C'était sa faille, sa blessure que je décelais dans la fragilité de son sourire - Tatiana de Rosnay
Je m'étais sentis vide ce soir là. Je ne pensais plus qu'à une chose. Granger.
Je ne savais pas ce qu'il m'avait pris, je l'avais vu s'avancer vers moi et le fait qu'elle se soit arrêté m'avait frustré bien plus que dû.
Je m'étais senti obligé de comblé le vide qu'elle avait instauré.
Je m'étais senti obligé de tout faire pour sentir ses lèvres, de sentir sa peau.
Nous nous étions éloignés et nous courrions à en perdre l'haleine vers nos dortoirs respectifs espérant échapper au maudit concierge qui avait brisé le moment.
Je me retrouvais donc dans mon dortoir, allongé dans mon lit, encore habillé, mouillé, les bras sous la tête. Je fixais mon plafond inlassablement. A mieux y repenser je ne m'étais jamais intéressé à Granger.
Nous nous étions rapprochés durant cette année, la dernière d'une longue série où je l'avais longtemps persécuté. J'avais appris à la connaître un peu mieux et depuis mes moqueries étaient basées sur des faits réels. Je la connaissais maintenant, bien plus qu'elle ne l'imaginait.
Mais jamais je ne m'étais épris d'elle, je n'avais jamais eu cette idée saugrenue.
Pourtant il fallait l'avouer que lorsque nous nous étions embrassés, une sorte de liquide chaud s'était rapidement répandu dans tout mon être. J'étais vide ce soir là et je ne m'étais même pas rendu compte que j'étais aussi creux. L'embrasser avait tout changer, elle avait su combler ce vide que je n'avais même pas eu le temps de connaître consciemment.
Je ne savais pas d'où était sortit la dernière phrase que je lui avais dit.
Avais-je vraiment besoin d'elle ?
Certainement. J'avais su l'apprécier nous étions maintenant amis avant tout. Sa révélation m'avait chamboulé plus qu'autre chose. J'avais sentis mes entrailles se tordre provoquant une douce douleur. Sa déclaration m'avait fait plaisir, je ne pouvais le nier. Je ne savais pas trop quoi en penser mais Merlin que je m'étais sentis bien à l'entente de ses mots...
Je ne pu travailler sur le sujet car déjà je me faisais emporté dans les bras de Morphée.
Le lendemain je m'étais réveillé de bonne humeur. Le soleil d'un vendredi joyeux s'était levé, le dernier levé de la semaine que je verrai. Je sortis rapidement de mon lit sans faire de bruits. Les autres dormaient encore.
Je m'étais préparé en prenant tout mon temps. Lorsque ce fut fait, je sortis du dortoir et de la salle commune.
J'arpentais les couloirs, nous n'étions qu'une dizaine à être debout de si tôt -ce qui n'était pas pour me déplaire-. La journée se passa relativement bien, ce n'est qu'au soir, lors du repas que tout bascula. Je parlais à Blaise et mon regard se dévia sur l'assemblé que formait la Grande Salle. Je ne ratai pas la table des Gryffondor où une jeune fille me regardait.
Granger.
Dans un premier temps, la seule pensée qui me vint à l'esprit fut de la comparer à une petite psychopathe. Une, deux puis trois secondes passèrent et elle ne baissait toujours pas le regard. Nous nous sommes donc affronter tels deux gamins.
Ce n'est que lorsque Théodore, qui était assis en face de moi, me lança un verre d'eau à la figure que je me repris. Au loin, je la voyais éclater de rire. J'allais durement riposter lorsque Théo me lança un sors pour me sécher.
«C'était juste pour te signaler que Blaise te parle d'une chose importante depuis bientôt cinq minutes.» avait-il déclaré pour unique défense. Je lui lançai un regard noir et m'excusai auprès de mon ami qui reprit avec réticence son histoire. Toujours est-il que l'image de Granger s'était imprégné dans mon esprit. Il fallait que je la vois seul à seul.
Le soir venu, je bravi quelques interdits et enfreint quelques règles pour me rendre en douce à la tour d'Astronomie, témoin involontaire de ma récente et étrange expérience.
Le couvre feu était déjà dépassé et certes j'étais Préfet-en-Chef mais mes soirées de ronde n'avaient pas lieu le vendredi soir.
Je n'avais en aucun cas transmis à Granger un quelconque message, je priai donc pour que par pur hasard elle ait eu la même idée que moi. Cependant, à quelque pas seulement de la porte qui allait me mener au sommet de la tour, je m'arrêtai.
Et si elle n'était définitivement pas là ? Pourquoi serait-elle là d'ailleurs, je n'avais rien fait pour et c'était vraiment étrange mais seul mon instinct m'avait persuadé de ne pas me poser de questions et de venir.
Je pesais le pour et le contre lorsque soudain je cru entendre des bruits de pas dans l'escalier de la tour.
Était-ce mon esprit qui me jouait des tours pour me convaincre ou...
J'avais de tout de façon, maintenant, une bonne excuse pour justifier ma présence si jamais on me prenait sur les faits. Je poussai donc la porte et montai les marches unes à unes.
