Coucou ! Alors voilà, je suis une nouvelle sur le site des FanFictions.
J'adore en lire des tonnes, en écrire aussi, mais je n'en ai encore jamais publié.
C'est donc ma toute première.. Une romance Remus/O.C. !
Je sais que dans ce 1er chapitre, on ne verra pas beaucoup (voire pas du tout) Remus, mais c'est juste histoire de vous faire faire connaissance avec Loredana, ma petite héroïne ^_^
Si vous voyez des ressemblances entre elle & Becky Bloomwood.. C'est normal ! Je voulais faire une sorte de crossover entre les deux, car j'adore le personnage de Sophie Kinsella.
Bref, bonne lecture, et n'hésitez surtout pas à commenter, me laisser vos impressions, etc. !

:: A girl can never have too many shoes ::

J'ai marché des kilomètres,
J'ai usé mes vieilles chaussettes
J'me suis fait des ampoules
Maintenant je marche comme une poule !
Puis, enfin, je les ai vues,
Là, au détour d'une rue !
C'était elles, j'en étais sûre...
Mes nouvelles, mes belles chaussures !
Cristine, Les Chaussures

Vous pensiez que les Serdaigles étaient des créatures ennuyeuses et mornes, toujours fourrés dans leurs gros bouquins poussiéreux, sans aucun sens de l'humour ? Vous aviez raison. Enfin, pour la plupart d'entre eux, en tout cas. Franchement, je me demande comment, à dix-sept ans, ils peuvent être aussi adultes. Je veux dire, je sais, on est censés être majeurs, mais notre vie commence seulement, non ? Maintenant, on a enfin l'âge légal pour aller danser dans les boîtes magiques à la mode, ou pour boire de l'alcool dans les pubs. Pas que ça change quoi que ce soit, bien sûr – comme si j'avais attendu d'avoir dix-sept ans pour danser en boîte. Mais les Serdaigles ! Allez leur parler d'une soirée pyjama entre filles dans le dortoir, avec un bon verre de magicosmopolitain et des jeux débiles comme « action-vérité » ! Je n'ose même pas imaginer leur tête, emplie d'un mélange d'horreur, de dégoût et de peur, comme si c'était contagieux. Non, ils ne poseraient même pas l'orteil à dix mètres de la frontière entre ce qui est autorisé et ce qui ne l'est pas « autorisé – interdit ». Et maintenant qu'ils ont l'âge d'enfin s'éclater, pensez-vous qu'ils en profitent ? Que nenni ! Enfin, si, ils s'éclatent, il n'y a pas à dire : depuis la moitié de leur sixième année ils s'entraînent déjà pour leurs Aspics. Le pire ? Leurs joues toutes roses d'excitation quand ils vous parlent d'un de ces sorts barbants à mourir et totalement inutile qu'ils réussissent enfin à maîtriser – par contre, demandez-leur s'ils connaissent un seul sort pour empêcher le rouge à lèvres de déraper sur les dents. Là, ils sèchent. Mais bon sang, on est jeunes ! C'est maintenant qu'il faut en profiter !

Je me demande ce que moi-même je fiche à Serdaigle. C'est un peu comme le jour et la nuit. Je me serais assez bien vue à Poufsouffle, plutôt. Hum, non, je n'ai pas leur patience. À Gryffondor, alors ? Non, à vrai dire, ils me font un peu peur, tous, ils ont cet air de détermination dans les yeux comme si le monde leur appartenait, et ils sont si susceptibles ! Ils montent sur leurs grands chevaux pour un oui ou pour un non. Quant à Serpentard, et bien… Ils me font encore plus peur, avec leur air sournois et mauvais.

Je crois qu'en fait, j'ai plus atterri à Serdaigle en désespoir de cause que pour une autre raison.

Il doit pourtant bien y avoir du Serdaigle en moi. Cependant, pas dans la façon traditionnelle dont les gens se le représentent. C'est vrai, je suis assez forte en Enchantements et en Métamorphose, mais je trouve ça plus marrant de s'en servir pour des choses vraiment utiles et fun : j'adore les sortilèges très girly du magazine B*Witched, par exemple. Je les réussis tous du premier coup !

