PRELUDE !
Elle est donc notre meilleur atout. lança songeur Donnel Udina assis à son bureau, en croisant minutieusement les jambes, les sourcils froncés tandis qu'il observait l'image tri-dimensionnel d'une douzaine de centimètre d'une femme avec précision.
- Peut être même notre seul atout à l'heure actuelle. répliqua sereinement le capitaine Anderson assis en face de lui, son regard rivé dans la même direction.
La tension était quasi palpable dans le bureau de l'ambassadeur Udina. Il s'agissait de ne pas se tromper, de gâcher une occasion qui ne se renouvellerait pas de sîtot pour l'humanité, alors toute proche de renforcer stratégiquement sa position sur l'échiquier politique intergalactique. Dans la pièce luxueuse et richement décorée, se trouvaient sagement assis autour de la table les trois personnages les plus influents et les plus puissants de l'Alliance Interstellaire. Le Capitaine Anderson qui avait jadis servi dans les forces spéciales humaines, l'homme le plus décoré et le plus renommé de l'Armée. Aussi l'Amiral Hackett, responsable de la cinquième flotte sur Arcturus et l'Ambassadeur lui-même qui représentait l'Humanité sur la Citadelle auprès du Conseil.
Personne ne peut mieux assurer le rôle que Shepard, le job est taillé pour elle. reprit Anderson, catégorique. Il n' avait apparemment aucun doute là -dessus. Hackett semblait plus circonspect, mais ses paroles sages et mesurées ne diminuaient pas moins la force et l'impact du soutien qu'il apportait à l'assertion du Capitaine.
- Elle a servi l'Alliance avec un dévouement exemplaire. Le résultat de son parcours est aussi extraordinaire.
De tous évidemment, Donnel Udina semblait le plus impliqué, le plus nerveux, mais aussi le plus hésitant. C'était que la sélection du candidat qui résulterait de sa décision seule et finale, allait marquer une victoire politique et surtout personnelle. Une victoire que s'attribuait déjà personnellement Udina qui ne doutait pas qu'il avait joué un rôle majeur dans l'avancée de cette cause commune. Bien sûr il ne lui échappait pas que le conseil était de plus en plus préoccupé et conscient de la montée en puissance exceptionnelle et fulgurante de leur espèce. Amadouer cette " nouvelle entité en pleine ascension " par des offres alléchantes faisait certainement partie de leur plans.
Et devant les nombreuses opportunités qui s'ouvraient alors à lui, Udina ne pouvait tolérer que cette chance leur échappe, lui file entre les foigts en octroyant le mauvais rôle au mauvais candidat. Il avait fallu des années de pression, de supplications et de discussions intéressées pour que le conseil daigne envisager à nouveau la possibilité de faire accéder un humain au statut de Spectre après le désastre qu'avait été Anderson. Il y a de cela plusieurs décennies en tant que premier candidat choisi pour l'humanité et par l'Ambassadrice de l'époque. Anita Gogyle. Udina désirait tout sauf répéter les erreurs imbéciles du passé. Il sentait qu'il avait agrippé le bon bout, il n'était plus question de lâcher, ce n'était pas son genre, surtout après un tel dévouement à la rude tâche harrassante de réparer les fautes d'antan. Il lui revenait le droit d'être plus que prudent, et surtout exigent, quitte à faire traîner les choses encore une fois.
- Johanna Shepard. murmura t-il en appuyant sur chaque syllable, pendant que ses yeux noirs farouches tentaient de lire au delà de l'image tri-dimensionnel qui tournait inlassablement sur elle-même. Des chiffres, des tableaux et des paragraphes s'invitèrent soudain dans l'hologramme qui s'extendit, tandis qu' Udina pianotait sur son ordinateur portable, le plus performant qui soit, connecté au réseau privé et hautement sensible des forces spéciales dont il se servait pour examiner en détail le fichier classifié et hautement protégé de l'un de leur soldats d'élite. Née sur terre, mais aucun lien de parenté de connu. Et nous y revoilà. Anderson ne savait que trop où l'Ambassadeur voulait en venir.
