Les flaques d'eau
Par la Halfeline
Atelier de la Lanterne Fringante de décembre 2007
Sur le personnage imposé : Dr House
Avec le thème imposé : Les flaques d'eau
Tendu sur le pommeau de sa canne, le bleu de l'œil morne, le zygomatique dubitatif, House écoutait depuis plus d'une minute la rombière bien sapée lui expliquer en détails de quelle manière son rejeton de six ans devait probablement ses vomissements au nombre d'heures qu'il passait au parc à patauger joyeusement dans la fange avec ses petits semblables morveux, ce par tous les temps. Evidemment, la nounou d'Afrique Noire n'avait aucune idée des précautions à adopter dûment pour les sorties en extérieur lorsqu'il pleuvait comme vache qui pisse, et que les nids-de-poule du square prenaient des allures d'abreuvoirs à cochons : de là où elle venait, on ne savait certainement rien du mauvais temps !
- Et Dieu sait ce qu'on peut s'attendre à trouver dans ces bauges où on le laisse se vautrer ! ajouta-t-elle en frémissant.
- Dans le square moyen, je pencherais effectivement pour quelque chose comme un porridge d'excréments canins, de restes de pigeons crevés et, avec un peu de chance, de résidus de préservatifs de la veille au soir mais ne vous en faites pas Madame heum… Shaller : les traitements progressent à pas de géant de nos jours.
House profita du silence de mort qui s'ensuivit pour examiner le petit bonhomme, qui gambillait sur la table d'examen avec un air assez absent. Enfin un qui semblait réaliser la perte de temps que représentait cette énième consultation de la journée… Pourquoi fallait-il que les patients soient par nature des êtres destinés à évoluer dans le milieu clos et aqueux d'un verre d'eau où se noyer ? Ou d'une flaque d'eau, en l'occurrence… Docteur ! J'ai établi mon diagnostic mais, par pitié, dites-moi ce qu'il a ! C'était un peu comme écouter le rapport d'une vingtaine de Camerons par jours… en plus désagréables à regarder la plupart du temps, par-dessus le marché. Mais toujours… toujours… cette noyade perpétuelle dans une flaque d'eau, qui semblait leur vision toute particulière de l'envie de vivre.
- Alors, Bobby, dis-moi si c'est mou quand tu vas aux toilettes ou si tu fais des cacas bien fermes de champion.
- J'fais des cacas d'champion, moi ! lança le môme.
- Robert ! le reprit la mère sur un ton embarrassé.
- Ca c'est très bien, Bobby, n'oublie jamais que c'est la clé de la réussite. Bon, tu ne dois pas avoir grand-chose d'inquiétant, mais je vais quand même te faire une petite prise de sang histoire d'assurer à ta maman que tu n'as pas de staphylocoques dorés, d'accord ?
House claudiqua jusqu'à l'armoire pour y chercher une seringue stérile, qu'il déballa.
- Y a des bestioles dorées dans mon vomi ?
- Exactement. Mais elles sont toutes petites, alors j'aime autant te dire qu'il faudra dire à tes petits copains de bien se pencher s'ils veulent les apercevoir !
Le médecin se retourna, et baissa des yeux, où l'affliction transparaissait à peine, sur la nouvelle flaque qui venait de se former en-bas de la table d'examen. Dessus, le moutard avait cessé de gambillé, le regard aux abois braqué sur l'aiguille.
House soupira.
- Un instant, je vous prie.
Il claudiqua jusqu'au labo, où il était certain de trouver la personne appropriée à la situation.
- Cameron ! Il me faudrait votre diagnostic pour le patient en salle 236. Si vous avez besoin de moi, faites comme si de rien était, parce qu'il est 16h57 et que je me rentre !