Mais ça, ne le répétez à personne. Car, bon, maintenant qu'on se connaît un peu, je peux vous l'avouer. De toute façon vous vous en rendrez bien vite compte par vous-même : j'ai une réputation de parfaite petite Serdaigle. Calme, discrète, intelligente et travailleuse. Et cette réputation, j'y tiens ! C'est la seule façon d'être tranquille, dans cette fichue école.

J'ai encore un secret pour vous : Poudlard m'énerve ! Le comble, pour une Serdaigle ! Ce n'est pas ma faute. J'ai bien essayé de m'y faire, mais je ne m'y sens pas à ma place. J'aime bien critiquer les gens avec ma meilleure amie, oui, mais ici… Ici, c'est vraiment abusé. J'ai l'impression que c'est un sport national chez certaines personnes. Les réputations vont à toute vitesse, à plus forte raison quand vous êtes une fille. Quand vous êtes populaire, les rumeurs les plus folles courent à votre sujet : « Elle n'a pas grossi, elle ? » « Si, mais il paraît qu'elle est enceinte de Dumbledore… » « Elle sort avec lui ? Mais je croyais qu'elle sortait avec le gars de sa classe ! » « C'est une pute, tu ne le savais pas encore ? ». Quand vous n'êtes pas populaire, c'est vacherie sur vacherie. Bel exemple : ce gars de Serpentard, Rogue. J'admets qu'il a l'air un peu louche, et fouineur, mais de là à le traiter de la sorte…

Non, croyez-moi, ici, il ne vaut mieux pas faire de vagues. Alors je garde pour moi mes amusements peu orthodoxes pour une fille de ma maison (les vêtements, les chaussures, les magazines, les garçons, l'alcool, la fête et les boîtes de nuit) et je feins de l'intérêt pour ce qui me fait intérieurement bailler (le nouveau décret du Ministre de la Magie, le devoir d'études des runes à rendre pour dans deux mois, trois semaines et six jours, les examens qui approchent à grands pas, après tout, on est presqu'en octobre, et la rumeur selon laquelle Evy Leagues, de Poufsouffle, sortirait avec un Gryffondor de deux ans en moins qu'elle).

C'est d'ailleurs de cette dernière rumeur que sont en train de bavarder mes camarades de classe, lors du souper. Je pousse de petits « Nooon ? », « Ah bon ? » et « C'est pas vrai » une fois de temps en temps, pour avoir la paix, tout en mangeant mes petits pois et en me demandant s'ils ont déjà reçu les nouvelles bottes à talon haut de Wendy Weller, à MagiClothes, la super petite boutique de fringues ultra tendances que j'ai repérée au terme de longues heures de pérégrinations à Pré-au-Lard.

Comprenez bien, je suis une fille, c'est vrai. J'aime bien les ragots, connaître les derniers potins. Avec ma meilleure amie, on peut passer des heures à analyser le comportement d'une personne lorsqu'elle est face à quelqu'un dont nous soupçonnons qu'elle est amoureuse. Mais ça reste innocent. Ça reste gentil. Jamais nous ne dirions ni ferions quoi que ce soit pour les mettre mal à l'aise. Mais les petites piques que se lancent les élèves entre eux, les moqueries, tout ça… Non, vraiment, je ne cautionne pas.

-Loredana ? fait une voix familière à l'autre bout de la table.

Je lève les yeux vers Giussy, ma meilleure amie, coincée entre deux assommants Serdaigles de son année (elle est en 6ème).

-Quand tu auras fini de manger, tu pourras, euhm… Jeter un œil à mon dernier devoir d'Enchantements ? Je voudrais ton avis.

Je lui lance un sourire radieux.

-Je termine, et je te rejoins. Dans la classe du troisième étage, comme d'habitude ?

-Ca me semble parfait, répond-elle.

Elle me sourit et se lève de table. Je me hâte de terminer mon repas et je m'excuse auprès de mes camarades pour aller retrouver Giussy.

« Jeter un œil à mon dernier devoir » est notre nom de code pour « se retrouver pour discuter chiffons et maquillage ». Comme ça on garde la face devant nos camarades de dortoir et on se paie une franche soirée de rigolade. Croyez-moi, je vais beaucoup lui manquer, à Giussy, quand je serai partie.