- Oui. C'est une orpheline, elle a grandi dans la rue, seule. Anderson appuya bien ces mots, sachant bien de quoi il était question dans l'esprit de l'ambassadeur dont il voyait à nouveau le front se plisser méchamment. La chose qui le dérangeait depuis le début en réalité. Shepard avait un passif douteux avant de s'être engagé dans l'armée. Son passé minutieusement fouillé, étudié, tous savaient qu'elle avait été membre d'un gang mafieux très violent et connu sur terre. les Reds Street Tenth, plongés dans des affaires de drogues, de trafic d'armes, et de prostitutions. Ils ne savaient pas exactement quel rôle et quelle part elle avait prise, mais elle n'avait jamais commis d'actes criminels comme le meurtre, ou touché à la drogue. Ou plutôt elle avait tué, mais avait toujours prétendu avoir agi par la légitime défense. Ce qui était crédible dans les quartiers pauvres de la Terre, aussi infâmes que les zones sur Omega. A cette époque l'Armée ne s'était pas préoccupé de savoir si elle disait vrai ou non. L'officier de recrutement avait besoin de remplir son quota, et cette jeune fille paumée était bien tombée. Evidemment, aujourd'hui, il était trop tard pour rouvrir des portes, et de toute façon, personne n'en n'avait l'envie aujourd'hui après tant de services rendus avec une loyauté et une efficacité infaillible.
Sans parents, alors sans éducation et sans discipline, désorientée, et tentant de survivre dans une jeunesse désespéré au milieu d'un environnement hostile et pauvre, Shepard avait simplement été tentée comme n'importe quel enfant l'aurait été dans sa condition. Et le fait qu'à ses 18 ans, elle ait décidé de fuir ce cycle de violence, cette tourmente impitoyable et sans fin, tout ce dans quoi elle avait toujours vécu, prouvait aux yeux d'Anderson sa force de caractère. Et il se fichait éperdument de l'atermoiement de l'Ambassadeur à ce sujet. Il avait déjà eu l'occasion, pas plus tard que ce matin de se former une opinion sur elle, en personne. Il n'avait pas été déçu. Udina posa enfin la question qui le turlupinait.
- Dois-je conclure que les aléas de son adolescence n'ont plus aucune influence ou incidence sur le soldat qu'elle est devenue ?
- Ca ne l'a jamais été. C'est du passé, le soldat d'aujourd'hui n'a plus rien avoir avec tout ceci. Considérez cet épisode comme s'il n'avait jamais existé Ambassadeur. Anderson avait pris le ton de l'homme confiant qui jurait de la compétence et de la fiabilité de son équipage, ce qui n'était pas tout à fait métaphorique concernant Shepard. Udina hocha simplement la tête, sans disserter plus là-dessus. C'était un homme raisonnable.
- Shepard. C'est cette femme qui a défrayé la chronique il y a quelques années, après avoir survécu à l'enfer sur Akuzé. reprit l'Ambassadeur dont les yeux noir sur son visage frustre s'illuminaient soudain d'intérêt. Cette fois, Hackett crut bon d'intervenir et de mettre ses propres doutes sur la table. Il considérait comme un devoir d'avertir l'Ambassadeur des zones d'ombres de cette sale affaire.
- Aussi miraculeuse, soit sa survie, elle a aussi vu mourir toute son unité sous ses yeux là-bas. Ce genre de choses ça vous poursuit toute une vie, ça vous bouffe de l'intérieur. Je ne compte plus le nombre d'hommes brisés après avoir vécu ce genre d'expériences, et ils étaient tous de bons soldats. Shepard a été bien sûr établi comme stable il y a des années, mais...
- Tous les soldats ont leur cicatrices, Hackett, c'est le lot de chacun d'entre eux, chacun d'entre nous. Se défiler ne rime à rien. Shepard est une survivante. Elle a résisté mentalement et physiquement à une expérience des plus traumatisantes, et s'en est remise sans jamais avoir démontré un quelconque signe de défaillance mentale. Elle à survécu contrairement à cinquante marines présent, au delà de toute probablité, grâce à son seul talent et à sa volonté, face à une colonie de monstruosités de crocs et de griffes parmi les sables mouvants. Avez-vous conscience de l'exploit que cela représente ? C'est le genre de chose incroyable qu'un spectre ferait.
