Je crois que c'est l'un des défis les plus difficiles que j'ai eu à écrire. L'inspiration était à sec et l'idée me vient de mon petit frère. Merci à lui !
Bonne lecture! (et sachez que vous avez échappé à une description très précise de ce que Gandalf peut faire avec une pomme tout en se tripotant le lobe d'oreille !)
Il y a bien des années, alors que le Mal n'avait que peu atteint les Terres du Milieu, alors que les Elfes couraient librement dans les forêts, que les oiseaux piaillaient dans les branchages et que les renards chapardeurs parlaient aux lapins malins, les Ents se contaient fleurette au bord des ruisseaux. Ce monde était doux, calme. Et tout allait pour le mieux.
Jusqu'à ce jour terrible.
Lorsque le soleil se leva, que la brume se dissipa, Nœudif étira lentement ses ramages, appréciant le sentiment de ses feuilles qui s'épanouissaient. Le geai qui nichait dans ses branches s'éveilla en même temps que lui. Tout semblait exactement comme avant. Puis, il ouvrit les yeux.
Alors que la veille encore, sa tendre compagne s'endormait à ses côtés, il n'y avait plus personne. Il ne restait que quelques unes de ses feuilles que l'automne avait à peine commencé à décrocher. Et lorsqu'il l'appela, rien ni personne ne lui répondit. Et en son cœur, il sut qu'il avait perdu son Ent-femme. Même le couple de mésanges qu'elle hébergeait avait disparu sans laisser de traces. Le geai n'avait rien vu, rien entendu. Et lorsque Nœudif entendit les appels désespérés de ses congénères, il comprit que toutes les Ents-femmes s'en étaient allées.
Si les autres Ents choisirent de rester là, en attendant qu'elles reviennent d'elles-mêmes, Nœudif ne put l'accepter et il décida de partir à leur recherche. Il se dirigea d'abord vers l'est, car sa compagne aimait voir le soleil se lever. Elle n'aimait pas la nuit, et il ne l'imaginait pas partir en tournant le dos à l'aube.
Il marcha longtemps, avalant les miles grâce à ses larges enjambées. Et pourtant, nul n'avait vu passer la moindre Ent-femme. Ni les souris, ni les fleurs que Pumila aimait tant.
Alors, il partit vers le sud, là où la chaleur invitait à la paresse, où les lézards escaladaient les troncs et où les oiseaux étaient plus colorés et leurs chants plus exotiques. Mais ceux-ci n'avaient pas non plus rencontré sa compagne et ses amies.
Lorsqu'il se rendit vers l'ouest, il ne trouva qu'une immense étendue d'eau que ses racines n'apprécièrent guère. Les poissons ne surent comment lui parler et le geai tenta de survoler l'océan, en vain. Il revint épuisé et bredouille.
Alors tous deux prirent le chemin le plus improbable. Vers le nord, là où le froid et le vent faisaient se recroqueviller les bourgeons, où le soleil ne brillait pas, où les Hommes avaient coupé les arbres pour construire leurs cités. Là, il chercha, chercha, et chercha encore. Désespéré, sans autre solution, il arpenta les routes et les villages, faisant fi des haches et des feux. Mais il ne trouva rien.
Alors, à contre-cœur, il accepta de rebrousser chemin, l'oiseau toujours sur l'épaule, pour rejoindre les siens. Le pas lent et l'humeur morose, il parcourut les collines qui le séparaient de ses bois. Il traversa des prairies et des vergers.
Et là, au milieu de l'un d'entre eux, il découvrit une pomme d'or.
Mais Pumila n'était plus là.