J'arrive dans la salle de classe que nous avons l'habitude d'occuper pour nos soirées filles. Dans la Salle Commune, il y a toujours du mouvement, on ne peut pas parler librement, et tout le monde vous regarde de travers si vous osez sortir le B*witched ou un autre magazine du genre.

-Alors ? je demande avec avidité une fois que j'ai soigneusement refermé la porte derrière moi.

-J'y suis presque, et toi ?

-Presque aussi !

Nous poussons des cris hystériques. Notre dernière trouvaille ? Maîtriser le sort d'invisibilité afin de pouvoir sortir en douce de Poudlard et faire la fête dans les boîtes toutes les nuits. L'an passé, je le faisais avec mon autre grande amie, Stella, de Gryffondor, et des amies à elle, mais elles ont quitté l'école et le passage secret que nous empruntions a été rebouché. Il nous faut donc développer d'autres techniques. On a réussi la dernière fois, grâce à une potion, mais c'est vraiment trop dangereux. On a dû aller piquer des ingrédients dans la réserve personnelle du prof, et c'était moins une pour qu'il nous attrape.

-Montre voir ! me lance Giussy.

Je m'assieds alors en position du lotus, les mains jointes à hauteur de la poitrine, la baguette magique bien droite, et je fais le vide dans mon esprit. Quand je me sens prête, au bout de quelques minutes, je lance la formule : « Invisibilis ! ». Une pluie de paillettes mauves jaillit du bout de ma baguette et se désintègre avant d'avoir atteint le sol.

Sous le regard étonné et envieux de Giussy, je me sens disparaître petit à petit. Mon corps est ankylosé et ma peau est de plus en plus pâle, et bientôt il ne reste de moi que de vagues couleurs délavées, de moins en moins décelables. Malheureusement, cela ne dure que quelques instants et bientôt je reprends ma forme normale.

Je reste assise encore quelques instants, pantelante. Le souci, avec ce truc, c'est que ça me vide de mon énergie et que ça ne dure jamais plus de quelques secondes. Il faut encore que je m'entraîne mais j'ai peur de ne pas y parvenir avant la fin de l'année scolaire et là, à quoi ça servira, de me rendre invisible pour sortir en douce du collège, puisque je l'aurais quitté ?

-A toi, dis-je à Giussy en me relevant et en allant m'appuyer sur le bord de la table.

-Oh, Lola, je suis loin de le faire aussi bien que toi ! s'exclame-t-elle, chagrine. Dire que je me croyais si bien partie !

-Mais non, ne dis pas ça ! Je suis sûre que tu le fais très bien. N'oublie pas non plus que j'ai un an de plus que toi, et que c'est de la très haute magie ! Allez, vas-y ! C'est en t'entraînant que tu y arriveras le mieux !

Après quelques secondes d'hésitation, Giussy hoche la tête et s'assied dans la même position que moi. Elle prend bien son temps pour vider son esprit et prononce la formule. Pendant quelques secondes, il ne se passe rien, puis, soudain, je ne vois plus du tout son visage ni ses mains : seuls semblent flotter ses yeux et ses vêtements. C'est assez effrayant, je dois dire… et très drôle aussi. J'essaie de toutes mes forces de ne pas me moquer mais, au moment où je me mords les lèvres pour réfréner mon sourire, Giussy ouvre un œil. Voyant mon expression, elle a envie de rire aussi. Alors elle hoquète et c'est encore plus drôle car, sous les effets de son rire, sa peau réapparaît puis disparaît de nouveau. Je ne peux plus me retenir et j'éclate de rire. Elle redevient totalement visible et rigole avec moi.

-C'est… Si… Nul ? réussit-elle à articuler.

-Non ! Non, Giussy… je t'assure… tu te débrouilles… à merveille ! je fais en m'essuyant les yeux, pleins de larmes. C'est juste… très surprenant ! Il ne restait que tes vêtements et tes yeux ! Elle rigole encore plus fort et mon fou-rire me reprend. C'est ça qui est génial avec Giussy. Elle n'arrête pas de rire et il est vraiment super communicatif !