Comme espéré, Anderson avait frappé juste, Udina prit la balle à la volée.
- Et c'est ce que semble aussi penser le Conseil également. Ils n'ont jamais caché leur intérêt pour Shepard depuis cet évènement. Anderson a raison.
- Shepard ne s'est pas arrêté là, ce n'est que le début d'un parcours absolument incroyable. poursuivit Anderson. Vous trouverez tous les détails des opérations qu'elle a mené et où elle participé depuis qu'elle est sortie du programme N7. L' 'Humanité lui doit beaucoup. C'est le meilleur agent que l'Alliance à offrir, la meilleur carte à jouer.
- J'ai déjà lu les rapports Capitaine. Un excellent soldat, je n'en disconviens pas. Akuzé a fait la preuve de son abnégation et de sa résistance. La question est la suivante. Ferait-elle un bon spectre ? Peut-on confier le sort de la galaxie à ce genre de personne ?
- Si quelqu'un peut le faire, c'est justement ce genre de personne. Udina plissa les yeux suite à la réponse assuré du nouveau Capitaine du Normandy, puis tourna son regard vers Hackett, qui après mûre réflexion hocha finalement la tête, en toute approbation.
- Bien, c'est donc décidé. J'informerai le Conseil de ma décision. Parlons maintenant de la balise prothéenne et du lancement de notre nouveau prototype.
-Heure de décollage du Normandy dans moins de 6 heures pour aller récupérer la Balise. répondit Anderson en allant droit au but. Mes hommes sont prêts. C'était lui qui dirigerait les opérations et serait au commande de ce nouveau vaisseau aux capacités exceptionnelles et nés d'une venture humano-turienne.
- Le site a été sécurisé au mieux des possibilités offertes sur la planète, le bébé n'attend plus que d'être cueilli par le Normandy pour le transit. ajouta Hackett qui relayait là le message de l'Etat Major. Il s'était d'ailleurs personnellement impliqué, et il avait pu constater par lui-même que tout était en place. Udina ne daigna pas leur accorder un regard de satisfaction, trop de choses étaient à l'épreuve en ce moment et il n'avait manifestement pas le temps pour ça. Il croisa plutôt ses mains sous son menton, son expression sur sa face frustre plus sèche que jamais.
- Messieurs, inutile de vous rappeler l'importance de cette mission pour l'Humanité, nous avons enfin capté l'attention du Conseil, j'entends bien que nous ne ne manquions pas l'occasion. Rappel et avertissement inutiles évidemment.
- Nous sommes pleinement conscient des enjeux, Ambassadeur. Par ailleurs, j'aimerai informé Shepard, après tout elle est mon second et je crois que... commença Anderson, démontrant un chouia de gêne, mais l'Ambassadeur leva la main tout en hochant la tête tandis qu'il l'interrompait.
- Pas question. Moins il y aura de personnes au courant, mieux ce sera. Le secret doit être absolu, le Conseil y tient. Les risques de fuites seront moins grands. Shepard comprendra. Tenez vous en à la version officielle jusqu'à nouvelle ordre, à savoir qu'il s'agit simplement d'une mise en situation pour cette nouvelle frégate de l'Alliance. Vous informerez votre équipage lorsque nous le jugerons nécessaire et pas avant.
- Compris. se contenta de répondre l'ancien soldat des forces Spéciales, impassible, l'ambassadeur avait raison. Bien, Ambassadeur, si vous n'y voyez pas d'inconvénients, je crois que je vais retourner sur le Normandy, et m'assurer que tout soit en ordre.
- Pas avant d'avoir obtenu notre dernière audience avec le Conseil, Capitaine. J'aimerai que vous soyez présent au cas où ils auraient des questions sur les modalités de votre mission.
