pied, sous cette terrible averse. Quoique, il n'avait pas envie de se retrouver compressé entre des inconnus.
Lorsqu'il fut rentré, il se retrouva face à un séjour froid et plongé dans l'obscurité. D'un geste indolent, G appuya sur l'interrupteur. L'ampoule émit une forte lumière qui dévoila la pièce meublée d'un simple canapé, d'un meuble de télévision et de deux commodes. Il n'avait pas encore eu l'occasion de s'attarder sur la décoration.
Il déposa ses courses sur la table de la cuisine. G ne prit pas la peine de les ranger. Il se déshabilla, entra dans la cabine de douche et actionna l'eau chaude. Elle glissait le long de sa colonne vertébrale, s'écoulait entre les côtes de sa cage thoracique. Elle lui réchauffait le corps. Il n'y resta qu'une dizaine de minutes avant d'aller s'installer dans le canapé, le dos courbé, les coudes sur les genoux. La solitude le suivait chaque jour. Cette solitude n'était faite que de souvenirs, parfois de regrets. Les souvenirs de Frisk. S'il en avait eu la possibilité, il aurait gardé une photographie d'elle et l'aurait laissé ici, juste ici, posée sur l'un des meubles du salon. Ainsi, lorsqu'il entrerait, elle serait là pour l'accueillir.
« J'ai oublié de t'emmener là-bas hier, dit-elle. On se lève maintenant et on a le temps d'y aller. Tu verras, ça va te plaire. »
Il tira une bouffée de sa cigarette, expulsa une fumée qui se dispersa au contact de l'air matinal. Une brise entrait par la fenêtre semi-ouverte de la chambre et venait caresser la peau de la jeune femme dont le bas du corps était enveloppé sous les draps. Elle avait la tête posée sur son épaule et fixait le plafond d'un air distrait. Quelques fois, son regard se portait sur la fumée grisâtre qui s'élevait. G vint déposer les cendres de sa cigarette dans le cendrier posé sur la table de chevet. Lorsqu'elle remua pour trouver une position confortable, il joua avec ses cheveux.
« J'ai pas envie de bouger aujourd'hui, Frisk, répondit-il. On a qu'à rester ici, à ne rien faire. C'est mieux, non ?
- Eteins-moi cette cigarette et on y va.
- Laisse-moi la finir, au moins. »
Elle redressa la tête et du bout des doigts, chercha à prendre la cigarette.
« Qu'est-ce que tu fais ?
- Je t'aide à la terminer. »
Il rit. Des cendres froides se déposèrent sur l'épaule de la jeune femme. Il les retira d'un simple mouvement de la main.
« Toi, terminer une cigarette ? Tu ne fumes pas. »
Elle revint dans sa position précédente.
« C'est bien ça le problème. »
Frisk se couvrit du drap. Il lui caressa l'épaule. Elle se mit sur le flanc, ferma les yeux. G la laissa se reposer. Cela l'arrangeait, d'une certaine manière. Il écrasa le mégot de sa cigarette dans le cendrier, avant de reporter son attention sur la jeune femme qui se laissait doucement happer par la fatigue. Son souffle se fit plus lent, tout en restant régulier. Il était inaudible, à moins de se concentrer sur celui-ci. Le squelette contempla l'extérieur. Le ciel se teintait d'un bel orangé, le soleil se dessinait à peine à l'horizon et les oiseaux commençaient à s'égosiller sur les toits des immeubles, aux fenêtres des appartements. Le bruit des voitures qui passaient sur la route en contre-bas couvraient parfois leurs chants. La brise se réchauffait. C'était agréable. A son tour, il se laissa guider par le sommeil.
Un son strident retentit dans la chambre. G fut tiré de sa torpeur. Le poste fixe noir sonnait. Quelqu'un l'appelait, mais qui cela pouvait-il être ? A une telle heure, son patron sûrement. La jeune femme qui était blottie contre lui se recroquevilla, gênée par le bruit. Elle fronça les sourcils, poussa une plainte sourde. Il laissa le téléphone sonner trois fois avant d'embrasser sa compagne sur le front pour s'excuser, puis de se redresser pour décrocher.
Ce fut au même moment qu'il s'éveilla réellement. Il retrouva le silence pesant du séjour ainsi que la solitude. Un salon qui lui paraissait immense, alors qu'il n'en était rien. Il s'était endormi dans son canapé. Combien de temps avait-il dormi ? G se leva, s'étira et alla vérifier l'horloge. Une trentaine de minutes seulement. L'averse avait redoublé et frappait contre les carreaux des fenêtres. Il tira les rideaux, se rendit dans la cuisine pour ranger les courses qu'il avait délaissé. Rien de plus, rien de moins.