Nous parvenons enfin à nous calmer et Giussy s'appuie au pied d'une chaise pour récupérer.

-Il va vraiment falloir travailler ça, dit-elle. À quoi ça sert de devenir invisibles si après on est crevées ? Comment veux-tu qu'on aille danser toute la nuit ?

-Ca viendra, avec le temps. Je suis de moins en moins fatiguée, moi, à force de le faire.

-Moi aussi, heureusement. Oh, j'ai hâte !

-Moi aussi ! Ca fait combien de temps qu'on n'a plus fait la fête ?

-Trop longtemps. Elle m'énerve, cette école. On est jeunes, on est supposés profiter de nos belles années, non ? Après Poudlard c'est tout de suite l'université, ou le travail. Alors quoi ? C'est quand on aura quarante ans et une flopée de mômes aux basques qu'on ira s'amuser jusqu'aux petites heures ?

-Je suis tout à fait d'accord avec toi ! Tous les ans, j'envoie un petit mot anonyme à Dumbledore pour lui suggérer l'idée de faire un bal. Mais tout ce qu'il y a c'est ce stupide banquet d'Halloween où on ne fait que manger. Ce serait trop cool qu'il y ait une soirée après ça !

-Elle n'est pas idiote, ton idée, fait Giussy, pensive. Je vais lui écrire moi aussi. Et je vais pousser mes amies à le faire aussi. Peut-être qu'on aura un bal, cette année !

-Ne te fais pas prendre ! je m'écrie, affolée.

Si les autres apprennent que derrière notre masque de filles sérieuses et rats de bibliothèque se cachent deux « clubbeuses », on va en entendre parler jusqu'à la fin de nos études. Enfin, pour moi, ce n'est pas si loin, mais après cette année, Giussy a encore un an à tirer, elle…

-Ne t'inquiète pas, ce sont des filles dignes de confiance ! elle me fait avec un sourire. Elles sont géniales. Je passe beaucoup de temps avec elles. On est vraiment proches.

-Ca va alors, je réponds, souriant moi aussi.

Pourtant, à l'intérieur de moi, mon cœur bat à du mille à l'heure. Quoi ? Giussy a d'autres amies avec qui s'éclater ? Est-ce qu'elle les aime mieux que moi ? Est-ce qu'elles rient plus ensemble ? Mon Dieu, est-ce qu'elle… Est-ce qu'elle pense à leur apprendre à devenir invisibles, elles aussi, une fois que nous y serons arrivées ?

Là, je dois vous avouer encore autre chose. Je suis d'une jalousie maladive avec mes amis. Pire que ça. C'est de la possessivité. Oh, ne vous en faites pas, je sais me tenir. Ca me fait mal au ventre d'imaginer que ma meilleure amie puisse me remplacer par une autre meilleure amie, mais je ne suis pas non plus du genre à poser des ultimatums ou à la jouer petite-amie collante avec des questions du style « tu l'aimes plus que moi ? ». Enfin, je ne pense pas.

-Ces filles… Qui sont-elles ? je demande d'un air détaché.

-Des copines de classe, avec qui j'ai sympathisé.

Des copines de classe, hein ? Mon Dieu, je ne peux pas rivaliser contre ça. Sauf si je double, là, peut-être… Mais on ne peut pas doubler à Poudlard. Sinon, ils vous forcent à prendre des cours d'été déprimants et vous finissez par vous pendre ou, tout au moins, par arrêter l'école.

-Tu les adorerais ! continue Giussy, indifférente à mon tourment intérieur. Je les connais depuis la 1ère mais on a vraiment commencé à sympathiser l'an passé. Puis, pendant l'été, on s'est vues deux ou trois fois. Je t'en ai parlé, non ?

-Ou… Oui, dis-je, me rappelant enfin.

À l'époque, je pensais que ce n'étaient que des copines de vacances. Pff ! Rien à voir avec moi, qui suis son amie de toujours. Je l'ai prise sous mon aile dès la première, bon sang ! Je lui ai appris tout ce que je savais sur la mode, le maquillage et les garçons ! Quand ses parents refusaient de lui donner de l'argent de poche, la trouvant trop jeune, c'est moi qui lui refilais mes magazines, dès que je les avais lus ! C'est avez moi qu'elle est allée en boîte pour la première fois, pour ses bons résultats aux B.U.S.E. ! Et maintenant, elle se fait d'autres amies et ne me les présente pas ?