Au moins une bonne dizaine d'heures de sommeil grapillées pour Johanna Shepard, qui se sentait au sortir de la douche, fraîche comme une belle pêche mûre au beau milieu d'un été, l'eau dégoutant encore de ses cheveux mi courts aussi noirs que la nuit pendant qu'elle finissait de s'habiller dans sa chambre. A peine arrivée sur le Normandy, juste après la rencontre rapide avec l'équipage, Johanna profitant de l'absence opportune du Capitaine Anderson, avait senti le besoin de récupérer de son voyage, quitte à s'isoler du reste et dormir comme une masse sans s'inquiéter outre-mesure de la déconcertation unanime des autres occupants du vaisseau qui auraient aimé profité plus longuement de la présence de leur officier supérieur. C'était que la mission débutait le lendemain. Il avait déjà été plus que bouleversant qu'elle se soit révélée aussi tard, mais les volontés de l'état-major n'étaient pas toujours compréhensibles.
Shepard, commandant du meilleur vaisseau de l'Alliance, une frégate dotée d'un panel de compétences humaines indiscutable, les meilleurs qui soient et qu'avait à offrir l'humanité, par ailleurs équipé d'un concentré de technologie de pointe qu' aucun autre vaisseau dans la galaxie n'était capable de rivaliser. Et Johanna en serait l'une des têtes, la seconde à proprement parler, quelle charge, et quelle fierté.
A seulement 29 ans, voilà que survenait la consécration de sa carrière très active de soldat, une nouvelle étape dans sa vie. Elle était prête à assumer le commandement depuis longtemps déjà cependant, elle le savait, tous le savaient. On avait simplement estimé à l'état major plus qu'impressionné par ses résultats, que la laisser mûrir et accumuler en expérience, tout en observant avec diligence ses progrès serait pour le mieux. Peut être avaient-ils pêché par excès de prudence, peut être avaient-ils eu raisons. Peu importe, le temps avait passé, et encore et à chaque fois, la faiseuse de miracle avait fait la démonstration de ce dont elle était capable au cours de missions qui avaient alors été jugé quasi-impossible. Aujourd'hui Shepard faisait l'unanimité, au sein de l'etat-major, au sein de l'Alliance, au sein de l'humanité. Qu'elle ait été affecté au meilleur vaisseau de guerre fut en quelque sorte comme lui rendre justice.
Que ressentait-on lorsqu'on était propulsé ainsi, avec un soutien aussi fort, justifié par une confiance aveugle ? D'autres se sentiraient immensément honorés sans nulle doute, plus encore se demanderaient s'ils seraient à la hauteur ou qu'ils ne méritaient simplement pas un tel honneur, une telle confiance malgré leur compétences indéniables. Pas Johanna, elle ne ressentait rien de tout ça, ce qu'elle considérait comme de la fausse modestie ne faisait pas partie de ses attributions. Elle le méritait, et depuis longtemps déjà ! Non pas qu'elle se soit plainte, simplement, les faits étaient là et il n'était guère de ses besoins de se défiler devant l'évidence.
Après avoir enfilé son T-shirt au-dessus de son soutien-gorge de sport, mettant en valeur le dessin de ses abdos très présent, - preuve d'un entraînement intensif quotidien -, Johanna remonta un treillis militaire aussi bleu que le haut au dessus de ses jambes, couleurs de l'Alliance, puis se chaussa enfin de bottes pratiques répondant aux standard de l'armée. Ceci fait sans se presser, elle s'admira ensuite dans le miroir, ses yeux d'un bleu frappant, presque anormaux tant ils étaient perçants, projetés sur son reflet. Un regard imperturbable l'accueillit tandis qu'à travers la glace, le soldat vérifait que tout était parfait, que pas un seul pli ne se nichait sur sa vêture. Tout devait être nickel pour un militaire, surtout pour un officier exécutif. Satisfaite, Shepard quitta froidement la glace et son reflet, puis la pièce en marchant droit vers une destination précise. La cafétaria !