La porte menant à la salle de cours était entrouverte, je la poussai donc sans difficulté et sans bruit. Dans un coin se tenait debout une silhouette. Je fis quelques pas avant que la personne ne se décide à se retourner. Granger. Merlin était avec moi, j'en était parfaitement sûr à cet instant là.
« – Malefoy, dit-elle en guise de salut.
– Granger.
– Nous avons eu apparemment la même idée.
– Apparemment oui.
– Que fais-tu ici ?
– Je voulais te parler. »
Nous nous sommes assis et pourtant nous n'avons pas prononcé ne serait-ce qu'un mot.
Tout avait déjà était dit, ou peut-être nos expressions parlaient à notre place.
Elle avait le regard porté vers la lune maintenant bien distincte comparée à hier soir. Elle semblait reposée, détendue. Je voyais qu'un sourire avait élu domicile à la commissure de ses lèvres. Un sourire aussi fragile qu'une fleur sous un vent fort.
Que voulait dire ce sourire ? Était-ce moi qui l'avais provoqué ? Je ne savais pas et je trouvais l'idée de me murer dans le silence bien plus alléchante que de le lui demander.
Je n'avais pas trop bien compris sa réaction la veille : alors que d'autres auraient été stressé à l'idée de se rendre compte qu'ils étaient amoureux de moi, elle l'avait plutôt bien pris. Que devais-je comprendre à ça ? Après plusieurs réflexion je me suis dit que ce devait être le fait de pouvoir mettre un nom sur ses maux qui l'avait rendu si heureuse.
A bien y repenser, était-elle heureuse en ce moment ? Son sourire était-il vrai ?
La forme exquise que prenait ses lèvres était envoûtante je devais l'avouer. Pourtant comment pouvait-elle être heureuse si elle ne savait pas si moi je l'aimais ? Elle était dans l'incertitude et elle se perdait dans la contemplation du ciel un sourire accroché aux lèvres.
Elle avait sûrement peur je suppose. J'aurai eu peur. Et j'avais, en effet, peur.
Était-ce un masque ou appréciait-elle vraiment ce moment à deux ? À me poser autant de question j'oubliais l'heure, j'oubliais l'endroit. Puis comme une évidence tout m'échappait.
Les interrogations s'estompèrent. Je n'avais cessé de la regarder. Depuis le début. J'avais vu lorsqu'elle avait fermé ses paupières tout doucement et tourner la tête vers moi sans même me regarder. Elle avait ré-ouvert ses yeux et je m'étais perdu à mon tour dans ses iris chocolatées comme elle s'était perdue dans le ciel étoilé.
Nous étions assis à même le sol depuis quoi, une minute ? Une heure ? Ou peut-être deux ... Je ne le savais pas et à vrai dire je m'en fichais un peu.
Tout était calme et doux à cet instant. Les criquets étaient sans doute les seuls êtres bruyants des alentours. J'entendais cependant les hululement des hiboux et des chouettes. Mais qu'importait, à cet instant la seule chose digne d'intérêt était assise près de moi.
Je ne lui avais pas souris, je ne m'étais pas rendu compte de l'immobilité de mon visage et de la dureté de mes traits.
Voyait-elle seulement à quel point j'étais obnubilé par elle ? Je ne pense pas.
Elle refit un sourire, triste cette fois ci. Et j'ai tout de suite compris qu'elle avait mal interprété mon mutisme.
A travers cet unique sourire je vis sa blessure, la faille qu'elle essayait sans doute de cacher.
Elle esquissa un mouvement et ma seule crainte était qu'elle ne s'en aille et c'est ce qui allait arriver. Elle pris appuie sur ses jambes mais je ne lui laissa pas le temps de partir. Je ne voulais pas qu'elle ait un sourire tel que celui-ci lorsqu'elle allait me quitter, ce qui allait de toute façon forcément arriver.
Je la pris par le bras et elle sut qu'elle devait rester. Les mots ne suffisaient plus. Il n'y avait rien pour pouvoir retranscrire ce que je ressentais à cet instant. Peut-être était-ce la peur de la perdre. La peur de l'inconnue. La peur de la voir disparaître.
Je m'avançais doucement vers elle, je craignais qu'elle ne s'échappe. Je m'étais vu avoir une douceur nouvelle. Nous nous faisions face et je vins prendre son menton entre mes doigts puis le dos de ma main vint caresser sa joue gauche.
Et, enfin, je me penchai vers son visage. J'eus le temps de voir ses yeux se fermer et je vins clore la décision muette. Mes yeux se fermèrent à leur tour.
Je ne saurais dire si j'avais déjà vécu ses émotions là.
Hier encore c'était la surprise de me rendre compte que cette fille pouvait créer ce genre de sensations. Aujourd'hui je venais de moi même sceller nos deux êtres que tout opposait.
Je me sentais bien là, près d'elle, avec pour seule spectatrice la lune qui avait l'air de nous regarder d'un air bienveillant. Vous savez, je ne pense pas qu'il y ait du bonheur, juste des moments de pause entre chaque malheur. Je vivais en ce moment la pause, une pause que je ne comprenais pas, qui n'avait ni queue ni tête. Une pause qui n'avait aucune raison d'être mais qui était.
Je perdais peu à peu la tête ...