Bon, d'accord, j'exagère, je le sais. L'an passé, moi aussi j'avais d'autres copines. Mais elles étaient potes aussi avec Giussy. De toute façon, Giussy et moi, on est amies, et rien ne pourra briser notre lien ! On a parfaitement le droit de voir d'autres personnes sur le côté ! J'ai 17 ans, misère, je ne suis plus une gamine !

Forte de ces pensées, j'arrive à me reprendre.

-Tu as raison, dis-je enfin. Si on est plusieurs à le suggérer, Dumbledore cèdera peut-être enfin. Tu me les présenteras ?

-Bien sûr ! fait-elle, enchantée. Tu vas les adorer ! Il y a Fiona et Esther, de Gryffondor, et Mary, Rachel et Leigh, de Poufsouffle, et elles sont toutes très sympas et très drôles, tu verras, et…

-Oui, oui, dis-je, la coupant.

« Garde m'en un peu pour plus tard », j'ai envie de dire, mais je me retiens à temps. À la place, je dis :

-Ce week-end, je vais voir si la nouvelle collection de Wendy Weller est arrivée à Pré-au-Lard. Tu viens avec moi ?

Elle grimace.

-C'est ce week-end ?

-Oui, pourquoi ?

-Oh, ça ne m'arrange pas… J'ai une tonne de devoirs à faire, et je…

-Allez, Giu ! je la presse. Juste deux ou trois heures. Que représentent trois heures sur l'entièreté de ton week-end, après tout ? Et puis, tu as encore demain, jeudi et vendredi pour travailler ! Je t'aiderai, si tu veux.

-Tu n'as pas des devoirs à faire, de ton côté ? me demande-t-elle, suspicieuse.

-Je… Je les ai finis, dis-je en croisant les doigts dans mon dos.

Ce qui est presque vrai, après tout. J'ai lu la consigne de tous mes travaux et je l'ai bien comprise. Et un énoncé bien compris, c'est déjà cinquante pourcents des points, comme me dit toujours mon père.

-Loredana… me fait sévèrement mon amie.

-D'accord, je vais m'y mettre, je dis en soupirant.

Giussy a un petit sourire satisfait. Dieu qu'elle m'énerve ! Mais en même temps, je l'admire. Malgré tout le temps qu'elle passe à lire en loucedé des romans moldus, comme moi, et tout le temps qu'elle passe à s'amuser à écrire de petits contes, à dessiner ou à apprendre des sorts de beauté en prétextant que c'est du travail scolaire, Giussy arrive encore à être la première de sa classe. Je ne sais pas comment elle fait. Moi, rien que l'idée d'ouvrir un bouquin de cours me déprime. Je ne sais pas non plus comment je fais pour garder ma réputation de bonne élève !

Quoiqu'il en soit, pour faire bonne figure – et parce que j'ai déjà lu tous mes magazines –, je bosse assez bien, les trois jours suivants. J'ai déjà réuni la documentation nécessaire pour mon devoir d'astronomie, et j'ai pas mal avancé sur celui de botanique. Bon, pour les runes, on verra ça plus tard. Je déteste ce cours, mais mon père est professeur de runes à l'université, alors, pour lui faire plaisir, j'ai décidé de persévérer dans cette voie. Il croit que je suis douée, tout comme lui. Ha ! ha !

Bref, quand vient le samedi, j'ai bien mérité ma grasse matinée jusqu'à onze heures (je prétexte des règles douloureuses à mes camarades de dortoir, pour ne pas qu'elles me prennent pour une fainéante). Ensuite, je me lève, je me prépare sans me presser, je travaille une demi-heure à mon invisibilité dans la salle de bains et je vais dîner tranquillement en lisant mon roman moldu du moment, « Le diable au corps ». Évidemment, j'ai changé la couverture grâce à un super sort trouvé dans le B*witched, ma bible. Le bouquin affiche maintenant le titre « Métamorphose avancée » et quelques élèves de troisième me regardent avec admiration. Je fais comme si je n'avais rien remarqué mais je mets encore plus en évidence le titre du livre. Après tout, je pourrais très bien être en train de lire ce genre de bouquins, non ?