Tandis qu'elle se dirigeait vers le mess apparemment déserté, Shepard ne rencontra personne. Une cafetière encore pleine l'attendait cependant, magnifique ! C'était le plus important. Une journée de sommeil, une douche rassénérante, du café, quoi de mieux pour commencer la soirée avant une mission qui figurerait dans moins d'une douzaine d'heures ? Après s'être servi, Johanna s'assit à un siège et sirota tranquillement le liquide brûnatre. Bientôt en mission ? Pas vraiment à vrai dire. Il ne s'agirait qu'une mise en situation du Normandy, un lancement d'essai de la nouvelle frégate, pas de quoi fouetter un chat. Ce serait sans doute instructif et amusant. Surtout que l'équipage en entier avait été mobilisé, il serait intéressant de voir tout le monde au boulot. Et à cette fin que tout soit certain de se passer comme prévu, Johanna avait exigé au pilote et au Lieutenant Alenko de commander plusieurs manipulations, bien que le premier qui se nommait Joker jurait sa grande fois tout en levant les yeux au ciel, que c'était inutile, et que le Normandy était en parfaite condition. Evidemment, elle n'avait pas transigé. A la pensée de sa réaction, elle s'autorisa un petit sourire pernicieux, alors que ses lèvres caressaient la porcelaine de la tasse de café. La vie était parfois injuste. Pendant qu'elle prenait la liberté de paresser, elle exigeait pendant ce temps de ses hommes un petit travail supplémentaire. Pas le meilleur moyen d'acquérir de la réputation auprès d'eux, se dit-elle ironiquement. Mais la réputation, elle n'en n'avait que faire. Qu'ils suivent ses ordres à la lettre et sans discuter lui suffisait. Ceux-ci apprendraient bien vite qu'en repos, Shepard s'autorisait pas mal de choses, et ils devraient s'y faire.
Procédure de vérification des systèmes du Normandy. clama d'une voix haute Joker, le pilote, manifestement peu enthousiaste. Tout est en ordre. Assis à côté de lui au poste de pilotage, le Lieutenant Alenko ne répondit rien, s'assurant de la véracité de cette affirmation par un autre moyen. Il consultait minutieusement les résultats de simulations préliminaires du Normandy, pianotant tranquillement sur l'interface tactile d'un des multiples ordinateurs de bords. Et les chiffres ne descendaient jamais à moins de 91%, une très bonne nouvelle. Le Commandant pourrait dormir sur ses deux oreilles. Si ce n'était déjà fait, se dit-il soudain en souriant intérieurement.
Sérieusement, quel gachis de temps ! s'exclama finalement Joker à l'adresse de son compagnon d'infortune, presque offusqué, faisant mine de s'enfoncer dans son fauteuil mobile tout en s'étirant. Le Normandy est en parfait état, quelle mouche a piqué le commandant.
- Un surcroît de prudence n'est peut être pas de trop. se contenta de répondre Alenko, lui jetant un bref regard en biais avant de se reporter à nouveau sur ses préoccupations. Manifestement, peu l'enchantait de discuter des lubies de leur nouvel officier exécutif arrivé fraîchement ce matin.
- Surcroît de Prudence, mais bien sûr. Et pendant ce temps là, elle a la vie belle. A peine arrivée, un pt'it coucou et hop au lit ! J'aurai aimé aussi pouvoir en profiter. Ah, j'te jure, elle fait fort pour sa première apparition !
- Mieux vaut garder ça pour toi.
- Hé ho, je m'appelle Joker, pas maboule siphonné !
Avec un sourire compatissant, agrémenté d'un petit hochement de tête, Kaidan Alenko retourna au travail. Enfin s'y essayait -il. Pour le moment, l'image de cette femme qui se figurait être son supérieur direct lui était réapparu en tête, et encore une fois, il sentait quelque chose remuer en lui, quelque part au niveau de ses entrailles. Fugace certes, mais assez dérangeant tout de même. Il se souvenait de la première réaction qu'il avait eu à leur première rencontre sur le Normandy. Quelle n'avait pas été sa surprise, comme tout le monde lorsqu'il avait appris qu'il s'agissait du Commandant Shepard, l'icone révérée de l'Alliance depuis ce qu'il s'était produit sur Akuzé, celle là même qui avec le temps était apparemment devenu l'un des meilleurs soldats d'élite qu'avait à offrir l'humanité. Kaidan ne l'avait jamais vu qu'en holo, célèbre qu'elle était aux quatre coins des colonies humaines. Et la première chose qu'il pouvait en dire, c'était que l'expérience était sacrément différente avec la réalité. Joker avait bien réagi évidemment, décontracté et sûr comme à son habitude, mais lui s'était senti rougir comme un jeune abruti, bafouillant presque maladroitement ses premiers mots tandis qu'il se présentait timidement. Heureusement, le Capitaine Anderson qui semblait pressé ce matin avait mis rapidement fin à son supplice et emmené Shepard voir le reste de l'équipage, du côté technique et des machines.