Je le termine dans la Salle Commune. Vers quatorze heures, Giussy me rejoint et nous partons vers Pré-au-Lard dans la foule d'autres étudiants.

Nous bavardons de tout et de rien et prenons le chemin de notre boutique préférée. Peu d'élèves la connaissent car elle est située assez loin du centre.

-Bonjour ! nous fait la vendeuse et sous-directrice avec un sourire. Bienvenue.

-Salut, Gemma ! je dis. (Nous avons nos petites habitudes, ici.) Tu as reçu la nouvelle collection de Wendy Weller ? J'ai vu quelques articles dans le Magicosmopolitan qui me plaisent bien.

-Suivez-moi, dit-elle en prenant des airs de conspiratrice. Vous allez voir, vous n'allez pas en revenir.

Effectivement, arrivée devant le stand des chaussures, je manque de défaillir. Mon Dieu ! Comme elles sont belles ! Bien plus encore que sur le papier glacé du magazine ! Je m'avance et saisis une paire avec soin. Waw… elles sont magnifiques.

-Waw… elles sont magnifiques, murmure Giussy.

Je hoche la tête en signe d'assentiment. Mon regard se porte sur une paire de boots à talon bobine d'un vert cendré profond. Wendy Weller s'est dépassée.

-Chaque paire est unique, nous dit respectueusement Gemma, elle aussi hypnotisée par les magnifiques pièces. J'en ai mis quelques-unes de côté pour vous. Elles devraient vous plaire. Ne bougez pas.

Mon cœur manque un battement. Pour nous ! Je me sens tellement importante ! Je jette un regard à Giussy qui affiche le même air d'émerveillement que moi.

-J'ai mis de côté pendant trois mois en attendant cette collection, me souffle-t-elle. J'espère que c'est assez.

J'acquiesce. Moi aussi, j'ai mis de côté. Combien encore ? Je ne me souviens plus très bien. Une somme assez rondelette… Je suis fille unique, alors niveau argent de poche, mes parents me gâtent.

J'essaie de calculer combien j'ai. Soudain, je me rappelle ce cardigan bleu marine en cachemire qu'il me fallait absolument. Il m'a coûté assez cher, mais il en valait le coup. Je le porte, en ce moment. Ha, et aussi, cette paire de chaussettes trop rigolote, qui n'était pas donnée non plus. Mon Dieu, faites que j'aie assez d'argent !

Gemma revient auprès de nous, cinq boîtes flottant derrière elle. Elle les redépose d'un geste délicat de la baguette magique et les ouvre avec une lenteur étudiée.

Je me sens sur le point de défaillir. Il me FAUT ces chaussures. Il me les faut ! Giussy pousse un petit soupir, elle aussi. Elle jette son dévolu sur la première paire – des bottillons peep toes violet foncé en peau de dragon. Elles sont magnifiques, peut-être les plus belles de la collection, pourquoi a-t-il fallu qu'elle les voie avant moi ?

Puis, Gemma ouvre la dernière boîte et c'est le coup de foudre. J'oublie instantanément les bottillons de Giussy.

Elles sont juste divines. Parfaites. Des Richelieu bordeaux avec un talon vertigineux, en cuir verni. Le talon aiguille est noir et mesure au moins huit centimètres. Je les veux. Je les veux.

-Lesquelles souhaitez-vous essayer ? demande Gemma.

Nous indiquons d'un doigt tremblant les chaussures de notre cœur. Gemma les adapte à notre pointure. J'envoie valser mes derbies blanches et glisse délicatement mes pieds dans les Wendy Weller. Je me lève et, hésitante, fais un pas ou deux, peu habituée à marcher sur des talons aussi hauts. Mais elles sont d'un confort absolu. Gemma sourit en voyant mon visage tout illuminé.

-Elles ont été conçues spécialement pour paraître hautes, mais être aussi confortables que des ballerines, dit-elle avec respect. Alors ? Que fais-tu ?

-Je les prends, dis-je dans un souffle, je les prends.

-Elles sont sublimes, Lola ! me dit Giussy, mais elle n'a d'yeux que pour ses bottillons.

-Les tiennes aussi ! fais-je, et je suis très sincère.

Si seulement nous avions la même pointure, je pense secrètement.

Je me rassieds pour les enlever et récupérer mes derbies qui me paraissent maintenant bien fades. En m'emparant de la boîte pour les remettre dedans, je vois le prix et mon souffle s'arrête.

Septante-neuf Gallions. C'est le prix. Septante-neuf Gallions… Mais ça me fait quasiment seize semaines d'argent de poche, ça ! Je m'empare de mon porte-monnaie, tout au fond de mon sac moldu –un Marc Jacobs offert par maman pour mon anniversaire– et je compte combien j'ai. En faisant des petits tas avec des Mornilles et des Noises, j'arrive à… Non ! Cinquante-deux Gallions, trente-neuf Mornilles et quatre-vingt Noises ! Je n'ai pas assez !

Je suis tout abattue. Giussy, elle, regarde le prix et fronce les sourcils.

-Soixante-quatre Gallions, ce n'est pas donné, mais qu'importe ! J'avais prévu le coup.

-Je vous fais une remise de dix pourcents, nous chuchote Gemma, parce que vous êtes des clientes habituelles. Mais pas un mot !

Le visage de Giussy s'illumine, et le mien s'assombrit encore. Même comme ça, je n'ai pas assez !

-Loredana ? Ça va ? s'enquiert mon amie, voyant ma mine défaite.

-Je n'ai pas assez, dis-je d'une voix blanche.

-Oh, fait Gemma, s'immobilisant.

-J'ai essayé d'économiser, et j'ai travaillé pour gagner des sous, mais il a fallu que j'achète ce foutu cardigan !

-Il est très beau, dit poliment Gemma.

-Et à cause de ça, je continue en l'ignorant, je n'ai pas assez pour m'offrir une paire de chaussures ! A quoi ça a servi de corriger tous ces devoirs d'Enchantement pour le professeur Flitwick, hein ? A quoi ça a servi de montrer à papa tous mes bons points pour qu'il m'offre deux malheureux Gallions ? Je ne peux même pas m'offrir ce que je veux !

Je fulmine. Je vais peut-être vous sembler caractérielle, ou matérialiste. Mais à Poudlard, comme on est obligés de porter ce fichu uniforme, la seule chose qui nous distingue les uns des autres, la seule fantaisie que l'on peut se permettre pour afficher son style, quand on est en classe, ce sont les chaussures. La plupart des filles portent des ballerines noires, et les garçons optent pour des Converses. Mais dès qu'une fille porte une jolie paire de chaussures qui sort un peu de l'ordinaire, alors là, waow… Elle est le centre d'attention, tout le monde l'admire pour son bon goût. Il est vrai que je n'aime pas être le centre d'attention quand il s'agit de rumeurs mesquines. Mais au niveau chaussures, je fais toujours mon petit effet. Les filles de ma classe font mine de rien, car ce sont des Serdaigles, bien au-dessus des préoccupations matérielles, mais, l'air de rien, elles me glissent parfois un petit compliment, ou me demandent où je les ai achetées. (Je leur réponds toujours que c'est un cadeau d'une tante espagnole. Hors de question qu'elles découvrent mes sources. Comme elles ne lisent pas les magazines de dindes, elles ne découvriront pas le pot au rose. Bien fait !) Et j'adore ça ! J'adore être à la mode ! C'est ce qui me permet de tenir dans ce monde cruel qu'est le Collège !

J'exagère un chouïa. Mais disons… que c'est important pour moi. C'est ma passion. Il y en a, ce sont les métamorphoses. D'autres, la littérature obscure du monde magique. Moi, c'est la mode, et les chaussures en particulier, voilà.

-Lola, il te manque combien ? me demande précipitamment Giussy.

Je fais un rapide calcul mental.

-Environ vingt Gallions, je dis avec mauvaise grâce.

Giussy fait la grimace.