Il est vrai cependant qu'il s'était attendu tout sauf à ça. En avait-il vu défilé des jolies femmes soldats ou officiers tout au cours de sa carrière militaire, l'Alliance en avait largement à revendre, il y en avait évidemment sur le Normandy. Jamais pourtant aucune réaction au delà d'un intérêt poli, Kaidan était un professionnel et un homme raisonnable qui savait là ou s'arrêtait le devoir. Mais celle-là, relevait d'un autre niveau, nulle n'avait jamais pu l'émouvoir comme elle l'avait fait durant quelques secondes. Sa chevelure noir, son teint mat, la fulgurance de ses yeux bleus, son regard acéré et cette froideur, témoignant certainement d'une dangerosité dont il fallait se méfier, qui l'auréolait. Cet ensemble qui s'harmonisait avait provoqué en lui un frisson qu'il espérait ne plus jamais revoir reproduire. Heureusement, Alenko n'avait aucun mal à cacher ses émotions. Il se promettait de faire plus attention à l'avenir.
Ils venaient de terminer quand juste derrière eux se pointa Shepard, celle à l'origine de leur supplice.
Alors messieurs, ces vérifications et ces simulations ? Tous deux se tournèrent vers leur commandant, Alenko fit mine de se lever, mais une main levée de leur officier l'en empêcha. Dîtes moi seulement ce que ça a donné. Alenko tendit le bras et lui transmit le datapad où il avait transcrit les résultats pendant que Joker se rengorgeait.
- Comme prévu, le Normandy, est prêt pour une mise en situation, tout est okay. La probabilité d'une défaillance en vol est d'une chance sur trois-cents. J'vous l'avait dit Commandant, ce vaisseau, c'est mon bébé, je l'saurai s'il y avait quelque chose qui clochait. Il était inutile de s'inquiéter.
Shepard ne releva pas la tête tandis qu'elle consultait minutieusement le datapad, ses yeux sautant de droite à gauche, mais elle prit la peine de lui répondre sobrement.
- Oui ben justement, autant s'en assurer. Le capitaine Anderson ne se contentera pas de simples assurances. Il exigera cette procédure et je tiens à ce que nous soyons prêt à son retour. Merci Lieutenant. ajouta t-elle satisfaite à l'adresse d'Alenko, qui hochant la tête récupéra le datapad et tourna son fauteuil mobile vers le poste de pilotage... avant sans pouvoir s'en empêcher de jeter un dernier coups d'oeil à Shepard. Et celle-ci pour son plus grand malheur avait capté son regard furtif, ses yeux bleux perçant posés un instant sur lui. Il se retourna pour de bon, et décida qu'il avait encore d'autres choses à régler. Dans le même temps, l'interphone du Normandy signalait le retour du Capitaine. Johanna, hésitante bien qu'elle ne le montra pas, se demanda encore si elle s'imaginait des choses avec Alenko. La façon dont il l'admirait si intensément depuis leur première rencontre, parfois de manière furtive, avait le don de la troubler même si sa parure froide ne se brisait pas. Etait-ce vraiment le regard d'un soldat à un autre, d'un officier à son supérieur ? Aussi, pas du tout genre à se cacher ou à se défiler, elle s'avouait volontiers qu'elle le trouvait irrémédiablement craquant. Beau ténébreux séduisant aux yeux noirs touchants, dégageant une aura rassurante tout autour de lui. Bien sûr d'un point de vue strictement hors du cadre professionnel et des règles. Mais Johanna et les règles... ça n'avait pas toujours fait un... Loin de là. Au delà de ça, elle manifestait de l'intérêt pour son cas, c'était un biotique après tout, et c'était la première fois qu'elle en rencontrait. Elle ne savait pratiquement rien d'eux. Sans aucun doute, travailler avec lui sur le terrain serait instructif.
une voix aisément reconnaissable, celle du Capitaine Anderson, la détourna de ses pensées.
Ah, Shepard. s'annonça t-il simplement en souriant tandis qu'il s'arrêta à un pas d'eux. Elle se retourna, puis à l'exemple d'Alenko se mit au garde à vous et pratiqua un salut parfait. Mais ses yeux, comme les autres, se fichèrent avec surprise sur le deuxième individu qui le suivait de près. Un Turien ! Sur un vaisseau humain de l'Alliance ! Cette race extraterrestre à la peau rocailleuse, aussi dure que de la roche, leur têtes semblable à celle d'un faucon, leur yeux tout aussi perçants et magnétiques. Ils étaient en même temps un peu plus grands et plus mince que des humains standard, assurément ils avaient de la stature, et peut être quelque part quelque chose d'attirant, de... masculin. Actuellement les turiens étaient l'espèce considérée comme la plus puissante de la galaxie, avec la plus grande flotte, la plus grande armée, connus pour être particulièrement redoutable sur le champs de Bataille et d'une discipline à toute épreuve. Ils faisaient partie du Conseil, l'union des trois puissances galactiques qui gouvernaient l'espace concilien où ils avaient établi leur règles. Le Turien, en face d'eux ne plaisantait pas. Il était lourdement armé, empêtré dans une impressionnante armure qui le faisait presque apparaître invincible là-dedans. Assurément les balles auraient du mal à l'atteindre avec tout ce barda. De ses yeux connaisseurs, Shepard pouvait le certifier. De son être émanait une sérieuse menace, en lui se percevait quelque chose de grave, une tension nerveuse malgré la tranquillité qu'il affectait en apparence. De toute évidence il ne s'agissait pas de n'importe qui. Ses yeux vert intenses étaient fixement plantés dans ceux de Shepard, comme s'il la jaugeait. Il ne regardait nulle part ailleurs.
- Je vous présente Nilhus, du ministère des affaires tactiques de reconnaissance. Joker ouvrit grand les yeux et ne put s'empêcher de s'exclamer dans le silence surpris.
- Un Spectre ?
- Il nous accompagnera durant la mise en situation du Normandy, Le Conseil a participé à la conception du Normandy et ils tiennent à la présence d'un des leurs.
Joker suspicieux et Alenko intrigué échangèrent un regard. Shepard elle, insondable, ne réagit pas, quitte à ne laisser transparaître autre chose qu'une immobilité stoïque. Un regard perçant à l'adresse du Capitaine et au Spectre accueillit simplement la nouvelle.
- J'ai beaucoup entendu parler de vous ces dernières années, commandant. lança Nilhus, prononçant là ses premiers mots d'une voix féline, avec le moelleux d'un chat qui ronronnait. Il ne disserta pas plus, à nouveau mu dans un silence observateur. Johanna ne sut que répondre à ces paroles, et surtout comment les prendre, optant alors pour un simple hochement de tête.
- Bien. reprit Anderson. Le vol sera pour bientôt, avant ça, j'aimerai qu'on établisse des simulations des systèmes de navigation du Normandy.
C'est déjà fait, Capitaine. Le Normandy est pleinement opérationnel. répondit Shepard, Anderson sembla quelque peu surpris, mais il se reprit immédiatement et poursuivit. Parfait. A présent je vous laisse, j'ai certaines choses à discuter avec notre invité. Si vous me cherchez, je serai dans ma salle d'accès privée. Là-dessus le Capitaine, invita Nilhus de la main à le suivre, et celui-ci non sans jeter un dernier regard intéressé à Shepard, s'exécuta. Sa démarche était celle d'un chasseur à l'affût, prêt à fondre à n'importe quel moment sur sa proie.
Pourquoi j'ai la soudaine impression qu'on ne nous a pas tout dit ? s'interrogea Joker d'une voix sombre. Nul ne répondit à sa question, mais Johanna avait le même sentiment que quelque chose ne tournait pas rond. Un Spectre ?