-Je n'ai pas assez pour te prêter !

-Non ! je m'exclame. Je ne te demanderai jamais de me prêter de l'argent. Maman dit toujours que c'est ça qui mène aux plus grandes disputes entre amis.

-Mais allons, Lola, c'est moi ! Giussy ! Je sais que tu me rendras ! Alors si tu veux, j'ai… - elle calcule rapidement – oui, j'ai dix Gallions à te prêter. J'ai dix Gallions, fait-elle en se tournant vers Gemma. Et pour les dix qui restent, tu peux peut-être lui faire crédit ?

-Je crains que ce ne soit pas possible, souffle Gemma, gênée. La directrice m'a tapé sur les doigts, la dernière fois. Je n'ai plus le droit.

-Mais voyons, Gemma, c'est Loredana ! Tu sais qu'elle reviendra !

-Oui, c'est vrai ! Je reviendrai ! dis-je, pleine d'espoir.

Gemma soupire, regarde nos mines de petit chat… Et déclare :

-Je vais voir ce que je peux faire.

Lorsque nous sortons de là, je suis dégoûtée. Giussy a réduit sa jolie boîte et l'a mise dans la poche de sa cape (une petite merveille en soie et cachemire d'un beau bleu encre, que je lui ai offert l'an passé pour Noël et qu'elle adore). La directrice n'a pas voulu me faire crédit. À moi ! Loredana Lombardo ! Je ne suis pas une voleuse, ai-je eu envie de lui dire. Mais ça n'aurait servi à rien. Gemma avait l'air sincèrement désolée et, par solidarité, Giussy a refusé d'acheter les bottillons. J'ai bien vu combien il lui en coûtait et je l'ai convaincue que ce n'était pas grave. Elle m'a paru soulagée, et je la comprends, mais j'admire sa loyauté.

-Qu'est-ce que je vais faire, Giu ? je demande soudain. La prochaine visite à Pré-au-Lard n'est que dans trois mois, et si je les commande par hibou, ça me coûtera cinq Gallions en plus pour les faire livrer à Poudlard, et trois autres pour que ça vienne sous forme de lettre pour que personne ne s'en aperçoive !

-Tu trouveras la solution, me dit-elle positivement. Économise encore quelques semaines et tu pourras te les offrir. J'économiserai aussi, ajoute-t-elle courageusement.

Je lui serre l'épaule avec gratitude. Je sais qu'elle a deux frères, alors elle reçoit moins d'argent de poche que moi, et elle doit travailler deux fois plus – elle bosse dur pour prendre d'excellentes notes, qu'elle envoie ensuite à Fleury & Boots. Ils rassemblent les notes du plus grand nombre d'étudiants possibles et vendent des résumés élémentaires pour étudiants en difficulté. Elle n'est pas payée énormément, mais eux ils se font un pont d'or avec son travail et celui des autres. Brusquement, je les hais. Puis je me calme en disant que je ne fais que reporter mon énervement sur quelque chose qui n'a rien à voir avec la vraie raison pour laquelle je suis dépitée.

Peut-être est-ce la solution, me dis-je en pénétrant avec elle aux Trois-Balais, où nous allons boire un verre avec Stella, Kim et Lucy, nos amies de l'an passé. Je n'ai qu'à économiser et attendre un peu.

Je commande une Bièraubeurre et une petite assiette de sandwiches. Ils sont assez chers, ici, mais j'ai faim. Bon, promis, après ça, j'arrête de dépenser mon argent pour rien.

Sauf pour m'acheter de nouveaux livres moldus, à la petite librairie à laquelle personne ne fait jamais attention, coincée entre Zonko et la poste. Ils sont chers parce qu'il faut les importer du monde non-sorcier, mais j'en ai vraiment besoin. Et aussi de sucreries de chez Honeydukes. Et de quelques magazines moldus.

L'un dans l'autre, lorsque je fais mes comptes, le soir même, je m'aperçois que j'ai dépensé pour presque quinze Gallions, aujourd'hui. Et je n'ai pas encore renouvelé mon abonnement à Sweet Witch, un autre mensuel de filles.

Mon Dieu, ça va être dur de ne pas flamber tous mes sous.